Algérie histoire

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yacoub

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Re: Algérie histoire

Ecrit le 04 févr.17, 04:46

Message par yacoub »

Affaires religieuses/ Les imams appelés à investir les réseaux sociaux
Société, Une février 1, 2017 Abdou Semmar

Le ministre des Affaires religieuses et des Wakfs, Mohamed Aïssa, a appelé, hier mardi, depuis la wilaya de Msila, les imams à l’utilisation massive des réseaux sociaux pour encadrer les jeunes et faire face aux publications préjudiciables au référent religieux national.

Le but d’un tel appel est, selon le ministre en charge du département des Affaires religieuses, de «consolider le lien avec les jeunes, transmettre les messages de la mosquée conformément aux références religieuses nationales et de lutter contre le phénomène sectaire». Le même responsable a ajouté que la création de 42 000 comptes sur Facebook, Twitter et Instagram permettra aux imams de s’imposer comme un «outil de pression» pour demander aux administrateurs de ces réseaux sociaux de supprimer toutes les publications portant atteinte à l’islam.

Cependant, M. Aïssa a tenu à rassurer que la défense du référent religieux national ne peut se faire au détriment de la liberté d’expression et la liberté de conscience. «L’État veille à ce que ces droits consacrés par la Constitution soient appliqués dans les règles, pour ne pas semer la pagaille», a-t-il souligné.

Massi M.
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yacoub

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Re: Algérie histoire

Ecrit le 07 févr.17, 03:32

Message par yacoub »

Kamel Daoud : « Nous sommes des sacs vides »

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Kamel Daoud publie cette semaine son nouveau recueil de chroniques, « Mes indépendances ». L’auteur de Meursault-contre enquête propose aux lecteurs plus d’une centaine de chroniques publiées dans différents journaux en Algérie et à l’étranger. Il sera présent dans l’après-midi du samedi 11 février à la librairie du Tiers Monde pour une vente-dédicace.

Dans cet entretien, le premier depuis sa chronique sur Cologne, l’écrivain revient longuement sur les polémiques suscitées par ses textes.
Comment est née l’idée de republier ces chroniques ?

Beaucoup de lecteurs collectionnaient mes chroniques. Et beaucoup d’entre eux me l’ont demandé. J’ai voulu aussi donner une idée aux lecteurs sur mes positions et sur ce que je pense depuis des années et non seulement depuis la parution de Meursault, contre enquête.
Pourquoi Mes indépendances ?

L’idée vient de la dernière chronique écrite dans Le Quotidien d’Oran en mars dernier après la polémique sur mon texte au sujet de ce qui s’est passé en Cologne (agression de femmes à la gare de Cologne notamment par des Maghrébins à la fin de l’année 2015, NDLR). Et cette chronique finissait sur cette phrase : « Je mène moi aussi mes guerres de libération et il m’arrive, moi aussi, de fêter mes indépendances. »
Dans ce recueil, vous republiez justement cette chronique sur Cologne qui a suscité une grande polémique. Vous ne regrettez pas donc ce texte ?

Absolument pas ! On regrette un crime, une erreur, un dépassement, une glissade. On ne peut pas regretter un constat sur ce que tout le monde vit et sur ce que toutes les femmes dans le monde dit arabe vivent et subissent.

En réalité, j’ai l’habitude des chroniques qui font la polémique. Cela ne date pas d’aujourd’hui. J’ai cette habitude d’écrire sur des sujets qui provoquent beaucoup de passions mais qui nous font réfléchir en urgence. C’est maintenant qu’il faut réfléchir là-dessus au lieu d’être dans le déni et dans le refus de réfléchir sur les sujets les plus douloureux. Une chronique publiée dans le New York Times a fait beaucoup de bruit. Sauf que pour nous, Algériens, le reste du monde, c’est la France. C’est-à-dire que tant que vous écriviez dans les journaux américains, allemands, italiens, vous pouvez dire ce que vous voulez. Cela n’impactera pas de la même manière. Dès que vous l’écrivez dans un journal ou vous le dites sur un plateau de télévision en France, cela prend une proportion assez grande.

J’avais publié l’article sur Cologne dans un journal italien. Il a été repris par d’autres journaux italiens, puis par un journal suisse-allemand, puis par un journal allemand, puis par un journal anglais avant que Le Monde ne l’achète et le publie. Bien sûr, ça n’a pas provoqué les mêmes réactions. Cela en dit plus sur le désordre idéologique en France et en Algérie que sur moi-même. Dans cet article, je dis que nous avions une douleur à vivre la féminité et la femme. Je dis également que l’Occidental doit assumer sa position au lieu de se débarrasser de la question mondiale des réfugiés. Les gens n’ont voulu lire que ce qu’ils avaient en tête. Seule la première partie du texte a été lue, commentée et sur-commentée. Personne n’a parlé de la deuxième partie du texte. Cela est très révélateur sur l’état du lecteur actuel et sur l’état des familles idéologiques dans le monde que sur ce que j’écris moi-même.
La polémique est-elle due seulement au fait que le texte soit repris par un journal français ?

Nous avons avec la France une relation très particulière comme tout le monde le sait. Une relation de passion, de haine, de rejet et d’acceptation. Un diplomate espagnol m’avait dit un jour : « Ce qui est extraordinaire chez vous en Algérie, c’est que vous voyez le reste de l’Occident à travers la France« . En 2014, je n’ai été attaqué par les islamistes que parce que je suis passé dans l’émission (de France 2) « On n’est pas couché ». Ce que j’y ai dit est banal par rapport à ce que j’écris depuis 19 ans. Mais en 19 ans, ils n’ont rien dit car ils n’ont rien lu, rien compris et donc rien commenté. Je pense que les (réactions) se sont démultipliées parce que l’article a été publié par un journal français.
Il n’y a pas que des Algériens qui vous ont critiqué. Dans une tribune publiée dans Le Monde, des universitaires estimaient que vous définissez plus d’un milliard de personnes par leur seul rapport à la religion, le sexe et la femme…

Premièrement, je pense que les 19 signataires ne sont pas les représentants des un milliard de musulmans. J’ai trouvé assez méprisable cette logique de procès et de meute pour commenter, à partir de son statut d’universitaire, un avis d’écrivain. Beaucoup d’écrivains ont des avis sur tout mais cela ne veut pas dire qu’ils ont des avis de spécialistes. On est écrivain et on commente le monde et sa propre époque. Je n’ai pas aimé la personnalisation de l’attaque. Quel droit ont des universitaires qui vivent dans le confort et la sécurité de l’Occident, toute relative maintenant, de juger que je suis un humaniste autoproclamé, que je représente une minorité ? Contrairement à ce que disent beaucoup de gens, je vis en Algérie dans ce monde dit arabe et musulman et je vois ce que vivent nos femmes, nos mères, nos filles, nos sœurs. Il ne faut pas se mentir. Le statut de la femme n’est pas réjouissant. J’estime que quelqu’un qui vit en Occident n’a pas le droit de commenter ce que je dis sur ce monde. Je ne suis pas une recherche universitaire, je ne suis pas une théorie, mais un corps, un être vivant qui mise sa vie et son corps dans ce monde-là.

Deuxièmement, je ne suis pas un universitaire pour qu’on me se mette à 19 pour me répondre, j’ai trouvé cette logique de procès assez dangereuse parce qu’elle cautionne un peu les discours conservateurs et islamistes chez nous.

Troisièmement, je n’ai pas essentialiser. J’ai dit que nous avons un problème avec autrui et avec la femme. Et cela tout le monde le constate. En même temps, j’ai rappelé que l’Occidental a un problème avec sa propre conscience. En réalité, ces universitaires, qui plus au moins voudraient représenter la gauche universitaire, ont surtout un rapport malaisé et douloureux vis-à-vis de l’Occident. Quand quelqu’un vient de mon monde, de notre monde à nous, mais qui ne soutient pas leurs discours de revendications face à l’Occident, ils se sentent trahis peut-être.

Dans leur texte, j’ai lu beaucoup plus une réaction passionnelle que réfléchie. J’ai eu l’impression que ces représentants de la gauche en Europe me disent : « Toi l’indigène, tu te tais. Nous parlons mieux de tes intérêts que toi. Donc ne fais pas le jeu de la droite« . À vrai dire, je n’ai à faire ni le jeu de la droite en Occident, ni celui de la gauche d’ailleurs. Je suis un Algérien et je suis libre de constater, de témoigner de mon époque et d’écrire ce que je veux. Je n’ai de leçon à recevoir de quiconque.
Ces universitaires n’ont pas donc le droit de commenter ce que vous dites ?

J’ai trouvé assez osé le fait de porter des jugements sur nos réalités à partir d’une autre géographie. Mais je ne veux pas qu’on accorde plus d’importance à cette affaire. Sur le fond, est-ce qu’on peut réduire le monde dit arabo-musulman au seul rapport à la religion, le sexe, la femme ? Non ! C’est eux qui ont eu une lecture réductrice. Ils n’ont voulu lire et retenir du texte que ce qu’ils les provoquaient. À 19, ils ont réagi à un seul de mes textes. Je trouve cela assez extraordinaire et révélateur. Évidemment, je ne dis pas que nous sommes des frustrations ambulantes. Je dis que dans le monde dit arabe et musulman, nous avons un problème majeur avec la sexualité et la femme. Et là, je défie quiconque qui vit dans notre monde de me prouver le contraire.

Quand j’ai publié le texte sur Cologne, beaucoup me disaient : « C’est vrai mais le souci est qu’il ne fallait pas l’écrire« . Là on a déplacé le débat vers autre chose. Notre relation à la femme conditionne notre relation au monde et au désir du monde, à l’imaginaire, à l’art, la culture, la paix et la sérénité. Nous ne pouvons pas vivre avec tranquillité si nous vivons un rapport malaisé à la femme.

Dans une chronique publiée dans un journal algérien, j’avais écrit que moi personnellement, je juge de la santé et de la civilisation des peuples par rapport à leur rapport aux femmes. Quand je vois un peuple mépriser ses propres femmes, mépriser celle qui lui donne la vie, je pense qu’il se méprise lui-même et je ne peux pas le respecter.
Le peuple algérien méprise ses propres femmes ?

Pas tous les Algériens, mais une grande majorité.
Certains vous ont accusé de servir, à travers cette chronique, l’extrême droite…

C’est un vieux procès. Est-que ceux qui dénonçaient les goulags du communisme dans les années 1940 et 1950 étaient des impérialistes ? Est-ce qu’il fallait se taire au nom de l’anti-impérialisme et ne rien dire sur les massacres de Staline ? Je pense que la position éthique, celle des gens comme nous et des journalistes, c’est d’être témoins honnêtes de leur époque et de dire ce qui s’y passe et non pas de faire des cachotteries par rapport à la mémoire collective au nom des calculs idéologiques. Je ne l’accepte pas. Personnellement, je suis responsable de ce que j’écris et pas de ce que les autres interprètent. Il se trouve que nous vivons une époque nouvelle où il y a une internationalisation des textes. Aujourd’hui, l’écrivant, l’écrivain ou le journaliste, peut écrire un texte en réagissant par rapport à son monde, son histoire, au traumatisme de son époque, de sa génération. Sauf qu’avec Internet, il y a une internationalisation rapide et une dé-contextualisation rapide de tous les textes. Vous ne contrôlez pas les textes et les lectures.

