Bonjour Homere,
Je me permets d'intervenir pour apporter quelques éléments de réponse.
homere a écrit :
Philippes,
Il est question de Dieu en Rm 10, mais le Seigneur dont l'invocation du nom sauve, est clairement identifié à Jésus, c'est le CONTEXTE immédiat qui le prouve.(Vous refusez de l'acceptez)
Même si vous identifiez le "Seigneur" dont il est question au v. 12 à Jésus, une citation intègre de l'AT (avec "Jéhovah") n'empêche pas l'apôtre Paul de dérouler son raisonnement sur le nom qui sauve puisque Jésus signifie "J[éhov]ah est salut". En la circonstance, Paul s'adresse aux judéo-chrétiens. Il ne s'adresse en effet aux chrétiens d'origine gentile qu'à partir du chap. 11 (v. 13). Donc la citation de Paul résonne particulièrement aux oreilles des judéo-chrétiens pour qui la signification du nom Jésus n'a pas de secret.
Ainsi, votre interprétation n'exclut pas de facto la possibilité que Paul est ici fait mention du nom personnel de Dieu, conformément au texte source de l'AT et en référence au nom Jésus qui tire son nom de Jéhovah.
homere a écrit :
Philippes,
Si pous l'apôtre Paul, le Seigneur est Jésus au v 9 ("tu confesses que Jésus est Seigneur"), il en est de même au v 16. De la même manière Paul cite un texte de l'AT destiné originellement à Yhwh et l'applique à Jésus (ce n'est pas systématique), mais vous REFUSEZ de le voir :
C'est là où il faut être cohérent.
Si vous estimez que le Père est appelé Seigneur tout au long de la lettre de Paul, du moins dans ses citations de l'AT, vous ne pouvez pas exclure que Paul fasse peut-être référence à Dieu en Rm 10:12 plutôt qu'à Jésus quand il emploie le mot Seigneur. De plus, Paul fait des citations formelles : "Car l’Écriture dit..." au v.11 puis au v. 13, il introduit une nouvelle citation "Car...", ce qui penche plutôt pour une citation intègre du texte source de l'AT, plutôt que pour une actualisation ou une adaptation du texte biblique. D'autant que je le rappelle, il s'adresse dans le contexte à des Juifs.
homere a écrit :"Mais tous n’ont pas obéi à l’Evangile. Esaïe dit en effet : Seigneur, qui a cru à notre prédication ? Ainsi la foi vient de la prédication et la prédication, c’est l’annonce de la parole du Christ."
"Paul" identifie presque toujours kurios au Fils, même dans les citations où ce mot remplace Yhwh.
Paul a sans doute mentionné le tétragramme au chapitre 10 de la lettre aux Romains. Par exemple Rm 10:16-17 se lit ainsi :
Mais tous n'ont pas accepté la Bonne Nouvelle. Ésaïe dit en effet: « Seigneur, qui a cru la nouvelle que nous proclamons? » Ainsi, la foi vient de ce qu'on écoute la nouvelle proclamée et cette nouvelle est l'annonce de la parole du Christ. -
BFC
L'universitaire G. Howard a examiné les variantes qui existaient dans les divers manuscrits de la lettre aux Romains. Curieusement, il y a principalement trois leçons pour la fin du verset 17 : 1. La parole
du Christ, celle principalement retenue ; 2. La parole
de Dieu ; et 3. La parole avec omission de la personne concernée. Comment expliquer ces variantes ? Les copistes ont-ils pu confondre aussi maladroitement
khristos et
theos ? Où s'agit-il d'une correction ? Et pourquoi d'autres ont fait le choix de mettre ni l'un, ni l'autre ?
La meilleure explication, comme le démontre Howard, c'est de postuler la présence originelle du nom divin dans la lettre aux Romain. Ce qui aurait donné :
Mais tous n'ont pas accepté la Bonne Nouvelle. Ésaïe dit en effet: « YHWH, qui a cru la nouvelle que nous proclamons? » Ainsi, la foi vient de ce qu'on écoute la nouvelle proclamée et cette nouvelle est l'annonce de la parole du Christ.
La présence du tétragramme au v. 16 dans cette citation d'Isaïe, attribué clairement ici à Jéhovah, expliquerait pourquoi certains copistes ont attribué à tort la "parole" à Dieu, plutôt qu'à Christ. Il y avait en effet à leur yeux tout lieu de penser que la parole dont il est question au v. 17 n'était pas celle de Jésus mais plutôt celle de Jéhovah puisqu'il était clairement identifié en début de verset. A l'inverse la mention Seigneur n'aurait pas fait difficulté aux copistes puisque Jésus est considéré comme le Seigneur. Enfin, le fait qu'un autre source manuscrite ne mette ni Christ, ni Dieu au v. 17 est sans doute la solution que les copistes ont trouvée pour ne pas avoir à trancher devant l'ambiguité du texte qui parle à la fois de YHWH et du Christ.
Ces variantes se perçoivent en comparant les traductions bibliques entre elles pour cet verset
- Voir ici. Il existe un autre exemple de ce type en Rm 14:10-11. Ainsi dans l'original de la lettre aux Romains, le tétragramme apparaissait vraisemblablement dans le texte. - Voir l'article
The Tetragram and the New Testament de G. Howard.
