Qu'est ce que la logique pour Vous ?

Forum Athée / croyant
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L’athéisme peut être considéré comme une attitude ou une doctrine qui ne conçoit pas l’existence ou affirme l’inexistence de quelque dieu, divinité ou entité surnaturelle que ce soit. C'est une position philosophique qui peut être formulée ainsi : il n'existe rien dans l'Univers qui ressemble de près ou de loin à ce que les croyants appellent un « dieu », ou « Dieu ».
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LumendeLumine

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Ecrit le 06 oct.06, 02:30

Message par LumendeLumine »

Apparemment nous avons des conceptions différentes de la philosophie. À mon avis, elle ne consiste pas à s'informer de la pensée des autres, mais de savoir ce qu'il en est de la vérité. Or si nous sommes en désaccord sur la démonstrabilité de l'existence de Dieu, si l'un nie la possibilité et que l'autre l'affirme, soit j'ai raison, soit vous avez raison.

En raisonnant sur la faculté de l'intelligence à abstraire du réel ses traits fondamentaux, je crois pouvoir montrer qu'elle peut fort bien sortir, par analogie, du champ de l'expérience et atteindre Dieu, non pas en son essence qui nous dépasse, mais du moins en son existence.
Florent51 a écrit :Ma phrase signifit-elle : "selon moi, un univers n'existant pas par soi = le néant"?
Non.
Elle signifie: "selon la théologie catholique, un univers n'existant pas par soi = le néant". Et c'est cette affirmation que j'attaquais.

Vous niez avoir utilisé le concept de néant comme non-existence. Et pourtant c'est bien à ce concept que vous faites référence quand vous dites:

"Ce qui n'a pas de nécessité par soi est un fantôme qui peut être révoqué de l'être à tout moment"

Être révoqué de l'être, c'est ne plus être, non?
Encore:

Le "néant" "antérieur" (...) exprime simplement la nullité de ce qui n'a aucune existence"

Ici néant implique clairement non-existence.

"dont l'existence, le droit à être est contesté par principe et susceptible à tout instant de disparition "

C'est bien de retourner à la non-existence que vous parlez ici.

Vous essayez de nier ce que vous avez dit, mais j'ai peur que vous vidiez votre argumentation de son sens. Votre "fond de négativité total" est un concept bien vide s'il n'implique pas non-existence. Comment ce qui existe pourrait être totalement négatif? Vous ne vous en sortez pas.

Mais j'attends le reste de votre réponse avec hâte.

Florent51

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Ecrit le 06 oct.06, 12:51

Message par Florent51 »

LumendeLumine a écrit :Apparemment nous avons des conceptions différentes de la philosophie. À mon avis, elle ne consiste pas à s'informer de la pensée des autres, mais de savoir ce qu'il en est de la vérité. Or si nous sommes en désaccord sur la démonstrabilité de l'existence de Dieu, si l'un nie la possibilité et que l'autre l'affirme, soit j'ai raison, soit vous avez raison.
Le premier mot que j'ai utilisé dans mon intervention précédente n'est pas "philosophie" mais "discussion". c'est ce à quoi nous nous livrons actuellement et cela implique en priorité de comprendre la pensée de l'autre. La philosophie est une tache plus solitaire.
Au moins sur un point je vous l'accorde : soit c'est vous qui avez tort car votre pensée est imprudente et affirme ce qu'elle ne peut poser légitimement. Soit c'est moins qui est tort car ma pensée n'est pas conséquente.
LumendeLumine a écrit : En raisonnant sur la faculté de l'intelligence à abstraire du réel ses traits fondamentaux, je crois pouvoir montrer qu'elle peut fort bien sortir, par analogie, du champ de l'expérience et atteindre Dieu, non pas en son essence qui nous dépasse, mais du moins en son existence.
Elle signifie: "selon la théologie catholique, un univers n'existant pas par soi = le néant". Et c'est cette affirmation que j'attaquais.

Vous niez avoir utilisé le concept de néant comme non-existence. Et pourtant c'est bien à ce concept que vous faites référence quand vous dites:

"Ce qui n'a pas de nécessité par soi est un fantôme qui peut être révoqué de l'être à tout moment"

Être révoqué de l'être, c'est ne plus être, non?
Reprenons : je vous ai déjà dit et redit que l'idée du néant dans la pensée chrétienne = l'être soustrait de lui-même. Donc effectivement je fais référence ici à la notion de "néant" prise comme valeur négative ("fantôme") dont la formule consiste à dire : "ce qui peut être révoqué - nié - soustrait - de l'être à tout moment".

Encore une fois cela ne signifie pas que la notion de "néant" a un sens acceptable pour moi au sens épistémologique mais qu'au sens axiologique elle signifie "négation", "soustraction", "amputation" "évidement" de l'être, c'est-à-dire une pure opération intellectuelle dont le simple but est de relativiser et de déposséder de son être le réel concret.