Donc vous avez deux choix : soit vous vous taisez et vous n’écrivez plus parce que vous avez peur d’être sur-interprété ou bien vous continuez à faire preuve de bonne foi et à témoigner de votre époque. C’est-à-dire à faire votre boulot et à dénoncer et assumer vos responsabilités. En tant qu’Algériens, nous réagissons différemment à l’islamisme par rapport à beaucoup d’autres pays qui n’ont pas subi notre guerre, notre trauma, nos massacres. Notre façon de percevoir l’idéologie islamiste par exemple ne ressemble pas à celle d’un Suisse.

Maintenant si le même texte est repris en Algérie et ailleurs, il n’a plus le même sens et la même signification. Je ne sers que ma vision du monde et ma logique du Salut. Les gens sont responsables de ce qu’ils lisent et je suis responsable de ce que j’écris par rapport à ce que j’ai subi, aimé. Cela étant dit, nous nous réagissons plus en Algérie généralement au texte, aux idées du texte mais à la personne. Depuis 19 ans, les gens appréciaient ou rejetaient ce que j’écrivais mais sans violence. Dès que cela a été hyper-médiatisé dans le reste du monde, on réagit par une sorte de procès de traîtrise permanent.

Pour les islamistes, quoi que tu dises, tu es kafer. La version laïque du « takfir » est le harkisme. Quoi que tu dises, tu travailles et tu sers les intérêts de la France. C’est extraordinaire cette fatwa laïque. On est toujours dans la bleuite ancienne.
Comment expliquez-vous cela ?

En Algérie, je pense que nous avons perdu l’habitude du débat pour verser dans l’habitude de la polémique. Nous vivons dans une époque de perte de confiance dans les personnes, les institutions et les élites. Est-ce que vous avez remarqué que tout débat sur l’histoire finit par un débat sur les harkis en Algérie ? Tout finit par un jugement binaire : soit vous êtes harki, soit vous ne l’êtes pas. On n’arrive pas à concevoir la différence, le débat, l’échange d’idées. Dès que vous avez un avis différent par rapport à un groupe, vous êtes qualifié de traître, de pro-sioniste, de harki. Je pense que nous avons à guérir l’esprit algérien pour qu’il accepte les différences. Et je pense que le plus grand drame de l’Algérien actuellement est ce que j’appelle « La maladie de l’unanimisme ». On voudrait être un, unanime avec une seule langue, un seul livre, une seule interprétation. Et cela constitue la nécrose d’une nation que de ne pas accepter les différences et de ne pas nourrir les débats.
L’Algérien souffre-t-il du complexe de colonisé ?

Ce n’est pas exactement un complexe de colonisé. On n’essaie pas de dépasser le trauma colonial pour assumer le présent. Tout pour nous est facilement et confortablement expliqué par le trauma colonial. Cela est assez frappant. On n’essaie pas d’aller au-delà pour assumer nos responsabilités. La colonisation a été un crime et cela est indéniable, on ne peut ni le cacher, ni l’ignorer. Mais tout expliquer par le trauma colonial est une attitude victimaire trop confortable qui permet de ne pas assumer nos responsabilités au présent.
Vous ne regrettez pas non plus la chronique « Pourquoi je ne suis pas solidaire de la Palestine » ?

Absolument pas. Quand je rencontre des Palestiniens très engagés à Paris qui me disent qu’ils ont apprécié la chronique parce qu’ils l’ont comprise, je pense que c’est une récompense magnifique. Je n’ai pas parlé de la Palestine mais de l’orthodoxie du sentiment pro-palestinien qui est devenu un fond de commerce. C’est-à-dire qu’au fond, on en a cure de ce que subissent les Palestiniens, c’est juste qu’il faut qu’on entretienne cette forme d’engagement qui est totalement passif, paralysé et inutile. Qu’est-ce que j’ai dit dans ce texte ? J’avais remarqué que nous avons porté un grand coup à la cause palestinienne en l’arabisant et en l’islamisant alors qu’il s’agit d’une cause universelle dont tout le monde, tous les pays, toutes les élites de gauche et de droite, sont responsables. La réclamer à travers la religion ou l’arabité, c’est la déclasser. Cela mène le reste du monde à s’en décharger et se déresponsabiliser et cela est très néfaste pour provoquer une vraie solidarité et une responsabilité internationale.

Le texte était clair là aussi sauf que j’ai touché un affect qui rendait les gens aveugles. Je disais que si vous êtes solidaires au nom de la religion, la race, je ne suis pas solidaire. Si vous êtes solidaire au nom d’une cause juste de décolonisation dont tout le monde est responsable, là on rendra le meilleur service à la cause palestinienne. J’ai également appelé à un bilan du sentiment pro-palestinien. Cela sert à quoi d’être solidaire, de réclamer le djihad et la réconciliation et de rentrer chez soi par la suite ? Je pense que j’ai appelé à une position pragmatique et à une vraie solidarité au lieu d’une solidarité de folklore.

En dernier, je me suis demandé : comment veut-on me convaincre d’une solidarité humaine envers la victime palestinienne tout en étant insensible aux maux dans le M’zab et les voisins qui meurent ? J’avais rappelé que je ne suis pas pour la solidarité sélective. Dès qu’elle est sélective, elle se décrédibilise et perd de légitimité vis-à-vis du reste du monde. J’estime que je suis le témoin de mon époque, que mon père m’a appris à être honnête et que pour être honnête, il faut dire et répéter que la solidarité n’est pas de crier Allah Akbar, vive la Palestine avant de rentrer chez soi. C’est respecter la liberté chez soi, construire des pays forts et par la suite peser sur la décision internationale pour vraiment aider les Palestiniens.

J’aime bien la citation de Washington qui dit qu’un sac vide ne tient pas debout. Donc, nous sommes des sacs vides. Nous ne pouvons pas tenir debout ou aider les autres à se relever.
Vous avez gagné votre procès contre le prédicateur salafiste qui est derrière la fatwa contre vous. Est-ce que vous vous sentez en sécurité aujourd’hui en Algérie ?

Si je ne me sentais pas en sécurité, j’aurais quitté le pays. Ce n’est pas le cas. Ceci dit, il ne faut pas être totalement imprudent. En réalité, il ne s’agit pas d’une menace sur Kamel Daoud précisément mais une menace sur tout le monde. Moi qui vis dans ce pays et qui bénéficie de la sécurité dans ce pays, je n’ai pas le droit de me présenter comme menacé par rapport à la jeune fille kidnappée à Alep ou à la jeune lycéenne kidnappée et vendue par Boko Haram au Nigeria. J’éprouve de la honte de me mettre en avant en me réclamant le statut de menacé. Je ne suis ni plus ni moins menacé que tout le monde. C’est-à-dire que le simple touriste, celui qui traverse la route et qui soutient une idée, qu’une femme qui n’arrive pas à trouver un taxi à partir de 20 heures à Alger. Donc, j’estime que c’est une question dépassée. Je n’aime pas jouer au martyr. Je le refuse en Occident et en Algérie. Il faut continuer à vivre sa vie, à produire et à écrire au lieu de se promener comme étant un martyr vivant. Je n’aime pas ce statut-là.
Vous êtes satisfait du verdict du tribunal ?

Quand on arrive à ce sentiment d’insolence et d’impunité jusqu’au point d’appeler sur les plateaux de télévision à la mort de quelqu’un, c’est qu’il y a un grave problème qui se pose. En Algérie, nous avions eu des centaines de milliers de morts, des déplacés, une perte de temps et de sang, de la douleur pour arriver à ce qu’un salafiste autoproclamé appelle à la mort de quelqu’un et ne pas être mis en prison. Je ne suis pas satisfait. Mais il ne s’agit pas d’assouvir un désir personnel. Il s’agit de rappeler qu’il y a eu des morts en Algérie et que si les gens sont morts en Algérie, ce n’est pas pour que ces gens-là puissent se promener, ne pas saluer le drapeau national, de refuser de se lever pour l’hymne national et manifester dans les rues en toute impunité. Des gens sont morts pour que je puisse dire ce que je pense et pour que je puisse être libre.
Vous n’avez pas arrêté d’écrire dans les journaux finalement comme vous l’aviez annoncé auparavant…

Je travaille avec cinq journaux dans le monde. J’avais décidé d’arrêter pour garder le contrôle sur ma parole, mes positions et pour réfléchir un peu. Avec Le Point, il y avait un engagement par contrat. J’avais également continué juste par addition pour la chronique. Passer de deux, trois chroniques par jour à une seule par semaine, c’était par pur plaisir plutôt que par besoin d’affirmer une parole. J’avais également signé un contrat jusqu’à janvier avec le New York Times.
Meursault, contre enquête a eu beaucoup de succès. À quand le prochain roman ?

J’ai publié le recueil de chroniques parce qu’il y a eu beaucoup de gens qui le demandaient. Cela signifiait aussi la fin de l’époque de Kamel Daoud, chroniqueur. Mais le roman est en cours. Je suis dans ce qu’on appelle les finitions.
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Ecrit le 09 févr.17, 02:18

Message par yacoub »

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Re: Algérie histoire

Ecrit le 20 févr.17, 04:27

Message par yacoub »

Nouvelle loi anti-couple hétérosexuel en Algérie

En Algérie, vous avez maintenant besoin d’un livret de famille pour sortir avec votre femme. Si vous vous faites arrêter en couple – homme et femme - par la police ou la gendarmerie sans celui-ci, ils vous emmènent au commissariat et immédiatement vous forcent à en établir un. Et conséquemment, vous ressortez du commissariat comme mari et femme sans avoir dépensé un sous -si vous n’êtes pas encore marié. Je trouve que c’est une excellente loi qu’on devrait encourager par tous les moyens à la disposition de notre ignorance. Alors, j’invite tous nos jeunes qui pendant des années voulaient se marier, mais faute de moyens, ils sont encore célibataires à investir la rue avec leurs copines et fiancées pour un mariage gratuit et sans endettement. Déjà , pour vous marier légalement en Algérie, il vous faut :

- Des analyses médicales pour les deux conjoints (coût 3 500 Dinars)
- Des certificats de naissance pour chaque partie
- Deux témoins
- La somme de 700 Dinars pour les coûts administratifs
- Votre carte de groupe sanguin
- Un certificat de virginité pour la femme et un certificat d’activité sexuelle régulière pour l’homme.
- Un échantillon de sperme pour l’homme et des menstruations pour la femme.
- La taille du pénis pour l’homme – testicules non-incluses – le diamètre du vagin de la femme clitoris non-inclus.

Toute cette paperasse est balayée d’une seule nouvelle loi. On avait perdu tout espoir avec l’Algérie, mais notre gouvernement vient de nous prouver le contraire. Cette loi est non seulement libérale, mais libératrice mes chers compatriotes. Car si on vous arrête lorsque vous êtes accompagnés d’une femme, par contre, on ne vous appréhende pas lorsque vous êtes en compagnie d’un homme ou d’un jeune enfant qui n’est pas le vôtre. Alors, voyez-vous, nous sommes sur la bonne voie pour la légalisation de l’homosexualité et de la pédophilie.

One Two three…Viva l’Algerie mes bons amis !

Hmimi O’Vrahem

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Re: Algérie histoire

Ecrit le 22 févr.17, 04:14

Message par yacoub »

Entretien. Kamel Daoud : “Je mène une bataille contre une pensée unanimiste dominante”


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Le journaliste et écrivain algérien Kamel Daoud, le 14 avril 2016 à Paris. PHOTO / JOEL SAGET/ AFP.

