Pollux a écrit : ↑01 sept.24, 06:33
Athanase d'Alexandrie ?
Peut être. Qui d'entre les évêques avaient la langue bien pendue ?
Si on demande à google on obtient cette réponse :
De l’Espagne, l’évêque le plus illustre par son éloquence, Osius3, y prit séance avec les autres évêques de la même contrée. L’évêque de la ville-reine, c’est-à-dire de Rome, ne s’y rendit pas à cause de sa vieillesse, mais il y envoya deux prêtres pour tenir sa place, et donner leur assentiment à ce qui serait fait4.
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Allez je mets tout le texte comme ça on a un peu de lecture.
ANNEE 325
— Convocation du premier concile œcuménique à Nicée en Bithynie.
— Membres du concile ; leurs divers caractères.
— Allocution de saint Eustathe d’Antioche à l’empereur.
— Discours de Constantin.
— Les présidents du concile.
— Discussion touchant les erreurs d’Arius.
— Projet de symbole présenté par Osius.
— Contre-projet d’Eusèbe de Nicomédie.
— Il est rejeté.
— Projet intermédiaire d’Eusèbe de Cæsarée.
— La doctrine en est approuvée, mais le projet d’Osius est cependant adopté.
— Symbole de Nicée.
— Son caractère.
— Arius et scs principaux partisans exilés.
— Ariens hypocrites qui ne signent le symbole que par crainte.
— Question de la Pâque.
— La discussion sur cette question disciplinaire n’a pas le même caractère que celle sur la question de foi.
— Décret sur la Pâque ; il est universellement adopté.
— Question du schisme de Meletios.
— Le schisme est condamné.
— Lettre du concile à l’Eglise d’Alexandrie.
— Lettres de Constantin sur les décisions du concile.
— La loi du célibat proposée et rejetée sur les observations de l’évêque Paphinitius.
— Les vingt canons du concile.
— Les grandes Eglises ; origine des patriarchats.
— Conclusion du concile.
— Grande fête offerte aux évêques par l’empereur.
— Son discours d’adieu. Retour des évêques dans leurs Eglises respectives.
Constantin était fort affligé des discussions ariennes qui ne troublaient plus seulement l’Egypte, mais l’empire romain tout entier. Ces discussions s’étaient compli-
quées du schisme de Meletios et de la question paschale. Les Syriens, les Ciliciens et les Mésopotamiens célébraient cette fête le même jour que les Juifs et soutenaient leur usage avec opiniâtreté1. Les lettres que Constantin avait adressées pour apaiser les discussions ariennes n’ayant pas produit l’effet qu’il en attendait, il se décida à convoquer2 un concile général. Il adressa dans ce but des lettres très-respectueuses à tous les évêques pour les engager à se rendre le plus vite possible à Nicée en Bithynie. Il avait choisi cette ville, parce que sa situation, au centre de l’empire, rendait plus facile la réunion des évêques des diverses provinces. Il fournit en outre aux évêques et aux ecclésiastiques qui les accompagnèrent les moyens de transport appartenant à l’Etat. L’ordre impérial3 ayant été porté dans toutes les
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1 Euseb., Hist. Constant., lib. III, c. c. 4, S, 6 ; s. Athan., De Synod., § 5 ; Epist. ad Afros, § 2.
2 Les pièces officielles que nous citerons ne laissent aucun doute sur la convocation du concile par Constantin. Les historiens sont unanimes sur ce point. Eusèbe dit positivement que Constantin convoqua le concile : σύνοδον οίκυ- μενικήν » συνεκρότει… » Hist. Const., lib. III, c. 6. Les autres anciens historiens l’affirment également. Théodoret dit :εες την Νικαεων « συνήγειρε » σύνοδον.
Socrate : σύνοοον οικουμενικήν « συνεκρότει, » τους πανταχοθεν επισκόπους διά γραμμάτων εις Νίκαιαν της Βιθυνίας άπανθήσαι παρακαλών.
Sozomène : « συνεκάλεσε » σύνοδον εις Νίκαιαν της Βιθυνίας, καί πανταχή τοίς προεστώσι των Εκκλησιών εγραιρεν, εις ρητήν ημέραν παρέίναι.
Gélase de Cyzique lui-même s’exprime ainsi ; lib. I, Proæm. : οΰ χαριν και την πολυάνθρωπον έχείνην επί την των Νικαεων πολιν ό πιστότατος βασιλεύς Κωνσταντίνος συνήγαγε σύνοδον
Κωνσταντίνου, τοϋ καί τήν σύνοδον των έπισκο’πων εν τη Νικαεων
συναιθροισθήναι προςτάξαντος πόλει·.
Dans les actes officiels què nous citerons, on verra que le concile lui-même reconnut qu’il avait été convoqué par Constantin. Gélase n’a pas pour nous une grande importance à cause des erreurs nombreuses et incontestables qu’il a commises. Mais, comme certaine école théologique, dans l’Eglise romaine, lui accorde quelque autorité, nous citerons son témoignage, lorsqu’il sera conforme à ceux des anciens historiens. Nous devons dire que, si des théologiens romains accordent trop d’autorité à Gélase de Cyzique sur plusieurs points, d’autres, dans la même Eglise, l’ont trop rabaissé. (Voy. le Dictionnaire historique du jésuite Feller.) La vérité, ici comme en mille autres circonstances, est au milieu des exagérations en sens contraire.
Des témoignages que nous venons de citer, il résulte que c’est l’empereur Constantin qui a convoqué le concile de Nicée. Ce fait n’étonnera pas ceux qui connaissent l’histoire et la constitution primitive de l’Eglise ; mais il ne cadre pas avec la théorie papale qui veut que tout concile, pour être légitime, soit convoqué par l’évêque de Rome.
3 Eusèbe se sert du mot παράγγελμα, qui signifie proprement un ordre, une ordonnance.
provinces, les évêques, fort joyeux, s’empressèrent de se rendre à la ville indiquée. L’espérance du bien qui pourrait résulter pour l’Eglise de leur réunion, le désir de rétablir la paix, le bonheur de voir un empereur si miraculeusement appelé à la religion, tels étaient les motifs qui les guidaient tous. La réunion de tant d’hommes qui ne se connaissaient, pas, qui étaient étrangers les uns aux autres, eut des résultats excellents ; ils formèrent, dit Eusèbe, une couronne sacerdotale composée des plus belles fleurs.