J'ajoute que les références au nom personnel de Dieu se retrouve dans d'autres passage de cette lettre aux Romains : "
Car "le nom de Dieu est blasphémé à cause de vous parmi les nations" ; comme c’est écrit." - Rm 2:24. "
Car l’Écriture dit à Pharaon : "C’est pour cela même que je t’ai laissé subsister, pour montrer à ton sujet ma puissance, et pour que mon nom soit proclamé dans toute la terre."" - Rm 9:17. "
Comme c’est écrit : "C’est pourquoi je veux te reconnaître ouvertement parmi les nations, et pour ton nom je veux exécuter des mélodies."" - Rm 15:9.
Vous noterez que Paul cite les Ecritures ici, comme il le fait en Rm 10:13, et toutes ces références aux noms renvoient les chrétiens, à tout les moins les judéo-chrétiens, au nom personnel de Dieu qu'ils révéraient comme tous les juifs de leur époque.
homere a écrit :Philippes,
Paul (sauf oubli de ma part) ne désigne JAMAIS Dieu par le titre "Seigneur", il réserve ce titre à Jésus :
« Il n’y a pour nous qu’un seul Dieu, le Père, de qui tout vient et vers qui nous allons, et un seul Seigneur, Jésus Christ, par qui tout existe et par qui nous sommes » (1 Co 8,6).
Dans les 2 cas que vous proposez, Paul cite des textes de l'AT, qui contenaient initialement Yhwh (d'ailleurs la TMN met l'occurrence "Jéhovah") mais il ne nomme pas précisément Dieu par le titre "Seigneur". s'il y a "un seul Dieu" qui est le Père (et pas le Fils), il y a aussi "un seul Seigneur" (kurios) qui est Jésus-Christ et pas le Père. Sauf accident (du genre citation comportant par hasard un kurios non exploité par le contexte), les (premières) épîtres pauliniennes se tiennent assez strictement à cette règle.
Tout cela nous éloigne du CONTEXTE immédiat de Rm 10, qui désigne clairement Jésus comme le Seigneur qui sauve
"
Il n’y a pas en effet de distinction entre Juif et Grec, car il y a le même Seigneur au-dessus de tous, qui est riche pour tous ceux qui l’invoquent." - Rm 10:12. Se pourrait-il que le Seigneur dont il est question dans ce verset soit Dieu ? Tout dépend ou vous fixez les bornes du contexte. Plus vous les resserrez et plus l'on est enclin à identifier ce Seigneur à Jésus, plus vous les élargissez et plus je suis d'avis qu'il s'agit de Dieu.
Je vois pour ma part plus large. On peut d'ailleurs déborder le chapitre 10 et je rappelle à ce propos que la division en chapitre et en verset n'existait pas à l'origine. S'agissant du contexte immédiat, notez qu'il est question d'un Seigneur "au-dessus de tous" sans distinction de race "entre Juifs et Grec" selon Rm 10:12. Ce qui n'est pas sans nous rappeler l'idée que Paul développe au chap. 3 pour montrer que Dieu n'est pas partial :
29 Ou bien est-il seulement le Dieu des Juifs ? Ne l’est-il pas aussi des gens des nations ? Oui, des gens des nations aussi, 30 si vraiment Dieu est un seul, qui déclarera justes les circoncis par suite de la foi et justes les incirconcis par le moyen de leur foi. 31 Abolissons-nous donc [la] loi par le moyen de notre foi ? Que cela n’arrive jamais ! Au contraire, nous établissons [la] loi. - Rm 3:29-31
Ensuite il est question du seigneur qui est "riche" (gr.
plouteō) et cette notion de richesse est présente dans d'autres passages de la lettre aux Romains quand il s'agit de de Dieu lui-même : "
Ou bien méprises-tu la richesse (gr. ploutos) de sa bonté, de sa patience et de sa longanimité, parce que tu ne sais pas que la bonté de Dieu veut te conduire à la repentance ?" - Rm 2:4. Voir aussi Rm 9:23 et 11:33. L'idée que Dieu est plein de bonté se retrouve au chap. 11 quand Paul en termine avec les judéo-chrétiens pour s'adresser aux chrétiens d'origine gentile. - Rm 11:22. Je ne trouve pas dans la lettre aux Romains mention de richesse pour la personne de Jésus.
Enfin, je l'ai déjà dit, a minima on trouve des échos au nom divin dans cette lettre aux Romains, et quand on examine les arguments de G. Howard, on est fondé à croire que Paul a mentionné plusieurs fois le tétrgramme, notamment au chap. 10. Il s'ensuit alors que le Seigneur dont il est question au v.12 est Dieu, et que la citation de Joël fait bien mention du nom divin et non pas de son substitut Seigneur : "
tout homme qui invoquera le nom de Jéhovah sera sauvé". - Rm 10:13
C'est un premier jet. Il y a encore beaucoup à dire sur ce passage de la lettre aux Romains où, comme dit Pierre à propos des lettres de Paul, "
il s'y trouve (...) certaines choses difficiles à comprendre" - 2 P 3:16. Je vais donc prendre le temps de l'examiner plus en détail pour y apporter de nouveaux éclairages le cas échéant.
Le dieu de ce système de choses a aveuglé l’intelligence des incrédules - 2 Co 4:4