Concernant la justice universelle que je tente de fonder, elle ne nécéssite pas de postuler qu'il y aie une nature humaine. En effet, une exigeance commune ne définit pas une nature, car aucune exigeance ne saurait déterminer absolument l'homme à un certain comportement ou une certaine pensée (nous avons par exemple tous l'exigeance du bonheur mais nous le cherchons par des moyens différents, et qui ne font pas forcément que nous en approcher) et que je ne vois pas ce qui pourrait définir un homme à part son système de pensée et la somme de toutes ses actions. Parcontre il est vrai que tous les hommes conduits par la seule raison n'ont qu'une seule et même idée de la justice et seront donc les garants de la même éthique (mais tout le monde n'est pas conduit par la seule raison).Définir une Justice Universelle, c'est reconnaître implicitement une Nature à l'homme (en effet, dans le cas contraire, tout est relatif).
On arrive au dilemme des athées: l'homme peut-il avoir une Nature sans que celle-ci soit voulue par un Créateur?
Erriep a écrit :
Enfin un contradicteur! Merci Erriep de me donner l'occasion d'examiner plus à fond le bien ou le mal fondé de mon idée de la justice. Je tente de répondre aux objections soulevées après un bref rappel des deux besoins à l'origine de notre exigeance de justice et des maximes qui en découlent (selon mon analyse) :Notant également que c'est au nom de cet impératif d'universabilité que l'on a pu, par exemple, condamner l'homosexualité. Mais il s'agit de critères extrèmement formels qui peuvent être manipulés sans grande difficulté : il suffit de passer du principe suivant : "aime les individus qui sont de même sexe que toi", dont on peut supposer qu'il conduirait effectivement à l'extinction de l'humanité au cas où il se verrait appliqué de façon universelle, à celui qui indiquerait : "agis suivant ce que te commandes ton coeur et ton esprit en matière d'inclination sexuelle" pour contourner l'objection (et en créer bien d'autres..).
1)Besoin de pouvoir dénoncer et/ou combattre la barbarie ; assurer la survie et la dignité de l'humanité.
Or je ne saurais empêcher les gens d'agir comme moi.
Maxime => "Ne fais pas ce qui porterait atteinte à la dignité ou à la survie de l'humanité si tout le monde agissait comme toi."
2)Besoin de pouvoir vivre en société, ce qui permet d'assurer bien-être et une vie plus longue et moins servile qu'à l'état de nature.
Or une société ne peut fonctionner que si chaque membre est prêt à l'accepter telle qu'elle est, et personne ne saurait accepter d'être traité avec moins d'importance qu'un autre.
Maxime => "Agis de telle sorte que tu considères autrui comme ton égal."
Or une des grandes leçons de la vie ne serai-ce pas celle qui consiste à découvrir que ne dépendent de nous que nos actions mais non leur résultat? En effet, le résultat de mon action dépend de l'ordre des choses qui ne dépend pas de moi. Je peux, par exemple, activer l'interrupteur de ma télévision, mais bien que je souhaite l'allumer, il se peut qu'il y ai brusquement une coupure de courant ou encore une panne du tube cathodique, une implosion ou que sais-je encore.
C'est pourquoi une morale de la raison ne saurait être une morale conséquentialiste. Le résultat de mon action ne dépendant pas de ma volonté, il serait vain de se demander si il est de mon devoir ou non d'obtenir tel ou tel résultat par mon action. C'est pourquoi les conséquences de l'action ne sauraient faire l'objet d'aucune question morale (de la même façon qu'on ne saurait devoir aimer quelqu'un), mais ce serait plutôt à propos de ce en quoi c'est moi qui agit, donc de la nature de mon action et de ce qui la fonde, que je peux soulever une question morale.
Ceci pris en considération, il apparaît évident que seule l'intention peut être coupable mais non pas les conséquences de mon action. Cela devient d'autant plus limpide si je résume en disant que la personne peut être coupable, mais que personne n'est responsable des conséquences de son action.
Donc il ne serait pas forcément coupable de ne pas respecter mes deux maximes, mais seulement d'avoir l'intention de les enfreindre. Lorsqu'un homosexuel se met en couple avec une personne de même sexe que lui, on ne pourrait le considérer comme coupable qu'à la condition qu'il ne veuille briser l'assurance de survie et de dignité de l'homme (ou de sciemment considérer autrui comme inférieur à lui). J'ose croire que les homosexuels ne sont pas, ni dans un cas, ni dans l'autre.
Erriep a écrit :
Je tente de répondre à tes deux questions qui me serviront d'illustrations, après éclaircissements sur les convictions morales à priori à intégrer.Par ailleurs, évaluer la portée morale d'une action universalisée suppose des convictions morales a priori : en quoi la disparition de la propriété serait-elle en soi une mauvaise chose ? Pourquoi le chaos serait-il considéré comme pire que n'importe quelle forme, y compris inique, d'un ordre social ? Bref, nous nous situons à un tel niveau d'abstraction et de généralité que nous pourrions spéculer une vie entière sur la meilleure façon de résoudre ces dilemnes moraux sub specie aeternitatis.
Les convictions morales à priori à admettre sont au nombre de trois et se trouvent dans mes deux maximes : égalité entre les hommes, survie et dignité de l'humanité. Ni plus ni moins sous peine de dénaturer la justice. Les termes égalité et survie sont évidents à comprendre. Il faut, car j'ai conscience que le terme soit flou que je définisse plus avant ce que j'entends par dignité.
En fait lorsque je parlais d'égalité puis de dignité je fais une tautologie. Car la dignité de l'homme n'est finalement rien d'autre que les égards que je dois à mes semblables. Or quel devoir ai-je vis à vis d'eux sinon celui de les considérer comme mes égaux? C'est en fait ce qui fonde toute morale, donc tout ensemble de règles que je peux suivre en fonction de mon idée de l'humanité : l'idée que l'autre en face de moi vaut et que ses besoins valent autant que les miens.
***En quoi la disparition de la propriété privée serait une mauvaise chose? Cela m'a semblé plus ou moins évident par la considération selon laquelle l'homme sur cette Terre n'est pas si bien pourvu qu'il ne manque de rien. Ce qui est à lui est ce que la société juge qu'il a mérité de posséder. Le voleur, lui aussi, faisant partie de la société possède initialement ce qu'il mérite. Mais lorsqu'il y a vol, l'égalité nécéssaire à la justice n'est plus respectée : l'un est privé de ce qu'il méritait et l'autre perçoit plus ce que son propre mérite ne l'y autoriserait.
***Pourquoi le chaos devrait être considéré comme pire? Par chaos j'entendais bien sûr une société sans justice. Je la juge comme pire pour deux raisons:
-Sans justice tout est permis! Il ne serait pas plus condamnable d'assassiner un nourisson que de donner la charité à un homme dans la rue. Il ne serait pas plus condamnable de violer un enfant que d'inviter son voisin à manger pour midi. Dans une telle société, du points de vue du droit, ces quatres actions seraient jugées d'égales valeurs. La notion de mérite disparaîtrait, or comment assurer l'égalité de droits sans prendre en compte le mérite de chacun?
-Par ailleurs, les hommes sont naturellement inégaux. Certains sont plus malins, d'autres courent plus vite etc.. etc.. La justice est là pour pallier à cette inégalité naturelle et donner jour à un ordre nouveau où chacun est mis à la même hauteur que son voisin. Donc une société sans justice irait à l'encontre de la dignité ou de l'égalité.