Re: origine de l'immortalité de l'ame
Posté : 28 oct.12, 05:13
L'influence des idées hellénistiques sur la foi des premiers chrétiens, surtout sur celle du plus instruit d'entre eux, l'apôtre Paul, constitue un problème aussi ardu qu'intéressant, que nous allons examiner (1).
Essayons de mesurer d'abord l'action de la Philosophie grecque.
Au milieu du 1er siècle, comme des fleuves qui viendraient se perdre dans le même estuaire en quête de la mer, ses différents systèmes étaient en train de se fondre, malgré la diversité de leurs Principes, dans une commune recherche du bonheur. Le Stoïcisme enseignait que la paix se trouve dans le détachement des biens terrestres et l'attente de la vie éternelle. Ce point de vue a inspiré à Sénèque de hautes pensées sur la dignité et l'unité humaines. « L'homme, disait-il, est une chose sacrée pour l'homme » (épître 19). « Nous reconnaissons le monde entier pour notre patrie », écrivait-il encore dans son traité de la Tranquillité de l'Âme (eh. 3). Il a plaidé la cause de l'esclave, flétri les horribles brutalités du cirque (7e lettre à Lucilius), prêché et pratiqué un certain ascétisme. Cette prédication de dignité et de détachement devait être reprise un peu plus tard par Epictète, dont la philosophie Peut se résumer dans la devise fameuse : « Supporte et abstiens-toi ». Au sage stoïcien correspondait le sage épicurien, vertueux par intérêt plus que par principe, qui s'interdisait tout plaisir traînant à, sa suite une peine plus grande que lui, et qui cherchait le bonheur dans le renoncement à la vie sociale.
De son côté, le platonisme, pour lequel le moyen de salut consistait à se détacher de la prison qui s'appelle le corps (2), allait aussi dans le même sens. D'autre part, le néo-platonisme qui commençait à poindre, bien que son principe de la transcendance des Idées fût incompatible avec le panthéisme matérialiste des Stoïciens ou l'atomisme d'Épicure, se rapprochait d'eux par la tendance moralisante, sensible surtout chez Plutarque (fin du 1er siècle). Une aspiration assez semblable, le désir d'une vie sanctifiée, qui cherchait à se satisfaire par l'ascétisme, la théologie et la magie, tel était encore le trait distinctif du mouvement néo-pythagoricien, provenant des groupes orphiques d'Égypte (IIIe siècle avant J.-C.) et représenté par Apollonius de Tyane (en Cappadoce), prêtre réformateur et noble moraliste religieux, qui prêchait la fraternité humaine et fut après sa mort, l'objet d'un culte (1er siècle). Signalons enfin l'activité convergente des philosophes cyniques, désireux de soustraire les hommes à la tyrannie des besoins inutiles.
Tous ces courants de pensée circulaient à travers les foules. Celui du stoïcisme, il est vrai, était assez réservé. « La doctrine stoïcienne de l'insensibilité du sage, qui le rend plus grand que Jupiter, l'isolait sur la cime glacée de son orgueil » (3). D'ailleurs, « rien n'était plus loin de la pensée de Sénèque que de créer une sorte d'église large et populaire » (4). En réalité, le stoïcisme a été la religion d'une élite, et il est allé en s'affaiblissant. Son chef-d'oeuvre, au IIe siècle, les Pensées de Marc-Aurèle, a été « comme une exquise fleur d'automne, à la tête penchée, aux teintes pâles, à la grâce fragile, que porta, dans un élan suprême de vitalité, mais avec une sève déjà presque tarie, la sagesse païenne » (5).
Il n'en était Pas de même de l'école épicurienne, qu'on devrait plutôt appeler une communauté, car son maître, en entretenant une vaste correspondance avec ses disciples, les avait rapprochés. Elle était assez florissante, et elle devait le rester encore puisque, cent ans plus tard, Marc-Aurèle lui accorda son appui. Le groupe le plus remuant fut celui des Cyniques, devenus rapidement populaires. Tout en riant de leurs allures, on les écoutait, et leurs maximes se gravaient aisément dans les esprits. Il en circula même des recueils progressivement accrus. Devant ce succès, les autres écoles adoptèrent les mêmes méthodes. Ainsi fut créée la diatribe (6), « variété simplifiée du dialogue, où le philosophe doit exprimer lui-même les objections qu'il a lues en quelque sorte sur les visages de ses auditeurs » (Wendland). Ces missionnaires itinérants attaquaient les vices et insistaient sur une juste appréciation des biens d'ici-bas. Ils s'efforçaient aussi d'améliorer la religion nationale, en présentant une notion spiritualisée de la divinité et en plaçant la pureté du coeur au-dessus des cérémonies.
http://www.regard.eu.org/Livres.6/Histo ... .1/06.html
Essayons de mesurer d'abord l'action de la Philosophie grecque.
