Résultat du test :
Auteur : Seleucide
Date : 30 avr.17, 07:00
Message : J'ai terminé la lecture du livre de
Shady Hekmat Nasser, intitulé
The Transmission of the Variant Readings of the Qur’ān : The Problem of Tawātur and the Emergence of Shawādhdh (Brill, Leiden, 2013, coll. « Texts and Studies on the Qur’ān », n°9, 252 p.) C'est à ma connaissance l'ouvrage universitaire le plus complet traitant de la question des lectures coraniques. Je ne regrette pas de l'avoir lu, il est tout-à-fait passionnant. Je l'utiliserai bientôt avec d'autres ressources pour travailler un peu le sujet. Ci-joint mes notes de lecture relatives à l'ouvrage en question (ce dernier étant peu accessible, je me suis dit que cela pourrait intéresser des gens).
Pour ceux qui ne connaissent pas le rôle ou l'intérêt de ces lectures, lisez rapidement ce qui suit (les autres peuvent passer à la seconde partie) : vous savez probablement que le Coran est un texte écrit en langue arabe. Originellement, il convient de savoir que le texte coranique ne possédait pas de points diacritiques (= des points placés en haut ou en bas des lettres qui les distinguent les unes des autres). Voyons un exemple : les lettres
خ /
ح /
ج ont exactement la même forme et ne se distinguent entre elles que par le point dessus ou dessous (ou l'absence de point) de la lettre. Nous voyons bien que selon les points diacritiques que l'on mettra, nous aurons des lettres et donc des mots différents : or, au moins 23 des 28 consonnes de l'alphabet arabe sont strictement similaires par la forme d'autres consonnes du même alphabet, ce qui donne un ordre de grandeur assez impressionnant. A cela s'ajoute les voyelles qui n'existaient pas non plus dans les manuscrits coraniques anciens, l'alphabet arabe étant consonantique. Prenons un autre exemple :
كتبت. Ce mot est constitué (avec points diacritiques) des lettres ka, ta, ba et ta ; littéralement, on pourrait le transcrire
ktbt. Nous pouvons ajouter des voyelles pour lui donner un son : ainsi, katabata
كَتَبَتَ, kitibiti
كِتِبِتِ, koutouboutou
كُتُبُتُ. Les voyelles sont, vous l'aurez remarqué, ces petits signes ajoutés au dessus ou dessous de chacune des lettres. Or, on donnera un sens différent suivant la manière dont on voyellisera ce mot : katabtou (j'ai écrit), katabta (tu as écrit, garçon), katabti (tu as écrit, fille), katabat (elle a écrit).
Ce que l'on nomme lecture du Coran sont des manières que certains lecteurs musulmans ont eu de "diacritiser" et de "voyelliser" le texte coranique primitif qui ne possédait qu'un squelette consonantique que l'on nomme rasm (dans l'exemple choisi, le rasm est ktbt). Suivant les lectures, nous mettrons un point diacritique différemment, nous aurons une autre lettre ; une voyelle différemment, nous aurons un autre mot/sens, etc.
Vocabulaire :
qira'at : lectures (du Coran)
shawadhdh : lectures rejetées/aprocryphes (du Coran)
ijtihad : effort d'interprétation
rasm : squelette consonantique
mutawatir : rapporté suivant le tawatur
tawatur : terme désignant une donnée sûre et certaine, transmise absolument hors de tout doute
- II) Le hadith des 7 lettres (Ahruf)
Il est la seule justification/légitimation des lectures (
qira’at) du Coran. Il présente cependant un certain nombre de difficultés :
-> sa compréhension est peu évidente (al-Suyuti présente pas moins de 35 interprétations dudit hadith) même si l’ensemble des savants sunnites est unanime pour ne pas identifier les 7 lettres aux 7 lectures (celles-ci seraient contenues dans celles-là mais ne sont pas celles-là).
-> le hadith dans sa forme première rapporte un récit de divergence entre deux compagnons du prophète, Omar et Hakim ibn Hizam, quant à la récitation du début de la sourate al-Furqan (= XXV), mais aucun manuel de
qira’at n’en propose (on en trouve cependant dans ce que l'on nomme
shawadhdh, c'est-à-dire les lectures rejetées/apocryphes du Coran).
-> sa datation est, comme celle de tous les hadiths, problématique : suivant la méthodologie de Harald Motzki, nous pouvons supposer qu’elle a commencé à se répandre vers la fin du VII-Ième, début VIII-IIème siècle.
La tradition est probablement «
a demonstration of the failure of the codification process bu ‘Uthman, which was not able to produce a single unified Reading of the Qur’an. », p. 229.
- III) La canonisation des 7 lectures
La canonisation/sélection des 7 lectures fut opérée par ibn Mujahid au X/IVème siècle, et présente également un certain nombre de difficultés :
-> Il y avait un grand nombre de lectures qui circulaient avant cette canonisation (at-Tabari avait lui-même écrit un livre sur 20 lectures rapportées à 20 lecteurs éponymes, mais nous trouvons d’autres traités sur la question avec 25, 8, 5, 20 lecteurs/lectures, etc). Ces lectures pré-canoniques étaient parfois plus anciennes que celles sélectionnées par ibn Mujahid : elles circulaient librement sans aucune volonté de les limiter/restreindre (l’exégèse d’at-Tabari témoigne de cette époque relativement flexible quant à
l'ijtihad (= effort d'interprétation) du texte, l’auteur utilisant des lectures qui deviendront « apocryphes » (
shawadhdh) et rejetant comme ineptes d’autres qui deviendront canoniques).
-> Ibn Mujahid ne donne explicitement
AUCUN critère pour expliquer l’admission et le rejet de lectures dans son canon.
-> En conséquence de quoi de nombreux savants contemporains critiquèrent ibn Mujahid pour sa volonté de restriction de lectures, n’ayant aucune base théologique, et de nombreux traités plus ou moins rivaux virent le jour en supprimant ou ajoutant des lectures au canon d’ibn Mujahid. Le canon mis un certain temps à s’imposer durant lequel d’autres lectures continuèrent à être utilisées, mais avec la pression et le temps, les opposants au canon finirent par rejoindre le « consensus » : «
Those who opposed Ibn Mujahid’s officially promulgated “Canon” and insisted on following their own standards and criteria were tried, flogged, and coerced into adhering to the consensus. », p. 36.
- IV) La question du tawatur.
La transmission par «
tawatur » signifie qu’un récit, une sunnah, une loi ou un enseignement est absolument certain, intouchable, intègre : pour faire simple, c’est une donnée transmise par un nombre tellement élevé de transmetteurs immédiats qu’on ne peut la mettre en doute. L’exemple typique de transmission par
tawatur est celui du Coran : sa transmission est jugée absolument intègre et hors du moindre doute par l’ensemble des savants (et même des croyants musulmans). Le Coran est alors dit
mutawatir (= transmis selon le
tawatur). Qu’en est-il du
tawatur des lectures ?
-> La notion de
tawatur appliqué aux lectures du Coran est relativement tardive, puisqu’elle n’apparaît qu’au milieu du XIII/VIIème siècle. Elle n’existe pas chez ibn Mujahid ni dans aucune bibliographie le concernant.
-> La majorité des savants sunnites, à l’image d’ibn al Jazari (auteur du fameux ajout de 3 lectures), considère (ou plutôt constate) que les lectures n’ont pas été rapportées par le
tawatur, puisque le nombre de transmetteurs immédiats de celles-ci est trop faible (le chiffre est même d’un seul transmetteur immédiat pour certaines lectures). Une telle donnée est très problématique pour la foi islamique : puisqu’on ne peut lire le Coran sans les lectures canoniques (= sans la voyellisation/diacritisation), on se rend compte qu’on ne peut déchiffrer/décoder le texte coranique, c'est-à-dire le squelette consonantique (rasm)
mutawatir qu’au travers seul de lectures qui elles, ne sont pas
mutawatir.
-> En cherchant les transmissions de ces lectures pour établir la question du
tawatur, les spécialistes des qira’at se sont rendus comptes que les transmetteurs de ces lecteurs divergeaient entre eux : «
the more transmissions on the authority of the seven Readers the Qurrā sought, the more variants they obtained. […] If all the transmissions of a variant reading were to be taken into consideration, most verses would have been rendered in so many different ways, all being attributed to one single eponymous Reader.», p. 124. L’auteur donne l’exemple d’une variante d’un mot d’un verset du Coran
qui est transmis de quatre manière différente et contradictoire par 4 transmetteurs d’un seul et même lecteur. D’où le paradoxe suivant lequel plus on cherchait de transmissions pour établir le
tawatur, plus on obtenait de variantes rapportées d’une seule lecture ; à l’inverse, plus on cherchait à unifier le texte et à exclure les variantes, plus on était obligé de supprimer des transmetteurs et de reconnaître que le
tawatur n’existait pas. D’où la sélection de 2 principaux transmetteurs de chaque lecteur, dont certains ne font même pas partis des transmetteurs immédiats, pour établir le texte de chaque lecture. Certains anciens savants continuèrent d’employer des transmetteurs autres que les deux « officiels », mais ceux-ci finirent par tomber dans l’oubli et par entrer dans les lectures apocryphes : «
These variants were slowly vanishing from the standard Qirā'āt manuals and started infiltrating the shawādhdh works. », p. 135.
- V) Les types de variantes
1) changement de cas (nominatif, cas direct etc)
2) changement de voyelles internes
3) changement de forme active/passive
4) changement relatif au shaddah (doublement de consonne)
5) changement de forme verbale
6) changement relatif au tanwîn (marque de l'indétermination)
7) changement relatif au hamzah (lettre spécifique de l'alphabet)
8) changement de voyelles longues
9) dérivation anormale de noms
10) changement du préfixe de l’inaccompli
11) changement du suffixe de l’accompli
12) alternation de lettre via l’homographie ou la phonologie
13) omission de voyelle, perte de consonne via la phonologie
14) Confusion pronom personnel
15) changement de particules
16) changement relatif au ta marboutah (= genre du nom)
17) article défini
18) transposition (= ordre de deux mots inversés) / métathèse (= ordre de deux consonnes renversées dans un mot)
19) variante possédant une lettre seulement commune de racine
20) variante due à l'assimilation
21) variante due à l'amalgame (= deux mots/particules séparées lus comme un seul mot)
22) alternation de temps (accompli/inaccompli)
23) Wazn (= variante sans aucune lettre commune de racine mais possédant le même schème).
- VI) Conclusion : à propos de l'origine des lectures
Quelle est l'origine de ces variantes ?
Pour l'orientalisme classique qui, évidemment, n'adhère pas à la divinité de celles-ci, elles sont en grande partie à mettre sur le fait de la transmission du Coran, écrit en
scriptio defectiva. En cela, et contrairement à ce que certaines peuvent croire, ils avaient été précédé par certains savants musulmans qui, à l'image d'at-Tabari, d'ibn Mujahid, d'ibn Atiyyah ou encore d'ibn al-Arabi, considéraient que ces variantes loin de posséder une origine divine, résultaient de
l'ijtihad (= effort d'interprétation) des lecteurs éponymes sur le
rasm (= texte consonantique sans diacritique/voyelle) coranique (de fait, la croyance en la divinité de ces variantes est seulement attestée à partir du XIII/VIIème siècle). Une telle hypothèse expliquera ainsi largement les possibles fautes de grammaire que nous pouvons trouver dans le Coran : seul 2 des 7 lecteurs canoniques étaient en effet grammairiens. La conclusion ressortant de ces travaux est que, nous l'avons vu,
le texte coranique que chacun a aujourd'hui sous les yeux est UNE seule version d’UNE seule lecture du squelette consonantique (rasm) coranique ; et que CHACUNE des 7 lectures canoniques ne sont pas mutawatir, c'est-à-dire ne sont pas absolument sûres et certaines. Aussi ne serait-on pas étonné de voir certains orientalistes, à l’image de Bellamy ou Eymard, proposer sur des passages auxquels l’exégèse traditionnelle a toujours buté, des lectures différentes du
rasm, plus nuancées et sensées, et arriver à des résultats tout-à-fait probants. Après tout, si de l'aveu des savants musulmans même, les lectures canoniques ne sont pas sûres et certaines, il n'y a aucune difficulté à laisser sa chance à une autre lecture, plus critique et contemporaine.