Vous êtes dur comme les pierres : je vous ai expliqué que "ne plus être" est une expression qui ne correspond qu'à votre métaphysique c'est-à-dire quelque chose qui fait fond sur le réel, ne parle que du réel (pour le nier) mais est absolument incapable de penser ce que signifie la notion d'un "quelque chose d'antérieur au réel" que par hypothèse on peut supposer (sans pouvoir le penser) "avant le commencement du réel".
LumendeLumine a écrit : Encore:

Le "néant" "antérieur" (...) exprime simplement la nullité de ce qui n'a aucune existence"

Ici néant implique clairement non-existence.
La notion de nullité et les guillemets vous indiquent 1) la référence explicite à la dimension axiologique du terme 2) à quel point je prends avec des pincettes des expressions qui ne sont pas les miennes. Puis-je être plus clair? Aves-vous fait effort de comprendre cette phrase selon ce que je vous ai déjà expliqué de ma vision des choses?
Dans l'expression "nullité de ce qui n'a aucune existence" le terme "nullité" met en évidence le caractère dépréciatif dans la pensée chrétienne de ce qui n'est qu'une simple négation du réel, de l'être (non-existence) cette manière de voir les choses n'étant ni dans les termes ni dans l'aspect dépréciatif la mienne s'agissant de ce que je ne nomme pas ou simplement comme "le commencement impensable du réel".
LumendeLumine a écrit : "dont l'existence, le droit à être est contesté par principe et susceptible à tout instant de disparition "

C'est bien de retourner à la non-existence que vous parlez ici.
Encore une fois cette "contestation du droit à être de l'univers" dans la pensée chrétienne est une simple figure négative dont la seule valeur est axiologique : dépréciation du réel. Vous tentez encore d'y voir une signification épistémologique que je sous-entendrais, vous avez tort. Mon post précédent vous a suffisamment informé que c'est à mes yeux un pur jeu : ce qui est important ici de voir c'est le terme de "contestation", autrement dit "d'insécurité ontologique" fondamentale qui pèse sur l'univers dès lors qu'on le dit tiré de cette valeur absolument nulle qu'on entend par le terme "néant".

Je comprends cependant que ma formulation ici, dans ce cas, pouvait être ambiguë et qu'elle a pu être mal comprise, je ferais désormais effort pour ne laisser place à aucune ambiguïté dans mes propos, sachant hélas que vous ne rechercherez pas par vous-mêmes le sens précis et cohérent avec mon discours en général que je peux donner à ces expressions.
LumendeLumine a écrit : Vous essayez de nier ce que vous avez dit, mais j'ai peur que vous vidiez votre argumentation de son sens. Votre "fond de négativité total" est un concept bien vide s'il n'implique pas non-existence. Comment ce qui existe pourrait être totalement négatif? Vous ne vous en sortez pas.

Mais j'attends le reste de votre réponse avec hâte.
C'est terrible mais là je vois que vous n'avez pas du tout fait effort pour comprendre ma pensée et je m'en attriste.
Vous dîtes "comment ce qui existe pourrait être totalement négatif?" et précédémment vous faîtes référence à ce que j'appelle "fond de négativité total".
Là j'avoue que je reste perplexe devant votre question...
Le "fond de négativité total" auquel je fais référence c'est bien entendu la notion forgée de "néant" qui est propre à votre pensée. La qualifiant de "fond de négativité total" je dénonce évidemment sa dimension axiologique nulle.
Comment pouvez-vous alors lier cela à "ce qui existe"?

Le seul sens que je vois à ce que, je dois l'avouer, je trouve que vous exprimez sur ce point extrêmement mal, est le suivant : je pense en effet que dans la pensée chrétienne "ce qui existe" (c'est-à-dire le réel, l'univers) est perçu en tant que "totalement négatif" au sens où venant du "néant" (dans la pensée chrétienne!!!) il signifie simplement : "ce qui n'a aucune valeur et peut retourner à ce néant, c'est-à-dire à cette non-valeur absolue à tout instant".
Pour cette raison "Ce qui existe" (c'est-à-dire l'univers) est effectivement "totalement négatif" en tant que valeur dans la pensée chrétienne et celle-ci manifeste suffisamment son rejet du réel, de la chair (au sens concret) et des valeurs de ce monde pour ne pas avoir besoin d'y insister..

Ai-je besoin de préciser que ceci n'est pas ma conception des choses?

Avez-vous à présent compris mon point de vue?
Une énième fois je vous répète que je crois avoir bien compris le vôtre et que je me chagrine de ces mésintérprétations récurrentes et à la longue un peu inquiétantes et énervantes de ma propre pensée.

Finissons de cette manière : croyez-vous que j'acorde une valeur épistémologique au terme "néant"?
Coryez-vous que selon moi le terme "néant" qualifie de manière adéquate ce que par hypothèse je suppose "antérieur" au commencement du réel?
En répondant à ces questions vous aurez la clé de vos erreurs d'interprétation.

lionel

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Ecrit le 06 oct.06, 13:13

Message par lionel »

Si vous pouviez parler avec des mots que tout le monde comprends, je vous en serais très reconnaissant, mais franchement et entre nous un étalage de vocabulaire que(en tout cas moi ne comprends pas) ne vous donne pas plus de crédit que les autres, et ce n'est pas la peine de me dire : moi dit a toi que ceci cela. Je ne suis pas née de la derniere plui, mais aimerai bien comprendre votre discour avec des mot non scientifique a la con et compréhensible par tous. Car cela nous concerne aussi un petit peu.

L'apabache de vocabulaire certifie pas la véracité de vos dire, et tant que je n'aurais pas compris votre dialogue, je n'en porterai aucun témoignage, ce que je déplore vivement.

LumendeLumine

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Ecrit le 06 oct.06, 13:31

Message par LumendeLumine »

Honnêtement, Florent, là, je ne vous suis pas ! :lol:

C'est peut-être moi, c'est peut-être vous, je ne sais pas trop. Je ne sais pas du tout quoi répondre à vos deux questions. Votre conception est pour moi nébuleuse et sans cohérence. Mais j'aimerais bien comprendre, autrement je parle dans le vide en essayant de vous reprendre.