Au milieu du 1er siècle, comme des fleuves qui viendraient se perdre dans le même estuaire en quête de la mer, ses différents systèmes étaient en train de se fondre, malgré la diversité de leurs Principes, dans une commune recherche du bonheur. Le Stoïcisme enseignait que la paix se trouve dans le détachement des biens terrestres et l'attente de la vie éternelle. Ce point de vue a inspiré à Sénèque de hautes pensées sur la dignité et l'unité humaines. « L'homme, disait-il, est une chose sacrée pour l'homme » (épître 19). « Nous reconnaissons le monde entier pour notre patrie », écrivait-il encore dans son traité de la Tranquillité de l'Âme (eh. 3). Il a plaidé la cause de l'esclave, flétri les horribles brutalités du cirque (7e lettre à Lucilius), prêché et pratiqué un certain ascétisme. Cette prédication de dignité et de détachement devait être reprise un peu plus tard par Epictète, dont la philosophie Peut se résumer dans la devise fameuse : « Supporte et abstiens-toi ». Au sage stoïcien correspondait le sage épicurien, vertueux par intérêt plus que par principe, qui s'interdisait tout plaisir traînant à, sa suite une peine plus grande que lui, et qui cherchait le bonheur dans le renoncement à la vie sociale.
De son côté, le platonisme, pour lequel le moyen de salut consistait à se détacher de la prison qui s'appelle le corps (2), allait aussi dans le même sens. D'autre part, le néo-platonisme qui commençait à poindre, bien que son principe de la transcendance des Idées fût incompatible avec le panthéisme matérialiste des Stoïciens ou l'atomisme d'Épicure, se rapprochait d'eux par la tendance moralisante, sensible surtout chez Plutarque (fin du 1er siècle). Une aspiration assez semblable, le désir d'une vie sanctifiée, qui cherchait à se satisfaire par l'ascétisme, la théologie et la magie, tel était encore le trait distinctif du mouvement néo-pythagoricien, provenant des groupes orphiques d'Égypte (IIIe siècle avant J.-C.) et représenté par Apollonius de Tyane (en Cappadoce), prêtre réformateur et noble moraliste religieux, qui prêchait la fraternité humaine et fut après sa mort, l'objet d'un culte (1er siècle). Signalons enfin l'activité convergente des philosophes cyniques, désireux de soustraire les hommes à la tyrannie des besoins inutiles.
Tous ces courants de pensée circulaient à travers les foules. Celui du stoïcisme, il est vrai, était assez réservé. « La doctrine stoïcienne de l'insensibilité du sage, qui le rend plus grand que Jupiter, l'isolait sur la cime glacée de son orgueil » (3). D'ailleurs, « rien n'était plus loin de la pensée de Sénèque que de créer une sorte d'église large et populaire » (4). En réalité, le stoïcisme a été la religion d'une élite, et il est allé en s'affaiblissant. Son chef-d'oeuvre, au IIe siècle, les Pensées de Marc-Aurèle, a été « comme une exquise fleur d'automne, à la tête penchée, aux teintes pâles, à la grâce fragile, que porta, dans un élan suprême de vitalité, mais avec une sève déjà presque tarie, la sagesse païenne » (5).
Il n'en était Pas de même de l'école épicurienne, qu'on devrait plutôt appeler une communauté, car son maître, en entretenant une vaste correspondance avec ses disciples, les avait rapprochés. Elle était assez florissante, et elle devait le rester encore puisque, cent ans plus tard, Marc-Aurèle lui accorda son appui. Le groupe le plus remuant fut celui des Cyniques, devenus rapidement populaires. Tout en riant de leurs allures, on les écoutait, et leurs maximes se gravaient aisément dans les esprits. Il en circula même des recueils progressivement accrus. Devant ce succès, les autres écoles adoptèrent les mêmes méthodes. Ainsi fut créée la diatribe (6), « variété simplifiée du dialogue, où le philosophe doit exprimer lui-même les objections qu'il a lues en quelque sorte sur les visages de ses auditeurs » (Wendland). Ces missionnaires itinérants attaquaient les vices et insistaient sur une juste appréciation des biens d'ici-bas. Ils s'efforçaient aussi d'améliorer la religion nationale, en présentant une notion spiritualisée de la divinité et en plaçant la pureté du coeur au-dessus des cérémonies.
http://www.regard.eu.org/Livres.6/Histo ... .1/06.html