De toutes les Eglises qui remplissaient l’Europe, l’Afrique et l’Asie1, ceux qui tenaient le premier rang parmi les ministres de Dieu se réunirent dans une seule Eglise qui parut se dilater pour la circonstance. Les Syriens et les Ciliciens, les Phéniciens, les Arabes et les Palestiniens, les Egyptiens, les Thébains, les Mésopotamiens s’y trouvèrent réunis. Un évêque de Perse assista au concile, et on y remarqua un évêque scythe2. Le Pont, la Galatie, la Pamphylie et la Cappadoce, l’Asie et la Phrygie fournirent leurs évêques les plus distingués. Les Thraces, les Macédoniens, les Grecs, les Epirotes, malgré leur éloignement de Nicée, s’y rendirent pour le concile. De l’Espagne, l’évêque le plus illustre par son éloquence, Osius3, y prit séance avec les autres évêques de la même contrée. L’évêque de la ville-reine, c’est-à-dire de Rome, ne s’y rendit pas à cause de sa vieillesse, mais il y envoya deux prêtres pour tenir sa place, et donner leur assentiment à ce qui serait fait4.
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1 Euseb., De Vit. Constant., lib. III, c. c. 7, 8.
2 Saint Athanase affirme que le concile représenta l’univers ; mais son expression notre univers peut ne signifier que l’empire romain. On peut croire que les lettres de Constantin furent communiquées aux évêques en dehors de l’empire, ce qui explique la présence d’un évêque persan et d’un évêque scythe. (Voy. S. Athan., Epist. ad Afros, § 1.)
3 Eusèbe ne le nomme pas, mais il ne peut y avoir de doute à ce sujet.
4 Euseb., De Hist. Constant., lib. III, c. 7 ; Socrat., Hist. Eccl·., lib. I, c. 8 ; Sozom., Hist. Eccl.., lib. 1, c. 17 ; Theod., Hist. Eccl., lib. 1, c. 6.
Dans tous les documents historiques dignes de foi, les prêtres Viton et Vincent sont seuls nommés comme délégués de l’évêque de Rome au concile de Nicée. On a voulu plus tard ajouter Osius de Cordoue, qui aurait présidé le concile au nom du pape. Osius ne présida pas le concile, comme on le verra plus bas, et il ne fut pas délégué de l’évêque de Rome. Ceux qui, par esprit de parti, l’ont prétendu, ont prouvé qu’ils n’avaient pas une connaissance suffisante de l’histoire et de la constitution de l’Eglise, au commencement du siècle. Un évêque ne représentait alors que son Eglise, et aucun évêque
Constantin, en convoquant ce concile qui était comme l’image du chœur apostolique, voulut faire hommage au Christ Sauveur d’une couronne dont les fleurs étaient attachées et tressées par le lien de la paix. Ce sont les expressions d’Eusèbe.
Du temps des apôtres, des fidèles de toutes les nations s’étaient réunis à Jérusalem ; mais, à Nicée, les membres du concile étaient tous des ministres de Dieu. On y vit plus de deux cent cinquante évêques, et l’on ne pourrait dire au juste le nombre de prêtres, de diacres, d’acolytes et autres clercs qui les accompagnèrent.
Parmi ces ministres de Dieul, les uns étaient distingués par leur sagesse, les autres par la gravité de leur vie et les souffrances qu’ils avaient supportées. Il y en avait qui se faisaient remarquer par leur modestie et la pureté de leurs mœurs. Quelques-uns étaient surtout honorés à cause de leur extrême vieillesse. D’autres étaient dans toute la vigueur juvénile de l’esprit et du corps, et n’avaient été revêtus du ministère que depuis peu de temps.
Pendant leur séjour à Nicée, Constantin leur fournit à tous les choses nécessaires.
Théodoret compte trois cent dix-huit évêques2. Il nomme parmi eux Jacques, évêque d’Antioche de Mygdonie, ville que les Syriens et les Assyriens nommaient Nisibe. Jacques était célèbre par ses miracles, et il avait, en particulier, ressuscité des morts. Paul, évêque de
y compris celui de Rome, ne croyait posséder une autorité qui devait être représentée. Les deux prêtres Viton et Vincent suffisaient bien pour représenter l’Eglise de Rome par délégation de l’évêque de cette ville. Aux témoignages des historiens qui ne nomment que Viton et Vincent comme délégués de Rome, il faut ajouter le successeur de Sylvestre, Jules Ier, évêque de Rome, qui ne mentionne que deux prêtres comme délégués de Rome au concile de Nicée. (Jul., Epist. ad Antioch., § 16.) Gélase de Cyzique est le premier qui ait prétendu qu’Osius avait été délégué de l’évêque de Rome.
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1 Euseb., De Vit. Constant., lib. III, c. 9.
2 Theod., Hist. Ecct., lib. I, c. 6. Op peut croire avec Eusèbe qu’il y en eut 250 lors de l’ouverture du concile ; mais qu’à la fin, le nombre s’en était élevé à 318, comme ledit Théodoret ; Socrate, qui écrivait d’après Eusèbe, a adopté le même chiffre que Théodoret et a modifié le texte d’Eusèbe sur ce point. Saint Athanase, qui assista au concile, se sert quelquefois de l’expression : Trois cents environ ; il affirme en d’autres endroits que les évêques furent au nombre de trois cent dix-huit. (Voy. S. Athanas., Hist. Arian. ad Monachos, § 66 ; Apolog. contra Arian., §§ 23-23 ; De Decret., Niam. Synod.,
§ 3 ; Epist. ad Afros, § 26
Néocæsarée sur l’Euphrate, avait souffert le martyre sous Licinius ; on lui avait coupé les deux mains et brûlé les nerfs aux articulations. Les uns avaient l’œil droit arraché ; les autres avaient les paupières coupées. Parmi ces derniers était un Egyptien, nommé Paphnutius1, évêque dans la Thébaïde supérieure. Un évêque de Chypre, Spiridion, jouissait d’une grande renommée dans l’Eglise. Le concile était comme une assemblée de martyrs. On y voyait cependant plusieurs évêques qui pensaient comme Arius, mais qui dissimulaient leurs mauvais sentiments. Les plus célèbres étaient Eusèbe de Nicomédie, Theognis, évêque de Nicée, et Maris, évêque de Chalcédoine, en Bithynie.
Leur principal antagoniste fut Athanase, diacre de l’Eglise d’Alexandrie. Alexandre, évêque d’Alexandrie, l’avait en grand honneur, ce qui lui avait fait beaucoup de jaloux.
