Savoir de quoi on parle : Bouddhisme et souffrance.
Posté : 21 sept.20, 19:47
Le Bouddhisme apparaît souvent au public peu ou pas informé comme une philosophie ou religion pessimiste. Pourquoi ? Car le Bouddha aurait affirmé que tout est souffrance.
C'est inexacte, réducteur et trompeur.
Pourquoi ?
Car l'on a traduit le mot "dukkha" (un terme pali, la langue originale des plus vieux enseignements du Bouddha dont nous disposions) uniquement par le mot "souffrance". Ce qui n'est pas correct.
La base de la base de tout l'enseignement du Bouddha est dans le tout premier sermon ou enseignement qu'il prononça à 5 anciens compagnons d'ascèse qu'il avait fréquenté.
Ce tout premier sermon, le Dhammacakkappavattana Sutta ou "Enseignement sur la mise en mouvement de la Roue de la Loi" contient les 4 Nobles Vérités.
- Dukkha existe.
- Comment "dukkha" apparaît. Quelles sont ses causes, les causes de son apparition.
- On peut mettre fin aux causes de dukkha.
- Le chemin qui mène à la cessation de dukkha.
Tout tourne autour de ce mot : dukkha. Et pour bien comprendre le Bouddha et le bouddhisme il est impératif de bien comprendre cette notion. Et, bien évidemment, le Bouddha s'est empressé de la décrire.
Avant de le citer Lui, un peu d'étymologie :
Extrait de l'article wikipédia :
Le terme sanskrit « duḥkha » vient probablement des éléments suivants : « su » et « duḥ » sont des préfixes qui indiquent que quelque chose est « bon » ou « mauvais », « correct » ou « incorrect » ; le mot « kha » signifiait « trou » et représentait plus particulièrement le « moyeu d'une roue » ou l’emplacement où prenait place l’axe d’une roue. Le mot sanskrit original « sukha » signifie donc « qui tourne parfaitement », et donc « duḥkha » est souvent comparé à une roue qui ne tourne pas correctement. On pourrait donc le traduire par « qui ne tourne pas rond », « désagréable » ou « insatisfaisant » mais ce mot est généralement traduit par « souffrance ». Si une souffrance est effectivement due à quelque chose qui ne « tourne pas rond », résumer « dukkha » au mot souffrance est réducteur.
Énoncer la première vérité en disant « Toute vie est souffrance » est donc simpliste. Une traduction plus correcte serait « Toute vie est insatisfaisante » ou, encore mieux, « ne tourne pas rond ». Mais là encore impossible de traduire parfaitement l’enseignement original. La compréhension exacte de « dukkha » ne peut se faire que par la lecture des textes et des multiples exemples de « dukkha ».
Sans possibilité de traduire correctement « dukkha », il est d'usage de garder le mot original. La première vérité sera donc : « Toute vie implique dukkha ».
Selon Cécile Becker : « Si l'étymologie de ce mot est importante, c'est que, sa richesse appelle des significations nuancées en fonction des sources mais aussi des auditoires auxquels elles sont destinées. Les références aux quatre nobles vérités sont abondantes. La façon dont elles sont évoquées oriente l'attention de l'auditoire vers des réflexions aux nuances distinctes. L'exposé peut ainsi se colorer d'une intention plus moralisante ou plus conceptuelle. »
Autre extrait :
Le mot « dukkha » (duḥkha en sanskrit) est souvent traduit par « souffrance » ou « douleur », ce qui est réducteur. Il revêt bien des significations dans l'enseignement du Bouddha : celles d'insatisfaction, d'imperfection, d'impermanence, de conflit, et de non substantialité. Chaque maître en expose un aspect : ainsi, Ajahn Chah la caractérisait par l'incertitude, tandis que pour Ajahn Brahm c'est "demander à la vie ce qu'elle ne peut nous donner". Le terme pali dukkha est donc couramment employé, faute de traduction adéquate.
Cette traduction « souffrance » vaut au bouddhisme la réputation d’être pessimiste, alors que le message du Bouddha est fondamentalement optimiste puisqu’il dit que l’on peut se libérer de cette insatisfaction ou souffrance.
