Tout ce que je connais maintenant du panthéisme est ceci.
Avant je n'en connaissais rien, ni même le mot:
Le panthéisme
(82.1) Question. - Comment les théosophes et les súfis comprennent-ils la question du panthéisme(a) ? Quelle est sa signification? Cette doctrine se rapproche-t-elle, ou non, de la vérité ? ( voir aussi: Renvoi 515)
(82.2) Réponse. - Sachez que la question du panthéisme est ancienne; elle n'est pas particulière aux théosophes et aux súfis. Au contraire, certains sages de la Grèce admettaient le panthéisme, tel Aristote qui dit : "La Vérité simple, c'est toutes les choses, et en même temps ce n'est rien." Et ici le simple est opposé au composé; c'est la Réalité isolée, qui est au-dessus de la composition et de la dispersion, et qui s'est résolue en formes innombrables. Donc, l'Existence réelle c'est toutes les choses mais non l'une d'entre elles.
(82.3) Bref, les adeptes du panthéisme admettent que l'Existence réelle est semblable à la mer, et que toutes les créatures sont semblables aux vagues; ces vagues, qui sont l'expression des créatures, sont les formes innombrables de l'Existence réelle. Donc, la Réalité sacrée est la Mer de l'Eternité, et les formes innombrables des créatures, les vagues qui se produisent.
(82.4) Egalement, on compare cette théorie à l'Unité réelle et aux nombres infinis; l'Unité réelle se réfléchit dans les degrés des nombres infinis, car les nombres sont la répétition de l'Unité réelle. Ainsi, le nombre deux est la répétition de un, et de même pour tous les autres nombres.
(82.5) Et parmi toutes leurs preuves se trouve celle-ci : à savoir que toutes les créatures sont les connaissances de Dieu; et une science sans connaissances n'existe pas, car la science se rapporte à ce qui existe, et non au néant. La pure non-existence, quelle spécification et quelle individualisation peut-elle avoir dans les degrés de la science?
(82.6) Donc, les réalités des créatures, qui sont les connaissances de Dieu le Très-Haut, ont l'existence qu'a la science(a), puisqu'elles sont la forme du savoir divin, et elles sont éternelles, puisque la science divine est éternelle. Et puisque la science est éternelle, les connaissances le sont également; et les individualisations et les spécifications des créatures, qui sont les connaissances éternelles de l'Essence de l'Unité, sont la science divine elle-même. Car les réalités de l'Essence de l'Unité, la science, et les connaissances, ont une unité absolue, véritable, établie. Autrement, l'Essence de l'Unité deviendrait le lieu de phénomènes multiples, et la multiplicité des Eternels deviendrait nécessaire, ce qui serait absurde.
(82.7) Il est donc établi que les connaissances sont la science même, et la science l'Essence même; c'est-à-dire que le Savant, la science et les connaissances sont une réalité unique. Et si nous imaginons quelque chose en dehors de tout cela, il faut revenir à la multiplicité des Eternels; on arrive à l'enchaînement(a), et les Eternels finissent par devenir infinis!
(82.8) Et comme l'individualisation et la spécification des créatures dans la science de Dieu étaient l'Essence même de l'Unité, et qu'il n'y avait parmi elles aucune sorte de différence, il n'y avait qu'une véritable unité, et toutes les connaissances étaient diffuses et incluses dans la réalité de l'Essence unique; c'est-à-dire que, selon le mode de la simplicité et de l'unité, elles étaient les connaissances de Dieu le Très-Haut et l'Essence même de la Réalité.
(82.9) Et lorsque Dieu manifesta son éclat, ces individualisations et ces spécifications des créatures, qui avaient une existence virtuelle, c'est-à-dire qui étaient la forme de la science divine, trouvèrent leur existence substantielle dans le monde extérieur; et cette Existence réelle se résolut en formes infinies. Tel est le principe de leur démonstration.
(82.10) Les théosophes et les súfis se divisent en deux branches. L'une, composée de la masse qui, simplement, par esprit d'imitation, admet le panthéisme, sans comprendre l'intention de ses docteurs respectés; car la masse des súfis croit que la signification de l'Existence, c'est l'existence d'une façon générale, prise substantivement, et qui est comprise par l'intelligence et l'esprit de tous : c'est-à-dire que l'homme la comprend.
