Le paradoxe auquel se heurte votre interprétation de prononciation du nom divin, c'est que Jésus emploie des expressions construites autour du "nom" de Dieu, mais que le nom divin lui-même n'est jamais écrit noir sur blanc dans le texte du NT.
L'AT contient près de 7000 occurrences d'un nom de quatre lettres en hébreu, יהוה, qui n'a été repris, ni tel quel, ni en transcription grecque, dans le texte du NT, rédigé en grec. Quand les rédacteurs du NT emploient l'expression "le nom (de Dieu)", alors qu'ils n'écrivent jamais יהוה, c'est qu'ils ne font pas référence à l'utilisation ou à la prononciation de יהוה, mais à la personne même de Dieu, à ses qualités et actions, à son autorité. De la même façon que l'on peut dire "au nom de la loi", sans jamais chercher à écrire en toutes lettres son nom propre.BuddyRainbow a écrit :Ce paradoxe il est vôtre aussi car vous n'arrivez pas à expliquer pourquoi il est fait tant de fois référence au nom divin dans le NT sans qu'il soit inscrit en toute lettre dans le texte grec que nous avons hérité de la tradition manuscrite chrétienne. Et l'AT qui compte 7000 occurrences du nom divin accentue considérablement ce paradoxe.
Vous en tirez la conclusion qu'il devait y être et en a été effacé (alors que toutes les allusions à son nom y auraient été maintenues) ; la plupart des lecteurs en concluent que "sanctifier le nom", "manifester le nom", "faire connaître le nom" n'est pas une affaire de prononciation et que "le nom", dans ces expressions ne renvoie pas tant au Tétragramme hébraïque ou à une forme grecque de יהוה (non précisée dans le texte) qu'à la personnalité même de Dieu.
Ma tournure de phrase ne se voulait pas complètement affirmative. Parce que le message néo-testamentaire ne s'adresse pas qu'aux Juifs mais que, bien évidemment, il ne les exclue pas non plus : ses références au nom divin (jamais explicitement cité) ne devaient pas avoir le même écho chez un pagano-chrétien de Corinthe que chez un judéo-chrétien.BuddyRainbow a écrit :Il ne renvoie pas "tant au Tétragramme hébraïque ou à une forme grecque de יהוה (non précisée dans le texte) qu'à la personnalité même de Dieu" mais il y renvoie quand même comme le sous entend votre phrase. Et ces éléments que sont le nom divin et la personnalité de Dieu sont indissociablement liées entre eux, ce que vous venez de confesser. Vous en concluez pourtant, contre la logique élémentaire qui veut qu'une personne possède un nom de manière définitive et y est étroitement associée, que le nom divin n'est plus d'actualité, qu'il est caduque pour Jésus et ses disciples... Je n'arrive pas à suivre votre logique.
Votre logique, qui ne parvient pas à comprendre la mienne, repose sur l'idée que Dieu "possède un nom de manière définitive" et qu'il ne peut pas devenir caduque. Pourtant, le nom divin selon ses presque 7000 occurrences de l'AT est יהוה et même pour un Témoin de Jéhovah, il n'est plus vraiment d'actualité. Vous me rétorquerez qu'il a été traduit en français, et que "Jéhovah" et יהוה, c'est du pareil au même. En ce cas, comment les Grecs de Thessalonique ou de Galatie, à qui Paul a écrit, lisaient-ils (tant visuellement qu'à haute voix) le nom divin ?
Vous postulez que le nom divin figurait forcément dans le NT puisqu'il était présent près de 7000 fois dans l'AT... mais vous ne l'acceptez qu'en traduction grecque dans le NT, alors que tous les témoignages que nous avons font état : 1) de l'absence de יהוה ou d'une transcription grecque déterminée dans le NT ; 2) de l'absence de consensus chez les auteurs antiques quant à l'écriture/la prononciation du nom divin en grec ; 3) de l'absence de débat voire même d'un simple commentaire sur un remplacement du nom divin par des termes génériques grecs.
De ce fait, et jusqu'à preuve du contraire, les auteurs néo-testamentaires ont traduit יהוה par les termes grecs que nous y voyons encore, à savoir Kurios et Theos. Vous préférez une autre traduction, qui cherche davantage la prononciation que la signification de יהוה, soit. Mais ce ne fut pas l'attitude des premiers chrétiens, visiblement.