La convocation du concile de Nicée avait fait grand bruit dans tout l’empire. De nombreux philosophes se rendirent en Bithynie, et se mirent à discuter avec les évêques avant que les séances du concile ne fussent ouvertes2. Comme ils faisaient assaut de dialectique, un évêque, doué d’un jugement très-droit, leur adressa ces paroles : « Le Christ· et les apôtres ne nous ont enseigné ni la dialectique, ni des subtilités, mais une doctrine simple et claire que l’on croit et que l’on pratique en faisant le bien. »
Tous convinrent que cela était vrai, et qu’il fallait s’en tenir à la doctrine, en laissant de côté les subtilités de la dialectique. Le diacre Athanase s’était fait surtout remarquer dans ces discussions et avait attiré l’attention sur lui.
Avant les séances solennelles, l’empereur demanda aux évêques de lui remettre par écrit les reproches qu’ils auraient à s’adresser les uns aux autres, afin qu’il pût les examiner. Déjà il avait reçu auparavant quelques plaintes. Quand les pièces lui furent remises, il déclara
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1 Socrat., Hist. Eccl., lib. I, c. 8.
2 Socrat., Ibid. ; Sozomen., Hist. Eccl., lib. I, c. 17.
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il déclara
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1 Socrat., Hist. Eccl., lib. I, c. 8.
2 Socrat., Ibid. ; Sozomen., Hist. Eccl., lib. I, c. 17.
aux évêques qu’il n’avait pas qualité pour être leur juge ; que Dieu seul l’était, et qu’il fallait renvoyer toutes les plaintes à son jugement. Il fit donc brûler les pièces en présence des évêques, et il leur dit : « Le Christ a ordonné de pardonner à son frère, si l’on veut soi-même obtenir le pardon. » Puis il engagea les évêques à conserver entre eux la paix et la concorde.
Les séances du concile eurent lieu dans le palais impérial, dans la salle du milieu qui était le local le plus vaste qu’il y eût à Nicée1. Des sièges étaient disposés des deux côtés de la salle, et chacun prit la place qui lui était assignée. Tous gardèrent d’abord un profond silence, en attendant l’empereur. Les grands officiers de la cour, qui étaient chrétiens et particulièrement affectionnés de Constantin, entrèrent d’abord dans la salle du concile et prirent place. On annonça l’empereur ; tous se levèrent aussitôt, et Constantin entra jusqu’au milieu de la salle, semblable, dit Eusèbe, a un ange de Dieu ; son manteau de pourpre, parsemé de pierreries et d’ornements en or, jetait comme des éclairs. Il s’avança avec une modestie qui rehaussait encore les grâces extérieures de sa personne. Après avoir salué l’assemblée, il s’avança jusqu’à l’extrémité des sièges, devant une chaise d’or très-basse, et ne s’assit qu’après en avoir obtenu la permission de l’assemblée.
Les évêques s’assirent après lui.
Alors celui des évêques qui occupait le premier siège de droite2 se levant, adressa à l’empereur une courte allocution dans laquelle il bénissait Dieu d’avoir placé un si grand souverain à la tête de l’empire. L’orateur
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1 Euseb., De Vit. Constant., lib. III, c. 10.
2 Euseb., De Vit. Constant., lib. III, c. 11.
On a beaucoup disserté pour savoir qui était cet évêque. Eusèbe ne l’a pas nommé. Théodoret (Hist. Eccl., lib. I, c. 6), dit que ce fut le Grand Eustathe, élevé depuis peu sur la chaire de l’Eglise d’Antioche. Sozomène affirme (Hist. Eccl., lib. I, c. 10), que ce fut Eusèbe Pamphile lui-même, évêque de Cæsarée. Des modernes ont prétendu que c’était Osius qui aurait présidé le concile en qualité de légat du pape ! (sic). Ces doctes s’appuient, pour prouver qu’Osius était délégué de l’évêque de Rome, sur le témoignage de Gélase de Cyzique. Or Gélase est un écrivain qui s’est rendu coupable des erreurs les plus grossières ; ceux mêmes qui en appellent à son témoignage sont obligés d’en convenir. Dans le texte que les savants romanistes invoquent, Gélase a copié
s’étant assis, tous avaient les yeux fixés sur Constantin. Celui-ci, après avoir jeté un regard joyeux et doux sur toute l’assemblée, prononça ce discours :
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Eusèbe du Cæsarée, en y intercalant des erreurs. Nous donnons les deux textes en parallèle :
Texte d’Eusèbe :
DE VIT. CONSTANTIN, lib. III, C. 7.
« Des Espagnes vint un évêque très-célèbre qui prit séance avec beaucoup d’autres.
« L’évêque de la ville impériale, à cause de sa vieillesse, était absent, mais ses prêtres étaient présents et le remplaçaient. »
Texte de Gélase de Cyzique :
HIST. CONC. NICOEN., lib. II. C. 5.
« Des Espagnes vint Osius très-célèbre qui tenait la place de l’évêque de la grande Rome, avec les prêtres Viton et Vincent, qui prit séance avec beaucoup d’autres.
« L’évêque de la ville impériale, nommé Métrophanes, était absent à cause de sa vieillesse, mais ses préires étaient présents et le remplaçaient. »
Il est clair que Gélase a voulu corriger Eusèbe et le compléter à sa manière. S’il s’était contenté de mettre le nom d’Osius dans le texte d’Eusèbe, et indiquer les noms des deux prêtres délégués de Rome, on n’aurait pas de reproche à lui faire. Mais comment l’excuser d’avoir entendu Constantinople et non pas Rome dans l’expression de ville impériale dont parle Eusèbe ? Constantinople n’était alors que Byzance, et n’était pas encore capitale de l’empire. Il suffit de rapprocher les deux textes ci-dessus pour apprécier le degré de confiance que mérite Gélase. Cet écrivain copie ordinairement Eusèbe, en y ajoutant des erreurs grossières. C’est sur le témoignage de Gélase de Cyzique que repose tout ce qui a été écrit sur Osius, légat du pape à Nicée, et à ce titre présidant le concile.
La vérité est que le concile eut plusieurs présidents qui étaient les évêques des plus grands sièges. Le premier de ces présidents fut très-probablement Eustathe d’Antioche, comme l’affirme Théodoret. Le siège d’Alexandrie fut regardé, depuis l’institution des patriarchats, comme supérieur à celui d’Antioche. Alors même qu’il en aurait été ainsi avant le concile de Nicée, on comprendrait que saint Alexandre eût cédé la première place à saint Eustathe d’Antioche, puisqu’il était partie dans l’affaire d’Arius qui devait être jugée ; on peut penser aussi que Constantin lui gardait un peu rancune d’avoir tenu peu de compte de la lettre qu’il lui avait adressée ainsi qu’à Arius.
Si l’on veut que le concile de Nicée n’ait eu qu’un président, la plus grande probabilité serait pour saint Eustathe d’Antioche.