Auteur : Citizenkan
Date : 30 avr.17, 09:54
Message : Seleucide a écrit :J'ai terminé la lecture du livre de
Shady Hekmat Nasser, intitulé
The Transmission of the Variant Readings of the Qur’ān : The Problem of Tawātur and the Emergence of Shawādhdh (Brill, Leiden, 2013, coll. « Texts and Studies on the Qur’ān », n°9, 252 p.) C'est à ma connaissance l'ouvrage universitaire le plus complet traitant de la question des lectures coraniques. Je ne regrette pas de l'avoir lu, il est tout-à-fait passionnant. Je l'utiliserai bientôt avec d'autres ressources pour travailler un peu le sujet. Ci-joint mes notes de lecture relatives à l'ouvrage en question (ce dernier étant peu accessible, je me suis dit que cela pourrait intéresser des gens).
Pour ceux qui ne connaissent pas le rôle ou l'intérêt de ces lectures, lisez rapidement ce qui suit (les autres peuvent passer à la seconde partie) : vous savez probablement que le Coran est un texte écrit en langue arabe. Originellement, il convient de savoir que le texte coranique ne possédait pas de points diacritiques (= des points placés en haut ou en bas des lettres qui les distinguent les unes des autres). Voyons un exemple : les lettres
خ /
ح /
ج ont exactement la même forme et ne se distinguent entre elles que par le point dessus ou dessous (ou l'absence de point) de la lettre. Nous voyons bien que selon les points diacritiques que l'on mettra, nous aurons des lettres et donc des mots différents : or, au moins 23 des 28 consonnes de l'alphabet arabe sont strictement similaires par la forme d'autres consonnes du même alphabet, ce qui donne un ordre de grandeur assez impressionnant. A cela s'ajoute les voyelles qui n'existaient pas non plus dans les manuscrits coraniques anciens, l'alphabet arabe étant consonantique. Prenons un autre exemple :
كتبت. Ce mot est constitué (avec points diacritiques) des lettres ka, ta, ba et ta ; littéralement, on pourrait le transcrire
ktbt. Nous pouvons ajouter des voyelles pour lui donner un son : ainsi, katabata
كَتَبَتَ, kitibiti
كِتِبِتِ, koutouboutou
كُتُبُتُ. Les voyelles sont, vous l'aurez remarqué, ces petits signes ajoutés au dessus ou dessous de chacune des lettres. Or, on donnera un sens différent suivant la manière dont on voyellisera ce mot : katabtou (j'ai écrit), katabta (tu as écrit, garçon), katabti (tu as écrit, fille), katabat (elle a écrit).
Ce que l'on nomme lecture du Coran sont des manières que certains lecteurs musulmans ont eu de "diacritiser" et de "voyelliser" le texte coranique primitif qui ne possédait qu'un squelette consonantique que l'on nomme rasm (dans l'exemple choisi, le rasm est ktbt). Suivant les lectures, nous mettrons un point diacritique différemment, nous aurons une autre lettre ; une voyelle différemment, nous aurons un autre mot/sens, etc.
Vocabulaire :
qira'at : lectures (du Coran)
shawadhdh : lectures rejetées/aprocryphes (du Coran)
ijtihad : effort d'interprétation
rasm : squelette consonantique
mutawatir : rapporté suivant le tawatur
tawatur : terme désignant une donnée sûre et certaine, transmise absolument hors de tout doute
- II) Le hadith des 7 lettres (Ahruf)
Il est la seule justification/légitimation des lectures (
qira’at) du Coran. Il présente cependant un certain nombre de difficultés :
-> sa compréhension est peu évidente (al-Suyuti présente pas moins de 35 interprétations dudit hadith) même si l’ensemble des savants sunnites est unanime pour ne pas identifier les 7 lettres aux 7 lectures (celles-ci seraient contenues dans celles-là mais ne sont pas celles-là).
-> le hadith dans sa forme première rapporte un récit de divergence entre deux compagnons du prophète, Omar et Hakim ibn Hizam, quant à la récitation du début de la sourate al-Furqan (= XXV), mais aucun manuel de
qira’at n’en propose (on en trouve cependant dans ce que l'on nomme
shawadhdh, c'est-à-dire les lectures rejetées/apocryphes du Coran).
-> sa datation est, comme celle de tous les hadiths, problématique : suivant la méthodologie de Harald Motzki, nous pouvons supposer qu’elle a commencé à se répandre vers la fin du VII-Ième, début VIII-IIème siècle.
La tradition est probablement «
a demonstration of the failure of the codification process bu ‘Uthman, which was not able to produce a single unified Reading of the Qur’an. », p. 229.
- III) La canonisation des 7 lectures
La canonisation/sélection des 7 lectures fut opérée par ibn Mujahid au X/IVème siècle, et présente également un certain nombre de difficultés :
-> Il y avait un grand nombre de lectures qui circulaient avant cette canonisation (at-Tabari avait lui-même écrit un livre sur 20 lectures rapportées à 20 lecteurs éponymes, mais nous trouvons d’autres traités sur la question avec 25, 8, 5, 20 lecteurs/lectures, etc). Ces lectures pré-canoniques étaient parfois plus anciennes que celles sélectionnées par ibn Mujahid : elles circulaient librement sans aucune volonté de les limiter/restreindre (l’exégèse d’at-Tabari témoigne de cette époque relativement flexible quant à
l'ijtihad (= effort d'interprétation) du texte, l’auteur utilisant des lectures qui deviendront « apocryphes » (
shawadhdh) et rejetant comme ineptes d’autres qui deviendront canoniques).
-> Ibn Mujahid ne donne explicitement
AUCUN critère pour expliquer l’admission et le rejet de lectures dans son canon.
-> En conséquence de quoi de nombreux savants contemporains critiquèrent ibn Mujahid pour sa volonté de restriction de lectures, n’ayant aucune base théologique, et de nombreux traités plus ou moins rivaux virent le jour en supprimant ou ajoutant des lectures au canon d’ibn Mujahid. Le canon mis un certain temps à s’imposer durant lequel d’autres lectures continuèrent à être utilisées, mais avec la pression et le temps, les opposants au canon finirent par rejoindre le « consensus » : «
Those who opposed Ibn Mujahid’s officially promulgated “Canon” and insisted on following their own standards and criteria were tried, flogged, and coerced into adhering to the consensus. », p. 36.
- IV) La question du tawatur.
La transmission par «
tawatur » signifie qu’un récit, une sunnah, une loi ou un enseignement est absolument certain, intouchable, intègre : pour faire simple, c’est une donnée transmise par un nombre tellement élevé de transmetteurs immédiats qu’on ne peut la mettre en doute. L’exemple typique de transmission par
tawatur est celui du Coran : sa transmission est jugée absolument intègre et hors du moindre doute par l’ensemble des savants (et même des croyants musulmans). Le Coran est alors dit
mutawatir (= transmis selon le
tawatur). Qu’en est-il du
tawatur des lectures ?
-> La notion de
tawatur appliqué aux lectures du Coran est relativement tardive, puisqu’elle n’apparaît qu’au milieu du XIII/VIIème siècle. Elle n’existe pas chez ibn Mujahid ni dans aucune bibliographie le concernant.
-> La majorité des savants sunnites, à l’image d’ibn al Jazari (auteur du fameux ajout de 3 lectures), considère (ou plutôt constate) que les lectures n’ont pas été rapportées par le
tawatur, puisque le nombre de transmetteurs immédiats de celles-ci est trop faible (le chiffre est même d’un seul transmetteur immédiat pour certaines lectures). Une telle donnée est très problématique pour la foi islamique : puisqu’on ne peut lire le Coran sans les lectures canoniques (= sans la voyellisation/diacritisation), on se rend compte qu’on ne peut déchiffrer/décoder le texte coranique, c'est-à-dire le squelette consonantique (rasm)
mutawatir qu’au travers seul de lectures qui elles, ne sont pas
mutawatir.
-> En cherchant les transmissions de ces lectures pour établir la question du
tawatur, les spécialistes des qira’at se sont rendus comptes que les transmetteurs de ces lecteurs divergeaient entre eux : «
the more transmissions on the authority of the seven Readers the Qurrā sought, the more variants they obtained. […] If all the transmissions of a variant reading were to be taken into consideration, most verses would have been rendered in so many different ways, all being attributed to one single eponymous Reader.», p. 124. L’auteur donne l’exemple d’une variante d’un mot d’un verset du Coran
qui est transmis de quatre manière différente et contradictoire par 4 transmetteurs d’un seul et même lecteur. D’où le paradoxe suivant lequel plus on cherchait de transmissions pour établir le
tawatur, plus on obtenait de variantes rapportées d’une seule lecture ; à l’inverse, plus on cherchait à unifier le texte et à exclure les variantes, plus on était obligé de supprimer des transmetteurs et de reconnaître que le
tawatur n’existait pas. D’où la sélection de 2 principaux transmetteurs de chaque lecteur, dont certains ne font même pas partis des transmetteurs immédiats, pour établir le texte de chaque lecture. Certains anciens savants continuèrent d’employer des transmetteurs autres que les deux « officiels », mais ceux-ci finirent par tomber dans l’oubli et par entrer dans les lectures apocryphes : «
These variants were slowly vanishing from the standard Qirā'āt manuals and started infiltrating the shawādhdh works. », p. 135.
- V) Les types de variantes
1) changement de cas (nominatif, cas direct etc)
2) changement de voyelles internes
3) changement de forme active/passive
4) changement relatif au shaddah (doublement de consonne)
5) changement de forme verbale
6) changement relatif au tanwîn (marque de l'indétermination)
7) changement relatif au hamzah (lettre spécifique de l'alphabet)
8) changement de voyelles longues
9) dérivation anormale de noms
10) changement du préfixe de l’inaccompli
11) changement du suffixe de l’accompli
12) alternation de lettre via l’homographie ou la phonologie
13) omission de voyelle, perte de consonne via la phonologie
14) Confusion pronom personnel
15) changement de particules
16) changement relatif au ta marboutah (= genre du nom)
17) article défini
18) transposition (= ordre de deux mots inversés) / métathèse (= ordre de deux consonnes renversées dans un mot)
19) variante possédant une lettre seulement commune de racine
20) variante due à l'assimilation
21) variante due à l'amalgame (= deux mots/particules séparées lus comme un seul mot)
22) alternation de temps (accompli/inaccompli)
23) Wazn (= variante sans aucune lettre commune de racine mais possédant le même schème).
- VI) Conclusion : à propos de l'origine des lectures
Quelle est l'origine de ces variantes ?