Jésus a fait connaître son Père, ses qualités, ses actions d'une manière telle qu'il a sanctifié, manifesté, fait connaître le nom de Dieu sans pour autant l'appeler par son "p'tit nom".
BuddyRainbow a écrit :Expliquez-moi comment Jésus peut-il "faire connaître sont Père (...) d'une manière telle qu'il a (...) fait connaître le nom de Dieu". Votre phrase est incompréhensible. Comment Jésus peut-il réussir cet exploit si le nom divin n'est plus d'actualité ? s'il n'a plus de réalité à ses yeux et n'a pas vocation à en avoir pour ses disciples ? Pourquoi Jésus continue-t-il a faire référence à un nom destiné à disparaitre ?
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Même réponse que précédemment : si Jésus fait référence à un nom qu'il n'énonce jamais comme tel, c'est que par "le nom", il ne parle pas de la prononciation mais de la personne qui le porte. Cela correspond d'ailleurs à la pratique juive de dire "Ha Shem" (le nom) à la place de יהוה dans leur vie quotidienne.
Vous êtes loin d'être "affranchi de tout préjugé religieux ou culturel" et pourtant vous parvenez à la conclusion que "Jésus faisait usage du nom divin", ce qui est exactement la conclusion à laquelle vous vous devez d'arriver en tant que Témoin de Jéhovah. Comme c'est bizarre !![]()
Le problème n'est pas de chercher à savoir si le nom divin figurait ou pas dans le NT originel, c'est d'affirmer catégoriquement que tel était assurément le cas, alors même qu'il n'y a aucune preuve d'une telle affirmation. Même les universitaires que vous citez ne concluent pas qu'il faut "rétablir" le nom divin, et a fortiori mettre "Jéhovah" dans le Nouveau Testament.BuddyRainbow a écrit :Georges Howard, David Trobisch, Pavlos D. Vasileiadis, ... sont des universitaires qui ont soutenu l'idée que le NT avait probablement contenu le nom divin à l'origine. Pour l'étude d'Howard qui a fait date, on pourra examiner l'intégralité de l'article intitulé The tetragram and the new testament ici (en anglais seulement). On se demande bien pourquoi ces personnes, qui ne sont pas Témoins de Jéhovah à ma connaissance, auraient soutenu une thèse qui serait une pure fiction ou juste le dada de quelques religieux exaltés par le nom divin. Vous êtes encore dans la caricature, le procès d'intention et voulez réduire les gens, leurs idées, à leur confession, comme s'ils n'étaient pas capables de se positionner en conscience, au terme d'une démarche raisonnée et scientifique. Finalement, c'est vous qui, par cette manière que vous avez d'étiqueter autrui, trahissait des préjugés bien ancrés.
Pas exactement : La seule certitude que nous avons, c'est que les chrétiens du deuxième siècle et après, du moins ceux dont on a les rouleaux ou les codex, n'ont aucune trace du nom divin dans leur version du NT. Le "conservé" est de trop dans votre phrase, puisqu'il suppose une présence originelle du Nom dans le NT, ce que votre/notre "cécité" à propos du 1er siècle (en l'absence des originaux) ne permet pas de prouver.
Pour quelle(s) raison(s), selon vous ?BuddyRainbow a écrit :Et j'ajouterai que ces mêmes chrétiens du deuxième siècle et après n'ont pas souhaité "conservé" le nom divin dans leur version de l'AT.
Nous voyons donc seulement que, à partir du IIe siècle, les chrétiens lisent les livres du NT dans lesquels le nom divin est rendu par Kurios ou Theos. Et nous n'avons pas de témoignage que quiconque parmi eux s'en soit offusqué. Rien ne semble donc indiquer un changement drastique par rapport à l'époque antérieure.
Leur version de l'AT est en grec, celle qui "faisait une place central (sic : centrale) au nom divin" est en hébreu. Il ne s'agit pas d'une "falsification de la Parole de Dieu", mais d'une traduction. Comment voulez-vous que les traducteurs/copistes de l'AT aient rendu יהוה dans leur version ?BuddyRainbow a écrit :Et nous n'avons pas plus de témoignages que "quiconque parmi eux s'en soit offusqué" que toutes les versions de l'AT disponibles ne conservent pas trace du nom divin, contre le témoignage du texte source. Ceux qui nous ont légué le texte du NT sont comptable de ce que vous appelez une "harmonisation", mais appelons un chat un chat, il s'agit d'une falsification de la Parole de Dieu qui faisait une place central au nom divin et que des chrétiens ont choisi d'évincer de leur version de l'AT.