Les islamistes, l’Occident ou le statut de la femme – les points de vue du journaliste et écrivain algérien Kamel Daoud déchaînent les passions et suscitent des réactions tranchées. À l’occasion de la sortie de son livre Mes indépendances, le quotidien algérien El-Watan l’a interviewé.
Nos services

Une année après la polémique née de la chronique sur “Cologne, lieu de fantasmes”, [Le Monde du 31 janvier 2016] vous signez un recueil de vos chroniques chez Barzakh sous le titre Mes indépendances. De quelles indépendances parlez-vous ?

Le titre est né d’une suggestion de mes éditeurs, extrait de la dernière phrase de la dernière chronique au Quotidien d’Oran, où j’avais écrit : “Il m’arrive à moi aussi de mener aussi mes guerres de libération et de fêter de temps à autre mes indépendances.” J’ai exprimé le souci d’être libre des pressions, des sollicitations. Le mot indépendance chez nous a toujours incarné un sens collectif et collectiviste. J’ai voulu restituer à ce mot sa charge individuelle.

Il ne s’agit plus de la libération d’un pays, mais de libertés individuelles. Je mène une bataille contre une pensée unanimiste dominante en Algérie d’abord, qui consiste à penser de la même façon, avoir les mêmes croyances, un anonymat collectiviste, un seul héros, le peuple, une culture qui nie le héros individuel. J’ai voulu marquer mon indépendance vis-à-vis des croyances collectivistes qui anonymisent et qui, au final, déresponsabilisent.

Mais pas uniquement au niveau local, j’ai voulu marquer mon indépendance vis-à-vis des sollicitations et des castings qu’on veut imposer à l’intellectuel du Sud, que l’on veut confiner dans la case dissident, militant en colère contre les siens, et qu’il soit impliqué dans le jeu et les clashs qui agitent l’Occident. Je n’ai pas à arbitrer, à m’immiscer ou être un intellectuel de soutien ou d’appoint dans ces clashs idéologiques, d’ailleurs, tout comme pour les anonymismes d’ici.

Meursault contre-enquête a eu un succès mondial ; vous attendiez-vous à un tel retentissement ?

C’est une surprise totale pour moi. Je n’ai jamais imaginé, envisagé ou anticipé que le roman allait dépasser les deux mille exemplaires. C’était totalement inattendu. Pour moi, c’était une variation sur l’échelle internationale. Une reprise de parole à partir du point de vue d’une victime, mais aussi un prétexte pour parler du présent algérien.

Une œuvre n’atteint pas une telle audience parce qu’elle parle d’une nation, mais quand elle parle de l’universel où le local n’est qu’un prétexte ; Haroun est un Algérien, mais ses amertumes sont universelles. Nous avons le droit d’être le centre du monde, d’écrire à partir et au nom de l’universel, réclamer notre humanité et non pas à partir du décolonisé ou du proscrit, de l’écrasé ou de la victime.

On peut être l’humanité et prendre la parole. Il y a des moments d’universalisme qui traversent les périphéries. L’Europe de l’Est, la Russie, l’Amérique latine, qui a connu son heure de gloire littéraire et intellectuelle. L’universalisme est partout et non pas là où on lui tourne le dos. Meursault… est une très belle expérience pour moi, qui a démontré que l’on peut écrire en Algérie, avoir du succès en France, mais surtout qui m’a fait découvrir que le reste du monde existe en dehors de l’Algérie et de la France.

Il y a eu ce succès phénoménal qui vous a propulsé au-devant de la scène littéraire internationale, mais vite suivi d’une violente polémique ; comment avez-vous vécu cela ?

Etre sous les feux des projecteurs et la surmédiatisation devait avoir une facture, elle provoque des passions positives et négatives. Des gens qui vous soutiennent, d’autres qui vous rejettent, ce qui est normal. Si vous vous intéressez au monde avec passion, le monde s’intéressera à vous avec la même passion.

Nous retenons seulement la polémique, surtout en Algérie, mais en réalité le reste du monde a lu Meursault… comme il a lu Camus à l’époque, sans considérer que l’Étranger est un roman pied-noir, mais de la condition humaine. Il y a eu des moments intenses de découvertes, de rencontres. Le lien avec mes lecteurs est passionnant et se renouvelle. Ce n’est pas parce que certains parlent à voix haute qu’ils sont plus nombreux que les autres. Il y a eu des moments heureux, des moments malheureux, des malentendus qui durent encore. La polémique fait partie du revers de la médaille. Mais, j’ai envie de dire “arrêtons d’être des commissaires politiques ambulants”.

Votre roman et tous les débats et polémiques qui l’ont accompagné reposent de manière violente le rapport entre le Nord et le Sud, notamment entre la France et l’Algérie…

Il s’agit de l’histoire, de notre incapacité à sortir du passé et à parler du présent. C’est le grand malentendu, d’autres veulent parler inlassablement du passé, et moi je veux parler du présent. Je suis l’enfant des indépendances. Je parle de liberté et j’ai le droit de vivre sans porter sur mon dos l’histoire coloniale et celle de la guerre de libération. On me reproche mon attitude vis-à-vis du culte de l’histoire. Je n’ai pas ce culte, je ne suis pas né dans cette guerre, je suis porteur de vie, je suis un enfant de l’indépendance.

Cela conditionne une lecture pathologique ici et en France. On n’arrive pas à sortir du soupçon. En règle générale, l’Histoire ne tolère pas l’imaginaire. Lorsqu’on écrit une fiction dans des mondes dominés par des totalitarismes de l’Histoire, on vous soupçonne d’avoir écrit un essai détourné. Il faut lire les romans pour ce qu’ils sont, pas des manifestes ou proclamations d’allégeance. Ce ne sont pas des livres codés, des complots écrits. Je ne suis pas dans la littérature de la guerre, mais de l’imaginaire, de l’art et de la création et du fantasme. Nous sommes effectivement marqués par cette histoire en Algérie et en France, et ça nous marque violemment. C’était le procès fait à Albert Camus.

Qu’est-ce qu’il voulait dire, que représente un tel personnage ? Lisons ses romans comme des romans et ses essais comme des essais. J’ai un énorme respect pour les martyrs, pour nos aînés, qui se sont battus pour que je sois libre, libre de dire, mais il nous faut sortir de l’Histoire pour assumer notre présent. Pour les honorer, nous devons exercer nos libertés. L’attitude victimaire généralisée qui prévaut chez nous, autant par mode chez les intellectuels dits de gauche, comme chez le régime politique, est une attitude de confort. C’est trop facile.

Dans sa préface, Sid Ahmed Semiane [jounaliste, écrivain, cinéaste et photographe connu en Algérie sous le sigle SAS] écrit que le succès quand il vient d’ailleurs est suspect…

De toute manière, tout ce qui nous vient d’ailleurs est suspect, parce que depuis toujours ce qui est venu d’ailleurs c’est le colonisateur, des occupants et des envahisseurs. Nous sommes xénophobes vis-à-vis des autres et de nous-mêmes. Nous sommes à la fois face à un Occident qui nous fascine, qui nous rejette, que nous rejetons. Tout ce qui est lié à cet Occident est frappé de soupçon. Mais nous devons admettre que l’Occident représente la civilisation. Elle n’est pas dans le désert de l’Afghanistan. Elle est à Paris, Londres, New York et Tokyo. Cet Occident nous a agressés, nous a colonisés, volés, dominés. Il est donc normal de voir en lui un suspect.

Mais, aujourd’hui, il est le dépositaire des valeurs. Les gens, quand ils ont peur ou se sentent menacés, persécutés, ne vont pas dans le désert d’Afghanistan, mais vers le Nord, parce qu’on y retrouve la sécurité, la liberté, le confort, le luxe, la valeur. Il ne faut cependant pas voir cet Occident seulement sous son aspect négatif. Il nous faut sortir de cette logique et arrêter de mettre tout sur le dos du colonisateur. C’est un piège qui nous enferme et qui nous empêche de réussir. On passe nos vacances chez eux, on publie chez eux, quand on est en disgrâce politique, on va chez eux. On se bat pour être ambassadeur chez eux, pour envoyer nos enfants chez eux, nous installer chez eux. Pourquoi ? Ils ont réussi quelque chose. Il faut reconnaître cela chez eux pour pouvoir le réussir chez nous.

Si on ne le fait pas et que nous continuons à dire que l’Occident c’est le mal et à lui courir derrière, on va à l’insulte collectivement et on le sollicite pour s’y soumettre individuellement. Je ne veux pas avoir un rapport malsain à l’Occident. Il n’est ni juste ni injuste, il est ce qu’il est, il n’est ni mon père ni ma mère. Je ne veux pas attendre de lui ni caresse ni héritage, je dois le regarder et voir en lui ce qui me dépasse pour pouvoir le dépasser. C’est un monstre splendide qu’il faut regarder dans les yeux pour pouvoir le dépasser.

Vous êtes célébré en Europe, à Paris… ; en Algérie, il y a eu plus de rejet, du moins chez les élites. Nul n’est prophète en son pays s’applique-t-il bien à votre cas ?

Il nous faut guérir de l’idée de la réussite et du succès. Vous imaginez que l’on vous reproche de courir derrière le succès. Nous en sommes là ! Une grave pathologie. Nous voyons le succès comme quelque chose de répréhensible. Le succès, c’est l’objectif du monde. Je ne comprends pas cette criminalisation du succès. Il faut restaurer chez nous l’idée du succès et de la réussite, que l’on soit fier de nos enfants. C’est légitime, c’est une plus-value pour le pays, l’expression de notre valeur et notre participation à l’humanité. Un modèle à offrir à nos enfants.

C’est comme le coureur d’Athènes qui court et parle en disant : “Tous les peuples applaudissent leurs coureurs et je suis le seul à courir pour encourager les miens pour qu’ils n’espèrent pas encore plus”. C’est une image frappante qui résume ce que nous sommes.

Le discours d’une certaine partie de nos élites participe à la fois du confort, de la frustration et de l’incapacité à sortir du victimaire, au refus de la liberté et de la singularité individuelle. Défendre l’individu dans un pays qui est né d’une guerre de libération collective, c’est trahir. La liberté individuelle est une valeur à restaurer, elle n’est pas une trahison.

Nous ne sommes pas le seul pays à avoir été colonisé. J’ai été au Vietnam et j’ai été frappé par cette distance qu’ils ont avec l’Histoire. Oui, nous avons été colonisés, massacrés, nous avons mené des guerres et nous les avons gagnées, mais quand ont leur demande si vous avez un ministère des Anciens combattants, ils vous disent non. Ils ne sont pourtant pas dans le déni. Nous avons un culte à corriger chez nous. Les racines ne se mangent pas, ça vous soutient contre les vents, mais il nous faut des récoltes.

Parlons des racines justement ; vous refusez qu’on vous enferme dans un monde dit arabe en vous définissant comme algérien. Qu’est-ce qu’être algérien ?

Etre ce que je suis, avec ma carte d’identité nationale algérienne, vivre ici ou ailleurs en emportant mon imaginaire, avoir des racines algériennes, une histoire algérienne et peut-être un malaise algérien et le mal d’être algérien. J’ai été saturé par cette idée que nous avons un malaise identitaire, je sais ce que je suis. L’arabité m’appartient, mais je ne lui appartiens pas. Nous sommes un pays qui n’a pas besoin d’être dans l’unanimisme, nous avons nos régions, nos langues, nos histoires, nos ancêtres.

