Salut! Disons que c'est un peu plus compliqué que cela. La prière du cœur, qu'on appelle aussi la prière de Jésus, est un cran au-dessus des psaumes. Elle est avant tout dans l'esprit des psaumes, mais en tant que "concentré", si l'on peut dire: de fait, elle a l'avantage d'aller à l'essentiel tout en accomplissant l'attente des psaumes. En ce sens pour les Pères, elle apporte beaucoup de grâce, plus même que la psalmodie, parce qu'elle est liée étroitement à l'humilité et à la conscience des péchés.Béréen a écrit :Salut totocapt,
Donc si je comprends bien, l'église orthodoxe récite en quelque sorte encore toujours les psaumes ou font des prières basés sur les psaumes?
Ainsi, Saint Grégoire le Sinaïte dit que la psalmodie est pour les moines pratiques et les commençants, alors que la prière du cœur est pour ceux qui ont goûté la grâce divine, pour les hésychastes: "... Toi, ne psalmodie pas trop souvent, car c'est une confusion... Car psalmodier beaucoup est le propre des pratiques, à cause de leur ignorance et de leur labeur, non le propre des hésychastes, qui se contentent de prier Dieu seul en leur cœur et de s'abstenir des pensées ... Selon les Pères, celui qui a goûté à la grâce doit psalmodier avec mesure et s'occuper surtout à la prière. Celui qui est négligent doit psalmodier et lire les pratiques des Pères ..." [un moine pratique s'occupent de tout ce qui est actif et laborieux dans le domaine spirituel, au contraire d'un moine dit théorique. Du grec praxis: action]
Pour comprendre cet arrière-plan de pensée, il faut voir la méfiance du renonçant: avec la psalmodie peut venir la confusion, car l'égoïsme et l'orgueil s'introduisent à cause d'une belle voix, à cause de l'impression produite sur les autres, alors que si le fidèle dans sa cellule dit: "aie pitié de moi", il n'y a aucune extériorisation, et pas de cause d'orgueil...
Dans cet accomplissement de l'esprit des psaumes, il faut dire aussi qu'on peut y lire que la grâce de Dieu passe de l'âme dans le corps et que celui-ci ressent l'activité de la vivifiante grâce divine: "... Mon âme soupire et languit après les parvis de Yahvé, mon cœur et ma chair crient de joie vers le Dieu vivant ..." (psaume 84v3). Et cela dépasse notre conditionnement biologique: "... Je dors, mais mon cœur veille ..." (Cantique des cantiques 5v2). Cela est pleinement abouti avec la prière du cœur, car l'avant dernier stade de cheminement spirituel dans cette prière est justement le fait que la prière s'entretient d'elle-même, cependant que l'ascète travaille ou qu'il mange, parle ou se trouve dans le sanctuaire, ... ou même lorsqu'il dort, comme le relate Cantique 5v2. Là est la force de cette prière du cœur, car tout en étant dans l'esprit des psaumes, elle les accomplit et les transcende: quand on ne peut plus psalmodier, la prière a en effet toute sa place...