Pour l'orientalisme classique qui, évidemment, n'adhère pas à la divinité de celles-ci, elles sont en grande partie à mettre sur le fait de la transmission du Coran, écrit en
scriptio defectiva. En cela, et contrairement à ce que certaines peuvent croire, ils avaient été précédé par certains savants musulmans qui, à l'image d'at-Tabari, d'ibn Mujahid, d'ibn Atiyyah ou encore d'ibn al-Arabi, considéraient que ces variantes loin de posséder une origine divine, résultaient de
l'ijtihad (= effort d'interprétation) des lecteurs éponymes sur le
rasm (= texte consonantique sans diacritique/voyelle) coranique (de fait, la croyance en la divinité de ces variantes est seulement attestée à partir du XIII/VIIème siècle). Une telle hypothèse expliquera ainsi largement les possibles fautes de grammaire que nous pouvons trouver dans le Coran : seul 2 des 7 lecteurs canoniques étaient en effet grammairiens. La conclusion ressortant de ces travaux est que, nous l'avons vu,
le texte coranique que chacun a aujourd'hui sous les yeux est UNE seule version d’UNE seule lecture du squelette consonantique (rasm) coranique ; et que CHACUNE des 7 lectures canoniques ne sont pas mutawatir, c'est-à-dire ne sont pas absolument sûres et certaines. Aussi ne serait-on pas étonné de voir certains orientalistes, à l’image de Bellamy ou Eymard, proposer sur des passages auxquels l’exégèse traditionnelle a toujours buté, des lectures différentes du
rasm, plus nuancées et sensées, et arriver à des résultats tout-à-fait probants. Après tout, si de l'aveu des savants musulmans même, les lectures canoniques ne sont pas sûres et certaines, il n'y a aucune difficulté à laisser sa chance à une autre lecture, plus critique et contemporaine.
Bonjour Seleucide, je vous avais donné un lien qui répond à ce genre d'arguments, et je vous le redonne ici :
http://www.maison-islam.com/articles/?p=181
En voici des passages :
La récitation du Coran peut être faite selon de légères variantes (al-qirâ'ât ou al-ahruf), liées à la lexicologie, à la morphologie, à la syntaxe, etc., qui n'influent en rien sur le sens global du texte.
Pour un certain nombre d'orientalistes, l'existence de ces variantes dans la récitation du Coran sont la preuve de l'imprécision des copies diffusées par le calife Uthmân (644-656). "C'est bien, disent-ils, parce que le texte arabe de ces copies ne contenait pas de signes diacritiques (points qui différencient entre elles certaines lettres possédant la même forme) ni de voyelles courtes que ces variantes de lecture sont apparues."
Le problème c'est que si le constat de l'existence de variantes de récitation est vrai, l'explication qui en est avancée par ces orientalistes est erronée. En effet, si c'était le simple fait de pouvoir "deviner" le mot qu'on voulait à partir des copies coraniques qui était à l'origine des variantes de récitation, comment expliquer que d'innombrables fois, un mot écrit avec la même graphie ne connaisse pas les mêmes variantes ? Ainsi, le mot écrit "mlk" figure dans la sourate al-Fâtiha et aussi dans la sourate an-Nâs : pourtant, les variantes "mâlik" et aussi "malik" existent à propos de la sourate al-Fâtiha (première sourate dans l'ordre des copies coraniques), alors qu'en ce qui concerne la sourate an-Nâs (dernière sourate dans l'ordre des copies coraniques), la seule récitation possible est "malik". Si c'était l'imprécision des copies qui est à l'origine des variantes de récitation, pourquoi, pour un mot écrit exactement de la même manière ("mlk"), lit-on "malik" et mâlik" dans la sourate al-Fâtiha, mais seulement "malik" et pas "mâlik" dans la sourate an-Nâs ? Très nombreux sont les exemples de ce genre.
En fait c'est le Prophète lui-même qui avait, de son vivant, enseigné à différents Compagnons différentes variantes de récitation du Coran.
il faut savoir qu'à l'époque du Prophète, différents dialectes de la langue arabe existaient en Arabie. Alors que les Arabes du Hedjaz avaient recours à l'élision de la lettre hamza, ceux d'Arabie orientale la prononçaient fortement ; "sal", disaient les premiers, "is'al", les seconds. Des différences de prononciations existaient entre différentes régions : ici "kuffèr", là "kuffâr" ; ici "hudè", là "hudâ" ; ici "SirâT", là "zirâT" ; ici "Salât", là "SaLât" (avec le lâm emphatique). Des mots comme "tarîq" et "sûq" étaient féminins dans le Hedjaz, masculins en Arabie orientale.
Que désignent les termes "7 harf" dans le Hadîth "Ce Coran a été descendu selon 7 harf" ?
Les variantes de récitation portent le nom de "qirâ'ât" (comme les a nommée Ubayy devant le Prophète : Muslim, n° 820). Et cette multiplicité des récitations est due à la permission des sept "harf" (pluriel : ahruf) (comme les a nommées le Prophète dans les hadîths, notamment celui-là même qu'a rapporté Muslim, n° 820, où il a justifié devant Ubayy l'existence de ces variantes de récitation par le fait que le Coran peut être récité selon sept harf). C'est donc le fait que le Coran a été révélé selon 7 "harf" qui entraîne qu'il y existe des variantes de récitation ("qirâ'ât"). Les harf sont donc les catégories auxquelles différentes qirâ'ât peuvent être reliées.
Quand le Prophète a dit : "Ce Coran a été descendu avec 7 harf. Récitez donc celle qui est facile pour vous", il ne voulait nullement dire que chaque mot ou chaque phrase du Coran pourrait être récitée selon sept variantes différentes (Fath ul-bârî, 9/36). Ce que le Prophète a voulu dire, c'est que le total des catégories des variantes existant dans la totalité du texte coranique s'élève à 7.
-
Et quelles sont ces 7 catégories de variantes ?
Il y a de nombreux avis sur le sujet. Nous nous contenterons d'en citer ici deux...
– Un premier avis :
D'après Ibn Jarîr at-Tabarî, il s'agit de 7 dialectes arabes de l'époque.
A cet avis on objecte de façon pertinente que Omar ibn ul-Khattâb et Hishâm ibn Hakîm étaient tous deux qurayshites, et pourtant le récit (cité plus haut) montre que le Prophète leur avait enseigné la sourate al-Furqân avec des variantes.
– Un second avis :
D'après Ibn Qutayba et Abu-l-Fadhl ar-Râzî, il s'agit de 7 catégories de variantes de récitation (cf. Al-Itqân, p. 147, Fath ul-bârî, 9/37). Quel est le détail de ces 7 catégories, il y a ensuite divergence entre ces ulémas...
--- D'après Abu-l-Fadhl ar-Râzî, il s'agit des catégories suivantes :
– 1) variantes d'accents (ikhtilâf ul-lahajât) : par exemple "nâs" / "nès" ; "yûmin" / "yu'min" ; "salaka-kum" / "salak'kum" ;
– 2) variantes dans le genre d'un nom (ikhtilâf ul-asmâ') : c'est-à-dire féminin / masculin ;
– 3) variantes de termes (al-ibdâl) : comme "al-'ihn" / "as-Sûf" (la seconde variante étant rapportée de Ibn Mas'ûd) ; ou comme "wa tal'hin" / "wa tal'in" (la seconde variante étant relatée par Alî : Fat'h ul-bârî tome 9 p. 37).
Ces 3 catégories des variantes sont liées aux différences dialectales existant alors entre différentes régions d'Arabie...
Les 4 catégories qui vont suivre sont quant à elles dues non plus aux seules différences dialectales mais à une multiplicité – due à la souplesse de la révélation coranique – de récitations, révélées ainsi au Prophète et transmise par ce dernier à ses Compagnons :
– 4) variantes liées aux cas syntaxiques (ikhtilâfu wujûh il-a'râb) : comme "al-'ayna" / "al-'aynu" ;
– 5) variantes de temps de conjugaison des verbes (ikhtilâfu tas'rîf il-af'âl) : "bâ'id" / "ba'ada" ;
– 6) variantes liées à une inversion de mots (ikhtilâf ut-taqdîm wa-t-ta'khîr) : comme "wa jâ'at sak'rat ul-mawti bi-l-haqqi" / "wa jâ'at sak'rat ul-haqqi bi-l-mawti", cette seconde variante étant celle relatée par Abû Bakr (Fath ul-bârî, tome 9 p. 37) ;
– 7) variantes liées à la majoration ou à la diminution d'un ou deux mots (ikhtilâf un-naqs wa-z-ziyâda) : comme "wa mâ khalaqa-dh-dhakara wa-l-unthâ" / "wa-dh-dhakari wa-l-unthâ" (la seconde variante étant rapportée du Prophète par Abu-d-Dardâ' ; Ibn Mas'ûd aussi récitait de la sorte).
-
Si on retient cette interprétation des "7 harf", elle implique que, dans le premier temps, il n'y avait aucune harf à propos de la partie du texte coranique déjà révélée, puisque aucune variante n'y était possible.
avait donc aucune harf, donc aucune variante de récitation possible dans le texte coranique jusqu'alors révélé.
– Puis, suite à la demande du Prophète, Dieu accorda l'autorisation d'une harf, c'est-à-dire d'une catégorie de variantes. Suite à l'insistance du Prophète, 2 harf furent accordées, puis 3, enfin 7 harf furent accordées.
Conclusion :
Les orientalistes considèrent que c'est l'absence de signes diacritiques dans les premières copies du Coran qui est à l'origine d'une imprécision du texte, d'où l'existence de variantes dans sa récitation.
Mais ce n'est là que théorie et non conclusion prouvée.
Et les faits consistent en une inversion totale de la perspective : c'est en réalité le Prophète lui-même qui a enseigné des variantes de récitation.
Auteur : Seleucide
Date : 30 avr.17, 10:50
Message : Citizenkan a écrit :La récitation du Coran peut être faite selon de légères variantes (al-qirâ'ât ou al-ahruf), liées à la lexicologie, à la morphologie, à la syntaxe, etc., qui n'influent en rien sur le sens global du texte.
Il y a certaines variantes, qu'elles soient canoniques ou non, qui influent sur la théologie coranique.
Voir à titre d'exemple :
http://www.forum-religion.org/post1158050.html#p1158050
Citizenkan a écrit :Pour un certain nombre d'orientalistes, l'existence de ces variantes dans la récitation du Coran sont la preuve de l'imprécision des copies diffusées par le calife Uthmân (644-656). "C'est bien, disent-ils, parce que le texte arabe de ces copies ne contenait pas de signes diacritiques (points qui différencient entre elles certaines lettres possédant la même forme) ni de voyelles courtes que ces variantes de lecture sont apparues."
Ce n'est pas seulement l'avis de certains orientalistes, mais également de savants musulmans renommés comme ibn Attiyah, ibn Mujahid, ibn al Arabi etc. Aucun de ceux-ci ne voyaient une origine divine dans les variantes de lecture, mais une origine purement humaine (= l'ijtihad des lecteurs sur le rasm).
Cela étant, en admettant même que le prophète soit à l'origine de ces variantes, il reste que celles-ci n'ont pas été rapportées suivant le tawatur et qu'elles ne possèdent pas le même statut "hors du moindre doute" que celui du rasm coranique. Les savants musulmans eux-mêmes, ainsi que l'auteur de l'article que tu cites, corroborent cela. Il y a donc ici une sévère difficulté.
Citizenkan a écrit :Le problème c'est que si le constat de l'existence de variantes de récitation est vrai, l'explication qui en est avancée par ces orientalistes est erronée. En effet, si c'était le simple fait de pouvoir "deviner" le mot qu'on voulait à partir des copies coraniques qui était à l'origine des variantes de récitation, comment expliquer que d'innombrables fois, un mot écrit avec la même graphie ne connaisse pas les mêmes variantes ? Ainsi, le mot écrit "mlk" figure dans la sourate al-Fâtiha et aussi dans la sourate an-Nâs : pourtant, les variantes "mâlik" et aussi "malik" existent à propos de la sourate al-Fâtiha (première sourate dans l'ordre des copies coraniques), alors qu'en ce qui concerne la sourate an-Nâs (dernière sourate dans l'ordre des copies coraniques), la seule récitation possible est "malik".
En l'occurrence, il existe la variante mâlik-malik dans la sourate an-Nâs, 114.
Seulement, elle n'est pas canonique.
Cela montre donc bien une histoire de transmission/ijtihad du rasm beaucoup plus chaotique et complexe que ne le subodore l'auteur de cet article.