Nous avons dit plus haut que le témoignage de Gélase de Cyzique est l’unique preuve que l’on puisse citer en faveur de cette thèse romaniste : Osius fut délégué de l’évêque de Rome au concile de Nicée. En effet, les témoignages postérieurs ne sont appuyés que sur le récit de Gélase. Fleury, dans son Histoire ecclésiastique, essaye de faire croire que le témoignage de cet écrivain est important, parce qu’il aurait écrit sur les mémoires des Grecs. (Fleury, liv. XI, § 5.) Il suffit de comparer le livre de Gélase avec la vie de Constantin, par Eusèbe de Cæsarée et les histoires de Ruffin et de Socrate, pour voir que l’écrivain du vme siècle n’a pas eu d’autres mémoires à sa disposition et qu’il s’est contenté d’y ajouter des détails de pure imagination. Sous l’influence des événements au milieu desquels il vécut, il crut pouvoir ajouter au récit d’Eusèbe et des autres ce qu’il jugeait convenable ou utile ; mais son imagination ou ses préjugés lui dictèrent ses additions. Tillemont impute simplement à Gélase une falsification du texte d’Eusèbe, à propos de la légation d’Osius, et il a parfaitement raison. (Tillemont, Mémoires pour servir à l’Histoire ecclésiastique, t. VI. Histoire du concile de Nicée, art. II.) Noël-Alexandre avoue la falsification, mais accepte le témoignage de Gélase, parce que d’autres postérieurs lui sont conformes. (Natalis Alexand., Hist. Eccl., Sæcul. IV., Dissert. XII, art. unic.) Quelle autorité peuvent apporter au témoignage de Gélase quelques mots qui n’ont d’autre appui que le témoignage de ce même Gélase ?
De nos jours, le docteur Héfelé n’a pas osé s’appuyer sur le témoignage de Gélase ; il en appelle seulement à quelques paroles prononcées dans le sixième concile œcuménique (au VIIe siècle), en essayant de leur donner plus d’im-
« Très-chers1, c’était le plus ardent de mes vœux de vous voir tous un jour rassemblés. Je rends grâce à Dieu, roi de toutes choses, de ce que ce vœu est accompli. Outre les biens innombrables dont il m’a comblé, il m’a accordé le plus grand de tous, celui de vous voir réunis avec les mêmes pensées et les mêmes sentiments. A l’avenir, que l’ennemi ne trouble plus nos succès ! La tyrannie de ceux qui avaient déclaré la guerre à Dieu étant détruite et anéantie, par le secours du Sauveur Dieu, que le démon n’ait plus aucun moyen de nuire à la religion par ses blasphèmes et ses calomnies ! Les divisions dans l’Eglise de Dieu me paraissent plus graves et plus périlleuses que la guerre et la rébellion ; et les choses extérieures ne m’émeuvent pas autant que les affaires religieuses. Depuis que, par la volonté et le secours de Dieu, j’ai remporté la victoire sur mes ennemis, il me semblait que je ne devais plus avoir d’autre soin que celui de remercier Dieu et de me réjouir avec ceux que Dieu m’avait donnés pour me seconder. Mais dès que j’ai appris la nouvelle de vos divisions, j’ai pensé
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portance qu’elles n’en ont, parce qu’elles ont été prononcées dans ce concile. Celui qui les prononça parla d’après Gélase de Cyzique, et son témoignage ne peut pas avoir plus d’importance que celui de l’écrivain qui lui fournit ses expressions.
Le même écrivain rapporte que, selon Ruffin, Constantin convoqua le concile de Nicée, d’après l’avis des évêques ; il en conclut que celui de Rome dut être consulté, puisqu’il était le premier. Nous le voulons bien ; mais il y a loin, de cette consultation à l’autorité papale convoquant le concile, de concert avec l’empereur. (Hétèlé, Histoire des conciles, Introd.,§ 3, liv. II, ch. II, § 24.) L’abbé Darras, l’historien papiste par excellence, a affirmé simplement que Constantin indiqua le concile de concert avec le pape saint Sylvestre et qu’Osius remplit les fonctions de légat du pape. Il ne s’est pas abaissé jusqu’à fournir une seule preuve à l’appui de ces deux affirmations qui pour lui n’offraient sans doute aucune difficulté. (Voy. Histoire générale de L’Eglise, Pontificat de saint Sylvestre, ch. III, § 3.) Nous avons appelé l’abbé Darras l’historien papiste par excellence, parce qu’il divise l’histoire de l’Eglise en autant de pontificats qu’il compte de papes, à commencer par saint Pierre, bien entendu, lequel, à ses yeux, a été pape de la même manière que Pie IX actuellement régnant. Les savants s’étonneront sans doute que nous ayons nommé celte indigeste et inepte compilation. Notre excuse, c’est que notre ouvrage ne s’adresse pas seulement aux savants, mais aussi à des personnes qui pourraient avoir besoin de savoir que nous avons eu la patience de lire les historiens romanistes les plus modernes. C’est pour le même motif que nous avons relevé quelques-unes des innombrables bévues de cet écrivain, le dernier qui ait entrepris une compilation, intitulée : Histoire générale de l’Eglise. Rhorbacher l’avait précédé. Ces deux compilateurs sont dignes l’un de l’autre ; les rares savants que possède l’Eglise romaine rougissent de leurs œuvres, et avec raison.
1 Euseb., De Vit. Constant., lib. III, c. 12.
que c’était une affaire que je ne devais pas négliger. Je vous ai donc tous appelés1 pour remédier à un si grand mal. Je ressens une indicible joie en vous voyant réunis, mais je ne croirai avoir accompli mon œuvre que le jour où je vous verrai tous d’accord et unis, pratiquant cette bonne harmonie que votre consécration à Dieu vous oblige de prêcher et de persuader aux autres. Appliquez-vous donc, ô très-chers ministres de Dieu, serviteurs fidèles de notre commun maître et Sauveur, à détruire toute cause de dissension, et à aplanir au plus vite toutes difficultés, par vos lois ! Vous ferez ainsi une œuvre agréable au Dieu souverain de toutes choses, et vous me rendrez à moi, votre collègue dans le service de Dieu, un grand service. »
Constantin avait prononcé ce discours en latin. Un interprète le traduisit en grec. Ensuite il accorda la parole aux présidents du concile2. Une vive discussion s’engagea aussitôt. L’empereur écouta tout avec patience ; s’intéressa à toutes les questions qui étaient soulevées, et ne prit la parole que dans un but de conciliation. Dans ces discussions, il se servait de la langue grecque, beaucoup plus répandue que le latin ; il parlait avec douceur et montrait en même temps qu’il connaissait bien les questions agitées. Aux uns, il opposait des raisonnements ; aux autres des paroles de paix ; il félicitait ceux qui avaient bien parlé ; et il cherchait à amener tout le monde à la même manière de voir. Il atteignit son but, et tous, à la fin, tombèrent d’accord.