Nos différences sont la source de nos enrichissements. Dire le Monde arabe me gêne, c’est une sous-catégorie de la vision orientaliste. Pourquoi le Français est français, l’Allemand est allemand et l’Algérien est arabe ? Cela me dérange. L’arabité est un beau patrimoine, mais je n’ai jamais vu de passeport arabe. J’ai vu des passeports différents, des Histoires différentes, des langues différentes, des combats différents…

Il y a des points communs autant qu’il y en a entre les Latins. Je ne veux pas et je ne peux pas accepter que l’arabité me soit imposée, ni comme nationalité ni comme matrimoine exclusif. L’arabité est un fabuleux héritage, j’y vais pour prendre ce qui enrichit mon présent, mais ce n’est ni ma nationalité, ni ma mère, ni mon père, ni ma terre. Je veux qu’on me reconnaisse comme algérien. Je ne suis pas dans le chauvinisme, je veux juste qu’on respecte ce que je suis.

Dans vos écrits, la question de la religion est très présente et vous l’abordez sans prendre de gants. Comment est vécue cette religion ?

Vous dites que je traite le fait religieux sans prendre de gants ! Si quelqu’un utilise la religion pour tuer sans prendre de gants, alors moi quand je traite de la religion je dois prendre des gants ? Pourquoi un prêcheur, niveau ‘bac -20’, a-t-il le droit d’accaparer le discours religieux et moi non ? Parce que je n’ai pas de barbe, que je ne m’habille pas comme lui et que Dieu lui appartient et pas à moi. J’ai le droit en tant qu’intellectuel algérien de réfléchir au fait religieux. Il n’appartient ni aux imams, ni aux clergés, ni aux confréries. Il m’appartient aussi. Les élites de chez nous doivent se le réapproprier, démonopoliser la réflexion sur le religieux. Qu’on ne le laisse pas aux islamistes, et surtout qu’on le dépolitise.

Pourquoi c’est à moi de me justifier alors que je n’ai tué personne ? Mais en même temps, c’est la grande question qui interpelle notre époque. Chaque époque a son monstre totalitaire, et l’islamisme est le monstre de notre époque qui veut dominer le monde. Il faut rappeler que l’islamiste n’est pas le musulman, il ne cherche pas à rencontrer Dieu, mais veut prendre le pouvoir. Il n’a pas le droit de m’interdire de réfléchir sur son arnaque fondamentale.

Nous devons nous réapproprier le débat sur le religieux et la laïcité. Ce que me reprochent certains qui prétendent se réclamer de la religion, c’est qu’ils ont quand même réussi une mainmise monopolisante sur les grandes questions de notre société. Tu peux parler de la poésie, de la littérature, de la métaphore, mais la nudité, le corps, le sexe et la mort ce sont les religieux qui en ont le monopole. Non, je récuse cela. J’ai le droit absolu de discuter de toutes ces questions et en dehors des catégories islamistes. Ils n’ont pas le monopole.

La métaphysique n’est pas la propriété de papa, elle appartient à tout le monde. Je ne m’attaque pas à la religion, je suis fasciné par la théologie depuis toujours, mais j’estime que la vie m’a été donnée, je suis en mesure de poser des questions à Dieu tout seul, je n’ai besoin ni de courtier, ni d’intermédiaire, ni de sous-traitant religieux. Dieu n’a signé de procuration à personne pour parler en son nom. Le Coran, l’islam, ma chair ne leur appartiennent pas. Et moi je n’ai tué personne.

Evoquons justement la question de la mort. Sommes-nous en train de vivre la mort au lieu de la vie ?

La mort doit être comprise comme un sujet romanesque, un espace pour restaurer la vie et non pas comme une question funeste. C’est quelque chose qui éclaire la vie et le présent. On observe que dans notre vie, on discute, on organise, on réfléchit la mort, pas la vie. Il y a une hâte, c’est troublant. Il faut considérer la mort dans le sens où elle éclaire la vie.

Une vie remplie de violence…

L’histoire est violente. Nous l’avons subie pendant la colonisation, mais elle ne doit pas servir d’excuse victimaire pour la perpétuer ce que nous avons fait jusque-là. Nous avons subi une violence coloniale, nous l’avons rééditée sur nos propres chairs durant la décennie quatre-vingt-dix. Et cela risque de se reproduire tant que nous n’aurons pas compris ce que nous sommes, de considérer que nous existons en tant que pays. Le but était d’avoir un pays libre, ce que nous avons fait. Et après ? Nous devons nous offrir un destin.

Vous critiquez le régime politique avec vigueur parce qu’il n’a pas offert ce destin…

Le régime politique n’est qu’un aspect de nous-mêmes. Je n’aime pas cet aspect d’être le contestataire à sens unique. Le régime, c’est nous, il n’est pas assis sur le vide, mais sur une chaise, la chaise, c’est nous. Tout expliquer par la faute du régime nous a servi à expliquer tout et à nous absoudre de nos propres responsabilités. Le régime existe, moi aussi. Nous sommes responsables de notre sort, et si nous ne l’acceptons pas, nous ne pourrons rien. Nous nous comportons avec le régime comme s’il était venu par la mer. Non. Je critique le régime parce qu’il est un aspect de la déception et de notre échec, mais tout n’est pas la faute du régime. Si tout était la faute du régime, le régime est de notre faute.

Vous abandonnez le journalisme pour sauter le pas vers la littérature ?

Non. Je ne change pas de musique, mais d’instrument. La littérature permet de parler de soi-même. La littérature est le témoin de son époque, c’est un exercice de voyeurisme universel qui permet de partager l’intimité universelle. Le personnage de Dostoievski n’est pas russe, il est humain, qu’on lit dans son village en Algérie avec plaisir, comme si nous étions à l’intérieur de ce personnage. C’est l’intimité universelle qui est partagée par la littérature. J’aime réfléchir le monde comme un miroir et comme un esprit. C’est exercer son droit à l’universalité et le conquérir.

C’est un témoignage incompressible de notre humanité. Quand tout va mal, quand vous êtes dans un goulag, vous avez un bout de papier et un crayon, vous faites de la littérature. Quand vous êtes à l’angle mort de votre humanité, vous produisez de la littérature. C’est produire du sens là où le sens est rendu impossible.

En vous présentant comme un intellectuel du Sud dissident qui combat l’islamisme, le monde éditorial et médiatique occidental ne cherche-t-il pas à vous enfermer dans un rôle ?

Ce n’est pas une tentative, c’est une entreprise permanente, et c’est dans l’ordre naturel des choses. Ils sont dans des combats idéologiques internes où chaque partie a besoin d’un témoin à charge ou à décharge pour valider telle ou telle thèse. On ne peut pas dépasser cette situation en l’analysant avec rancune, comme si c’était un complot. Non. C’est une mécanique qu’il faut démanteler en continuant à écrire, à soutenir ses propres propositions, à corriger les visions et à résister au casting que l’on propose à l’intellectuel du Sud en règle générale. C’est-à-dire un témoin à charge ou à décharge, un intellectuel de soutien ou d’appoint, un chaman qui doit lire l’avenir et d’être exotique. Il y a un rôle international pour l’intellectuel, c’était l’URSS, les dictatures en Amérique latine et maintenant c’est notre cas.

Nous sommes à la périphérie de l’Empire et on nous convoque pour répondre à certaines questions. Pour nous, s’agit-il d’accepter ce jeu, de le rejeter ou d’essayer de démanteler cette mécanique pour la dépasser et en faire le bénéfice de sa propre stratégie ? Oui, on appelle Kamel Daoud pour parler de l’islamisme, je dis non. Je refuse énormément de plateaux et d’interviews parce que je ne suis pas un intellectuel de soutien là-bas, ni celui de victimaire ici. Je ne suis pas un intellectuel de service fantasmé chez moi ni un intellectuel organique venu du Sud pour servir des combats idéologiques de l’Occident.

Je sais que je fais face à une mécanique immense qui me dépasse, mais je reste lucide. L’essentiel est de ne pas dénoncer ce processus, mais comment le dépasser. Il y a des récupérations, des enjeux politiques et des tentatives de vous impliquer dans des débats idéologiques fondamentaux en Occident. J’en suis conscient, je résiste et je travaille toujours à déconstruire cette mécanique ou à en faire une machine à mon bénéfice. Depuis que j’ai quitté mon village, je fonctionne avec l’adversité qui m’est essentielle. La force adverse est mon moteur.

Mais je dois tout de même souligner une chose importante : pourquoi on dit de Kamel Daoud et d’autres écrivains algériens qu’ils risquent d’être soumis à des tentatives de récupération idéologiques occidentales, mais jamais de l’islamiste qui se fait recycler en Arabie Saoudite, formé, formaté et renvoyé dans son pays pour exploser, semer le chaos ! Je ne comprends pas ! Il y a des manœuvres en Occident, mais pas de manœuvres idéologiques dans la vaste planète de l’islamisme ! Donc, la main étrangère est uniquement européenne, mais quand on va se former en Arabie Saoudite et qu’on revient en Algérie créer le désordre et les divisons, ce n’est pas une main étrangère, c’est quoi alors ? C’est une poignée de main ?!

La topographie prend une place importante dans vos écrits, surtout la mer. Que signifie-t-elle pour vous ?

La Méditerranée est un espace de division, le mur qui nous sépare de l’autre, c’est l’infranchissable. J’aime bien cette expression de “la seule métaphysique que je peux toucher de la main”, pour reprendre l’expression de Romain Gary. C’est aussi une épreuve, une vision religieuse fanatique du monde. La mer vous impose la nudité, le retour au corps, retrouver votre chair, être face à vous-mêmes. C’est le lieu d’où vient l’autre, le monstre qui nous a colonisés. C’est un lieu de basculement aussi.

Il y a aussi la femme ; sa place dans la société vous indigne-t-elle ?

Profondément. Elle m’indigne, me révolte et me culpabilise. Parce que durant une bonne partie de ma vie, j’ai été un homme algérien au sens machiste qui pense qu’il est normal que sa sœur lui serve à manger et que sa mère fasse la vaisselle. J’ai perpétué cet ordre-là pendant longtemps. Je m’en veux, ça me culpabilise.

Votre village Massera est important pour vous, c’est votre enfance…

J’y vais chaque semaine quasiment, ce sont les miens, c’est pour eux que j’écris. C’est fondamental pour moi. C’est ma mesure. Je garde un lien naturel avec les habitants, on ne me parle jamais de mon succès qu’on célèbre avec discrétion. On parle des choses simples de la vie. Ils ont une pudeur extraordinaire, ils en sont fiers mais sans trop parler de succès. Cela m’aide à garder les pieds sur terre. Enfant, j’ai rêvé d’être cosmonaute, puis raconter des histoires. J’avais une enfance heureuse, petit-fils d’un bûcheron. Nous étions très pauvres, mais nous ne le savions pas, c’était l’ordre des choses dans le village. Nous n’avions pas de télé à la maison. Avoir une fois par semaine un verre de limonade servi dans un verre de thé c’était énorme.

Et votre rapport à la ville d’Oran ?