Auteur : Citizenkan
Date : 30 avr.17, 22:07
Message : Seleucide a écrit :
En l'occurrence, il existe la variante mâlik-malik dans la sourate an-Nâs, 114.
Seulement, elle n'est pas canonique.
Cela montre donc bien une histoire de transmission/ijtihad du rasm beaucoup plus chaotique et complexe que ne le subodore l'auteur de cet article.
Ramenez ici ces variantes, qu'elles soient canoniques ou non, qui influent sur la théologie coranique, et nous en discuteront,
Aucun des auteurs musulmans que vous citez n'avancent que le Coran n'est pas d'origine divine, et que leur opinion ébranle la foi islamique, en cela l'argument se retourne contre vous...
C'est même justement la force de la sphère scientifique qui discute sur des points même sensibles, mais qui ne remettent pas en question l'idée de départ, soit que le Coran est immuable, je vous l'ai démontré en partie ici :
http://mizab.over-blog.com/2017/03/l-in ... tie-1.html
Ensuite, le tawatur n'est pas une condition de validité d'un texte coranique, étant donné que le texte original était déjà dans les poitrines du vivant du prophète, il devint une condition, si tant est qu'il en est une (je n'ai pas étudié la question en profondeur), lorsqu'il a s'agit d'en faire une version canonique...
Le khabar ahad est un élément inhérent des sources islamiques, n'en déplaisent à certaines écoles musulmanes :
http://mizab.over-blog.com/2014/12/ibn- ... tie-1.html
Donc, vous confondez les causes et les effets et soulevez un faux problème étant donné que le Coran était déjà conservé dans les poitrines, et que sa canonisation est resté la même sans que la moindre lettre n'en soit changée, et c'est de loin le cas pour la Bible...
Michel Orcel pointe du doigt cet état schizophrène : « On exerce son agressivité sur un objet haï en tentant de le démolir de façon à la fois symbolique et rationnelle. La psychanalyse aurait là-dessus son mot à dire. Que peut signifier pour Mingana, Prémare, Gillot ou autres Gallez cette tentative de disqualifier, de discréditer, l’islam et le Coran en les historicisant ? Je l’ignore, mais il va de soi qu’il y a souvent là-dessous du « règlement de compte »…
en sachant que ce problème de variantes n'a jamais posé de problème aux musulmans, ils y ont même consacré des ouvrages entiers, des dictionnaires étymologiques, philologiques, des écoles de lectures, etc.
Ensuite, l'auteur vous fait la démonstration de la variante de mâlik et de malik, qui non seulement est canonique, Warsh lit malik au maghreb et Hafs lui mâlik au Moyen-Orient, et retour à l'envoyeur, qu'elle soit canonique ou non, cela n'a aucune incidence sur le sens du mot, avant de parler d'une incidence sur le dogme, ou théologique...
En définitive, ces travaux d'orientalistes quoi qu'intéressant ne font que pécher/pêcher en eau trouble...
Auteur : Seleucide
Date : 01 mai17, 00:20
Message : Citizenkan a écrit :Ramenez ici ces variantes, qu'elles soient canoniques ou non, qui influent sur la théologie coranique, et nous en discuteront
Il y a certaines variantes, qu'elles soient canoniques ou non, qui influent sur la théologie coranique.
Voir à titre d'exemple : http://www.forum-religion.org/post1158050.html#p1158050
http://www.forum-religion.org/post1158796.html#p1158796
Citizenkan a écrit :Aucun des auteurs musulmans que vous citez n'avancent que le Coran n'est pas d'origine divine, et que leur opinion ébranle la foi islamique, en cela l'argument se retourne contre vous...
Ce n'est pas seulement l'avis de certains orientalistes, mais également de savants musulmans renommés comme ibn Attiyah, ibn Mujahid, ibn al Arabi etc. Aucun de ceux-ci ne voyaient une origine divine dans les variantes de lecture, mais une origine purement humaine (= l'ijtihad des lecteurs sur le rasm).
http://www.forum-religion.org/post1158796.html#p1158796
Citizenkan a écrit :C'est même justement la force de la sphère scientifique qui discute sur des points même sensibles, mais qui ne remettent pas en question l'idée de départ, soit que le Coran est immuable, je vous l'ai démontré en partie ici :
J'ai déjà dénoncé les partis pris, i.e. l'apologétique, de l'article en question. Voir :
http://www.forum-religion.org/post11526 ... f#p1152644
Tu prends ce qui t'arranges dans les travaux cités et tu rejettes ce qui te déranges. Il n'y a rien de scientifique dans une telle attitude.
Citizenkan a écrit :Ensuite, le tawatur n'est pas une condition de validité d'un texte coranique, étant donné que le texte original était déjà dans les poitrines du vivant du prophète, il devint une condition, si tant est qu'il en est une (je n'ai pas étudié la question en profondeur), lorsqu'il a s'agit d'en faire une version canonique...
Tu te trompes lourdement en affirmant que le tawatur n'est pas une condition de validité du texte coranique.
Tout ce qui est mutawatir n'est pas coranique, mais ce qui est coranique est
obligatoirement mutawatir ; tout ce qui n'est pas mutawatir n'est pas coranique.
Citizenkan a écrit :Le khabar ahad est un élément inhérent des sources islamiques, n'en déplaisent à certaines écoles musulmanes :
Je n'ai jamais dit que le khabar ahad n'existait pas dans les sources islamiques.
Encore une fois, tu me reproches des positions que je n'ai pas tenu.
Et si on se concentrait sur mes propos, maintenant ?
Citizenkan a écrit :Michel Orcel pointe du doigt cet état schizophrène : « On exerce son agressivité sur un objet haï en tentant de le démolir de façon à la fois symbolique et rationnelle. La psychanalyse aurait là-dessus son mot à dire. Que peut signifier pour Mingana, Prémare, Gillot ou autres Gallez cette tentative de disqualifier, de discréditer, l’islam et le Coran en les historicisant ? Je l’ignore, mais il va de soi qu’il y a souvent là-dessous du « règlement de compte »…
Oui, je connais la chanson.
Citizenkan a écrit :Ensuite, l'auteur vous fait la démonstration de la variante de mâlik et de malik, qui non seulement est canonique, Warsh lit malik au maghreb et Hafs lui mâlik au Moyen-Orient, et retour à l'envoyeur, qu'elle soit canonique ou non, cela n'a aucune incidence sur le sens du mot, avant de parler d'une incidence sur le dogme, ou théologique...
La variante mâlik-malik est canonique pour la fatiha, elle ne l'est pas pour la sourate an-Nâs.
Pourtant, elle est rapportée et existe dans les deux cas.
Il n'y a pas de rapport entre cette variante et celles engendrant des divergences théologiques. Je n'ai jamais rien mentionné de tel : encore une fois, tu spécules et me reproches ce que je n'ai pas écrit.
Citizenkan a écrit :En définitive, ces travaux d'orientalistes quoi qu'intéressant ne font que pécher/pêcher en eau trouble...
Démontre-le.
Auteur : Citizenkan
Date : 01 mai17, 01:01
Message : Seleucide a écrit :
Démontre-le.
Pour des questions pratiques, ramenez les exemples de variantes, qu'elles soient canoniques ou non, qui influent sur la théologie coranique, et nous en discuterons ici.
Ensuite, pour l'avis de ces savants illustres, je ne parle pas des variantes, mais du Coran même, cela démontre que le débat autour d'un point subsidiaire ne posait aucun problème, mais tous s'accorde à dire que le Coran est immuable et d'origine divine, en d'autres termes, cette divergence n'affecte en rien ce postulat...
bien qu'en réalité, il incombe de se pencher plus profondément sur le sujet, ce que je ferais à l'occasion, mais dors et déjà, je vous donne des indications plus bas !
Ensuite, le fait de s'attarder sur un auteur que j'utilise et qui ne constitue en rien la conclusion de mon étude, si ce n'est que partielle, n'est pas une dénonciation, si ce n'est que, peut-être, dan un monde virtuel où on s'accroche à ce qu'on peut !
Pour le tawatur, je ne faisais qu'émettre une réflexion, en sachant que je n'ai pas étudié le sujet, bien que le chose soit un peu plus compliqué que vous l'exposez, l'auteur en question en parle, dans un autre lien que je vous présente plus bas...
Pour le khabar ahad, on est d'accord, merci d'avoir dissipé l'amalgame, en sachant que vous n'étiez pas spécialement visé...
Pour la chanson, je suis d'accord également,
Pour malik, ok, nous sommes d'accord, merci d'avoir dissipé l'amalgame, sauf que vous ramenez, et je l'ai constaté chez pas mal d'auteur, des parenthèses du genre : et cela peut poser problème pour la foi islamique, dans le sens où on jette un pavé dans la marre sans en ramener la preuve, mais l'essentiel est de laisser son auditoire perplexe, c'est le but recherché, maintenant j'attends les variantes qui ont une incidence théologique, merci.
C'est ce que je suis en train de démontrer, comme promis :
http://www.maison-islam.com/articles/?p=177
Toute variante de récitation doit donc remplir désormais 3 conditions pour être récitée en tant que variante du texte coranique :
– 1) être établie par une chaîne de transmission authentique (sahîh) depuis sa source ;
– 2) pouvoir être récitée à partir de la graphie des copies uthmaniennes (ou au moins de l'une* de ces copies) ;
– 3) avoir été retenue par les spécialistes de la discipline.
* Car il existe quelques variantes minimes entre certaines des copies uthmaniennes. Cela est connu et répertorié dans les ouvrages classiques traitant du Tafsîr, de 'Ilm ul-qirâ'ât ou de 'Ilm ur-rasm.
L'exemple le plus connu de telles variantes est celui de la présence du terme "مِنْ", pour le passage de Coran 9/100 dans la copie destinée à La Mecque, alors qu'il est absent dans les autres copies. Ibn Kathîr – dont nous verrons le nom plus bas – lit ce terme dans ce passage, mais pas les autres spécialistes.
D'autres exemples existent. Voir Al-Itqân, p. 238, où est reproduit le propos de Ibn ul-Jazârî sur le sujet, et où sont cités 2 autres exemples encore.
La 3ème condition a été mentionnée par as-Suyûtî. On peut également y trouver allusion dans ce que Ibn ul-Jazarî a écrit. Cette 3ème condition explique l'existence de la catégorie c que nous allons voir plus bas : authentique et pouvant être lue à partir de l'écriture uthmanienne, mais n'étant pourtant pas acceptée comme qirâ'ah.
Or, peu à peu, jusqu'aux 2ème-3ème siècles après la mort du Prophète, ce que l'on peut appeler "des écoles des variantes" se constituent autour de spécialistes (imam, plur. aïmma) :
Chacune de ces écoles s'est distinguée des autres par rapport au fait que chacune rapporte une partie des variantes de récitation qui ont été enseignées.
-
Tout ce qui est relaté en tant que variante de récitation du texte coranique peut être classé dans l'une des catégories suivantes :
(Attention : Ci-après, "mash'hûr" a un sens voisin de celui que les juristes hanafites donnent à ce terme (et pas celui que les muhaddithûn lui donnent) : chez les juristes hanafites, les textes rapportés par une chaîne de transmission fiable (sahîh) sont, en fonction du nombre de rapporteurs qui sont présents à chaque niveau de la chaîne, de 3 types :
– le texte"mutawâtir" ou "rapporté au tawâtur" : la définition de ce texte mutawâtir est la même que chez les muhaddithûn ;
– le texte "wâhid" est le texte qui, pendant les 3 premières générations (Compagnons, Tâbi'ûn et Atbâ' ut-tâbi'în), n'a jamais atteint ce stade de diffusion importante, tawâtur, et n'est resté connu que d'un nombre relativement limité de personnes ;
– le texte "mash'hûr" est celui qui était au tout début "wâhid" mais qui, par la suite, à partir de Compagnons ultérieurs, ou à partir d'un des niveaux de la génération des Tâbi'ûn, ou tout au plus à partir de l'un des niveaux de la génération des Atbâ' ut-tabi'în, a atteint le tawâtur. Le fait que le texte atteigne le degré de tawâtur après cette génération, cela n'est plus pris en considération dans cette classification.)