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1 Constantin s’attribue donc à lui-même la convocation du concile.
2 Euseb., De Vit. Constant., lib. III, c. 15.
Il faut remarquer ces paroles d’Eusèbe : τοΐς της αυνοοου « προεοροις. » Elles prouvent que le concile eut à sa tête plusieurs présidents qui étaient, sans nul doute, les évêques des plus grands sièges.
Nous pensons que les délégués de Rome, étant de simples prêtres, ne purent prendre rang parmi les évêques.
Nous n’attachons aucune importance aux signatures qui ont été publiées dans les diverses collections des conciles. Elles ne sont pas authentiques. Du reste, les délégués de Rome auraient pu signer avant les autres évêques des grands sièges sans que l’on pût en conclure autre chose, sinon que l’évêque de Rome qu’ils représentaient était considéré comme le premier. Mais Osius et les deux prêtres Viton et Vincent étant en tête des signatures, il nous semble évident que ces signatures ont été arrangées d’après le récit de Gélase de Cyzique. à une époque postérieure.
La discussion portait sur deux points principaux : Le système d’Arius, qui résumait toutes les hérésies antérieures, et la question paschale1. On convint sur le premier point d’une profession de foi qui était l’exposition exacte de l’ancienne doctrine, et l’on fixa le jour où tous les chrétiens devraient célébrer la Pâque. Constantin, pour arriver à la conciliation, insistait principalement sur ce point2 : que la doctrine relative à la divinité était clairement exposée dans les livres évangéliques et apostoliques, et qu’il valait mieux s’en référer à leur témoignage que d’avoir recours aux finesses de la dialectique. Les évêques furent de cet avis et la grande majorité se déclara en faveur d’un symbole qui fut rédigé et proposé par Osius à l’assemblée3. Cependant plusieurs s’y opposèrent. Eusèbe de Nicomédie, Théodote de Laodicée, Paulinus de Tyr, Athanase d’Anazarbe, Grégoire de Byrouth, Aétius de Lidda ou Diospolis4 n’acceptèrent pas sincèrement le symbole, et ils rencontrèrent dans le concile de nouveaux adhérents au système arien : Ménophante d’Ephèse, Patrophile de Scythopolis, Theognis de Nicée, Maris de Chalcédoine, Narcisse de Neroniade ou Irenopolis. Théonas de Marmarique et Secundus de Ptolémaïde de Lybie, anciens partisans d’Arius, se prononcèrent aussi contre la saine doctrine. Les opposants présentèrent au concile une formule de foi, en opposition avec celle qu’Osius avait rédigée. Mais elle fut aussitôt rejetée comme contraire à la foi. Elle fut attaquée avec tant d’énergie et excita un tel tumulte que tous l’abandonnèrent, excepté Secundus et Théonas.
Le contre-projet de l’arianisme avait été rédigé par Eusèbe de Nicomédie5, de concert avec Menophante d’Ephèse ; Patrophile de Scythopolis ; Theognis de Nicée ;
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1 Euseb., De Vit. Constant., lib. III, c. 14.
2 Theodoret, Hist. Eccl, lib. I, c. 6.
3 S. Athan., Hist. Arian. ad Monach·., § 42.
4 Theod., Hist. Eccl.,’lib. 1, c. 4 etc. 6 ; Socrat., Hist. Eccl., lib. I, c. 8.
5 Eustath., Antioch., ap Theod., Eist. Eccl., lib. I, c. 7 ; Ibid., c. 6 ; S. Athanas., Epist. ad Afros ; et ap Theod., Hist. Eccl., Loc. cit.
Sozomène (lib. I, c. 21) prétend qu’Eusèbe hésita avant, d’admettre le mot consubstantiel, mais, qu’après réflexion, il y adhéra. Il affirme que les amis d’Arius, Eusèbe de Nicomédie, Theognis, Maris, Patrophile signèrent le symbole. Il leur adjoint à tort Secundus de Ptolémaïde en Lybie.
Narcisse de Neroniade ; Théonas de Marmarique et Secundus de Ptolémaïde. Il s’était appliqué surtout à se servir d’expressions amphibologiques, afin de faire croire qu’il admettait la divinité du Fils qu’il rejetait réellement. Mais ses subterfuges ne purent tromper le concile. On lui opposa l’Ecriture et la tradition des Eglises qui enseignaient que le Fils était de la même substance que le Père, c’est-à-dire qu’il lui était consubstantiel (όμοουσίοζ).
Arius lui-même connaissait ce mot, comme on l’a vu dans sa lettre à saint Alexandre, et reprochait aux orthodoxes de s’en servir pour exprimer la vraie foi. C’était surtout sur ce mot, inséré par Osius dans son projet de symbole, que la discussion avait porté. La plupart des évêques y adhérèrent comme à l’expression de la vraie foi.
Saint Athanase, qui assista au concile et prit une large part aux discussions, nous a laissé sur ce sujet des renseignements qui complètent ceux des historiens. Ils méritent d’être recueillis avec soin :
La discussion s’étant ouverte sur la doctrine, les évêques demandèrent aux ariens avec beaucoup de douceur et de politesse d’exposer les raisons qui militaient en faveur de leur doctrine et de l’appuyer sur des preuves positives, c’est-à-dire théologiques, sans se perdre dans des divagations philosophiques. Ils osèrent à peine ouvrir la bouche, et tous les jugèrent dignes de condamnation. Ils se disputèrent entre eux ; et quand on leur eut opposé les preuves qui réfutaient leur système, ils gardèrent un silence qui était l’aveu de leurs erreurs. Les évêques rejetèrent donc les expressions amphibologiques dont ils les avaient enveloppées, et proclamèrent la vraie foi de l’Eghse1.
Arius exposa lui-même sa doctrine devant le concile.
Le Fils, dit-il2, ne participe pas plus à la substance divine que les autres créatures, car lui-même est une
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1 S. Alhan., De Decret. Nicœn. Synod., § 3.