(82.11) Au lieu de cela, cette existence générale est un accident de la nature de ceux qui pénètrent la réalité des créatures; et les qualités des créatures sont la substance. Et cette existence accidentelle, qui dépend des créatures, ressemble aux propriétés des choses qui dépendent d'elles. C'est un d'entre les accidents, et certes ce qui est la substance est supérieur à ce qui est l'accident.
(82.12) Car la substance est le principe et l'accident la conséquence; la substance dépend d'elle-même, et l'accident dépend de quelque chose d'autre, c'est-à-dire a besoin d'une substance dont il dépende. Autrement, Dieu serait la conséquence de la créature, Il aurait besoin d'elle, et celle-ci serait indépendante de Lui!
(82.13) Par exemple, chaque fois que les éléments isolés se combinent conformément à l'ordre universel divin, une créature d'entre les créatures vient au monde. C'est-à-dire que, lorsque certains éléments se combinent, cette combinaison produit une existence végétale; lorsque d'autres se combinent, c'est un animal; d'autres encore, et ce sont différentes créatures. Dans ce cas, l'existence des choses est la conséquence de leur réalité.
(82.14) Comment se pourrait-il que cette existence, qui est un accident d'entre les accidents et nécessite une autre essence dont elle dépende puisse être l'Essence éternelle, l'Auteur de toutes choses ?
(82.15) Mais les docteurs initiés des théosophes et des súfis, qui ont étudié cette question, pensent qu'il y a deux catégories d'existences.
(82.16) L'une est l'existence générale, qui est comprise de l'intelligence humaine : c'est un phénomène, un accident d'entre les accidents dont la réalité des choses est la substance. Mais le panthéisme ne s'applique pas a cette existence générale et qu'on imagine, mais bien à l'Existence véritable, affranchie de toute interprétation. Et c'est par elle que toutes choses existent; et c'est elle l'unité, c'est-à-dire l'Unité réelle, par laquelle toutes choses sont venues au monde, telles la matière, l'énergie et cette existence générale qui est comprise par l'intelligence humaine. Telle est la vérité sur cette question, selon les théosophes et les súfis.
(82.17) ' Bref, sur cette théorie que c'est par l'Unité que toutes les choses existent, tout le monde est d'accord, c'est-à-dire les philosophes comme les prophètes. Mais il y a entre eux une différence; c'est que les prophètes disent que la science de Dieu n'a pas besoin de l'existence des créatures, tandis que la science de la créature a besoin de l'existence des connaissances.
(82.18) Si la science de Dieu avait besoin de quelque autre chose, elle serait la science de la créature, et non celle de Dieu. Car l'éternel est différent du phénoménal, et le phénoménal est le contraire de l'éternel; ce que nous attribuons à la créature, à savoir les contingences nécessaires, nous le nions pour Dieu; car le fait d'être au-dessus des imperfections est une de ses propriétés nécessaires.
(82.19) Ainsi, dans le phénoménal, nous voyons l'ignorance, dans l'Eternel nous reconnaissons la science; dans le phénoménal, nous voyons l'impuissance, dans l'Eternel nous reconnaissons la force; dans le phénoménal, nous voyons la pauvreté, dans l'Eternel, nous reconnaissons la richesse. Ainsi, le phénoménal est le principe des imperfections, et l'Eternel est la réunion des perfections.
(82.20) Comme la science phénoménale a besoin de l'existence des connaissances, la science éternelle est indépendante de leur existence. Aussi l'éternité de la spécification et de l'individualisation des créatures, qui sont les connaissances de Dieu le Très-Haut, n'existe pas.
(82.21) Ces attributs divins et parfaits ne sont pas assez bien compris par l'intelligence, pour que nous décidions si la science divine a besoin des connaissances ou non.
(82.22) Bref, voilà l'argument suprême des súfis; et si nous voulions mentionner leur argumentation complète et expliquer les réponses qu'ils font aux objections, cela traînerait beaucoup en longueur. Tels étaient leur preuve décisive et leur argument évident, du moins ceux des docteurs instruits, parmi les súfis et les théosophes.