Y compris sa traduction en d'autres langues ? Quel est le nom de Dieu, selon l'AT (celui achevé à l'époque de Jésus et ses disciples, évidemment) ?
Répondu quoi ?BuddyRainbow a écrit :Il est temps d'accepter l'idée que l'on vous a répondu. Cette façon que vous avez de répéter toujours les mêmes questions, quand vous avez eu réponse, commence à être préoccupante.
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Et où le prononçait-il ? Comment ? Et devant qui ?
"À partir de Simon le Juste et jusqu’à la ruine du temple, le nom ne fut plus entendu « comme il est écrit » que dans la liturgie du Yom Kippour, au temple de Jérusalem, où le grand prêtre le prononçait dix fois dans la journée. « Les cohanim et le peuple présents dans le parvis, lorsqu’ils entendaient le nom explicite sortant de la bouche du grand prêtre, tombaient à genoux, se prosternaient et tombaient la face contre terre en disant : béni soit le nom glorieux de son règne pour toujours. » La formule vaut d’être relevée : la Mishna ne dit pas que le grand prêtre prononçait le nom divin, mais que le nom « sortait de sa bouche ». Il semble d’ailleurs que, vers la fin de la période du second temple, le grand prêtre ne prononçait plus le nom qu’à voix basse, si l’on en croit un souvenir d’enfance de Rabbi Tarphon (I-IIe s.) qui raconte que, même en tendant l’oreille, il n’avait pas pu entendre le nom. La formule de l’Exode « C’est mon nom pour toujours » (Ex 3,15), moyennant un jeu de mots sur l’hébreu, est interprétée par le Talmud de Jérusalem : « C’est mon nom pour être caché.»"BuddyRainbow a écrit :Le grand prêtre le prononçait dans le temple une dizaine de fois le jour de Yom Kippour et le peuple, rassemblait dans la cour du temple avec les prêtres, devait s'agenouillait chaque fois qu'il entendait le nom divin prononcé à haute et intelligible voix. Le Talmud explique : "When the priests and the people standing in the temple court heard the fully-prononced name come forth from the mouth of the high priest, they bent their knees, bowed down, fell on their faces and called out : blessed be the name of his glorious kingdom for ever and ever." - Mishnah, Yoma 66a.
(https://fr.zenit.org/articles/la-pronon ... el-remaud/)
Et qui donc le prononçait encore après la destruction du temple ?
Ainsi donc, à l'époque de Jésus, seul le grand prêtre, le jour du Yom Kippour, prononçait le nom divin (et encore pas distinctement), mais les disciples juifs de Jésus l'auraient dit à voix haute. Pas étonnant que les autorités juives aient été furieuses.BuddyRainbow a écrit :D'après la tradition juive les judéo-chrétiens. Puisqu'ils possédaient des exemplaires des Evangiles qui renfermaient le nom divin, comme le rapporte la Tossefta, ce qui attisait la haine des autorités juives qui cherchaient par tous les moyens à faire disparaitre ces disciples de Jésus qu'ils considéraient comme hérétiques, et à détruire par le feu tous les livres chrétiens qu'ils possédaient.
Ah bon ?! A quoi a donc servi le travail des massorètes quelques siècles plus tard ?
Et comment les Juifs sachant lire l'hébreu sans les points voyelles au temps de Jésus lisaient-il à voix haute les יהוה qu'ils voyaient dans le texte hébraïque de l'AT ? Comment prononçaient-ils le nom divin dans leurs discussions quotidiennes ?BuddyRainbow a écrit :Les Juifs savaient lire l'hébreu sans les points voyelles au temps de Jésus. Sans quoi cette langue n'aurait pas existait en l'état si longtemps. Ce n'est que des siècles plus tard que les Massorètes inventent le système des points voyelles. Ce système, qui permet de vocaliser un texte, a été créé à l'attention de Juifs qui ne parlent et ne maîtrisent plus guère l'hébreu au Moyen-Âge.
"A partir de Simon le Juste et jusqu’à la ruine du temple, le nom ne fut plus entendu « comme il est écrit » que dans la liturgie du Yom Kippour, au temple de Jérusalem, où le grand prêtre le prononçait dix fois dans la journée." (https://fr.zenit.org/articles/la-pronon ... el-remaud/) - "A partir de Simon le Juste", soit le IIIe siècle avant notre ère.