– a) la variante mutawâtir :
--- elle est rapportée par un si grand nombre de personnes qu'il est impossible que cet ensemble de personnes se soient trompées. La présence de cette condition rend superflue les 2 autres conditions suscitées.
b) la variante mash'hûr : elle remplit les 3 conditions suscitées :
--- elle est rapportée par une chaîne de transmission authentique jusqu'à la source voulue ;
--- elle peut être récitée à partir de la graphie des copies uthmaniennes ;
--- enfin, les spécialistes et référents (imams) des variantes l'ont retenue, car elle était connue et diffusée dans leur milieu (takûnu mash'hûratan 'inda aïmmati hâdha-sh-sha'n).
– c) la variante wâhid (pluriel : âhâd) (parfois également désignée comme : "shâddh") :
--- elle est rapportée par une chaîne qui est authentique jusqu'à la source voulue,
--- et elle peut tout à fait être lue à partir de la graphie des copies uthmaniennes,
--- cependant elle n'a pas été retenue par les spécialistes (aïmmat ul-qirâ'ât), car n'étant pas diffusée (ce n'est pas le fait de n'avoir pas pour source le Prophète qui a fait qu'elle n'a pas été diffusée parmi ces spécialistes ; car si c'était cela la cause, la première condition ne serait elle non plus pas satisfaite ; or ici la première condition est remplie).
d) la variante shâddh (parfois également désignée comme : "wâhid") :
--- elle est rapportée par une chaîne qui est authentique jusqu'à la source voulue,
--- cependant elle ne peut pas être lue à partir de la graphie des copies uthmaniennes (Al-Itqân, p. 242).
Ainsi :
----- "wa-dh-dhakari wa-l-unthâ" (relaté par Abu-d-Dardâ en tant que variante récitée par le Prophète : al-Bukhârî, 4659, 4660) ;
----- "mâ ukhfiya lahum min qurrâti a'yun" (relaté par Abû Hurayra en tant que variante récitée par le Prophète : al-Hâkim : Al-Itqân, p. 242 ; voir aussi ce que al-Bukhârî a rapporté sous le n° 4501) ;
----- et bien d'autres exemples, que nous avons mentionnés dans l'autre article ;
– e) la variante shâddh :
--- elle est rapportée par une chaîne qui n'est pas authentique :
----- "malaka yawm ad-dîn" (Al-Itqân, p. 242) ;
– f) la variante mawdhû' :
--- il est établi qu'elle a été inventée [car n'ayant pas été enseignée] :
----- les variantes relatée par al-Khuzâ'î appartiennent à cette catégorie (Al-Itqân, p. 242).
Seules les deux premières (a & b) de ces catégories de variantes peuvent être récitées en tant que texte coranique.
-
Ces 2 catégories de variantes (a & b) sont constituées de l'ensemble de ce qui est relaté par 10 "écoles" :
Il s'agit des écoles dites de :
– Nâfi' (mort en 169 de l'hégire),
– Ibn Kathîr (mort en 120 de l'hégire),
– Ibn 'Âmir (mort en 118 de l'hégire)
– Abû 'Amr (mort en 154 de l'hégire),
– Hamza (mort en 156 de l'hégire),
– 'Âssim (mort en 127 de l'hégire),
– Kissâ'ï (mort en 189 de l'hégire),
– Ya'qûb (mort en 225 de l'hégire),
– Khalaf (mort en 229 de l'hégire),
– et Abû Ja'far (mort en 130 de l'hégire).
Les chaînes de transmission de chacun de ces grands référents remontant jusqu'à tel Compagnon du Prophète sont visibles dans An-Nashr fi-l-qirâ'ât il-'ashar, de Ibn ul-Jazarî.
Chacun de ces 10 grands référents a 2 élèves "transmetteurs-référents".
Ce qui nous donne en fait : 20 écoles de récitation (l'école de chaque "maître" n'existant que par ses 2 "transmetteurs-référents").
Ainsi :
--- Hafs est un élève de 'Âssim,
--- et Warsh est un élève de Nâfi'.
Auteur : Seleucide
Date : 02 mai17, 03:43
Message : Citizenkan a écrit :Pour des questions pratiques, ramenez les exemples de variantes, qu'elles soient canoniques ou non, qui influent sur la théologie coranique, et nous en discuterons ici.
Pour revenir à la question traitée, à savoir s'il existe parmi les lectures canoniques des variantes modifiant la théologie coranique, je répondrai avec l'auteur par l'affirmative : bien qu'elles soient très rares, de telles variantes existent indubitablement. Je cite en effet, par exemple, p. 224 :
« The 8% of Active/Passive variants in the Qur’ān is very interesting since these variants could have theological implications in determing the subject of the verb or simply suppressing it by changing the voice. For example, (Q. 113:2) “min sharri mā khalaqa/khuliqa” would translate to (From the evil of that which He created) in the active voice, or to (From the evil of that which was created) in the passive voice. This difference in meaning would defnitely raise the question as to whether God could or could not, might or might not, create “evil”. Not surprisingly, we find a discussion on this subject in Fakhr al-Dīn al-Rāzi’s tafsīr. »
Autrement dit : suivant la lecture qu'on fera de Coran CXIII, 2, c'est-à-dire suivant la forme active ou passive que l'on accordera au verbe khalaqa, nous obtiendrons des théologies/théodicées coraniques complètement différentes.
http://www.forum-religion.org/post1158050.html#p1158050
J'en profite pour souligner qu'il est évident que nombre de lectures extra-canoniques (
shawadhdh) peuvent modifier la théologie dans la mesure où celles-ci peuvent contenir
des variantes, dites anormales, qui modifient le squelette consonantique du Coran,
rasm.
Citizenkan a écrit :Ensuite, pour l'avis de ces savants illustres, je ne parle pas des variantes, mais du Coran même, cela démontre que le débat autour d'un point subsidiaire ne posait aucun problème, mais tous s'accorde à dire que le Coran est immuable et d'origine divine, en d'autres termes, cette divergence n'affecte en rien ce postulat...
D'accord, mais c'est hors-sujet.
Le sujet de ce topic concerne les variantes de lecture et non pas l'origine du Coran.
Citizenkan a écrit :Ensuite, le fait de s'attarder sur un auteur que j'utilise et qui ne constitue en rien la conclusion de mon étude, si ce n'est que partielle, n'est pas une dénonciation, si ce n'est que, peut-être, dan un monde virtuel où on s'accroche à ce qu'on peut !
Là encore, c'est hors-sujet.
Citizenkan a écrit :Pour le khabar ahad, on est d'accord, merci d'avoir dissipé l'amalgame, en sachant que vous n'étiez pas spécialement visé...
Il n'y a rien dans mes propos qui puisse alimenter un tel "amalgame".
La confusion provient de toi et de toi seul.
Citizenkan a écrit :Pour malik, ok, nous sommes d'accord, merci d'avoir dissipé l'amalgame, sauf que vous ramenez, et je l'ai constaté chez pas mal d'auteur, des parenthèses du genre : et cela peut poser problème pour la foi islamique, dans le sens où on jette un pavé dans la marre sans en ramener la preuve, mais l'essentiel est de laisser son auditoire perplexe, c'est le but recherché, maintenant j'attends les variantes qui ont une incidence théologique, merci.
Au-delà des possibles variantes théologiques, le principal problème soulevé par cette étude réside dans le fait que
le rasm mutawatir ne peut être lu que par le moyen de lectures qui ne sont pas mutawatir. Autrement dit : non seulement ces lectures n'ont pas le même statut sacré que le
rasm coranique, mais plus encore elles peuvent être remises en question et sont douteuses.
"
In other words, one cannot read the Qur’ān without the canonical Readings; the Qur’ān is coded, and one needs these canonical Readings to decode it. In theory, the Qur’ān is mutawātir, i.e. it is absolute and it yields necessary and undisputed knowledge; however, the means by which the Qur’ān is decoded and read are not mutawātirah.", p. 111.
Citizenkan a écrit :Toute variante de récitation doit donc remplir désormais 3 conditions pour être récitée en tant que variante du texte coranique :
– 1) être établie par une chaîne de transmission authentique (sahîh) depuis sa source ;
– 2) pouvoir être récitée à partir de la graphie des copies uthmaniennes (ou au moins de l'une* de ces copies) ;
– 3) avoir été retenue par les spécialistes de la discipline.
Le problème, c'est que les conditions de validité d'une variante ont pu évoluer avec le temps, notamment pour l'isnad ou l'accord avec la langue arabe.
Citizenkan a écrit :– le texte"mutawâtir" ou "rapporté au tawâtur" : la définition de ce texte mutawâtir est la même que chez les muhaddithûn ; [...] – a) la variante mutawâtir :
--- elle est rapportée par un si grand nombre de personnes qu'il est impossible que cet ensemble de personnes se soient trompées. La présence de cette condition rend superflue les 2 autres conditions suscitées.
S'il existe des variantes
mutawatir, elles doivent être relativement rares : des exemples seraient ici les bienvenus.
Cela étant, quant bien même cela serait, cela ne change rien au fait que les lectures canoniques ne sont pas
mutawatir, et donc, que l'on peut douter d'elles même d'un point de vue islamique.
Citizenkan a écrit :Ces 2 catégories de variantes (a & b) sont constituées de l'ensemble de ce qui est relaté par 10 "écoles" : [...] Chacun de ces 10 grands référents a 2 élèves "transmetteurs-référents".
Ce qui nous donne en fait : 20 écoles de récitation (l'école de chaque "maître" n'existant que par ses 2 "transmetteurs-référents").
Pour être plus précis, chacun des lecteurs possède 2 transmetteurs
canoniques.
Les anciens savants ne répugnaient pas à employer d'autres transmetteurs (i.e. qui transmettent un texte différent de la même lecteur d'un lecteur), mais comme il est mentionné plus haut, ceux-ci finirent par tomber dans l’oubli et par entrer dans les lectures apocryphes : «
These variants were slowly vanishing from the standard Qirā'āt manuals and started infiltrating the shawādhdh works. », p. 135.
D'où ils résulte, comme je le disais plus haut,
que le texte coranique que tu as sous les yeux est UNE version (due aux 2 seuls transmetteurs canoniques) d'UNE lecture (parmi les 7 canoniques et la masse innombrable de lectures apocryphes et possibles) du Coran. Auteur : Thedjezeyri14
Date : 05 mai17, 12:27
Message : Suposons que les 7 versions apocryphe ait survecu et que 7 groupes de musulmans utilisaient chacun une versions . Quelle difference on aurait eut ??
Auteur : Seleucide
Date : 05 mai17, 21:57
Message : Thedjezeyri14 a écrit :Suposons que les 7 versions apocryphe ait survecu et que 7 groupes de musulmans utilisaient chacun une versions . Quelle difference on aurait eut ??
Est-ce que tu parles de 7 versions transmises différemment d'une même lecture ou bien de 7 lectures ?
Auteur : yacoub
Date : 06 mai17, 01:33
Message : Thedjezeyri14 a écrit :Supposons que les 7 versions apocryphes aient survécu et que 7 groupes de musulmans utilisaient chacun une versions . Quelle différence on aurait eu ??
Seuls les savants islamologues sont intéressés par ce débat.
Les sunnites et les chiites utilisent le même Saint Coran alors que le Coran chiite existe mais réservé aux savants
Auteur : Thedjezeyri14
Date : 06 mai17, 09:54
Message : Seleucide a écrit :
Est-ce que tu parles de 7 versions transmises différemment d'une même lecture ou bien de 7 lectures ?