C’est là où je vais, où j’ai mes amis. Oran est une ville ambivalente où j’ai longtemps été sans domicile fixe. C’est une ville où à partir de 17h les gens rentraient chez eux. Les portes se fermaient, les rideaux étaient baissés, j’étais seul dans la rue à tourner ; moi je n’avais pas où dormir. C’est une ville mur. Mais j’ai fini par trouver une fissure, à m’installer, à trouver un lit, un toit, une maison. C’est une ville qui a du charme, ouverte sur la mer, décontractée. Elle n’est pas obsédée par ses racines.

… Et Paris ?

C’est la perpétuelle destination. Le Paris littéraire d’Henry Miller, d’Hemingway. C’est la capitale du monde.

Comment avez-vous vécu les années de terrorisme ?

Comme tout le monde, dans le choc, l’incompréhension, dans le déni, l’acceptation et la soumission, le silence et la complicité. Et nous n’en sommes pas encore sortis. On ne peut pas sortir d’un cycle sans lui donner du verbe, de la voix et l’assumer. Le raconter pour s’en défaire. On l’a tu. Nous sommes tous complices d’un grand silence et on va le payer un jour. Un mal qui n’est pas dit et assumé, on va sans doute le revivre. C’est Nietzsche qui a dit : “Le secret du père, le fils le révèle”.

Des minorités religieuses sont persécutées en Algérie. Le pays est-il aussi étroit pour ne pas admettre une pluralité ?

La grande maladie de l’Algérie, c’est l’unanimisme. Un parti unique, le Dieu unique, la pensée unique. Cela va tuer la nation. Il faut revenir à nos différences qui sont notre richesse, il faut les cultiver. La nature nous a donné sept couleurs et nous on veut en garder une seule, la couleur noire. L’Algérie est vaste et plurielle. Elle est musulmane, chrétienne et juive et plus que ça. Nous sommes une République, notre histoire est riche.

Dans une de ses tribunes, le grand poète syrien Adonis dit de belles choses sur vous…

Je pense que c’est le papier le plus pertinent écrit sur moi parce qu’il touche du doigt cette impossibilité de la naissance du “je” dans nos sociétés. Il dit une phrase magnifique : “On vient au monde comme des pères”, où nous sommes en permanence dans la position conservatrice, immobile et statique. On revendique la paternité avant même la filiation. Son texte est court mais d’une pertinence incroyable.

Comme lui, vous êtes un peu un éternel incompris…

Il y a des malentendus, une hiérarchie d’incompréhension en raison de l’absence de la circulation des idées dans nos pays, peu d’espaces de débats, peu de librairies. On parle plus d’un match de foot que d’un livre. Mais ce qui est regrettable, c’est la mauvaise foi. Des gens qui ont bien saisi ce que je veux dire, mais qui ne veulent pas le comprendre ni le transmettre et qui déforment vos propos. Je sens souvent cette incompréhension.

J’ai comme l’impression qu’il y a un confort à vous donner un rôle, et cela vous dispense de penser. On décrète Kamel Daoud anti-musulman et on aura tout reglé. Je ne suis pas un intellectuel au service de l’Occident et je ne veux pas être un intellectuel de soumission chez moi. Je ne veux pas être soumis au diktat des idées dominantes. L’incompréhension vient du fait que moi je parle du présent, d’autres me parlent du passé. Je parle du train en marche et ils me parlent d’une gare fixe.

Nous sommes vivants et pas morts, l’histoire ne s’arrête pas. Le monde bouge autour de nous et nous, en Algérie, nous avons le culte de l’immobilité. Nos pensées, nos élites, le régime politique veulent de l’immobilité. Nous avons un problème avec la dynamique de la vie. Cessons de faire du présent une pierre tombale.
Propos recueillis par Hacen Ouali
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Biographie

Né en 1970 à Mostaganem, en Algérie, Kamel Daoud a été journaliste pendant quinze ans au Quotidien d’Oran tout en collaborant à divers médias en ligne dont le site Algérie-Focus. En 2014, il est victime d’une fatwa lancée le 16 décembre par l’imam intégriste Hamadache et appelant à son meurtre. En 2016, blessé par les accusations d’islamophobie, le chroniqueur annonçait, le 22 février, son retrait du journalisme mais continue à tenir des chroniques dans le magazine français Le Point avec lequel il a un engagement contractuel. Kamel Daoud écrivain d’expression française, a obtenu le Goncourt du premier roman en 2015 pour son ouvrage Meursault, contre-enquête (Actes Sud, 2014). Ce livre a été traduit dans une trentaine de langues. En février 2017, il publie Mes indépendances, Chroniques 2010-2016 (Actes Sud et coédition algérienne Barzakh), une sélection de 182 textes choisis parmi les quelques deux mille chroniques qu’il a rédigées pendant cette période.
Source
El WatanAlger
http://www.elwatan.com/

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yacoub

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Re: Algérie histoire

Ecrit le 27 févr.17, 04:48

Message par yacoub »

L'Algérie produit des écrivains exceptionnels comme Boualem Sansal et Kamel Daoud pour lesquels j'ai la plus haute admiration, mais l'Algérie est aussi gangrenée par ce type d'ordure qui détruisent les cerveaux des jeunes pour en faire de futurs soldats du califat où de sombres obscurantistes qui livreront leurs frères Algériens émancipés aux lames des égorgeurs.

En France certaines conférences accueillent ce genre de déchets et certaines mosquées délivrent ce genre de messages, "soyez tolérants", la loi permet de lutter contre les mosquées salafistes, mais le salafisme a pignon sur rue en France malheureusement

Ckeikh Chemsou : « Femmes, ne léchez pas la glace dans la rue ! »

J’vous jure que cela donne des idées à des frustrés, Cheikh Chemsou peut en témoigner ! Manger une glace dans la rue peut sembler anodin mais s’avère une agression pour les détraqués, hein Chemsou ? Question à deux dinars : que peut faire une femme qui n’offensera aucun homme ? Rien ! Alors faites et que les pervers le soient !

https://youtu.be/GQUoS_eJ6Ak

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Re: Algérie histoire

Ecrit le 27 févr.17, 08:04

Message par bercam »

Kamel Daoud harki franc macon =666

Yacoub forum religion org traitre algerie = ???? Devines ???


...........conclusion:

La haine rend aveugle et stupide ...et bien plus encore !

:Bye:

yacoub

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Re: Algérie histoire

Ecrit le 12 mars17, 04:44

Message par yacoub »

Les grandes dates du christianisme en Afrique du Nord

150-160 : Naissance de Tertullien (amazigh) à Carthage.
180 (17 juillet) : Décapitation à Carthage de douze chrétiens originaires de Kasserine (martyrs scillitains).
197 : Persécution des Chrétiens.
198 : Victor Ier (amazigh) est pape.
200 : Naissance de Cyprien de Carthage (amazigh).
202 : Édit interdisant la conversion au christianisme.
203 (7 mars) : Martyre de Perpétue et Félicité livrés aux lions de l’amphithéâtre de Carthage.
249 : Édit obligeant les Chrétiens à prier pour le salut de l'empereur et à sacrifier des animaux. (Persécution de Dèce).
256 : Concile de Carthage proposant de rebaptiser les fauteurs qui ont cédé lors des persécutions de Dèce.
257 : Édit de Valérien, persécution des Chrétiens, exil d'évêques et de clercs récalcitrants.
258 : Décapitation de Cyprien, évêque de Carthage.
260 : Édit de tolérance promulgué par Gallien.
295 : Maximilien de Theveste, martyr numide qui refusa de servir dans l'armée romaine. Il fut décapité le 12 mars 295.
303-305 : Persécutions des Chrétiens d’Afrique.
303-312 : Premiers écrits donatistes.
304 : Manifeste des martyrs donatistes d'Abitina.
305 : Sylvanus (donatiste) élu évêque de Constantine.
311-314 : Miltiade (amazigh) est pape.
312 : Caecilianus nommé évêque de Carthage contestée par l’évêque Donat.
317 : Répression accrue des donatistes.
321 : Suspension des mesures répressives à l’égard des donatistes.
336 : Concile de 270 évêques donatistes à Carthage.
340 : Révolte des circoncellions (ouvriers agricoles) contre les propriétaires terriens.
354 : Naissance de Saint Augustin (de père romain et de mère amazigh)
355 : Mort de l’évêque Donat.
362 : Julien met fin à l'exil des donatistes qui récupèrent leurs lieux de culte.
372-375 : Les donatistes sont mêlés à la révolte du chef maure Firmus.
376 : Nouvelle interdiction de l’église et du culte donatiste.
385-397 : Soutien du comte d’Afrique Gildon aux donatistes.
373 : Valentinien Ier interdit aux donatistes la pratique du « rebaptême ».
412 : Concile de Carthage réunissant 286 représentants catholiques et 279 représentants donatistes.
429-439 : Invasion du Maghreb par les Vandales (peuple germanique de confession chrétienne arienne).
431 : Mort de Saint Augustin, évêque d’Annaba.
439 : Fondation du royaume vandale arien d'Afrique (Carthage, Sardaigne et Corse).
439 : Début de la persécution des catholiques (flagellation, exil, décapitation)
442 : Les Vandales rendent la Sicile en échange de la Numidie et les deux provinces de Maurétanie (Maroc et Algérie) ; ils reçoivent un traité pour diriger la province romaine d'Afrique (Tunisie et Libye occidentale).
449 : Alliance des Vandales et d’Attila contre Rome.
455 : Pillage de Rome par les Vandales.
456 : Domination vandale en Sardaigne.
468 : Domination vandale en Sicile.
468 : Victoire des Vandales sur la flotte byzantine au Cap Bon.
477 : Mort de Genséric après un demi-siècle de règne sur les Vandales.
484 : Réduction du nombre d’évêchés, passant de 600 à 470
492 : Gélase Ier (amazigh) est pape.
523 : Décès du roi Thrasamund. Edit royal mettant fin à la persécution de Catholiques.
523 : Hildéric, fils de la princesse romaine Eudocia, pro-byzantin, devient roi des Vandales malgré son impopularité et son grand âge.
530 : Hildéric est renversé par Gélimer
533 : Les Byzantins (conduits par Bélisaire) battent les Vandales à deux reprises près de Carthage et entrent dans la ville en octobre.
534 : Reddition de Gélimer. Déportation des survivants à Byzance puis en Galatie, fuite des autres rescapés en Kabylie dans ce qui reste du royaume Vandale.
535 : Interdiction des cultes donatiste, juif, païen et arien.
647 : Raid arabe sur Sbeïtla.
698 : Prise de Carthage par les Musulmans.
VIIIe siècle : Il subsiste une quarantaine d’évêchés au Maghreb.
793 : Construction d’une église à Kairouan.
875 : Le cadi de Kairouan impose le tamyiz (port de vêtements spécifiques pour les Chrétiens et les Juifs)
Xe siècle : Exode des Chrétiens vers l’Europe et dans les oasis du sud.
983 : Persistance d’une communauté chrétienne à Carthage et à Kairouan.
1050 : Invasion hilalienne. Mention de communautés chrétiennes à Tlemcen, Alger, au Kef, etc.
Accélération du processus d'extinction du christianisme en Afrique du Nord.
1053 : Il ne subsiste que cinq évêchés dans le Maghreb.
XIe siècle : Installation de comptoirs chrétiens italiens sur le littoral maghrébin.
1191 : Mention d’une église à El Kala.
1192 : Mention d’un archevêque à Carthage.
1270 : Croisade de Tunis où Saint-Louis trouve la mort.
XIVe siècle : Ibn Khaldoun atteste la présence de chrétiens parmi les Berbères (Garawa et Nefusa, qui sont des Zénètes)
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yacoub

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Re: Algérie histoire

Ecrit le 22 mars17, 02:30

Message par yacoub »

Un jeune écrivain accusé de blasphème en Algérie

Un jeune écrivain accusé de blasphème en Algérie
Par Margaux Boddaert — 15 mars 2017 à 17:08
Anouar Rahmani, étudiant en droit et romancier, fait l'objet d'une enquête pour atteinte à la religion. En cause, des passages de son ouvrage «la Ville des ombres blanches», publié sur sa page Facebook.