2 S. Athan., Epist. ad Episcop. Ægypt. et Lyb., § 12 et 13 ; Orat. I, Contra Arian., § 7.
œuvre de Dieu. Dieu ne nous a pas créés pour lui ; il l’a, au contraire, créé pour nous. Dieu était d’abord seul et le Verbe n’était pas avec lui ; mais lorsqu’il voulut nous créer, il le créa, lui donna les noms de Verbe, de Fils, de Sagesse, et le fit l’intermédiaire de notre création. Comme toutes les autres créatures, il fut créé par la volonté du Père, mais il n’est pas le produit propre et naturel du Père ; ce n’est que par grâce qu’il devint son Fils. Dieu, qui a toujours été, a voulu que le Fils existât, comme il a voulu l’existence de tous les autres êtres. Le Fils n’est donc qu’un produit créé qui ne peut connaître la substance non créée, éternelle ; qui ne peut même comprendre sa propre nature.
En entendant de tels blasphèmes, les Pères du concile se bouchaient les oreilles ; ils déclarèrent unanimement que celui qui les proférait était un hérétique digne de condamnation. C’est pourquoi ils le frappèrent d’anathème et déclarèrent que son système était opposé à la foi de l’Eglise. Ils rendirent leur jugement en toute liberté et sans avoir à subir la moindre pression. Ils jugèrent que l’arianisme conduisait droit au judaïsme et même au paganisme, et que ceux qui soutenaient de telles erreurs ne méritaient pas le titre de chrétien.
Pour échapper aux subterfuges des ariens, les Pères du concile jugèrent qu’ils devaient déclarer que le Fils était de la substance du Père ; qu’il lui était consubstantiel1. Ce mot était susceptible d’un sens erroné. Sabellius en avait abusé pour dire que si le Fils était de la même substance que le Père, il ne faisait qu’une même personne avec lui, qu’autrement la substance divine serait reconnue divisible. Du mot consubstantiel admis comme orthodoxe, il en induisait la négation de la Trinité.
Le mot se présenta avec ce sens dans les discussions du concile d’Antioche contre Paul de Samosate. Si le Fils et le Saint-Esprit sont consubstantiels au Père, disait Paul, il s’ensuit qu’en Dieu il y a trois êtres, un qui a. la priorité, deux qui en émanent ; il y a donc trois Dieux. Il
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1 S. Athan., De Synod., § 45.
ajoutait : si l’on dit que le Fils fut un homme auquel on conféra le titre de Dieu, la substance de Dieu reste unique et intacte. Les évêques, afin d’éviter le piège que leur tendait Paul de Samosate, rejetèrent le mot consubstantiel dans le sens qu’il lui donnait, aussi bien que dans celui que soutenait Sabellius, et ils déclarèrent que le Christ était le Verbe de Dieu, préexistant à la création de la nature humaine à laquelle le Verbe fut uni hypo- statiquement.
Arius admettait, avec les Pères d’Antioche, que le Christ était le Verbe existant antérieurement à son union avec sa nature humaine, et même existant avant les temps ; mais il affirmait qu’il avait été créé avant les temps ; par conséquent qu’il n’était pas sorti de toute éternité de la substance du Père. Il s’autorisait, pour rejeter le mot consubstantiel, du sens que Sabellius avait donné à ce mot pour s’attaquer à la Trinité.
Les Pères de Nicée avaient à éviter un double écueil, afin de ne pas tomber dans le sabellianisme en condamnant l’arianisme. C’est ce qu’ils firent dans leur exposition de la foi, où ils affirmèrent le dogme d’une substance unique en Dieu, et celui de la Trinité des personnes. De cette manière, les deux hérésies étaient condamnées, et la doctrine catholique était mise en parfaite lumière.
Les partisans d’Arius proposaient de remplacer le mot consubstantiel par ceux-ci : qui vient de Dieu ; ils attachaient à ce mot de Dieu (ex Deo) un sens non orthodoxe ; les Pères du concile comprirent leurs ruses. Ils acceptèrent le mot ex Deo ; mais ils l’expliquèrent en disant que le Fils ne venait pas de Dieu de la même manière que les créatures ; qu’il était une véritable émanation de sa substance. On peut dire de toutes les créatures qu’elles viennent de Dieu, puisque c’est lui qui les a créées par son Verbe ; mais on ne peut dire que du Verbe qu’il vient du Père, ce qui veut dire, qu’il est de la substance du Père, expression qui ne convient à aucun être créé.
Les expressions : de la substance du Père, consubstantiel, n’étaient pas dans l’Ecriture ; mais elles exprimaient parfaitement la foi de l’Eglise ; c’est pourquoi les Pères
y eurent recours, forcés de les employer pour déjouer les subterfuges des ariens.
Ils n’inventèrent pas ces expressions, comme les ariens le leur reprochèrent plus tard, mais ils les empruntèrent aux anciens Pères1.
En se servant de ce mot, les Pères du concile ne se donnèrent pas comme revêtus d’une autorité personnelle pour juger de la foi2. Ils déclarèrent seulement « ce que croyait l’Eglise catholique. » Ils eurent soin d’expliquer qu’ils ne faisaient point un dogme nouveau ; qu’ils déclaraient seulement ce que les apôtres avaient enseigné, et ce que l’Eglise avait toujours cru.
C’est saint Athanase qui s’exprime ainsi.
Eusèbe de Cæsarée3 s’était d’abord prononcé contre le mot consubstantiel à cause du mauvais sens qu’y attachait Sabellius ; mais il savait aussi que les anciens Pères s’étaient servis de ce mot pour exposer la vraie doctrine. Dès qu’il connut que le concile de Nicée attachait à cette expression le même sens que les anciens Pères, il accepta franchement le symbole et écrivit de Nicée à son Eglise une lettre dans laquelle il s’exprimait ainsi4 :
« Vous avez sans doute connaissance, très-chers frères, des choses qui ont été traitées dans le grand concile de Nicée touchant la foi de l’Eglise ; car la renommée devance ordinairement la notification de l’avènement. Mais, dans la crainte que le récit qui vous en serait fait ne fût pas exact, nous avons jugé nécessaire de vous envoyer la formule de foi que nous avions d’abord proposée, et celle que les évêques, en ajoutant à la nôtre quelques éclaircissements, ont promulguée. Notre formule, lue en présence de l’empereur très-aimé de Dieu, parut à tous bonne et juste. Elle était ainsi conçue :
« Gomme nous l’avons reçu des évêques nos prédécesseurs, lorsque nous avons été initiés à la doctrine, et que nous avons été baptisés ; comme nous l’avons appris
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1 S.Athan., Le Decret. Nicœ-ii. Synod., §§ 19, 25, 52.