Le fait que l'étymologie permette de retrouver "la forme du nom divin" n'a pas de lien avec sa prononciation effective à l'époque de Jésus et de ses disciples.
Déjà, cela ne vaut vraiment que pour l'hébreu. Quand je prononce Daniel, Mikael, Gabriel... en français, je prononce certes le "el" mais je n'associe pas forcément ces prénoms avec le mot hébreu pour Dieu, et j'en déduis encore moins la prononciation du nom divin en hébreu. Pas plus que quand j'appelle quelqu'un Jonathan, Jean ou Josué/Jésus. Et il devait en être de même pour les Grecs de Corinthe, Ephèse, Colosses... à qui écrivait Paul.BuddyRainbow a écrit :Quand vous prononcez des noms théophores comme Daniel, Mikael, Gabriel, etc., vous prononcez une partie du mot Dieu en hébreu, el- de elohim. Quand vous prononcez des noms théophore comme Yehonathan, Yehohanan, Yehoshua, etc. vous prononcez une partie du nom divin en hébreu, Yeho- de Yehowah. Donc oui il y a bien un lien avec la "prononciation effective à l'époque de Jésus" car tous ces noms théophores étaient en usage au temps de Jésus. Et si vous niez cette vérité élémentaire alors il faut remettre en question toutes les traductions des noms théophores qui ont été réalisés jusque-là, et qui sont considérées comme fidèles au texte source.
D'ailleurs, vous semblez soutenir une traduction grecque (et donc une prononciation, puisque, contrairement à l'hébreu consonantique, le grec, lui se lit comme il s'écrit) de style Iaô. Pourquoi les rédacteurs néo-testamentaires auraient-ils écrit (selon vous) quelque chose comme Iaô si Jésus prononçait YéHowah ?
C'est justement la "diversité des traductions grecques du nom divin qui sont attestées" qui constituent un indice supplémentaire de leur non-présence dans le Nouveau Testament. Parce que les auteurs néo-testamentaires, s'ils avaient écrit le nom divin dans leurs textes, n'auraient certainement pas multiplié les formes (Ιαω, Ιωα, Ιευω, Ιαβα, Ιαβε/Ιαβαι, Ιαου(ε), Ιαη, etc...) ; ils en auraient utilisé une, la transcription la plus proche de ce que les disciples auraient entendu Jésus (ou même selon vous les autres Juifs) prononcer. Et c'est cette forme unique qui serait passée dans les annales chrétiennes, à l'écrit comme à l'oral.BuddyRainbow a écrit :Je pense que le problème est plus compliqué que cela étant donné la diversité des traductions grecques du nom divin qui sont attestées. Comme le souligne Vasileiadis dans un article intitulé The Pronunciation of the Sacred Tetragrammaton An Overview of a Nomen Revelatus that Became a Nomen Absconditus : "Concerning the reference to the Hebrew Tetragrammaton, various Greek transliterations were used, like Ιαω, Ιωα, Ιευω, Ιαβα, Ιαβε/Ιαβαι, Ιαου(ε), Ιαη, etc.". Ainsi devant cette diversité de traduction, il est 1) peu prudent d'en défendre une plus que les autres, sans avoir fait un examen exhaustif de chacune d'entre elle, je n'en suis pas là de mon côté, et 2) il est plus aisé de se baser sur la langue hébraïque pour traduire le nom divin et se rapprocher de la prononciation exacte de celui-ci, sinon l'atteindre. C'est chose faite.
S'il est " plus aisé (pour vous, en français) de se baser sur la langue hébraïque pour traduire le nom divin et se rapprocher de la prononciation exacte de celui-ci", tant mieux pour vous. Mais la question ici, encore une fois, n'est pas de savoir comment vous parvenez à "Jéhovah" et pourquoi vous pensez que c'est la meilleure traduction qui doit obligatoirement apparaître aussi dans le Nouveau Testament (malgré la leçon du texte grec à traduire). La question est de savoir ce que les auteurs néo-testamentaires ont fait. Sont-ils repartis directement du texte hébreu et ont-ils recopié, non-traduit, le nom divin qui y figurait, à savoir יהוה ? Ou ont-ils utilisé une traduction en grec de ce nom, et si oui laquelle (en supposant évidemment qu'ils ne se sont pas amusés à multiplier les formes grecques du nom de Dieu dans leur texte) ?