Le Bouddha décrit donc dukkha dans la première Noble Vérité ainsi :
« Voici, ô moines, la noble vérité de dukkha : la naissance est dukkha, vieillir est dukkha, la maladie est dukkha, la mort est dukkha, le chagrin et les lamentations, la douleur, l'affliction et le désespoir sont dukkha, être uni avec ce que l'on n'aime pas est dukkha, être séparé de ce que l'on aime ou de ce qui plaît est dukkha, ne pas obtenir ce que l'on désire est dukkha. En bref, les cinq agrégats de l'attachement sont dukkha. »
Enfin, le tout premier travail que doit effectuer un pratiquant du bouddhisme c'est de déjà vérifier la première affirmation : par la réflexion intellectuelle, par l'observation attentive des phénomènes en soi et autour de soi, par la méditation.
Si l'on ne fait pas déjà cela, on ne peut pas savoir si le Bouddha dit vrai ou pas, et il sera inutile et vain d'essayer d'en convaincre qui que ce soit qui ne pratique pas déjà.
Les 4 Nobles Vérités ne peuvent pas se transmettre comme un savoir verbalement, une connaissance, comme la géographie ou l'histoire. On doit soi même méditer dessus, les vérifier, expérimenter.
Ce sont des perceptions difficiles a admettre spontanément, le Bouddha en était conscient. Il était conscient que ses découvertes étaient tellement contre-intuitives, tellement contraires à ce que les hommes croient ou veulent croire, qu'il hésita longuement, dit-on, avant de parler. Plusieurs jours a plusieurs semaines. Il doutait d'être cru. Et était conscient qu'il ne pouvait pas transmettre ce qu'il avait appris comme le ferait un professeur d'université ou un professeur d'école avec une langue ou des mathématiques. Les gens devaient l'éprouver par eux mêmes pour s'en convaincre.
Il essaya malgré tout. Et en son temps, certain furent convaincus, d'autres non. Certains le trouvèrent assez persuasif pour essayer et vérifier d'autre non. Son propre charisme, sa propre sérénité, et le fait qu'il mettait en accord ses paroles et ses actes, étaient déjà des atouts.
J'espère que cela dissipe au moins quelques malentendus de base qui ont la vie dure, hélas. Comme je le dis parfois un peut par provocation, croire que le bouddhisme est pessimiste et nihiliste est a peut prêt aussi vrai que de croire que les premiers chrétiens pratiquaient le sacrifice rituel d'enfants et le cannibalisme des dits enfants sacrifiés (l'eucharistie, l'enfant Jésus...) ou qu'ils pratiquaient l'inceste de groupe (ils s'appelaient frères et sœurs...).
Voila
Merci pour ceux qui ont pris le temps de lire pour s'informer.
C'est inexacte, réducteur et trompeur.
Pourquoi ?
Car l'on a traduit le mot "dukkha" (un terme pali, la langue originale des plus vieux enseignements du Bouddha dont nous disposions) uniquement par le mot "souffrance". Ce qui n'est pas correct.
La base de la base de tout l'enseignement du Bouddha est dans le tout premier sermon ou enseignement qu'il prononça à 5 anciens compagnons d'ascèse qu'il avait fréquenté.
Ce tout premier sermon, le Dhammacakkappavattana Sutta ou "Enseignement sur la mise en mouvement de la Roue de la Loi" contient les 4 Nobles Vérités.
- Dukkha existe.
- Comment "dukkha" apparaît. Quelles sont ses causes, les causes de son apparition.
- On peut mettre fin aux causes de dukkha.
- Le chemin qui mène à la cessation de dukkha.
Tout tourne autour de ce mot : dukkha. Et pour bien comprendre le Bouddha et le bouddhisme il est impératif de bien comprendre cette notion. Et, bien évidemment, le Bouddha s'est empressé de la décrire.
Avant de le citer Lui, un peu d'étymologie :
Extrait de l'article wikipédia :
Le terme sanskrit « duḥkha » vient probablement des éléments suivants : « su » et « duḥ » sont des préfixes qui indiquent que quelque chose est « bon » ou « mauvais », « correct » ou « incorrect » ; le mot « kha » signifiait « trou » et représentait plus particulièrement le « moyeu d'une roue » ou l’emplacement où prenait place l’axe d’une roue. Le mot sanskrit original « sukha » signifie donc « qui tourne parfaitement », et donc « duḥkha » est souvent comparé à une roue qui ne tourne pas correctement. On pourrait donc le traduire par « qui ne tourne pas rond », « désagréable » ou « insatisfaisant » mais ce mot est généralement traduit par « souffrance ». Si une souffrance est effectivement due à quelque chose qui ne « tourne pas rond », résumer « dukkha » au mot souffrance est réducteur.