2 S. Alhan., Le Synod., § 5 ; Epist. ad Afros, § 2.
3 S. Athan., De Decret. Nicœn. Synod., S 3.
4 Euseb., Epist. ad Caesarienses, int. op. t. II, p. 1536, édit. Migne ; Socrat., Hist. Eccl., lib. 1, c. 8.
des saintes Ecritures ; comme tous, soit évêques, soit prêtres, nous avons cru et enseigné, nous croyons maintenant et vous exposons ainsi notre foi :
« Nous croyons en Dieu un, Père Tout-Puissant, créateur des choses visibles et invisibles ;
Et en un Seigneur Jésus-Christ, Verbe de Dieu, Dieu de Dieu, lumière de lumière, vie de vie, Fils unique, premier-né de toute créature, engendré de « Dieu le Père avant tous les siècles, par lequel toutes choses ont été faites ; qui s’est incarné pour notre salut et a vécu parmi les hommes ; qui a souffert, est ressuscité le troisième jour ; est monté vers le Père, et viendra de nouveau avec gloire juger les vivants et les morts.
Nous croyons aussi en un Saint-Esprit.
Nous croyons que chacun d’eux est et subsiste : Le Père véritablement Père ; le Fils véritablement Fils ; le Saint-Esprit véritablement Saint-Esprit, selon cette parole prononcée par Notre Seigneur, lorsqu’il envoya ses disciples prêcher : Allez, instruisez toutes les « nations ; baptisez-les, au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit . Nous déclarons penser ainsi, avoir cette foi, l’avoir eue auparavant, et que nous la conserverons constamment, condamnant et anathématisant toute hérésie impie.
« Nous attestons que nous avons toujours pensé ainsi du fond du cœur, dès que nous avons pu connaître ces vérités ; que nous pensons encore ainsi aujourd’hui, et que nous parlons en toute sincérité en présence de Dieu Tout-Puissant, de Notre Seigneur Jésus-Christ, prêts à vous donner des preuves de notre croyance et vous convaincre que nous l’avons toujours eue et enseignée, comme aujourd’hui.
« Lorsque j’eus lu cette exposition de foi, personne n’y fit d’objection. L’empereur très-aimé de Dieu y donna le premier son assentiment ; déclara qu’il croyait ainsi et engagea tout le monde à admettre cette foi et à y souscrire, en ajoutant seulement le mot consubstantiel. Il expliqua lui-même ce mot, en exposant que l’on ne
devait pas l’entendre dans un sens matériel, comme si la substance divine était susceptible de division, de partage, ce qui répugne à une substance toute spirituelle, mais dans un sens divin et mystique. Lorsque l’empereur eut ainsi disserté, l’assemblée adopta le mot consubstantiel et la profession de foi suivante. »
Eusèbe donne ici le symbole, tel que nous le citerons un peu plus bas ; puis il ajoute :
« Lorsque cette formule de foi eut été présentée, nous n’avons pas laissé passer sans examen ce qui fut dit touchant les expressions : de la substance et consubstantiel. On proposa à ce sujet plusieurs questions, et l’on fit plusieurs réponses ; l’on discuta sérieusement sur le sens des expressions proposées. A propos des mots : de la substance, il fut entendu qu’ils signifiaient que le Fils venait du Père, mais non comme une partie du Père. L’expression nous parut juste dès qu’elle exprimait la saine doctrine qui consiste en ceci : que le Fils vient du Père, mais qu’il n’est pas une partie de sa substance ; c’est pourquoi nous y avons adhéré. Nous n’avons même pas rejeté le mot consubstantiel par amour de la paix et pour ne pas faillir à l’exacte intelligence de la doctrine. Par la même raison, nous avons approuvé les mots : engendré, non fait ; car on observait que le mot fait désigne l’action créatrice de Dieu qui fit toutes choses, par le Fils ; et qu’il ne pouvait convenir à ce Fils, auquel il ne fallait point attribuer une cause analogue à celle des êtres qui ont été faits par lui ; lequel avait une substance bien supérieure à celle des créatures, substance qu’il tenait du Père, selon les divins oracles, d’une manière mystérieuse, ineffable et incompréhensible pour l’homme. Lorsqu’on dit que le Fils était consubstantiel au Père, il fut donc bien entendu que,1a communication de la substance du Père n’avait aucune analogie avec celle des êtres animés, dont la substance est communiquée par division, partage, communication, tous actes qui ne peuvent convenir à la nature divine. Le mot consubstantiel signifie donc seulement que le Fils n’a aucune ressemblance avec les créatures qui ont été faites par lui,
mais qu’il est semblable au Père par lequel il a été engendré ; qu’il n’a ni une autre essence, ni une autre substance que celle qu’il a reçue du Père.
« Quand toutes ces explications eurent été données, nous avons pensé que l’on devait approuver le mot consubstantiel, d’autant plus que nous savions qu’il avait été employé par plusieurs des anciens Pères et des écrivains les plus illustres pour expliquer la divinité du Père et du Fils.
« J’ai cru devoir entrer dans ces explications touchant la foi qui a été promulguée à Nicée, à laquelle nous avons tous adhéré, non à la légère et sans réflexion, mais selon les explications qui furent données devant le très-pieux empereur lui-même, et pour les raisons exposées ci-dessus, qui furent approuvées de tous.
« Nous n’avons pas vu avec peine l’anathème qui suit la formule de foi, puisqu’on ne fait qu’y proscrire des expressions étrangères aux saintes Ecritures et qui avaient causé tous les troubles de l’Eglise. Dans aucun des livres inspirés, on ne trouve ces expressions : Des non existants ; il fut un temps où il n’était pas ; il n’y a donc aucune raison pour s’obstiner à vouloir s’en servir. C’est pourquoi nous avons adhéré au décret juste et utile qui les proscrivait, d’autant mieux que nous n’avions jamais accepté les expressions condamnées.
« Très-chers frères, j’ai cru devoir vous écrire ces choses, afin que vous connaissiez les motifs de nos hésitations et de nos adhésions ; vous convaincre que nous avons eu raison de résister tant que les expressions dont on se servait ne nous ont pas offert un sens parfaitement clair et juste ; mais que nous les avons admises franchement dès qu’il nous a été démontré que ces expressions avaient un sens conforme à la foi que nous avions toujours confessée. »
Cette belle lettre répond aux accusations élevées contre le docte évêque de Cæsarée, et explique très-bien la conduite qu’il avait tenue jusqu’alors. Il n’acceptait pas les formules d’Arius ; mais certaines expressions dont se servaient les orthodoxes pouvaient être enten-
dues d’une manière erronée. Dès que le sens de ces mots fut fixé et que l’orthodoxie fut sauvegardée, Eusèbe les accepta sans difficulté.
Saint Athanase a cité avec éloge la lettre de l’évêque de Cæsarée1. Elle méritait cet honneur.