Reprenons:

"je pense en effet que dans la pensée chrétienne "ce qui existe" (c'est-à-dire le réel, l'univers) est perçu en tant que "totalement négatif" au sens où venant du "néant" (dans la pensée chrétienne!!!) il signifie simplement : "ce qui n'a aucune valeur et peut retourner à ce néant, c'est-à-dire à cette non-valeur absolue à tout instant". "

Dans la pensée chrétienne, qui fait sienne la philosophie réaliste, n'existe pas votre notion de néant, "négativité totale axiologique", notion que vous ne définissez pas par non-existence. Dans la philosophie réaliste, le néant est la non-existence, et en aucun cas et d'aucune façon on ne peut lui associer ce qui existe, même s'il n'existe pas par lui-même.

Vous avez tort de dire: "que l'idée du néant dans la pensée chrétienne = l'être soustrait de lui-même", si par "être soustrait de lui-même" vous entendez autre chose que "non-existence". Vous avez non moins tort de dire : "cette "contestation du droit à être de l'univers" dans la pensée chrétienne est une simple figure négative dont la seule valeur est axiologique". C'est tout simplement faux, la pensée chrétienne ignore votre "figure négative à valeur axiologique".

Comment pouvez-vous donc penser que la pensée chrétienne attribue cette "valeur négative absolue"? Elle ne connaît pas cette notion, et cette notion n'a rien de commun avec aucun de ses concepts.

De quel droit y grefferiez-vous vos concepts pour l'attaquer? Elle s'en défend facilement, repoussant votre idée de néant comme vide de sens.

Et en effet votre idée de néant, "négativité totale", est vide de sens, parce qu'elle n'implique pas non-existence, vous niez énergiquement faire usage de cette notion de non-être. Mais si elle n'implique pas non-existence, alors comment ne peut-elle pas impliquer existence? Ce qui n'est pas non-existant, existe. Or si elle implique existence, alors elle n'est pas "négativité totale".

De deux choses l'une donc: soit vous utilisez la notion réaliste de néant, et alors vous identifiez l'être au non-être, ce qui absurde; soit vous utilisez votre notion vague; mais comme elle est vide de sens, la critique ne porte pas.

D'une manière ou d'une autre, donc, je ne vois pas de consistance dans votre argument.

Florent51

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Ecrit le 07 oct.06, 02:53

Message par Florent51 »

LumendeLumine a écrit :Honnêtement, Florent, là, je ne vous suis pas ! :lol:

C'est peut-être moi, c'est peut-être vous, je ne sais pas trop. Je ne sais pas du tout quoi répondre à vos deux questions. Votre conception est pour moi nébuleuse et sans cohérence. Mais j'aimerais bien comprendre, autrement je parle dans le vide en essayant de vous reprendre.

Reprenons:

"je pense en effet que dans la pensée chrétienne "ce qui existe" (c'est-à-dire le réel, l'univers) est perçu en tant que "totalement négatif" au sens où venant du "néant" (dans la pensée chrétienne!!!) il signifie simplement : "ce qui n'a aucune valeur et peut retourner à ce néant, c'est-à-dire à cette non-valeur absolue à tout instant". "

Dans la pensée chrétienne, qui fait sienne la philosophie réaliste, n'existe pas votre notion de néant, "négativité totale axiologique", notion que vous ne définissez pas par non-existence. Dans la philosophie réaliste, le néant est la non-existence, et en aucun cas et d'aucune façon on ne peut lui associer ce qui existe, même s'il n'existe pas par lui-même.

Vous avez tort de dire: "que l'idée du néant dans la pensée chrétienne = l'être soustrait de lui-même", si par "être soustrait de lui-même" vous entendez autre chose que "non-existence". Vous avez non moins tort de dire : "cette "contestation du droit à être de l'univers" dans la pensée chrétienne est une simple figure négative dont la seule valeur est axiologique". C'est tout simplement faux, la pensée chrétienne ignore votre "figure négative à valeur axiologique".

Comment pouvez-vous donc penser que la pensée chrétienne attribue cette "valeur négative absolue"? Elle ne connaît pas cette notion, et cette notion n'a rien de commun avec aucun de ses concepts.

De quel droit y grefferiez-vous vos concepts pour l'attaquer? Elle s'en défend facilement, repoussant votre idée de néant comme vide de sens.

Et en effet votre idée de néant, "négativité totale", est vide de sens, parce qu'elle n'implique pas non-existence, vous niez énergiquement faire usage de cette notion de non-être. Mais si elle n'implique pas non-existence, alors comment ne peut-elle pas impliquer existence? Ce qui n'est pas non-existant, existe. Or si elle implique existence, alors elle n'est pas "négativité totale".

De deux choses l'une donc: soit vous utilisez la notion réaliste de néant, et alors vous identifiez l'être au non-être, ce qui absurde; soit vous utilisez votre notion vague; mais comme elle est vide de sens, la critique ne porte pas.

D'une manière ou d'une autre, donc, je ne vois pas de consistance dans votre argument.
Bonjour Lumen,

Je vois bien que vous ne suivez pas ce que je dis. Pour ma part, croyez-moi, j'essaye vraiment de réfléchir à votre position (pour vous prouver mon sérieux sachez que j'ai acheté - Paris est une ville où on trouve tout - le vieil ouvrage du Père Garrigou-Lagrange dont vous aviez cité certains extraits, je n'ai pas encore eu le temps de le lire assez mais je m'y penche incessamment, je ne saurai trop vous conseiller de lire vous aussi vos adversaires idéolgiques) et je trouve un peu malvenu ce smiley rigolard dont vous paraissez user pour vous foutre de mes propos (c'est comme ça que je le vois).