Un jeune écrivain accusé de blasphème en Algérie

Il a été convoqué le 28 février par la police judiciaire de Tipaza, à 70 kilomètres d’Alger, où il a dû s’expliquer sur des passages de son roman. Anouar Rahmani s’est retrouvé face à sept policiers. Ils lui ont posé des questions sur ses croyances, ses pratiques religieuses et un peu sur son livre, d’après le récit qu’il a fait à Human Rights Watch. Dans l’un des chapitres de la Ville des ombres blanches, publié sur Facebook en août 2016, un enfant discute avec un sans domicile fixe qui se fait appeler «Dieu» et affirme avoir créé le ciel avec du chewing-gum. Le roman raconte également une relation homosexuelle entre un combattant pour l’indépendance de l’Algérie et un colon français pendant la guerre.

Les policiers ont fait signer à Anouar Rahmani un procès-verbal après dix heures d’interrogatoire. Le document précise qu’il fait l’objet d’une enquête en vertu de l’article 144 bis du code pénal algérien : il risque entre trois et cinq ans d’emprisonnement et 100 000 dinars d’amende, soit environ 850 euros, pour «offense au Prophète» et «dénigrement du dogme ou des préceptes de l’islam». Anouar Rahmani a été laissé en liberté dans l’attente de la décision du procureur de l’inculper ou non. L’auteur, qui écrit aussi pour le quotidien El Watan, affirme avoir déjà été menacé et dénigré sur Internet et dans les médias algériens pour avoir soutenu la cause LGBT et défendu l’idée que le recours à la religion ne peut justifier une restriction des droits humains.
Musellement de la liberté d’expression

Selon Anouar Rahmani, son cas est une première en Algérie, qui continue de durcir ses positions sur le blasphème : «Ce serait la première fois qu’un écrivain comparait devant un tribunal pour ce qu’il a écrit dans une œuvre de création», explique-t-il le 1er mars sur son compte Facebook. Human Rights Watch, qui demande l’abandon des poursuites, rappelle que l’article 42 de la Constitution algérienne est supposé garantir la liberté de pensée et de conscience, et l’article 44 protéger la liberté «de création artistique». L’ONG affirme par ailleurs que «les lois qui pénalisent la diffamation de la religion ou des organisations religieuses sont incompatibles avec les normes internationales de la liberté d’expression». Un message qui passe difficilement en Algérie.

L’écrivain a rejeté en bloc les accusations, notamment celle d'«atteinte à l’entité divine et à la religion», rappelant que son roman ne parle pas directement de Dieu, mais d’une personne se faisant passer pour un dieu. Les policiers estiment de leur côté que le ton ironique du roman constitue «une insulte à l’égard de l’islam» et accusent Rahmani d’employer des termes «sexuels, contraires aux bonnes mœurs». L’auteur y voit «une porte ouverte à toutes les répressions» dans son pays.
Un conservatisme exacerbé

Depuis la réélection d’Abdelaziz Bouteflika en avril 2014, la liberté d’expression est de plus en plus malmenée en Algérie. Les médias sont sous surveillance du pouvoir, tout comme le secteur de l’édition. Une loi publiée le 19 juillet 2015 au Journal officiel stipule que «les activités d’édition, d’impression et de commercialisation du livre s’exercent dans le respect de la Constitution et des lois de la République, de la religion musulmane et des autres religions, de l’identité nationale et des valeurs culturelles de la société».

Le délit de blasphème n’est pas nouveau dans le pays, mais il est de plus en plus sanctionné quand il est diffusé sur les réseaux sociaux. En juin, deux Algériens, Rachid Fodil et Hicham Daif, ont été arrêtés pour «actes blasphématoires et prosélytisme anti-musulman sur Internet», alors qu’ils traduisaient le Coran en arabe algérien sur Facebook. Après avoir été condamnés à cinq et trois ans de prison au terme d’un premier procès en décembre, leurs peines ont été réduites, passant respectivement à un an et six mois de prison. En septembre, Slimane Bouhafs, chrétien converti, a également été condamné à trois de prison en appel pour des publications sur Facebook portant «atteinte à l’islam».
Margaux Boddaert
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yacoub

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Ecrit le 26 juin17, 02:57

Message par yacoub »

Djamila Bouhired dénonce

El Watan, 21 juin 2017

Halte à la falsification de l'Histoire !» ; «Halte à la profanation de la mémoire de nos martyrs !». La salve est de l'héroïne nationale Djamila Bouhired pour empêcher la réalisation d'un film sur son parcours et sa vie sans son aval.

Mme Bouhired a rendu public, hier, un communiqué pour prendre à témoin l'opinion nationale, mais surtout de mettre en garde contre l'entêtement de ce «réalisateur officiel» spécialisé dans les films «historiques». Le réalisateur en question n'est autre qu'Ahmed Rachedi qui s'est spécialisé depuis quelque temps dans la réalisation de films sur des figures de la Révolution grassement subventionnés pas le Trésor public.

L'héroïne de la guerre de Libération nationale accuse ainsi et vertement le pouvoir politique d'être derrière cette opération de légitimation. «Un film prétendant relater ma vie et mon parcours militant est en préparation. Commandité par le pouvoir politique, financé sur le budget de l'Etat, il est confié à un cinéaste officiel. Dans un contexte de falsification décomplexée qui tente de tailler une histoire sur mesure à des usurpateurs et des faussaires, cette opération vise, une fois encore, à instrumentaliser la guerre de Libération nationale à des fins de légitimation du pouvoir», pilonne-t-elle.

Elle dénonce une opération de «réduire la Révolution à un rôle de faire-valoir d'un régime autoritaire, impopulaire et antinational». Jamais des qualificatifs aussi durs et aussi radicaux n'ont été utilisés par cette légende vivante. C'est-dire la colère de cette femme qui, aux côtés de nombreuses jeunes Algériennes, s'est battue pour l'indépendance nationale. «Malgré mon opposition clairement formulée à la réalisation d'un film qui veut réduire la Révolution au rôle de faire-valoir d'un régime autoritaire, impopulaire et antinational, les commanditaires de ce film ont décidé de passer outre.

Après avoir manipulé les martyrs, ils revendiquent maintenant le droit d'instrumentaliser l'image des survivants dans des luttes d'arrière-garde. Je prends à témoin mes frères et mes sœurs algériens pour réaffirmer mon opposition à la réalisation de tout film dont je serai le personnage principal, et mon refus de servir de caution à toute opération occulte. Je dénonce avec force l'instrumentalisation de la Révolution et de ses martyrs à des fins de légitimation du pouvoir», dénonce-t-elle.

Hacen Ouali
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yacoub

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Ecrit le 05 juil.17, 03:41

Message par yacoub »

Salem Brahimi : "L'islam d'Abdelkader est la négation même de Daech"

VIDÉO-ENTRETIEN. Réalisateur du documentaire "Abdelkader", Salem Brahimi nous plonge dans la vie de cet émir qui interroge les soubresauts actuels de l'islam.

Dans cet entretien accordé au Point Afrique, Salem Brahimi revient sur son documentaire consacré à l'émir Abdelkader. Son intérêt : l'actualité des thèmes qui y sont abordés et à partir desquels Salem Brahimi confie sa vision et les réflexions que lui inspire le personnage dont la vie ne peut manquer de nous ramener aux événements actuels autour de l'islam politique et de la coexistence des religions.

Qui est l'émir Abdelkader ?

D'abord, une figure méconnue et chargée du romantisme nationaliste en Algérie et du romantisme orientaliste en France. Ensuite, un précurseur des luttes débutées le 1er novembre 1954 dans l'histoire officielle algérienne, mais aussi un combattant arabe respecté, que de nombreuses représentations montrent, tout drapé de blanc, et dont les écrits spirituels frapperont les esprits de la France du XIXe siècle.

Une figure double, donc, un totem aussi, auquel le réalisateur algérien Salem Brahimi a tenté de donner une dimension humaine à travers un film passionnant. Ce dernier est une mise en perspective à travers des interviews de spécialistes, une reconstitution aussi de la vie de l'émir avec un élégant habillage en images animées. Ni hagiographique ni en sécheresse narrative froide, Abdelkader est « conté » en arabe dialectal par la voix posée comme méditative d'Amazigh Kateb. Le documentaire est rythmé par l'oud électronique de Mehdi Haddab, creuset mélodieux intemporel et moderne. L'émir, en pointillisme, y apparaît comme une figure complexe et en cela éminemment moderne.

Il naît à La Guetna en 1808 dans un pays sous domination ottomane. Son père, Sidi Muhieddine al-Hassani, en est le muqaddam d'une zaouïa, une confrérie religieuse. Taleb à 8 ans (commentateur autorisé du Coran), hafiz (savant) à 14 ans, Abdelkader aurait pu connaître la vie paisible d'un chef spirituel. Mais les événements en décident autrement. La France chasse les Turcs en 1830 après l'incident diplomatique dit du « coup de l'éventail », tortueuse histoire d'un soufflet qu'aurait donné le dey d'Alger au consul de France. Pour repousser l'envahisseur, le tout jeune Abdelkader devient alors « émir », à la fois chef politique, militaire et spirituel, et livrera à l'armée française une longue guerre de dix-sept ans, entrecoupée de trêves. Dix-sept ans durant lesquels l'intelligence politique de l'émir se cristallisera notamment dans la création d'un début d'État algérien, structuré et mouvant, « la Smala ».

Après sa reddition, Abdelkader se retrouve emprisonné à Amboise, en violation de la promesse qui lui avait été faite d'un exil en terre arabe. Louis Napoléon Bonaparte, arrivé au pouvoir en 1848, l'autorise ensuite à partir vers le « Levant », d'abord en Turquie puis à Damas. Une vie d'études et de recentrement spirituel commence autour de ce qu'il appelle « le grand djihad », la lutte contre soi-même et la quête toujours plus intense de la voie soufie, notamment à travers les enseignements d'Ibn Arabi. À Damas, il se fera le protecteur des minorités chrétienne et juive de la ville, offrant sa maison, mais plus largement sa protection active à 12 000 d'entre eux menacés par des émeutes. Figure militaire, nationale, spirituelle et humaniste, Abdelkader sera aussi à l'origine de réflexions avancées sur le droit de la guerre, notamment sur le sort des prisonniers de guerre, bien avant la 3e convention de Genève de 1929. Le réalisateur algérien Salem Brahimi est intarissable sur le sujet. Pour le Point Afrique, il retrace le voyage de vie de l'émir, un homme à qui « rien de ce qui était humain n'était étranger ».

Le Point Afrique : comment réalise-t-on un documentaire sur une figure si imposante ?