Je parle du dexième cas , donc des 7 lectures
Auteur : Seleucide
Date : 10 mai17, 02:45
Message : Thedjezeyri14 a écrit :Suposons que les 7 versions apocryphe ait survecu et que 7 groupes de musulmans utilisaient chacun une versions . Quelle difference on aurait eut ??
D'une part, il y a bien plus que 7 lectures apocryphes (= shawādhdh).
Il y avait un grand nombre de lectures qui circulaient avant cette canonisation (at-Tabari avait lui-même écrit un livre sur 20 lectures rapportées à 20 lecteurs éponymes, mais nous trouvons d’autres traités sur la question avec 25, 8, 5, 20 lecteurs/lectures, etc). Ces lectures pré-canoniques étaient parfois plus anciennes que celles sélectionnées par ibn Mujahid : elles circulaient librement sans aucune volonté de les limiter/restreindre (l’exégèse d’at-Tabari témoigne de cette époque relativement flexible quant à l'ijtihad (= effort d'interprétation) du texte, l’auteur utilisant des lectures qui deviendront « apocryphes » (shawadhdh) et rejetant comme ineptes d’autres qui deviendront canoniques).
D'autre part, il serait difficile de répondre à ta question car nous n'avons presque plus aucun vestige de ces premières et plus anciennes lectures du texte. A l'image des lectures canoniques ou apocryphes que l'on connaît aujourd'hui, il est cependant certain qu'il y aurait eu des différences de sens dans de nombreux versets et parfois, bien que relativement rarement, des divergences d'ordre théologique. Nous pouvons également noter les difficultés qu'un texte coranique pluriel pourrait engendrer dans la communauté musulmane, puisque chaque groupe se retrouverait en dernière instance avec une version différente du Coran. Ce serait alors l'échec de la codification et de l'unification du texte voulue par le calife Othman, tel que Bukhari le décrit : «
Commandeur des fidèles, rattrape cette, umma avant qu’elle ne diverge sur l’Ecriture comme les juifs et les chrétiens ont divergé (sur leurs propres Écritures). »
De toute façon, cette divergence quant au décryptage du Coran demeure aujourd'hui comme hier, avec la seule différence qu'aujourd'hui, la masse et parfois même les intellectuels musulmans n'en ont pas conscience et croient naïvement que le texte qu'ils ont sous les yeux est intangible et a toujours été.
En fait, il ne s'agit que d'une version parmi d'autres d'une lecture parmi d'autres du rasm coranique... Auteur : Galileo
Date : 10 mai17, 04:18
Message : Je suis certain qu'il doit y avoir aussi 7 versions de la Belle au bois dormant
Auteur : Seleucide
Date : 11 mai17, 07:59
Message : Quel est l'intérêt d'un tel message ?
Auteur : Thedjezeyri14
Date : 11 mai17, 08:35
Message : Seleucide a écrit :Quel est l'intérêt d'un tel message ?
Je suis d'accord avec toi la masse musulmane est bien ignorante concernant ce sujet et j'ai l'impression que c'est un mensonge volentaire des savants qui croient les proteger avec ce mensonge . Ceci étant dit j'ai longtemps étudié ces variantes et je suis arrivé au constat que de telles études ne nous sert a rien tant qu'elle ne nous presentent pas une difference théologique d'entre les lecture ou encore mieu des differences juridiques au niveau du Fiqh.
Auteur : Galileo
Date : 11 mai17, 09:23
Message : Seleucide a écrit :Quel est l'intérêt d'un tel message ?
Rappeler que les religions ne sont que des contes de fées.
Auteur : prisca
Date : 12 mai17, 02:37
Message : Karlo ?
Pour ton avatar, tiens, il est joli

Auteur : Citizenkan
Date : 26 mai17, 00:54
Message : Seleucide a écrit :
D'où ils résulte, comme je le disais plus haut, que le texte coranique que tu as sous les yeux est UNE version (due aux 2 seuls transmetteurs canoniques) d'UNE lecture (parmi les 7 canoniques et la masse innombrable de lectures apocryphes et possibles) du Coran.
Seleucide et l'art du sophisme, d'un côté, il admet que les variantes peuvent avoir une incidence théologique, et ensuite, on lit :
Il n'y a rien dans mes propos qui puisse alimenter un tel "amalgame".
La confusion provient de toi et de toi seul.
Alors, maintenant, soyons clair, et ne jouons plus avec les mots, arrêtons ces débats de clercs dans lequel la plupart se perdent et moi le premier, donnez un exemple précis d'incidence théologique, vous avez donné la sourate et donnez des précisions syntaxiques, mais cela ne suffit pas :
Quel incidence théologique a cette variante, et expliquez-nous en quoi :
les lectures extra-canoniques (shawadhdh) peuvent modifier la théologie dans la mesure où celles-ci peuvent contenir des variantes, dites anormales, qui modifient le squelette consonantique du Coran, rasm ?
En attendant votre réponse :
http://www.maison-islam.com/articles/?p=180
I) Nous avons déjà dit dans un article précédent que les 7 harf, qui sont les catégories des variantes de récitation du texte coranique, qirâ'ât, sont les suivantes d'après l'avis auquel va notre préférence (c'est celui de Abu-l-Fadhl ar-Râzî) :
– 1) variantes d'accents (ikhtilâf ul-lahajât) : par exemple "nâs" / "nès" ; "yûmin" / "yu'min" ; "salaka-kum" / "salak'kum" ;
– 2) variantes dans le genre d'un nom (ikhtilâf ul-asmâ') : c'est-à-dire féminin / masculin ;
– 3) variantes de termes (al-ibdâl) : comme "al-'ihn" / "as-Sûf" (la seconde variante étant rapportée de Ibn Mas'ûd) ; ou comme "wa tal'hin" / "wa tal'in" (la seconde variante étant relatée par Alî : Fat'h ul-bârî 9/37) ;
– 4) variantes liées aux cas syntaxiques (ikhtilâfu wujûh il-a'râb) : comme "al-'ayna" / "al-'aynu" ;
– 5) variantes de temps de conjugaison des verbes (ikhtilâfu tas'rîf il-af'âl) : "bâ'id" / "ba'ada" ;
– 6) variantes liées à une inversion de mots (ikhtilâf ut-taqdîm wa-t-ta'khîr) : comme "wa jâ'at sak'rat ul-mawti bi-l-haqqi" / "wa jâ'at sak'rat ul-haqqi bi-l-mawti", cette seconde variante étant celle relatée par Abû Bakr (Fath ul-bârî, tome 9 p. 37) ;
– 7) variantes liées à la majoration ou à la diminution d'un ou deux mots (ikhtilâf un-naqs wa-z-ziyâda) : comme "wa mâ khalaqa-dh-dhakara wa-l-unthâ" / "wa-dh-dhakari wa-l-unthâ" (la seconde variante étant rapportée du Prophète par Abu-d-Dardâ' ; Ibn Mas'ûd aussi récitait de la sorte).
Les 4 premières catégories sont liées aux différences dialectales existant alors entre différentes régions d'Arabie...
Les 3 dernières catégories sont quant à elles dues non plus aux seules différences dialectales mais à une multiplicité – due à la souplesse de la révélation coranique – de récitations.
-
II) Nous avons dit dans un autre article que, pour pouvoir être récitée en tant que texte coranique, toute variante doit, fût-elle dûment relatée, satisfaire à 3 conditions :
– a) être établie par une chaîne de transmission authentique (sahîh) ;
– b) pouvoir être récitée à partir de la graphie des copies uthmaniennes (ou au moins de l'une* de ces copies) ;
– c) avoir été reconnue par les spécialistes de la discipline (cette 3ème condition a été mentionnée par Ibn ul-Jazarî – Al-Itqân, p. 239 – et as-Suyûtî – Ibid. pp. 241-242).
III) Ici, une question supplémentaire se pose par rapport à l'origine de cette relation : La variante doit être dûment établie depuis la source, cela constitue la condition a, et cela est certain. Cependant, quelle est cette source : toutes les variantes ont-elles dû être établies du Prophète (sur lui soit la paix) lui-même ? ou bien a-t-il suffi qu'elles soient établies de Compagnons, de leurs élèves ou d'élèves de leurs élèves ?
pouvons conclure comme suit...
– A) Pour toute variante engageant de façon conséquente le texte (soit la présence ou l'absence d'un terme - nom, verbe ou autre -, soit la nature du terme), il fallait impérativement que le Prophète lui-même ait enseignée cette variante détaillée à au moins un Compagnon.
(Plus tard, certaines de ces variantes furent abrogées lors de l'ultime révision entre le Prophète et l'ange Gabriel, d'autres furent délaissées suite au Consensus des Compagnons sur la nécessité de prendre l'écriture uthmanienne comme référentiel. Les autres variantes furent rapportées et sont toujours connues aujourd'hui.)
– B) Par contre, des variantes plus minimes étaient autorisées même si le Prophète ne les avaient pas enseignées : cela relevait de la permission générale qui lui avait été accordée de la part de Dieu et qu'il avait formulée en ces termes : "إِنَّ الْقُرْآنَ أُنْزِلَ عَلَى سَبْعَةِ أَحْرُفٍ، فَاقْرَءُوامَا تَيَسَّرَ مِنْهُ" : "Récitez-en ce qui vous est aisé" (al-Bukhârî, Muslim, etc.) : ces différences minimes ont été autorisées de façon générale. Cependant, pour qu'elle soit ultérieurement retenue par les spécialistes, il a fallu que ce genre de variantes aient été récitées par un Compagnon, un élève de Compagnons, ou un élève d'élève de Compagnons.
Par exemple :
--- la première voyelle longue du terme "آمَنُوْا", faut-il l'allonger d'une durée d'un seul alif, ou bien de 5 alifs ?
--- la voyelle longue du terme "النَّاس", faut-il la prononcer "â", ou bien "é" ? etc.
--- réciter : "يُوْمِن" ou bien "يُؤْمِن" (prononcer la lettre "hamza" ou en faire l'élision) ?
--- prononcer : "حَتّى حِيْن" ou bien : "عَتّى حِيْن" ?
--- dire : "التابوه" ou bien : "التابوت" ?
Car ce sont là seulement différentes façons de prononcer ces mots :
- ces mots sont, pour leur part, établis du Prophète (sur lui soit la paix) au tawâtur ;
- la façon de les prononcer selon tel accent ou tel autre, selon telle composition syntaxique ou telle autre, cela a été laissé à la diversité des Arabes de l'époque.
Auteur : Seleucide
Date : 26 mai17, 05:35
Message : Citizenkan a écrit :Seleucide et l'art du sophisme, d'un côté, il admet que les variantes peuvent avoir une incidence théologique, et ensuite, on lit :
Il n'y a rien dans mes propos qui puisse alimenter un tel "amalgame".
La confusion provient de toi et de toi seul.
Ces propos étaient relatifs à la place du khabar ahad dans les sources islamiques, pas aux variantes théologiques.
http://www.forum-religion.org/post11592 ... r#p1159215
Tourne ta langue dans ta bouche avant d'accuser tes interlocuteurs de pratiquer le sophisme.