Je serai donc clair : je sais évidemment que du point de vue chrétien la notion de "néant" n'est pas prise dans le sens axiologiquement nul que j'y vois. Ca c'est ce que Feuerbach en dit, mais précisément je crois qu'il a raison, que son analyse est incontestable, et c'est en ce sens que je la reprends.

Je vais réexpliquer ma position et si vous avouez ne pas la comprendre de nouveau cette fois-ci alors je pense que notre discussion peut s'arrêter ici sur ce point :

1) dans la pensée chrétienne la notion de "néant" signifie effectivement "non-être", "non-existence", c'est comme ça que vous la comprenez et cela à tel point que non seulement vous ne pouvez pas vous départir de cette définition mais qu'en plus vous ne pouvez pas envisager que quelqu'un puisse en avoir une autre définition.

2) je conteste que cette notion de "non-être" ou de "néant" puisque les deux sont identiques dans votre pensée ait un sens épistémologique véritable car ce que nous appelons "non-être" est en fait le résultat d'une soustraction dans le réel de quelque chose d'existant à quoi nous soustrayons l'être. Concrètement lorsqu'on dit ceci n'existe pas, on veut simplement dire : "cette chose (qui par ailleurs existe : billet de 10 euros, porte-monnaie, table, etc.) n'existe pas à ce moment là et dans cet endroit là" ou bien : "cet objet forgé (sirène, centaure, sphynx) composé d'éléments issus du réel (donc existant chacun individuellement et réunis par notre fantaisie) n'existe pas en tant que composé". Bref ce terme de "non-existence" fait toujours fond sur le réel, est tout entier indexé sur le réel, plein d'être.
Comme le note alors Sartre la notion du néant n'est qu'un néant d'idée car n'ayant aucun contenu épistémologique mais étant simplement le résultat d'une opération purement intellectuelle : je prends tout le réel et je le soustrais de lui-même et j'arrive ainsi à cette notion de "néant" qui n'est donc rien par elle-même sinon le reflet inversé du réel. Et parler du néant c'est encore parler de l'être.

3) Feuerbach faisant fond sur une telle analyse (sans employer bien sûr, à l'avance, les mêmes termes que Sartre mais l'idée est semblable) juge alors que même si la valeur épistémologique de ce terme de "néant" est nulle, ce terme a tout de même un sens car il a une dimension axiologique claire. Constituant la soustraction du réel à lui-même, l'usage qu'en fait la théologie chrétienne en disant le monde "tiré du néant" consiste alors (même si elle n'a évidemment pas conscience de la signification profonde de cette opération et ne se l'explique certainement pas ainsi à elle-même, comprenez-vous ça??) à mettre en équivalence le réel et sa propre négation, le passage de l'un à l'autre étant assuré de manière nécessaire par un médiateur : Dieu. Bref, même si ce terme de "néant" ou de "non-être" n'a pas de contenu épistémologique il a valeur en tant qu'il signifie : "cet élément actuel du réel (billet de 10 euros, porte-monnaie, table, etc..) qui nous paraît avoir sa propre consistance et une existence indubitable n'est en réalité qu'un être en suspens, susceptible à tout instant de retourner au non-être".

A ce stade vous allez alors me dire : "mais voyez-donc vous employez encore ce terme de non-être, de non-existence donc vous affirmez bien l'équivalence entre "néant" et "non-existence"!!!!"
C'est là que la réflexion est subtile et qu'on ne peut pas la comprendre si on ne fait pas un petit effort : je vous ai dit que les terme de "non-être" ou de "néant" me paraissent tous les deux (l'un équivalent l'autre) inadéquats pour exprimer ce qui serait vraiment le contraire de "l'être", le contraire du "réel". Je vous ai dit que lorsque nous disions "ceci n'est pas" nous ne faisions en réalité qu'une opération de soustraction à l'intérieur du réel donc que nous n'atteignons pas véritablement par cette opération la soustraction réel de l'être. Cela nous ne pouvons pas le faire ni l'imaginer car notre pensée ne peut penser que le réel et pas le "non-être". Et je vous ai dit que je ne croyais qu'à un langage apophatique sur cette question.
Donc, comme je vous l'ai déjà dit, la teneur épistémologique des termes "néant" ou "non-être" étant vide quand je réemploie le vocabulaire de l'église exprimant l'idée de non-être, je n'entends pas véritablement ce que serait le contraire de l'être et ceçi paraît totalement évident lorsque nous envisageons l'incapacité totale que nous avons à penser l'idée de "néant" ou plutôt, puisque ce terme est définitivement inadéquat, l'idée d'une disparition complète de l'être. Notre esprit ne peut que demander : quand l'univers a-t-il commencé d'exister?, où était celui qui par hypothèse l'a créé? et votre remarque sur l'impossibilité de penser le "commencement du réel" le montre bien, nous ne le pouvons pas effectivement, parce que c'est contraire aux lois de notre logique qui ne pense toujours les choses qu'à partir d'un réel déjà là, déjà donné.

Conclusion : le terme de "néant" ou de "non-être" ne signifiant rien du point de vue de la connaissance, n'étant qu'un simili-terme, ne peut donc être pris qu'en tant que valeur : celle de nullité axiologique totale signifiant : ce qui n'a pas de valeur par soi-même (cette valeur étant conférée à l'être, à "l'existence" telle que nous pouvons la penser, c'est-à-dire toujours de plein pied avec cette réalité concrète, que, paradoxalement et par un renversement assez incroyable la théologie chrétienne rend équivalente à sa soustraction possible à tout instant puisque pour que ce billet de 10 euros continue d'exister dans les minutes à suivre (sinon il sera soustrait du réel) il faut qu'il plaise au caprice de Dieu de le laisser continuer à être..).