Salem Brahimi : aucun documentaire n'est totalement objectif. Je voulais d'abord ne pas me concentrer sur la seule période algérienne de sa vie, ne pas être prisonnier de son rapport à la France. En parallèle, je travaillais sur une fiction, Maintenant, ils peuvent venir », qui porte sur la décennie noire de l'Algérie et j'ai compris que le vrai vaccin contre l'islamisme n'est pas forcément le discours démocrate, laïque auquel j'adhère aussi. Mais le vrai vaccin est l'émir, car il est enraciné. Il portait un islam sans complexe, revendiqué comme tel, mais qui propose des voies différentes de celles des islamistes. Notre propre histoire porte nos propres solutions enracinées, sereines, de coexistence pacifique, et montre que nous n'avons de leçon d'islam à ne recevoir de personne.

La difficulté est qu'il y a une vraie bataille de la représentation de l'émir, qui en fait soit un surhomme, soit un héros romantique. Je revendique la sérénité. Ne pas surinvestir l'enjeu de la mémoire, ce qu'on voit trop souvent en Algérie où c'est une bataille idéologique. Surinvestir des figues d'homme, comme on a pu le voir après la guerre d'Algérie, dépossède le peuple de ses combats. La figure de l'émir a aussi été récupérée dans une stratégie postcoloniale. En attribuant à une seule personne des mérites, cela permet de déposséder le reste de la communauté de la même honorabilité. Je ne voulais pas entrer dans cette mêlée historique, même dans la perspective de la construction d'un récit national. Ma génération – je suis né 10 ans après l'indépendance – veut redéfinir en paix ses enjeux mémoriels. Enfin, je ne voulais pas imposer ma vision, mais stimuler l'imagination de gens pour qu'ils en aient leur propre vision, en ajoutant de l'animé par exemple.

Ambiguïté ?


Salem Brahimi : "L'islam d'Abdelkader est la négation même de Daech" - Page 2
VIDÉO-ENTRETIEN. Réalisateur du documentaire "Abdelkader", Salem Brahimi nous plonge dans la vie de cet émir qui interroge les soubresauts actuels de l'islam. - Page 2
Propos recueillis par Hassina Mechaï

Comment navigue-t-on alors entre les écueils de l'hagiographie, de la légende et du pur factuel ?

C'est la question que je me suis posée du début à la fin. La réponse trouvée est d'assumer le problème. Amazigh Kateb, qui dit le texte, n'est jamais appelé, par exemple, « narrateur », mais « conteur », « goual ». Ainsi, on a voulu assumer la part de légende avec une voix off poétique. Mais tout ce qui est dit relève de faits historiques. On a travaillé de façon polyphonique, avec des spécialistes de nombreux pays, pour montrer l'universalité de cette figure. Sa contribution à certains événements et valeurs humaines est difficile à contester : de son combat contre la conquête coloniale jusqu'à la protection active des chrétiens de Damas. Nous n'avons trouvé personne pour formuler une critique négative sur le personnage. Il est à la fois démesuré et très humain. Mais il n'a jamais cessé d'être remis en perspective à la lumière de la lumière historique : la guerre d'Algérie qui s'inscrit dans la résistance de l'émir, les principes de guerre de protection énoncés par lui dans un édit de 1842. Or la 3e convention de Genève ne reconnaît le statut du prisonnier de guerre qu'en 1929. Tout cela le rend encore plus visionnaire.

Les Algériens interviewés dans votre film ne connaissent l'émir qu'à la seule lumière de la guerre d'Algérie. Comme une figure anticipatrice. Mais un jeune homme dit : « On ne connaît pas les années 80, les années 50. Comment connaître les années 30 ? » Y a-t-il en Algérie un surinvestissement de la mémoire officielle tout autant qu'une perte de la mémoire historique ?

Les Algériens ne connaissent pas bien l'histoire totale de l'émir. Pour plusieurs raisons. Il est peu enseigné à l'école. Puis, s'il l'est, on se concentre sur la part algérienne de sa vie, son combat contre la France. Enfin, certaines voix ont pu s'élever pour dire qu'il a été un traître car il a passé un accord avec les Français. Mais je pense que c'est hors de propos. Il a combattu pendant dix-sept ans contre la première armée au monde, qui pratiquait terres brûlées, enfumades, crimes de guerre. Puis l'émir était un chef de guerre mais aussi un soufi qui disait en filigrane que la guerre est un devoir mais un devoir qu'on doit faire avec dégoût. Devoir de défense devant l'envahisseur, simplement. Et, comme pour tout devoir, il y a un début et une fin. C'est le petit djihad. Le vrai, le grand djihad, est celui que mène un être humain contre lui-même. L'émir combattant la France est presque l'unique figure retenue en Algérie. C'est effectivement un moment essentiel de sa vie, mais ce n'est pas le seul.

© DR


Les spécialistes qui interviennent sont algériens, français mais aussi anglo-saxons, turcs, autres. Est-ce un choix délibéré pour sortir de la seule dimension France-Algérie ou est-ce que, parce que l'émir est une telle figure, il a une dimension internationale ?

C'est un peu pour ces deux raisons. On aurait pu faire un film avec de seuls spécialistes algériens. Mais je voulais une polyphonie pour donner un sens universel sans avoir à le dire. Les spécialistes d'autres pays ne sont pas dans le passif franco-algérien. Cela décomplexait. L'universel, finalement, est de prendre une part de soi et de la mettre dans l'équation mondiale, de voir que cela résonne. Les Algériens n'ont pas l'habitude de s'aimer ainsi, de voir qu'il y a une Algérie universelle. En France, à la lumière du terrorisme, le film a acquis une autre dimension. Des professeurs nous ont dit, lors des projections, que ce genre de film est un outil pour parler aux élèves, montrer que les valeurs de la République peuvent coexister avec une dimension autre de l'islam, celle que portait l'émir.

Avez-vous donc trouvé des résonnances actuelles dans la réception du film ?

Oui. Par exemple, que se passe-t-il quand l'émir débarque en France, après la capitulation et son exil ? Il vient avec une suite importante. Que faire de leurs morts en terre chrétienne ? C'est une question à laquelle la France a dû déjà répondre au XIXe siècle. Celle de la présence de « l'autre », porteur d'une autre religion. Cela remet en perspective les questions actuelles. Car il me semble qu'il y a un problème objectif avec l'islam en France. Non pas dans l'islam en soi mais dans la façon dont sont acceptés les musulmans de France. Plus largement, la proposition spirituelle de l'émir est un garde-fou immédiat à l'islam salafiste. L'émir n'est pas tiède en matière de religion, il est rigoriste. Mais il pose sur les prisonniers, le chrétien, le juif, un regard qui est la négation même de Daech ou de ce qu'était le GIA en Algérie. Sa proposition spirituelle est très actuelle.

N'est-il pas en cela caractéristique d'un islam du Maghreb, ensourcé dans cette terre, tout en se revendiquant d'une « oumma » plus large ?

Je n'ai aucun problème avec une Algérie qui a développé sa propre forme d'islam, qui dessine un univers religieux et social propre. Si l'islam politique en Algérie était alors issu de cela, je serais honoré de ne pas être d'accord tout en le respectant. Ce qui est terrible est quand se développe un islam d'importation, qui est adossé à des pratiques qui ne viennent pas de chez nous. Des pratiques improvisées dans l'esprit de quelques-uns : l'obsession des barbes, d'habits traditionnels, par exemple le qamis qui est un habit afghan. En quoi le qamis est-il religieux et algérien ? C'est une simple référence à la mythologie des djihadistes afghans.

Vous dites qu'il a été un « homme de l'entre-deux ». En quoi l'a-t-il été ? Plus largement, le soufisme a-t-il été sa matrice spirituelle ?

C'est de la conjecture, mais je le vois comme son logiciel de base : concilier la chose et son contraire. Je pense que cela permet de mettre en cohérence les actions de l'émir. Mais je n'impose rien. Beaucoup de ses talents politiques viennent de son éthique de soufi et de la discipline intellectuelle qui en découle. Une grande partie du parcours soufi consiste à se libérer de la dictature des apparences. Une vision du monde en est créée. Concilier guerre et paix, l'autre et soi. Sortir de la binarité. Chaque chose a sa place et a sa cohérence. De là découlent des conséquences politiques. Il a pu gérer la gestion matérielle de la guerre, repousser un envahisseur, sans céder à la passion de la guerre, à la haine de l'ennemi. Il a été un homme spirituel et, en même temps, un immense stratège

L'émir s'est-il adapté aux événements ou lui ont-ils été imposés ?

Lui-même disait : « Les événements m'ont fait bien plus que je n'ai fait les événements. » Il était parti pour avoir une vie enracinée dans la zaouïa fondée par son père. Mais la France arrive. Là où il a su faire, c'est qu'il s'est toujours hissé à la hauteur des événements pour les reconfigurer. De façon inattendue. Reconfigurer la guerre en acte de protection des prisonniers. Reconfigurer la conquête française pour créer un État algérien. Par exemple, quand il est en exil à Amboise, on lui propose un arrangement qu'il refuse. Il va vers un emprisonnement de lui et des siens, mais le transforme à son avantage. Ce sera pour lui d'une période d'ascèse et de recentrement spirituel après dix-sept ans de guerre. Il emprisonne son geôlier en refusant de renier sa parole donnée. Son message est finalement que, et c'est en cela qu'il m'intéresse comme citoyen arabe, quelle que soit l'équation donnée, on peut choisir d'être autre chose. On peut toujours choisir. On n'est pas condamné. Le monde arabe a aujourd'hui une vision de lui-même pessimiste. Mais on peut choisir de se définir, d'agir autrement. L'émir a pu choisir de ne pas brûler, tuer, répondre à l'ennemi avec les mêmes actes. Il a dépassé cela en inventant un début de droit de la guerre, de droits humains.

Vous développez, à travers des archives écrites, l'aspect très violent de la conquête, les enfumades, le général Bugeaud dont la stratégie de la terre brûlée a choqué les populations algériennes de l'époque. Cela résonne avec des débats contemporains aussi…

Je pense que la seule repentance qui vaille est la repentance sincère. Sans aspect politique qui ne serait qu'un marchandage. Mais, au fond, je n'aime pas le terme de repentance. Il y a dans ce terme une idée d'autoflagellation. Il faut que cela reste serein, sans humiliation. Ce qu'il y a eu lieu pendant la conquête de l'Algérie a été a minima des crimes de guerre. Il faut clore enfin cela. Le choix a été fait en 1967 de tout amnistier. Mais amnistie ne vaut pas oubli. La mémoire du mal qui a été fait à l'Algérie demeure. Ni oubli ni réinvention de l'histoire. On a quand même eu un candidat, François Fillon, qui a parlé de « partage de cultures ». Ce qui revient au colonialisme de base, des « lumières de la civilisation ». Or il faut revenir aux textes : le général Bugeaud qui dit à l'Assemblée, en parlant des Arabes, « Si nécessaire, tuez-les jusqu'aux derniers. » Le maréchal de Saint-Arnaud qui enfume femmes et enfants. L'acte fondateur de la conquête de l'Algérie a été barbare. La phrase d'Emmanuel Macron sur le « crime de l'humanité » est intéressante par l'agitation qu'elle a provoquée. Les tensions sont encore là, rien n'est éteint. Mais Emmanuel Macron est d'une autre génération, cela est aussi intéressant, car il semble décomplexé sur cette question.