D’après les documents cités, on proposa trois formules de foi au concile de Nicée. Celle d’Eusèbe de Nicomédie fut rejetée sans hésitation comme hérétique ; celle d’Eusèbe de Cæsarée fut approuvée, pourvu qu’on y insérât le mot consubstantiel. Osius présenta la formule qui fut adoptée, après que le sens du mot consubstantiel eût été fixé d’une manière orthodoxe, et mis à l’abri de toute fausse interprétation.
Telle est la formule ou profession de foi promulguée à Nicée2 :
« Nous croyons en Dieu un, Père Tout-Puissant, créateur de toutes choses visibles et invisibles :
« Et en un Seigneur Jésus-Christ, Fils de Dieu, seul engendré du Père, et étant de la substance du Père, Dieu de Dieu, lumière de lumière, vrai Dieu de vrai Dieu : engendré, non créé, consubstantiel au Père ; par lequel toutes choses ont été faites, celles qui sont au ciel, comme celles qui sont sur la terre : Pour nous hommes, et pour notre salut, il est venu, s’est incarné et s’est fait homme ; il a souffert, il est ressuscité le troisième jour, il est monté aux cieux, et reviendra juger les vivants et les morts.
« Nous croyons aussi au Saint-Esprit.
« Ceux qui disent : il fut un temps où il (le Fils) n’était pas, et il n’existait pas avant d’être engendré ; ou bien : il a été fait d’éléments non existants : Ceux qui disent que le Fils est d’une autre substance, d’une autre essence (que le Père) ; qu’il a été créé, qu’il est soumis à la mutation et au changement : la sainte Eglise catholique apostolique les anathématise. »
Telle fut la rédaction primitive du symbole de Nicée.
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1 S. Athan., De Decret. Niccen. Synod., §3.
2 S. Athan., Epist. ad Jovian., § 3 ; Euseb., Epist. supracit. ; Socrat., Hist. Eccl., lib. I, c. 8. ; Ruffin, Hist. Eccl., lib. I, c. 6.
I1 était conforme aux anciens symboles que nous avons cités d’après les Pères antérieurs, et qui étaient en usage dans les Eglises particulières ; mais il fut le premier qui reçut le caractère d’universalité ; il était surtout dirigé, dans ses détails, contre les erreurs de l’arianisme. Par leur terminologie exacte et claire, les membres du concile, en confirmant la foi toujours admise, rendaient vaines toutes les subtilités de l’hérésie.
Arius refusa de signer cette formule de foi et fut déposé. Eusèbe de Nicomédie et Theognis de Nicée consentaient, du moins en apparence, à admettre la formule, mais refusaient de souscrire à la déposition d’Arius1. Constantin exila Arius et lui défendit de jamais rentrer à Alexandrie. Théonas de Marmarique et Secundus de Ptolémaïde furent également exilés. Eusèbe de Nicomédie et Theognis de Nicée ne furent exilés qu’après le concile, comme on le verra dans la suite du récit. Ces évêques, comme tous ceux qui avaient soutenu Arius, ne signèrent qu’hypocritement et par crainte de l’exil2. Dès qu’ils purent revenir sur leur signature et attaquer le concile de Nicée sans avoir de risques à courir, ils le firent avec une audace inouïe, comme on le verra dans la suite.
Après la condamnation de la doctrine d’Arius, le concile passa à la question paschale. La discussion eut un tout autre caractère. Lorsqu’il s’agissait de la foi, les Pères se contentaient de dire : Ainsi croit l’Eglise catholique. « Ils professèrent, ajoute saint Athanase3, ce qu’ils avaient toujours cru, et promulguèrent, non pas une doctrine nouvelle, mais une doctrine apostolique. Ce qu’ils donnèrent par écrit n’était pas de leur invention, mais ce que les apôtres avaient enseigné. »
Cette observation de saint Athanase détermine clairement la nature de l’autorité épiscopale dans les décisions de foi. Les évêques n’ont aucun droit sur la doctrine ; ils ne peuvent ériger en dogme une doctrine nouvelle ; leur devoir est de proclamer ce que les apôtres ont
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1 Socrat., Hist. Eccl., lib. I. c. 8.
2 S. Athan., Apolog. contr. Arian., §. 23 ; De Décrit. Nicaen. Synod., §. 3 et 6
3 S. Athanas., De Synod., par. 5 ; Epist. ad Afros. §. 2.
enseigné, et ce que l’Eglise catholique a toujours cru.
La discussion touchant la fixation du jour de Pâques eut un tout autre caractère. Il s’agissait d’une question purement disciplinaire, ecclésiastique par sa nature, et pouvant être, par conséquent, tranchée avec autorité par les évêques, premiers pasteurs de l’Eglise, et investis d’une autorité divine pour la gouverner. Les Pères du concile de Nicée ne dirent donc pas, comme sur la question de foi : « C’est ainsi que croit l’Eglise catholique ; » mais ils usèrent de cette formule : « Ce qui suit a été décrété. »
Cette remarque est de saint Athanase.
Le décret du concile de Nicée touchant la Pâque ne nous a pas été conservé. On sait cependant1, qu’il y était prescrit de ne pas célébrer cette fête le même jour que les Juifs, mais seulement le dimanche qui suivait le quatorzième jour de la lune après l’équinoxe du printemps.
Pour déterminer ce jour, le concile décida que l’Eglise d’Alexandrie, connue depuis longtemps par sa science en astronomie, serait chargée de ce soin, et qu’elle communiquerait sa décision à l’Eglise de Rome. Cette dernière, placée dans la première capitale de l’empire, ayant des relations plus faciles avec les provinces les plus éloignées, fut chargée de leur faire connaître le jour indiqué par l’Eglise d’Alexandrie.
Le décret de Nicée ne trancha pas toutes les difficultés, car, à Rome, on calculait l’équinoxe autrement qu’à Alexandrie, et, quoique cette dernière Eglise eût été chargée du calcul, on refusa à Rome d’accepter ses décisions, ce qui entretint encore quelques divergences dans la célébration de la Pâque, entre l’Orient et l’Occident, quoique l’on fût d’accord sur la loi promulguée par le premier concile de Nicée2.
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1 Voy. s. Leon., Epist. 121 ad Marcian. Imperat., édit. Ballerin. ; Ambros., Epist., 25, class. 1, ad Episcop.per Æmil. Constit. ; Epiph., Hœres., 30 et Hœres., 70, §§ 11 et 12.
2 Ces divergences cessèrent au VIme siècle, lorsque Denys-le-Petit eut fait adopter à Rome un cycle qui concordait avec celui de l’Eglise d’Alexandrie pour déterminer le jour de la Pâque. Les Eglises d’Orient et d’Occident