Avez-vous cette fois compris ma position?
Je nie cette expression de "non-être" comme ayant vraiment une consistance épistémologique. Le "non-être", la "non-existence" ne désigne que la non-existence actuelle de quelque chose qui par ailleurs existe de quelque manière (soit réellement à la manière d'un objet concret, soit en tant que partie d'être existant dans un être composé par l'imagination). Et a fortiori la notion de néant étendant cette opération à l'ensemble du réel est incapable de cerner ce que signifierait le "x" contraire du réel "antécédant" au commencement du réel. Cela nous ne pouvons le dire ni le penser sinon de manière apophatique. Ce x non seulement n'est pas l'être mais il n'est pas non plus ce que dans notre langage ordinaire, faisant toujours fond sur le réel, sur l'être, nous appelons "non-être" et qui ne parle jamais que de l'être, que du réel.

Quoi qu'il en soit, et si cette pensée est définitivement impossible à comprendre et à accepter par vous, je vous ferais tout de même remarquer que même si vous voulez persister à conserver une valeur épistémologique aux termes "néant" et "non-être" cela ne vous empêche nullement de comprendre le raisonnement de Feuerbach disant dans ce cas (et sans entrer dans la complexité de ce que je dis en m'appuyant sur la formule de Sartre) qu'un univers tiré du "néant" (au sens où vous entendez ce terme) est un univers fragile dont la perpétuation dans l'être, dans le réel ne tient qu'à un caprice de Celui sans quoi il ne serait rien.

Lorsque vous terminez votre message précédent par cette phrase : "soit vous utilisez la notion réaliste de néant, et alors vous identifiez l'être au non-être, ce qui est absurde", vous me paraissez faire preuve, excusez-moi de le dire ainsi, sinon d'une mauvaise foi du moins d'une mauvaise volonté à comprendre particulièrement choquante.

Ce qui serait "absurde" ce serait effectivement de dire (de croire que le raisonnement de Feuerbach peut être interprété ainsi) platement : "ce qui existe égale ce qui n'existe pas".
Ce qui est clair par contre c'est la chose suivante (encore une fois vous pouvez comprendre ce raisonnement sans entrer dans ma critique de la conception classique, réaliste dites-vous, des mots "être" et "non-être") :

- si "ce qui est" (l'univers) est tiré du "non-être" par un intermédiaire nécessaire entre les deux alors il est clair que sans cette intermédiaire (sans sa volonté) "ce qui est" (l'univers) n'aurait pas été ou, ayant commencé d'exister, n'existerait plus. Et donc en ce sens on peut dire que sans l'intermédiaire nécessaire "l'être reviendrait au non-être".
Ce raisonnement n'est nullement absurde, car il fait intervenir la volonté du "médiateur nécessaire" que vous vous plaisez évidemment à subtiliser dans ce cas du raisonnement pour le faire paraître (ce qu'il est effectivement sans le rôle du médiateur) absurde!

Et une fois ce raisonnement compris (dans une optique que certes la théologie chrétienne accepterait difficilement de percevoir ainsi mais qui est pourtant logiquement tout à fait valide), vous pouvez difficilement refuser à certaines personnes de percevoir cette relativisation de l'univers, dont l'existence est suspendue au bon vouloir d'un autre, comme quelque chose de négatif et qui, par soi-même, du fait de la fragilisation du réel qu'elle implique (vous-mêmes n'ayant pour vous rassurer à cet égard que les "arguments" que vous dressez complaisamment sur l'obligation qu'aurait Dieu de maintenir la pérennité du réel) est inacceptable.

Cela au moins le comprenez-vous?

LumendeLumine

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Ecrit le 07 oct.06, 10:45

Message par LumendeLumine »

Bonjour Florent,

je suis désolé que vous ayiez mal pris mon " :lol: ". Je riais du cocasse de ne rien comprendre malgré tous vos efforts, ce qui vaut mieux que s'arracher les cheveux sur la tête. En aucun cas je ne rirais de votre logique ou de vous, j'ai au contraire un grand respect pour votre travail.

Je suis honoré par votre achat du livre de Garrigou-Lagrange, je vous félicite et vous souhaite une agréable lecture. Moi-même je suis en train de le relire et j'y trouve bien des choses que je n'avais pas comprises la première fois.

Mais venons-en au débat. Puisque vous avez numéroté vos points, j'y répondrai suivant les mêmes numéros.

1) Je conçois fort bien que vous ayiez une définition différente de la mienne, mais j'en vois bien mal les raisons et les conséquences.

2) Que le terme non-être ait pour fond le réel, soit. On n'atteint pas cette notion directement, comme si on pouvait constater le non-être quelque part; mais en abstrayant la notion d'être des choses réelles, on peut "forger" une idée dont le contenu est "être + négation". Parler de néant, c'est parler d'être, soit, mais indirectement: ce qu'on désigne directement par néant, c'est la négation de l'être; nous ne pouvons le concevoir que par rapport à l'être, c'est un fait. "non-être" contient le mot "être"; impossible de penser au néant sans référence à l'être.

J'imagine que nous sommes d'accord ici, du moins, je l'espère.

