réponse à muslim (entretemps nadiral a envoyé un mess...) :
Ouh là ça commence mal

Nietzsche remettait tout en cause donc oui il était Athée évidemment ...
La lecture de ce philosophe apprendrait pas mal de choses à beaucoup. Je vous le conseil, aux athées d'abord, mais aussi aux croyants, car ses écrits seront un excellent moyen de tester leur foi à cause des remises aux questions fondamentales que ce philosophe apporte...
Depuis que je suis sur ce forum j'ai vu beaucoup d'excellents argumenteurs en faveur de la foi (qui l'ont bien étudié), mais finalement assez peu d'athées bien informés...
Je ne dis pas que toute l'oeuvre de Nietzsche est à prendre comme parole d'évangile (justement

), je ne suis d'ailleurs pas d'accord avec ses positions les plus extrêmes, même si pour moi il est un des penseurs modernes le plus intéressant et qui me correspond le mieux.
Chacun tirera de lui ce qu'il veut, mais je suis persuadé qu'il enrichirait les réflexions de millions de gens qui se balladent tranquillement avec leurs convictions illusoires et qui en plus se permettent de donner des leçons de vie...
J'avais déjà exprimé mon point de vue dans le sujet AMEN, mais apparement les gens n'avaient pas l'air interressés par mon avis... Je rajoute donc maintenant l'avis de Nietzsche - qui est à 90/100 le mien - pour vous faire réfléchir. J'espère que les gens prendont la peine de le faire, et j'attends vos réactions avec impatience...
Je vais essayer d'être clair.
Nietzsche, comme je l'ai dit, pense qu'il faut abolir la métaphysique idéaliste et dualiste, donc qui oppose deux ordres de réalité (dualisme) et qui valorise massivement la réalité non physique, immatérielle, intangible, éternelle (c'est l'idéalisme).
La forme d'existence basée sur cette métaphysique est logiquement centrée sur le connaître intellectuel et va de pair avec une morale: la vie cognitive, contemplative, qui est pour le croyant la vie la plus vertueuse et mène à la connaissance de la Vérité qui est le Bien Suprême.
Nietzsche croit que le dualisme est indissociable d'une valorisation; c'est à dire d'une hiérarchie. Toute la philosophie occidentale tiendrait ainsi en une suite de couples conceptuels hiérarchisés: vrai/faux, réel/fictif, âme/corps, spirituel/matériel, être/néant etc..
C'est cette structure hiérarchisée - qui refoule le monde sensible au profit des arrières-mondes illusoires - qu'il faut abolir. Mais on ne peut pas pour autant opérer un retournement simple qui mènerait alors vers un matérialisme obtu qui nierait toute vitalité créatrice au profit d'une mortelle certitude rassurante.
Le matérialisme n'échappe pas à la métaphysique dans la mesure où il reste une théorie prétendant à la Vérité.
Nietzsche prône le renoncement à toute hiérarchie stable, à toute interprétation définitive; il prône l'affirmation de la multiplicité ouverte des valeurs, du corps et de l'esprit, de tous les opposés...
Le nihilisme traditionnel (évoqué précédemment) associé à la philosophie occidentale, et spécialement à l'idéalisme platonicien, a trouvé avec le christiannisme un allié de choix.
La crise des valeurs (qui monte fortement au 19e siècle) et la destruction du dualisme métaphysique sont libératrices autant qu'angoissantes.
->Angoissantes: elles suppriment tous les points de repère et les significations stables traditionnels, ne laissant que le vide du non-sens et l'anarchie des principes, et révélant le néant là où on placait l'être (Dieu, la Vérité, le Bien).
->Libératrices:
elles secouent les hiérarchies et les dogmes figés, sclérosés, étouffant la vie, la création et l'évolution. La destruction des vieilles valeurs et des anciens tabous est donc aussi joyeusement iconoclaste, acte prospectif qui rend possible de nouvelles créations, l'invention de valeurs inouïes, la découverte d'autres interprétations de la vie, du monde et de l'homme.
On en arrive à des trois convictions essentielles de Nietzsche:
1:la volonté de puissance
2:l'Eternel Retour du Même
3:Le Surhomme et la création artistique
1: la volonté de puissance:
C'est l'affirmation du primat radical de la volonté et de la liberté sur la raison (on la voit tous les jours dans le monde...). La puissance est à comprendre comme force (luttes incessantes pour dominer l'autre) et comme potentialité (le monde a un réservoir infini de virtualités qui cherchent à s'actualiser, à s'exprimer). Un tel univers n'est pas fait pour l'homme (même si c'est lui qui le provoque en majorité...).
Ce n'est qu'en imaginant, créant et détruisant aussi que l'homme peut être dans le mouvement de la volonté de puissance. Pour Nietzsche, l'artiste incarne une telle existence.
Le religieux, le philosophe et le savant sont incapables d'assumer le tragique de la volonté de puissance et de la vie, car ils sont toujours en quête anxieuse d'une identité définitive et d'un fond qui ne se dérobe pas.
Nietzsche ne se rendait pas totalement compte de la dynamique concrètement créatrice - la créativité techno-physique - de la science contemporaine. Mais la n'est pas la question.
En poête et en herméneuticien (art et science de l'interprétation du monde), Nietzsche pousse à un dépassement inlassable et polymorphe, sans fixation sur ce que l'on a conquis ou inventé. Le devenir créateur est infiniment multiple et délivré de toute finalité eschatologique (en recherche d'Absolu) unique et exclusive.
2: L'Eternel Retour du Même:
Si le temps est infini, on peut estimer que tout reviendra un nombre infini de fois. Chaque instant est comme éternel et chaque acte aussi. L'individu assez fort pour supporter cette idée n'a plus aucune raison de regretter d'avoir fait ou de ne pas avoir fait telle chose, car c'est depuis une éternité et pour l'éternité que cela a été, est, et sera accompli. Accédant à ce niveau de conscience, l'individu coïncide avec la volonté de puissance et avec l'infinité du devenir. Un tel homme est "surhumain" selon Nietzsche. Attention: d'une certaine manière, Nietzsche renoue avec l'Eternité et une forme de Vérité.
3: Le surhomme et la création artistique:
Le "surhomme" (finalement peut importe le nom qu'on lui donne) de Nietzsche est l'homme du nihilisme affirmatif, celui qui a rompu avec l'angoisse mortifère de la religion et de la métaphysique. Il est l'individu capable de penser et de vivre le mouvement incessant et multiple de la volonté de puissance. De penser et de vivre en créateur, en poête, en danseur, en artiste. Il est seul assez fort pour pour comprendre et accepter la terrible vérité de l'Eternel Retour du Même. Cette pensée de l'Eternel Retour du Même est opposée à l'utopisme tecnoscientifique qu'alimente le rêve d'une refonte totale de la condition humaine.
Ce rêve ne trouve-t-il pas son origine dans l'angoisse et la faiblesse de la vie incapable de se supporter et de se vouloir jusque dans sa souffrance?
Pour Nietzsche, la seule réponse forte à la condition humaine est la création artistique qui sublime l'existence humaine, la dépasse et la métamorphose symboliquement, se nourrissant au tragique de la vie au lieu de tenter de le nier.
"Nous avons l'art afin de ne pas mourir de la vérité" (Nietzsche, oeuvres posthumes)
Etant un artiste moi-même, je suis d'accord avec cette vision du monde, qui est sans doute inacceptable pour les croyants, et pourtant si criante de vérité que ça pince le coeur de penser que si peu de gens s'en rendent compte. Même si je crois, à la différence de Nietzsche,
que le progrès scientifique peut améliorer la condition humaine, je partage son avis sur la réalité de l'Univers qui est le nôtre, tellement complexe et insensé que l'homme doit s'inventer une religion et adhérer à une infinité de préceptes pour l'accepter et avancer en lui.
Je vous comprends les croyants (moi aussi je l'ai été), mais jamais vous ne me ferez croire à vos illusions, je préfère regarder la réalité en face et me faire ma propre opinion du monde. Nietzsche m'y a aidé, et m'a aidé à mettre des mots sur ce que je ressentais depuis longtemps, et je lui en suis pour toujours reconnaissant.
J'espère que vous avez suivi...

en tout cas faites moi confiance relisez bien...
J'attends vos réactions et éventuelles questions d'éclaircissement.
Merci.