Énoncer la première vérité en disant « Toute vie est souffrance » est donc simpliste. Une traduction plus correcte serait « Toute vie est insatisfaisante » ou, encore mieux, « ne tourne pas rond ». Mais là encore impossible de traduire parfaitement l’enseignement original. La compréhension exacte de « dukkha » ne peut se faire que par la lecture des textes et des multiples exemples de « dukkha ».
Sans possibilité de traduire correctement « dukkha », il est d'usage de garder le mot original. La première vérité sera donc : « Toute vie implique dukkha ».
Selon Cécile Becker : « Si l'étymologie de ce mot est importante, c'est que, sa richesse appelle des significations nuancées en fonction des sources mais aussi des auditoires auxquels elles sont destinées. Les références aux quatre nobles vérités sont abondantes. La façon dont elles sont évoquées oriente l'attention de l'auditoire vers des réflexions aux nuances distinctes. L'exposé peut ainsi se colorer d'une intention plus moralisante ou plus conceptuelle. »
Autre extrait :
Le mot « dukkha » (duḥkha en sanskrit) est souvent traduit par « souffrance » ou « douleur », ce qui est réducteur. Il revêt bien des significations dans l'enseignement du Bouddha : celles d'insatisfaction, d'imperfection, d'impermanence, de conflit, et de non substantialité. Chaque maître en expose un aspect : ainsi, Ajahn Chah la caractérisait par l'incertitude, tandis que pour Ajahn Brahm c'est "demander à la vie ce qu'elle ne peut nous donner". Le terme pali dukkha est donc couramment employé, faute de traduction adéquate.
Cette traduction « souffrance » vaut au bouddhisme la réputation d’être pessimiste, alors que le message du Bouddha est fondamentalement optimiste puisqu’il dit que l’on peut se libérer de cette insatisfaction ou souffrance.
Le Bouddha décrit donc dukkha dans la première Noble Vérité ainsi :
« Voici, ô moines, la noble vérité de dukkha : la naissance est dukkha, vieillir est dukkha, la maladie est dukkha, la mort est dukkha, le chagrin et les lamentations, la douleur, l'affliction et le désespoir sont dukkha, être uni avec ce que l'on n'aime pas est dukkha, être séparé de ce que l'on aime ou de ce qui plaît est dukkha, ne pas obtenir ce que l'on désire est dukkha. En bref, les cinq agrégats de l'attachement sont dukkha. »
Enfin, le tout premier travail que doit effectuer un pratiquant du bouddhisme c'est de déjà vérifier la première affirmation : par la réflexion intellectuelle, par l'observation attentive des phénomènes en soi et autour de soi, par la méditation.
Si l'on ne fait pas déjà cela, on ne peut pas savoir si le Bouddha dit vrai ou pas, et il sera inutile et vain d'essayer d'en convaincre qui que ce soit qui ne pratique pas déjà.
Les 4 Nobles Vérités ne peuvent pas se transmettre comme un savoir verbalement, une connaissance, comme la géographie ou l'histoire. On doit soi même méditer dessus, les vérifier, expérimenter.
Ce sont des perceptions difficiles a admettre spontanément, le Bouddha en était conscient. Il était conscient que ses découvertes étaient tellement contre-intuitives, tellement contraires à ce que les hommes croient ou veulent croire, qu'il hésita longuement, dit-on, avant de parler. Plusieurs jours a plusieurs semaines. Il doutait d'être cru. Et était conscient qu'il ne pouvait pas transmettre ce qu'il avait appris comme le ferait un professeur d'université ou un professeur d'école avec une langue ou des mathématiques. Les gens devaient l'éprouver par eux mêmes pour s'en convaincre.
Il essaya malgré tout. Et en son temps, certain furent convaincus, d'autres non. Certains le trouvèrent assez persuasif pour essayer et vérifier d'autre non. Son propre charisme, sa propre sérénité, et le fait qu'il mettait en accord ses paroles et ses actes, étaient déjà des atouts.
J'espère que cela dissipe au moins quelques malentendus de base qui ont la vie dure, hélas. Comme je le dis parfois un peut par provocation, croire que le bouddhisme est pessimiste et nihiliste est a peut prêt aussi vrai que de croire que les premiers chrétiens pratiquaient le sacrifice rituel d'enfants et le cannibalisme des dits enfants sacrifiés (l'eucharistie, l'enfant Jésus...) ou qu'ils pratiquaient l'inceste de groupe (ils s'appelaient frères et sœurs...).
Voila
Merci pour ceux qui ont pris le temps de lire pour s'informer.