Je conteste néanmoins que l'idée soit sans consistance ou n'ait pas de sens.
Ce que l'idée de non-être désigne n'est rien de positif, c'est la négation d'un concret; mais l'idée en elle-même est positive en tant qu'elle a ce contenu: la négation d'un concret. Il est impossible à se représenter, sinon en imaginant quelque chose qui est, c'est un fait. Mais nous sommes capables d'abstraction. Le nombre zéro est une idée fort utile et dont on se sert constamment; mais on ne saurait se le représenter ou essayer de penser à ce qu'il contient; il ne contient rien. Si le nombre zéro a une valeur réelle en mathématiques, s'il est tout aussi valable et utile que les autres nombres pouvant se rapporter à des objets concrets, pourquoi le non-être n'aurait-il aucune valeur en métaphysique?

Encore là, ce n'est pas vraiment votre faute, puisque nous héritons d'au moins un siècle de matérialisme et de plusieurs siècles d'empirisme, mais votre critique de la valeur de l'idée de néant a sa racine dans une confusion entre l'imagination, la capacité de se représenter les choses, et l'intelligence, qui fait abstraction des choses et par là les domine. Je suis incapable de me représenter le non-être autrement que par un objet existant, par de l'espace vide, par une immobilité totale; mais l'intelligence ne s'encombre pas de problèmes de représentation. La négation pure est pour l'intelligence un concept parfaitement cohérent.

Vos exemples faisant référence à toute sortes d'objets, réels ou imaginaires, ne me convainquent pas, car à chaque fois la négation de l'existence de ces objets est pour l'intelligence un donné cohérent et positif, quoique l'imagination ne puisse aucunement l'aider. Rien n'empêche l'intelligence de désigner le fait que ces choses n'existent pas par "non-être", et de se servir de la valeur logique de ce terme tant qu'elle le veut. L'impossibilité se trouve du côté de l'imagination, mais je ne vois pas pourquoi elle atteindrait l'intelligence.

Ce qui inintelligible, ce que l'intelligence ne peut même pas penser, c'est ce qui est contradictoire ou absurde, et non ce qu'on ne peut se représenter, ou ce dont le contenu n'est que la négation d'un concret.

3) Ici pour qu'il y ait équivalence en l'Univers et la "valeur nulle" qu'est le néant d'après vous, il faudrait que Dieu fasse réellement passer l'Univers de l'un à l'autre. Votre emploi du terme "médiateur" est révélateur; elle suppose bien concret le passage du néant à l'être. Or un tel passage est tout sauf concret; le néant ne désigne rien de positif d'où l'Univers pourrait sortir; il est une négation pure, justement! D'où il n'y a réellement aucun passage, puisque passage implique deux termes, or le néant, que ce soit votre concept ou le mien, étant pur négatif, ne saurait être pris positivement comme un terme. Ce passage est tout aussi abstrait que l'idée de néant; il n'a pas réellement lieu. On ne peut donc voir Dieu comme celui qui fait passer de l'un à l'autre, comme un médiateur. Dieu est cause transcendante actuelle de l'Univers. Votre critique est donc aussi peu signifiante que l'idée de passage du néant à l'être sur laquelle elle s'appuie.
Florent51 a écrit :même si vous voulez persister à conserver une valeur épistémologique aux termes "néant" et "non-être" cela ne vous empêche nullement de comprendre le raisonnement de Feuerbach disant dans ce cas (et sans entrer dans la complexité de ce que je dis en m'appuyant sur la formule de Sartre) qu'un univers tiré du "néant" (au sens où vous entendez ce terme) est un univers fragile dont la perpétuation dans l'être, dans le réel ne tient qu'à un caprice de Celui sans quoi il ne serait rien.
Oh, mais ça, la chrétienté n'a pas attendu Feuerbach pour le comprendre. L'Ecclésiaste commence ainsi: "vanité des vanités, tout est vanité". La différence entre la pensée chrétienne et la critique de Feuerbach ne tient pas à la fragilité de l'Univers, mais à qui est Dieu pour elle; elle sait bien, en effet, que Dieu est bon, et qu'être capricieux ne lui convient nullement.

Voyez la distinction que je fais: je ne nie pas la fragilité, la relativité d'un Univers causé par Dieu; de lui-même en effet l'Univers n'est rien et c'est Dieu qui lui donne tout. Simplement je refuse de donner à cette phrase "l'Univers n'est rien" la rigueur métaphysique que vous ou Feuerbach essayeriez de lui donner, en tordant un peu les concepts. Je réfute la torsion qui n'a pour fondement qu'une confusion entre l'image et l'idée; mais je continue à affirmer la fragilité de l'Univers. Fragile, l'Univers n'est pas pour autant une valeur purement négative; toute la valeur que l'Univers a lui est conférée par Dieu, et en tant que conférée par Dieu, elle ne peut être que positive. Il est vain d'essayer de l'associer à une idée abstraite telle que le néant, que ce soit votre définition ou ma définition.
Florent51 a écrit :Lorsque vous terminez votre message précédent par cette phrase : "soit vous utilisez la notion réaliste de néant, et alors vous identifiez l'être au non-être, ce qui est absurde", vous me paraissez faire preuve, excusez-moi de le dire ainsi, sinon d'une mauvaise foi du moins d'une mauvaise volonté à comprendre particulièrement choquante.
Apparemment vous êtes imperméable à la notion de conditionnel :wink: . Je n'ai pas supposé que vous l'utilisiez, mais n'étant pas sûr de comprendre votre pensée, j'envisage tous les cas possibles, y compris les peu probables. Il me semblait en effet peu probable que vous ayiez fait vôtre la notion réaliste de néant; mais je ne vais pas m'empêcher pour autant de la noter parmi les cas de figure possibles! Vous êtes bien chatouilleux, mon ami!
Florent51 a écrit :si "ce qui est" (l'univers) est tiré du "non-être" par un intermédiaire nécessaire entre les deux alors il est clair que sans cette intermédiaire (sans sa volonté) "ce qui est" (l'univers) n'aurait pas été ou, ayant commencé d'exister, n'existerait plus. Et donc en ce sens on peut dire que sans l'intermédiaire nécessaire "l'être reviendrait au non-être".
Dieu n'est pas entre le non-être et l'Univers et il n'est pas médiateur. Il est cause transcendante actuelle. Sans Dieu l'Univers ne serait plus; il serait identique au non-être; mais dans ce cas on ne peut dire que "l'être reviendrait au non-être" puisqu'il n'y aurait plus d'être pour y revenir! L'Univers non-être serait identique au non-être.