(82.23) Mais la question de l'Existence réelle, par laquelle toutes choses existent, c'est-à-dire la réalité de l'Essence de l'Unité, par qui toutes les créatures sont venues au monde, tout le monde l'admet.
(82.24) La différence réside en ce que les súfis disent : "La réalité des choses est la manifestation de l'Unité réelle." Et les prophètes disent : "Elle émane de l'Unité réelle." Et grande est la différence entre la manifestation et l'émanation!
(82.25) L'apparition par manifestation signifie qu'une chose unique apparaît dans des formes infinies. Par exemple la graine, qui est une chose unique, possédant les perfections végétatives, lorsqu'elle se manifeste en formes infinies, se résout en branches, en fleurs et en fruits; on appelle cela l'apparition par manifestation.
(82.26) Quant à l'apparition par émanation, c'est lorsqu'elle cette Unité réelle demeure et subsiste dans les hauteurs de la sainteté; l'existence des créatures est émanée d'elle, mais ne la manifeste pas.
(82.27) On peut la comparer au soleil, dont émane la lumière qui se répand sur toutes les créatures; mais lui, il demeure dans les hauteurs de sa sainteté; il n'y a pas pour lui de descente, et il ne se résout pas en formes lumineuses; il n'apparaît pas dans la substance des choses par la spécification et l'individualisation des choses, l'éternel ne devient pas le phénoménal, la richesse indépendante ne devient pas la pauvreté enchaînée, la pure perfection ne devient pas l'imperfection même!
(82.28) En résumé les súfis admettent Dieu et la créature; ils disent que Dieu s'est résolu dans les formes infinies des créatures, qu'Il s'est manifesté comme la mer qui apparaît dans les formes infinies des vagues; ces vagues phénoménales imparfaites sont identiques à la Mer éternelle qui est la somme de toutes les perfections divines!
(82.29) Les prophètes, au contraire, croient qu'il y a le monde de Dieu, le monde du royaume et le monde de la création, trois mondes.
(82.30) La première émanation de Dieu, qui est la bonté du royaume, se reflète, sur la réalité des créatures, comme la lumière qui émane du soleil et resplendit sur les créatures; et cette bonté, qui est la lumière, resplendit en formes infinies sur les réalités de toutes les choses et se spécifie et s'individualise suivant l'aptitude, le mérite et la valeur intrinsèque de chacune d'elles.
(82.31) La théorie des súfis exige au contraire que la Richesse indépendante descende au degré de la pauvreté, que l'Eternel s'enchaîne dans les formes phénoménales, et que la pure Puissance soit limitée sous la forme de faiblesse, selon les bornes des contingences! Et cela est une erreur évidente!
(82.32) Remarquons que la réalité de l'homme, qui est la plus noble des créatures, ne descend pas à la réalité de l'animal; l'essence de l'animal, qui est douée des facultés sensorielles, ne s'abaisse pas au degré du végétal; et la réalité du végétal, qui est ce pouvoir de croissance, ne s'arrête pas dans la réalité du minéral.
(82.33) Bref, la réalité supérieure ne descend ni ne s'abaisse dans les degrés inférieurs; comment se pourrait-il que la réalité universelle de Dieu, qui est affranchie de toute description et de toute qualification, malgré sa sainteté et sa pureté absolues, se résolve dans les formes des réalités des créatures qui sont la source des imperfections ? C'est une pure imagination qu'on ne peut comprendre!
(82.34) Au contraire, cette Essence sainte est la somme des perfections divines et célestes; toutes les créatures sont favorisées par les bienfaits du rayonnement par émanation, et elles reçoivent les lumières de perfection et de beauté de son royaume.
(82.35) De même, toutes les créatures terrestres obtiennent le bienfait de la lumière des rayons du soleil, tandis que ce dernier ne descend pas et ne s'abaisse pas dans Les réalités favorisées des existences terrestres!
(82.36) Après le dîner, et vu l'heure tardive, il n'y a pas lieu d'en dire davantage
http://www.religare.org/epub/ba/ba-leco.pdf