Citizenkan a écrit :Alors, maintenant, soyons clair, et ne jouons plus avec les mots, arrêtons ces débats de clercs dans lequel la plupart se perdent et moi le premier, donnez un exemple précis d'incidence théologique, vous avez donné la sourate et donnez des précisions syntaxiques, mais cela ne suffit pas :
Pour revenir à la question traitée, à savoir s'il existe parmi les lectures canoniques des variantes modifiant la théologie coranique, je répondrai avec l'auteur par l'affirmative : bien qu'elles soient très rares, de telles variantes existent indubitablement. Je cite en effet, par exemple, p. 224 :
« The 8% of Active/Passive variants in the Qur’ān is very interesting since these variants could have theological implications in determing the subject of the verb or simply suppressing it by changing the voice. For example, (Q. 113:2) “min sharri mā khalaqa/khuliqa” would translate to (From the evil of that which He created) in the active voice, or to (From the evil of that which was created) in the passive voice. This difference in meaning would defnitely raise the question as to whether God could or could not, might or might not, create “evil”. Not surprisingly, we find a discussion on this subject in Fakhr al-Dīn al-Rāzi’s tafsīr. »
Autrement dit : suivant la lecture qu'on fera de Coran CXIII, 2, c'est-à-dire suivant la forme active ou passive que l'on accordera au verbe khalaqa, nous obtiendrons des théologies/théodicées coraniques complètement différentes.
post1158050.html#p1158050
Citizenkan a écrit :Quel incidence théologique a cette variante
La question de savoir si Dieu peut ou non créer le mal.
Citizenkan a écrit :et expliquez-nous en quoi :
les lectures extra-canoniques (shawadhdh) peuvent modifier la théologie dans la mesure où celles-ci peuvent contenir des variantes, dites anormales, qui modifient le squelette consonantique du Coran, rasm ?
Si certaines lectures canoniques peuvent modifier le sens théologique d'un verset, a fortiori en sera-t-il de même pour les lectures extra-canoniques qui modifient parfois le squelette consonantique.
Auteur : Citizenkan
Date : 26 mai17, 06:26
Message : Seleucide a écrit :
Si certaines lectures canoniques peuvent modifier le sens théologique d'un verset, a fortiori en sera-t-il de même pour les lectures extra-canoniques qui modifient parfois le squelette consonantique.
Vous n'avez répondu à aucune question, et je ne lis pas l'anglais depuis plus de 20 ans, alors répondez explicitement aux deux questions posées :
donnez un exemple précis d'incidence théologique, vous avez donné la sourate et donnez des précisions syntaxiques, mais cela ne suffit pas :
Quel incidence théologique a cette variante, et expliquez-nous en quoi :
les lectures extra-canoniques (shawadhdh) peuvent modifier la théologie dans la mesure où celles-ci peuvent contenir des variantes, dites anormales, qui modifient le squelette consonantique du Coran, rasm ?
En attendant votre réponse :
http://www.maison-islam.com/articles/?p=344
La révélation coranique a cette particularité que lui sont liés certains versets qui, après avoir été révélés, ont été, du vivant même du Prophète, abrogés de récitation (mansûkh ut-tilâwa).
La révélation coranique a cette autre particularité que des variantes de récitation lui sont liées. En fait le texte coranique, au début de sa révélation, n'était enseigné par le Prophète et récité sans variantes (al-Bukharî, 4705, 819). Mais quand des personnes de diverses régions d'Arabie commencèrent à se convertir à l'islam (FB 9/36), le Prophète lui-même demanda à l'ange Gabriel de transmettre à Dieu sa demande : que soient rendues possibles des variantes de récitation du texte coranique : Dieu accepta sa demande et il y eut donc par la suite la possibilité de 7 "harf" (Muslim, 820).
Durant chaque mois de ramadan, le Prophète (sur lui la paix) fait avec l'ange Gabriel une révision du texte coranique déjà révélé (al-Bukhârî, 6, 3048, Muslim, 2308).
Lors du dernier ramadan de sa vie terrestre, celui de l'an 10 de l'hégire, le Prophète fait cette révision 2 fois ( al-Bukhârî, 3426, Muslim, 2450) ; il s'agit de "l'ultime révision" ("al-'ardha al-akhîra"). Le Prophète meurt au mois de rabî' ul-awwal de l'an 11, soit 5 mois et quelques jours plus tard.
Lors de cette ultime révision (al-'ardha al-akhîra), un certain nombre de variantes de récitation sont abrogées en sorte que leur récitation même ne se fera plus (naskh ut-tilâwa). Ibn Abbâs évoquera cette abrogation survenue alors (Ahmad 3247).
Sont alors abrogées notamment la large permission d'utiliser certains synonymes (mutarâdif) de certains mots du texte coranique, ainsi que la large permission d'inverser les Noms divins figurant en fin de versets (cf. Ulûm ul-qur'ân, Muftî Taqî Uthmânî, p. 147, As-Sârim ul-maslûl, Ibn Taymiyya, p. 123).
-
Quand, sous son califat, avec l'objectif de mettre fin aux dissensions qui agitent une partie des musulmans à propos de variantes de récitation du Coran, Uthmân fait préparer et universaliser des copies coraniques (cliquez ici pour lire notre article sur le sujet), qu'entend-il faire ?
Son objectif est alors :
- a) que personne ne récite plus de versets dont la récitation même a été abrogée (mansûkh ut-tilâwa) lors de l'ultime révision ou bien avant, et dont certains n'avaient pas eu connaissance du caractère abrogé ;
- b) que personne ne considère plus le commentaire d’un verset comme faisant partie du texte coranique ;
- c) et que le classement des sourates les unes par rapport aux autres soit uniformisé.
Ces 3 points là sont certains.
Mais :
- d) par rapport aux variantes de récitation enseignées par le Prophète (cliquez ici), quel est l'apport des copies uthmaniennes ? ces copies ont-elles délaissé 6 des 7 harf, ou bien englobent-elles les 7 harf ?
Il y a divergence d'opinions sur le sujet...
– 1) Un premier avis : Les copies uthmaniennes ont délaissé 6 des 7 harf :
L'avis de at-Tabarî étant que les 7 harf dont parlait le Prophète sont 7 dialectes arabes de l'époque (avis que nous avons cité dans l'article sur les 7 harf), il a prolongé le raisonnement en disant ce qui suit... A l'origine, la révélation de versets coranique se faisant seulement selon 1 harf (cela est établi), il s'agit du dialecte des Quraysh. A Médine, suite aux demandes du Prophète, permission fut donnée de réciter d'après d'autres dialectes. Ceci n'étant donc qu'une facilitation (rukhsa), et cette facilitation ayant à l'époque de Uthmân entraîné les dissensions que l'on connaît entre des musulmans, Uthmân a décidé, après consultation, que les musulmans délaisseraient la récitation du Coran selon les 6 autres dialectes, et reviendraient au dialecte originel en lequel la révélation s'était faite, à savoir celui de Quraysh.
Cette explication pose cependant problème, vu que d'une part les Quraysh ne prononcent pas la lettre hamza ("Quraysh lâ tahmiz"), cela est relaté et connu. Et que d'autre part cette lettre hamza a dûment continué à être prononcée sans élision dans de nombreuses récitations du Coran.
-
– 2) Un second avis : Les copies uthmaniennes n'ont pas été rédigées selon 1 seule des 7 harf, mais ont au contraire cherché à englober un certain nombre des qirâ'ât établies :
Ensuite il existe plusieurs nuances à l'intérieur de ce second avis...
--- 2.1) Les copies uthmaniennes englobent toutes les qirâ'ât enseignées par le Prophète et n'en ont délaissé aucune :
--- 2.2) Les copies uthmaniennes n'englobent pas la totalité mais seulement un certain nombre des qirâ'ât enseignées par le Prophète et appartenant à l'ensemble des 7 catégories de variantes (harf) autorisées :
("(...) وذهب جماهير العلماء من السلف والخلف وأئمة المسلمين إلى أنها مشتملة على ما يحتمله رسمها من الأحرف السبعة فقط (...)" : Al-Itqân p. 157).
Les ulémas partisans de cet avis 2.2 se subdivisent ensuite en tenants de deux avis...
----- 2.2.1) Les qirâ'ât qui, bien qu'ayant été enseignées par le Prophète, ont ensuite été abrogées lors de l'ultime révision, ces copies ne les incluent pas. Par contre, des qirâ'ât ayant été enseignées par le Prophète au cours de sa mission et n'ayant pas été abrogées lors de l'ultime révision, ces copies n'ont délaissé aucune :
("مشتملة على ما يحتمله رسمها من الأحرف السبعة فقط، جامعة للعرضة الأخيرة التي عرضها النبي صلى الله عليه وسلم على جبريل، متضمنة لها، لم تترك حرفاً منها" : Al-Itqân p. 157).
Cet avis est celui auquel Ibn ul-Jazârî a donné préférence (Ibid.).
Ce que Ibn Taymiyya a écrit in As-Sârim (p. 123) semble aussi y correspondre.
-
----- 2.2.2) Les qirâ'ât qui, bien qu'ayant été enseignées par le Prophète, ont ensuite été abrogées lors de l'ultime révision, ces copies ne les incluent pas. Et des qirâ'ât ayant été enseignées par le Prophète au cours de sa mission et n'ayant pas été abrogées lors de l'ultime révision, ces copies en englobent une partie seulement : certaines ont dû être délaissées :
Cet avis, bien que nuancé par rapport à l'avis 2.2.1, ressort pourtant de ce que Ibn ul-Jazarî lui-même a écrit.
Parlant des qirâ'ât établies par une chaîne authentique mais ne pouvant pas être récitées à partir de l'écriture des copies uthmaniennes (nous allons en voir quelques-unes plus bas), Ibn ul-Jazarî affirme en effet que si on ne peut pas les réciter en tant que variantes du Coran, c'est "parce qu'elles n'ont pas atteint le tawâtur, même si elles sont établies par relation (naql) ; elles sont donc abrogées :
– soit par l'ultime révision,
– soit par le consensus des Compagnons sur les copies uthmaniennes"
("والأكثر على المنع لأنها لم تتواتر وإن ثبتت بالنقل. فهي منسوخة بالعرضة الأخيرة أو بإجماع الصحابة على المصاحف العثمانية") (Al-Itqân p. 240).
Si les variantes n'étant plus récitées à cause de la première cause sont effectivement abrogées (mansûkh), celles ne l'étant plus à cause de la seconde cause sont délaissées (mat'rûk) davantage que abrogées.
-
En fait, des variantes de récitation existent qui sont relatées mais n'ont pas été incluses dans la graphie des copies uthmaniennes :
– Des variantes de récitation existent ainsi qui sont relatées de Ibn Mas'ûd et d'autres Compagnons, après le décès du Prophète, mais qui n'ont pas été incluses dans la graphie uthmanienne :
– Plus encore, des variantes existent que des Compagnons relatent explicitement avoir entendu le Prophète les réciter, et qui pourtant n'ont pas été incluses dans la graphie uthmanienne :
Comment explique-t-on qu'il y ait ainsi des variantes qui ne sont plus récitées en tant que texte coranique alors qu'elles sont relatées de Compagnons, voire même du Prophète ?
----- Pour un certain nombre de ulémas (ceux qui sont partisans de l'avis 2.2.1), ce genre de variantes, relatées par Ibn Mas'ûd etc., qui ne peuvent pas être lues à partir de la graphie des copies uthmaniennes, avaient déjà été abrogées lors de l'ultime révision par le Prophète. Cependant, Ibn Mas'ûd et ces autres Compagnons n'en avaient pas eu connaissance. Par contre, Zayd ibn Thâbit, lui, le savait, et c'est pourquoi Uthmân le nomma à la tête de la commission chargée d'élaborer la graphie des copies coraniques à universaliser.