C'est vous qui amusez à subtiliser le médiateur lorsque vous envisagez ce cas de figure. Je conteste et la subtilisation et le médiateur.

Cela dit je suis tout à fait d'accord, encore une fois, avec la relativisation de l'Univers et sa fragilité par rapport à Dieu, et votre raisonnement à ce sujet est impeccable. Mais vous allez trop loin en essayant d'associer l'Univers au néant. Même si néant est pris comme "valeur nulle", en donnant l'existence à l'Univers, Dieu, en donnant "positivité" à l'Univers le place à une distance infinie de cette "valeur nulle"; les deux ne sauraient avoir quoi que ce soit de commun, encore moins s'équivaloir tant que Dieu soutient l'Univers dans l'existence. Ainsi, l'Univers existant par Dieu n'est pas équivalent au néant. Si Dieu le lâche, très bien, il retourne au néant, il n'est plus rien; mais tant que Dieu le soutient, comment ne serait-il "rien"? Qu'a-t-il alors de commun avec une "négativité totale"?

Toutes vos explications à ce sujet tournent autour de l'idée que Dieu cesserait soudainement de conserver l'Univers. Or cette cessation, manifstement, n'arrive pas. Elle n'est pas actuelle. Elle est une possibilité, je vous l'accorde pour l'instant. Mais parce que la cessation n'est pas actuelle, on ne saurait actuellement associer l'Univers au néant, "négativité totale" ou "non-être" peu importe. La critique n'a de valeur qu'au regard de la volonté de Dieu: s'il est un être capricieux, la critique porte; s'il est un être bon, non. Si Dieu est bon, la possibilité n'est pas réelle; la critique ne porte pas. Votre raisonnement aboutit toujours à ce "caprice divin"; enlevez-le de l'équation et vous voyez bien que la critique est sans substance. Elle repose sur une possibilité, qui n'est réelle qu'à la condition que Dieu soit un être fort vilain.

Florent51

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Ecrit le 07 oct.06, 13:32

Message par Florent51 »

LumendeLumine a écrit :Bonjour Florent,

je suis désolé que vous ayiez mal pris mon " :lol: ". Je riais du cocasse de ne rien comprendre malgré tous vos efforts, ce qui vaut mieux que s'arracher les cheveux sur la tête. En aucun cas je ne rirais de votre logique ou de vous, j'ai au contraire un grand respect pour votre travail.

Je suis honoré par votre achat du livre de Garrigou-Lagrange, je vous félicite et vous souhaite une agréable lecture. Moi-même je suis en train de le relire et j'y trouve bien des choses que je n'avais pas comprises la première fois.

Mais venons-en au débat. Puisque vous avez numéroté vos points, j'y répondrai suivant les mêmes numéros.

1) Je conçois fort bien que vous ayiez une définition différente de la mienne, mais j'en vois bien mal les raisons et les conséquences.

2) Que le terme non-être ait pour fond le réel, soit. On n'atteint pas cette notion directement, comme si on pouvait constater le non-être quelque part; mais en abstrayant la notion d'être des choses réelles, on peut "forger" une idée dont le contenu est "être + négation". Parler de néant, c'est parler d'être, soit, mais indirectement: ce qu'on désigne directement par néant, c'est la négation de l'être; nous ne pouvons le concevoir que par rapport à l'être, c'est un fait. "non-être" contient le mot "être"; impossible de penser au néant sans référence à l'être.

J'imagine que nous sommes d'accord ici, du moins, je l'espère.
Bonsoir Lumen,

à l'heure qu'il est et où je prends connaissance de votre message j'aurais effectivement besoin de toutes mes lumières pour y répondre.

Je me réjouis en tous les cas de constater que ma pensée est de mieux en mieux comprise. Je ne m'attendais certes pas à ce que vous me disiez : je l'ai compris et je l'accepte tel quel, mais je vois que nous progressons. Vous-mêmes vous vous attendez je suppose à ce que je n'accepte pas vos critiques auxquelles je réponds sur l'essentiel.
LumendeLumine a écrit : Je conteste néanmoins que l'idée soit sans consistance ou n'ait pas de sens.
Ce que l'idée de non-être désigne n'est rien de positif, c'est la négation d'un concret; mais l'idée en elle-même est positive en tant qu'elle a ce contenu: la négation d'un concret. Il est impossible à se représenter, sinon en imaginant quelque chose qui est, c'est un fait. Mais nous sommes capables d'abstraction. Le nombre zéro est une idée fort utile et dont on se sert constamment; mais on ne saurait se le représenter ou essayer de penser à ce qu'il contient; il ne contient rien. Si le nombre zéro a une valeur réelle en mathématiques, s'il est tout aussi valable et utile que les autres nombres pouvant se rapporter à des objets concrets, pourquoi le non-être n'aurait-il aucune valeur en métaphysique?
Votre remarque sur le zéro est pertinente. Je comprends ce que vous dîtes mais, vous pouviez vous y attendre, je ne l'accepte pas.