L'émir s'inscrit-il aussi dans la question actuelle du monde arabe et des Printemps arabes ?

Il me semble qu'il y a là une résonnance absolue. Le Printemps arabe est devenu une marque ombrelle que chacun revendique. Mais le fait que différentes populations aient aussi inscrit leurs révolutions dans cette marque montre l'émergence d'une espèce de conscience panarabe, en rien nassérienne, mais autre. Chacun a pu se reconnaître dans l'autre, s'en inspirer. L'épopée de l'émir est une épopée éminemment panarabe dans un contexte colonial. Beaucoup d'éléments résonnent dans la région arabe : son rapport à la poésie, qui est typiquement arabe. Son islamité. Son destin moyen-oriental. Les questions qu'il pose indirectement, par son action, aux Ottomans qui réforment sous la pression des Occidentaux. La Syrie de l'époque connaît la même configuration qu'actuellement : une guerre avec l'implication d'acteurs régionaux et internationaux. Des acteurs prêts à faire valoir leurs intérêts jusqu'au dernier Syrien, avec comme dommage collatéral ce même peuple. L'émir a, au nom même de l'islam, choisi une autre voie et mis tout le monde face à ses responsabilités : il s'est opposé à l'Empire ottoman qui avait laissé faire le massacre de chrétiens et de juifs en 1860 et à la prétention de la France d'être le protecteur unique des chrétiens d'Orient. Au nom de l'islam, justement.
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yacoub

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Re: Algérie histoire

Ecrit le 17 juil.17, 03:34

Message par yacoub »

Saïd Bouteflika a besoin du soutien de Paris pour succéder à son frère. Que propose-t-il pour l’obtenir ?


Avec le régime algérien, rien n’est simple et rien ne doit être pris au premier degré. Y compris ses folles exigences de repentance. Ainsi, le 5 juillet 2017, quand, à l’occasion de la fête nationale, sourd, muet et quasi paralysé, le président Abdelaziz Bouteflika publie un message diffusé par l’agence officielle APS dans lequel « il » écrit : « Notre peuple exige (je souligne) toujours une reconnaissance de ses souffrances de la part du colonisateur d’hier, la France »[1].
Au-delà de cet exercice de style incantatoire, mécanique et convenu, passons à l’essentiel du message. Ceux qui tiennent la main du président Bouteflika s’y adressent plus aux Français qu’aux Algériens. Un paradoxe le jour de la fête nationale algérienne…. Après avoir insulté la France, voilà qu’ils y affichent une claire intention d’établir avec elle des rapports enfin apaisés à travers « un partenariat d’exception qui se doit d’être mutuellement bénéfique ».
« Mutuellement bénéfique » signifiant donnant-donnant, que demande donc le clan Bouteflika aux abois ? Tout simplement qu’Emmanuel Macron entérine la succession « à la cubaine » qu’il prépare, Saïd Bouteflika prenant alors la place de son frère Abdelaziz. En échange de cet aval français qui ouvrirait la voie à une reconnaissance internationale, les services algériens « aideraient » Paris dans un dossier malien de plus en plus pesant, mais dont ils connaissent intimement certains des principaux acteurs…

Explications :

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Soultan

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Re: Algérie histoire

Ecrit le 17 juil.17, 03:43

Message par Soultan »

La religion est pour ALLAH et non pas celle de l'état
Si c'est celle de l'état alors c'est des pharisiens, ou des néo omeyyades ou abbassides
Quand un état enseigne et fabrique des Imams, c'est des savants des palais quoi

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Re: Algérie histoire

Ecrit le 19 juil.17, 04:01

Message par yacoub »

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Re: Algérie histoire

Ecrit le 12 août17, 02:39

Message par yacoub »

« En Algérie, de toute façon, on n’a que la plage »

Sur le sable algérien, pas de « révolte du bikini » ni de débat sur le « burkini », mais des femmes confrontées à des comportements sexistes et à des harceleurs.

Par Zahra Chenaoui (contributrice Le Monde Afrique, Alger)

LE MONDE| Le 10.08.2017 à 15h44 • Mis à jour le 10.08.2017 à 19h35

Commune d’Aïn Taya, Alger. Août 2017 i

Vue d’en haut, la plage des Canadiennes, à Aïn Taya, 30 kilomètres à l’est d’Alger, ressemble à un paquet de bonbons. Des centaines de parasols roses, jaunes, verts, bleus sont serrés les uns contre les autres. Au pied du parking se dressent un poste de gendarmerie et un de la protection civile, puis, au pied des escaliers, la plage.

Samia Azzoug est assise sur une natte, entre un thermos en plastique et une glacière. Un drap a été accroché avec des pinces à linge le long du parasol, pour protéger des regards. Elle est venue de Bouira, une région montagneuse à 100 kilomètres au sud-est de la capitale. Quand on l’interroge sur le choix de cette plage, qui n’est pas la plus simple d’accès pour elle, deux mots reviennent : « sécurité » et « familial ».

« On vient sur cette plage parce qu’il y a la gendarmerie. Les jeunes peuvent être agressifs », explique son mari, qui vient de sortir de l’eau vêtu d’un pantalon en toile. Par « familial », il faut comprendre : un lieu où il n’y a pas de bandes de jeunes garçons ou des couples non mariés qui cherchent à se voir à l’abri des regards de la famille ou du quartier.

Ici, la polémique de ces dernières semaines, sur de prétendues « baignades républicaines », paraît un peu lointaine. Les tenues de plage — du maillot de bain au burkini — cohabitent sans difficulté sur le sable. Et si certaines vacancières hésitent en effet à se mettre en bikini, le problème est plus général : femmes et filles sont confrontées au machisme ambiant, qui va des regards appuyés aux remarques déplacées.

Samia passe un doigt entre son menton et son foulard blanc aux motifs indiens bleus. Il fait chaud, le tissu colle à sa peau. Elle n’ira pas se baigner. A côté d’elle, pourtant, il y a des jeunes femmes dans l’eau, avec leur robe noire et leur foulard sur la tête. D’autres sont en maillot de bain. Son mari secoue la tête : « Nous sommes musulmans quand même, il faut respecter les autres, il faut se couvrir. » Samia rétorque : « Mais moi, elles ne me gênent pas ces femmes ! »

« Les vêtements des autres, on s’en fiche »

Un enfant se met à hurler. Il a la jambe prise dans un bouquet d’algues dans lequel est accrochée une méduse. Enroulée dans un paréo, les bras croisés sur le ventre, Nassima surveille l’eau. « Cette année, l’eau était polluée par des déversements de produits dans l’oued à l’est de la plage. Mon fils a eu des boutons », dit-elle. Elle vient pourtant, « parce que c’est plus près ». Son mari, Zine El Abidine, lui, peste : « Je n’aime pas beaucoup cette plage. Les jeunes sont mal élevés, ils regardent les femmes. »

Plage des Aiguades en Kabylie - Juillet 2017 i

Nassima et sa sœur, Karima, ont mis l’une un paréo, l’autre une robe sur leur maillot de bain en sortant de l’eau. « Regardez autour de nous, la plupart sont des hommes. Si on s’allonge en maillot, on va se faire harceler, affirme Karima. Il paraît qu’à Annaba, elles font la révolution ! » Les deux sœurs, plutôt francophones, regardent les chaînes de télévision françaises grâce à un décodeur piraté. Certaines, dans la foulée de l’hebdomadaire Marianne, ont évoqué l’initiative d’un groupe de jeunes femmes sur Facebook et on parlé de « révolte du bikini » avec près de trois mille baigneuses (un chiffre démenti depuis). Nassima et sa sœur ont trouvé cela courageux. Lorsqu’on explique qu’il s’agit en fait d’une trentaine de femmes qui se donnent rendez-vous via le réseau social, Nassima rit : « Ah, mais c’est comme quand on va à la plage entre copines le week-end ! On se sert de Facebook, c’est plus simple. »

Les deux femmes disent qu’elles se sentent mal à l’aise à cause du regard des hommes. « Les vêtements des autres, on s’en fiche tant qu’on ne vient pas nous embêter. Il y a toutes sortes de tenues ici », ajoute Karima. « Quand je regarde autour de moi, je cherche des femmes qui sont comme moi et je me sens mieux, c’est tout », explique Nassima.

« Si tu as de l’argent, tu pars en Tunisie »

A quelques mètres d’elles, Souad, 49 ans, est assise sur une chaise basse en plastique, dans l’eau. Habillée d’un burkini noir et bordeaux, elle a gardé ses lunettes de vue et une casquette sur la tête : « Le bonnet qui va avec le maillot a été emporté par les vagues », dit-elle dans un rire. Ses deux nièces viennent s’asseoir sur le sable à côté d’elle. Depuis qu’elles sont arrivées, certains jeunes garçons leur ont dit « des choses vulgaires ».

« La plage, c’est comme partout. Il y a des gens biens et des gens moins bien, résume Souad. Avant, un jeune n’aurait jamais osé draguer une fille de 15 ans. Aujourd’hui, ils n’arrêtent pas. Elles ont ces mêmes problèmes au lycée. » Pour se protéger de ce harcèlement, les parents des deux jeunes filles les scolarisent dans un établissement privé, « qui organise le transport scolaire de la cour du lycée jusqu’à la porte de la maison ». Pour les mêmes raisons, elles ne viennent pas seules à la plage.

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Se baigner habillée, est-ce une solution ? « Ça n’a rien à voir. Quand j’étais jeune, je me baignais en bikini. Aujourd’hui, j’ai des enfants, je ne peux pas être vulgaire. Elles, elles sont jeunes, elles peuvent se le permettre », rétorque Souad, en précisant que pendant l’année, elle va nager dans une piscine publique deux fois par semaine en maillot de bain. Là-bas, les cours ne sont pas mixtes. « De toute façon, malgré ces embêtements, en Algérie, on n’a que la plage. Si tu as de l’argent, tu pars en Espagne, si tu en as moins, tu pars en Tunisie. Mais moi, je n’ai pas les moyens », conclut-elle.

Au milieu des fumeurs de chicha et des joueurs de dominos, trois jeunes filles se serrent sous un parasol, face à la mer, leurs sacs à leurs pieds, l’air dépité. Ryma, 25 ans, porte une robe rouge avec des petits pompons multicolores le long du col et a mis une casquette beige sur ses longs cheveux bruns. « On nous avait dit qu’on serait à l’aise sur cette plage. Mais on est bien entourées », dit-elle en riant et en désignant du menton deux groupes de jeunes garçons assis d’un côté et de l’autre.

Habituellement, ces jeunes femmes qui vivent au Golf, le quartier de la présidence de la République, vont se baigner au Club des Pins, là où résident certains hauts responsables politiques et militaires du pays et où on ne peut entrer qu’avec une carte de membre. Voyant qu’elles ne se baignent pas, un jeune homme s’approche et leur propose de venir un peu plus loin, dans le bout de plage qu’il « gère ». « Il y a des filles ! », lance-t-il.

La sécurité et la présence de filles sont des arguments marketing pour les jeunes hommes qui louent parasols, chaises et tables. Les trois amies se lèvent pour changer de place. Mais le premier loueur de parasol n’apprécie pas qu’on débauche sa clientèle et une bagarre éclate. Ryma et ses deux amies n’osent plus se faire remarquer. Elles se déplacent mais ne se baigneront pas. « On reviendra avec des garçons ou de la famille », essaye de se persuader Amal en haussant les épaules.
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