Al-Baghawî écrit : "On dit que Zayd ibn Thâbit a été témoin d
e la dernière révision, celle où ont été fixés ce qui est abrogé et ce qui est gardé (…). C'est pourquoi Uthmân l'a chargé de préparer les copies" (Al-Itqân, p. 158). La graphie des copies "uthmaniennes" inclut donc la totalité des variantes qui n'ont pas été abrogées lors de l'ultime révision entre le Prophète et Gabriel
----- Notre humble préférence va cependant à l'avis 2.2.2. Et selon celui-ci, s'il y a des variantes qui sont rapportées du Prophète par des Compagnons mais ne peuvent pas être lues à partir de la graphie des copies, c'est, comme nous l'avons vu sous la plume de Ibn ul-Jazarî, parce qu'elles "sont abrogées :
– soit par l'ultime révision,
– soit par le consensus des Compagnons sur les copies uthmaniennes"
Si les copies uthmaniennes englobaient vraiment toutes les qirâ'ât (je ne parle pas des versets mais bien des qirâ'ât de versets) pratiquées à l'époque du Prophète et n'ayant pas été abrogées de l'ultime révision (comme l'affirment les tenants de l'avis 2.2.1), comment explique-t-on qu'ici il soit dit que la qirâ'ah "وَ الذَّكَرِ وَالْأُنثَى" et autres semblables ont été abrogées soit par l'ultime révision, soit par le consensus des Compagnons sur les copies uthmaniennes ?
En fait :
– il y a effectivement des variantes qui avaient déjà été abrogées lors de l'ultime révision mais, certains Compagnons, ne l'ayant pas su, continuèrent à les réciter comme ils avaient entendu le Prophète le faire. Il était normal ne pas les inclure dans la graphie des copies uthmaniennes : elles ne devaient plus être récitées car ayant été abrogées par le Prophète lors de l'ultime révision ;
– mais d'un autre côté il y a d'autres variantes de récitation qui n'avaient pas été abrogées lors de l'ultime révision, et c'est pourquoi Ibn Mas'ûd, par exemple, qui les avaient apprises du Prophète, continua à les enseigner. Si ces variantes-là ne peuvent pas être lues à partir de la graphie des copies uthmaniennes, c'est parce que, alors qu'elles n'ont pas été incluses dans cette graphie [nous allons voir plus bas pourquoi], il y a eu consensus des Compagnons sur la nécessité, pour pouvoir réciter une variante même enseignée par le Prophète, de pouvoir la lire à partir du "socle" des copies uthmaniennes. C'est le consensus des Compagnons qui a donc établi qu'on ne réciterait plus ces variantes-là (d'après ce que as-Suyûtî a relaté de Ibn ul-Jazarî, déjà cité). Par contre il est vrai qu'on devrait parler non pas d'abrogation (naskh) mais plutôt de délaissement (tark) de ces variantes.
La graphie des copies "uthmaniennes" inclut donc bien sûr tous les versets qui ont été gardés lors de l'ultime révision. Cependant, elle inclut une partie conséquente mais non pas la totalité des variantes de récitation relatives à ces versets et non abrogées par le Prophète lors de la dernière année de sa vie terrestre.
Si les variantes relatées par Ibn Mas'ûd et d'autres Compagnons ne peuvent plus être récitées en tant que texte coranique, c'est donc, pour un certain nombre d'entre elles, à cause du consensus des Compagnons sur la nécessité, pour pouvoir réciter une variante enseignée par le Prophète, de pouvoir la lire à partir du "socle" des copies uthmaniennes.
-
Pourquoi notre humble préférence va-t-elle à l'avis 2.2.2 plutôt qu'à l'avis 2.2.1 ?
Parce que Ibn Mas'ûd disait qu'il ne comprenait pas pourquoi il devait abandonner certaines variantes qu'il avait apprises du Prophète et qui figuraient dans sa copie à lui. Il ne disait pas que les qirâ'ât connues par Zayd et incluses dans les copies que celui-ci préparait étaient incorrectes ; il disait que si ces qirâ'ât là étaient correctes, celles que lui il récite étaient aussi correctes : n'ont-elles pas toutes été enseignées par le Prophète ?
Pourquoi, alors, la commission nommée par Uthmân n'a-t-elle pas inclus ces variantes aussi dans la graphie particulière des copies qu'elle préparait ?
Parce que ces variantes relèvent surtout de catégories qui ne pouvaient être (ou ne pouvaient toutes être) englobées avec les autres dans une même graphie (il s'agit des catégories numérotées 3, 6 et 7 dans mon article Pourquoi y a-t-il des variantes de récitation dans le texte coranique ?).
Or le calife Uthmân se trouvait alors face à deux possibilités :
– soit il ne faisait rien et les malentendus à propos des variantes du texte coranique allaient s'amplifiant ;
– soit il universalisait un seul type de copie mais devait pour cela se résigner à ne pas pouvoir y inclure certaines variantes de récitation relatées du Prophète.
Il n'eut d'autre choix que d'avoir recours à la deuxième possibilité (cf. Fath ul-bârî, 9/39, premières lignes de la page).
Conclusion :
Les copies "uthmaniennes" englobent la totalité des versets dont la récitation n'a pas été abrogée lors de l'ultime révision entre le Prophète et Gabriel.
Cependant, elles n'englobent pas la totalité des variantes de récitation qui ont été conservées alors, mais seulement une partie d'entre celles-ci : le calife Uthmân n'avait pas d'autre choix. C'est le consensus des Compagnons – qui se réalise ensuite – qui fait qu'on ne peut plus réciter, en tant que relevant du texte coranique, que les variantes enseignées par le Prophète qui peuvent être lues à partir de la graphie uthmanienne.
http://www.maison-islam.com/articles/?p=183 Auteur : Seleucide
Date : 26 mai17, 09:06
Message : Citizenkan a écrit :donnez un exemple précis d'incidence théologique, vous avez donné la sourate et donnez des précisions syntaxiques, mais cela ne suffit pas
«
Les 8% de variantes de type voix active/passive dans le Coran sont très intéressantes en ce qu'elles pourraient avoir des implications théologiques dans la détermination du sujet du verbe ou simplement en la supprimant par changement de voix. Par exemple, (Q. 113:2), “min sharri mā khalaqa/khuliqa”, pourrait être traduit dans la voix active en (Du mal de ce qu'il a créé), et dans la voix passive en (Du mal de ce qui a été créé). Cette différence dans le sens pourrait définitivement soulever la question de savoir si Dieu pourrait ou ne pourrait pas, aurait-il ou n'aurait-il pas, créé le "mal". Sans surprise, nous trouvons une discussion sur le sujet dans le tafsir de Fakhr al-Din al-Razi. »
Citizenkan a écrit :Quel incidence théologique a cette variante
Suivant la lecture qu'on fera de Coran CXIII, 2, c'est-à-dire suivant la forme active ou passive que l'on accordera au verbe khalaqa, nous obtiendrons des théologies/théodicées coraniques complètement différentes.
Citizenkan a écrit :expliquez-nous en quoi : les lectures extra-canoniques (shawadhdh) peuvent modifier la théologie dans la mesure où celles-ci peuvent contenir des variantes, dites anormales, qui modifient le squelette consonantique du Coran, rasm ?
Si certaines variantes canoniques peuvent modifier le sens théologique d'un verset (cf plus haut), a fortiori en sera-t-il de même pour les lectures extra-canoniques qui modifient parfois le squelette consonantique. Je tâcherai de te trouver des exemples d'ici peu.
Auteur : Citizenkan
Date : 26 mai17, 09:54
Message : Seleucide a écrit :
Si certaines variantes canoniques peuvent modifier le sens théologique d'un verset (cf plus haut), a fortiori en sera-t-il de même pour les lectures extra-canoniques qui modifient parfois le squelette consonantique. Je tâcherai de te trouver des exemples d'ici peu.
J'en étais sûr, vous construisez votre raisonnement sur une toile d'araignée, merci :
Du mal de ce qu'il a créé et Du mal de ce qui a été créé veulent dire exactement la même chose, car dans la seconde tournure l'action de Dieu est implicite, et c'est même le propre de la forme passive !
Sans surprise, nous trouvons une discussion sur le sujet dans le tafsir de Fakhr al-Din al-Razi, étant donné que ce dernier est un partisan du kalâm en plus d'être un moderne, soit 600 ans au moins après la révélation...
Les adeptes du kalam, les néo-asharites qui sombrent peu à peu dans le mu'tazilisme, voire la philosophie néoplatonicienne sont des qadarites jabarites, et n'ont donc pas l'once d'une relation avec l'orthodoxie...
Maintenant que nous avons résolu cet énorme pavé, passons au suivant, et d'ailleurs, je serais surpris de voir s'il y en a d'autres ?
Auteur : Seleucide
Date : 26 mai17, 10:03
Message : Citizenkan a écrit :Du mal de ce qu'il a créé et Du mal de ce qui a été créé veulent dire exactement la même chose, car dans la seconde tournure l'action de Dieu est implicite, et c'est même le propre de la forme passive !
Non, ça ne signifie pas la même chose.
Soit Dieu est l'auteur du mal de la création, soit c'est la création elle-même qui, pour telle ou telle raison, est à l'origine de ce mal.
La forme passive n'est pas l'équivalent de la forme active.
Si cela eût strictement le même sens, il n'y aurait en outre pas eu ce genre de réflexion chez Fakhr al-Din al-Razi.
Auteur : Thedjezeyri14
Date : 26 mai17, 10:19
Message : Seleucide a écrit :
Non, ça ne signifie pas la même chose.
Soit Dieu est l'auteur du mal de la création, soit c'est la création elle-même qui, pour telle ou telle raison, est à l'origine de ce mal.
La forme passive n'est pas l'équivalent de la forme active.
Si cela eût strictement le même sens, il n'y aurait en outre pas eu ce genre de réflexion chez Fakhr al-Din al-Razi.
Salut . Au fait le Coran nous apprend que le seul Khaliq(createur) est Dieu , donc que ce soit khalaqa ou khouliqa les deux renvoient a Dieu , je suis surpris qu'un erudit comme al-Razi n'a pas pensé a cela , d'ailleur par souvenir j'etait sur que c'est lui qui m'avait donné cette reponse. Mais admetant que la forme passive changr quelque chose . Depuis quand un seul verset nous permet de conclure un dogme théologique?? Parceque ce verset n'est pas complet si ce n'est pas Dieu qui crée le mal , qui alors ?? Et si on lit d'autres verset on voit que le bien et le mal sont de Dieu.
@ Citizenkhan : Al razi pas orthodoxe ?? Qadarite , Jabrite , Mutazilite ,neo acharite , tu met tout dans le même sac ?? Je parie que sans t'en rendore compte tu es Salafiste , parcequ'il y a qu'un Salafiste pour balancer des etiquettes a flot. Aucune de ses sectes n'a sombré au contraire c'est l'orthodxie qui sombre sous le poids de la masse populaire.
Auteur : Citizenkan
Date : 26 mai17, 10:20
Message : Seleucide a écrit :
Non, ça ne signifie pas la même chose.
Soit Dieu est l'auteur du mal de la création, soit c'est la création elle-même qui, pour telle ou telle raison, est à l'origine de ce mal.
La forme passive n'est pas l'équivalent de la forme active.
Si cela eût strictement le même sens, il n'y aurait en outre pas eu ce genre de réflexion chez Fakhr al-Din al-Razi.
Désolé, cela fait plus de quinze ans que je traduis, et que de nombreuses subtilités du langage ne sont plus un mystère pour un vieux débris comme moi...
Désolé, vous êtes tombé sur la mauvaise personne...
Cela veut dire exactement la même chose, et vous le savez au fond de vous :
Il est impossible que le Coran impute la création à la création, et vous le savez...
Forme active :
Pierre jette la pierre
Forme passive :
La pierre a été jeté
par qui ?
Par Pierre
Forme active :
Du mal de ce qu'il a créé
Forme passive :
Du mal de ce qui a été créé
par qui ?
par Dieu.
Si le sujet a été occulté, c'est juste par un effet rhétorique...
Ce n'est pas au vieux singe qu'on apprend à faire la grimace, au suivant....
Fakhr al-Din al-Razi est dans l'interprétation métaphorique helléniste qu'il emprunte à l'école d'Alexandrie chez Philon et qui sera reprise par les scolastiques à l'image de d'Aquin, via les Pères de l'Eglise...
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