D'abord, premièrement, vous vous doutez bien que je ne nie nullement la valeur cognitive des "négations" en général. Elles ont évidemment un sens et on peut les utiliser dans le raisonnement de manière fort utile, comme c'est le cas du zéro.
Cependant en ce qui concerne le "non-être" et la question plus générale d'un "contraire de l'être, du réel que nous connaissons" nous nous situons dans un domaine particulier : permettez-moi de l'appeler la métaphysique. Dans ce domaine on se pose, vous devez le savoir, des questions différentes, plus fondamentales que celles qui ponctuent l'ordinaire de nos journées et pour lesquelles l'utilisation des négations a beaucoup de sens et d'efficacité.
Au regard de cette dimension métaphysique la notion de zéro est exactement du même registre que le négatif "non-être" : elle ne parle que du réel en en constituant une soustraction. Et je vous ai dit que selon moi cette manière de faire n'a pas de rapport avec le fait de réaliser l'impossibilité rationnelle fondamentale qui est la nôtre à saisir ce que peut signifier un "x antérieur au réel". D'un point de vue pratique, considérant les choses de ce monde et leur absence éventuelle, cette notion de "non-être" comme celle de zéro peut très bien avoir une utilité et un sens dans le discours commun : mais concernant la prise au sérieux du problème que pose le fait d'essayer de penser quelque chose comme le commencement absolu du réel elle constitue plutôt une cause d'erreur qu'une notion utile.
LumendeLumine a écrit :Encore là, ce n'est pas vraiment votre faute, puisque nous héritons d'au moins un siècle de matérialisme et de plusieurs siècles d'empirisme, mais votre critique de la valeur de l'idée de néant a sa racine dans une confusion entre l'imagination, la capacité de se représenter les choses, et l'intelligence, qui fait abstraction des choses et par là les domine. Je suis incapable de me représenter le non-être autrement que par un objet existant, par de l'espace vide, par une immobilité totale; mais l'intelligence ne s'encombre pas de problèmes de représentation. La négation pure est pour l'intelligence un concept parfaitement cohérent.
Cette remarque de votre part ne fait que reprendre ce qui nous différencie sans rien apporter : vous pensez pour ce qui vous concerne que l'intelligence humaine peut penser fondamentalement la réalité et qu'elle n'a à cet égard aucune limite, je pense au contraire comme je vous l'ai dit que concernant le problème qui nous préoccupe elle est limitée car elle ne conçoit jamais les choses que sur un fond d'être toujours déjà là, toujours déjà donné et dont elle ne peut absolument pas se départir pas plus qu'elle ne peut faire abstraction de l'espace et du temps. Vous n'y voyez aucun problème pour l'intelligibilité complète du réel, ce n'est pas mon cas.
LumendeLumine a écrit :3) Ici pour qu'il y ait équivalence en l'Univers et la "valeur nulle" qu'est le néant d'après vous, il faudrait que Dieu fasse réellement passer l'Univers de l'un à l'autre. Votre emploi du terme "médiateur" est révélateur; elle suppose bien concret le passage du néant à l'être. Or un tel passage est tout sauf concret; le néant ne désigne rien de positif d'où l'Univers pourrait sortir; il est une négation pure, justement! D'où il n'y a réellement aucun passage, puisque passage implique deux termes, or le néant, que ce soit votre concept ou le mien, étant pur négatif, ne saurait être pris positivement comme un terme. Ce passage est tout aussi abstrait que l'idée de néant; il n'a pas réellement lieu. On ne peut donc voir Dieu comme celui qui fait passer de l'un à l'autre, comme un médiateur. Dieu est cause transcendante actuelle de l'Univers. Votre critique est donc aussi peu signifiante que l'idée de passage du néant à l'être sur laquelle elle s'appuie.
La doctrine chrétienne décrit explicitement l'univers comme tiré par Dieu du néant. Je sais parfaitement qu'elle ne l'entend pas comme un "matériau" à partir duquel l'univers serait fait, le Dieu de la Bible n'est pas un démiurge. Mais cela ne fait précisément que ressortir la nécessité absolue de Dieu pour que l'univers soit puisque rien de concret ne préexistait même avant qui aurait pu avoir sa consistance propre. Quand je parle de "médiateur" je l'entends évidemment dans le sens de Feuerbach comme élément nécessaire au passage de la non valeur absolue (puisque la doctrine chrétienne utilise l'expression "tiré de") à la positivité de l'existence. Vos arguments ne changent rien à la justesse de la remarque de Feuerbach concernant la non-valeur absolue de l'univers dès lors qu'il ne doit son existence qu'à la fantaisie d'un Dieu l'ayant créé tout entier de lui-même, tout entier sur ses propres fonds.

LumendeLumine a écrit : Oh, mais ça, la chrétienté n'a pas attendu Feuerbach pour le comprendre. L'Ecclésiaste commence ainsi: "vanité des vanités, tout est vanité". La différence entre la pensée chrétienne et la critique de Feuerbach ne tient pas à la fragilité de l'Univers, mais à qui est Dieu pour elle; elle sait bien, en effet, que Dieu est bon, et qu'être capricieux ne lui convient nullement.

Voyez la distinction que je fais: je ne nie pas la fragilité, la relativité d'un Univers causé par Dieu; de lui-même en effet l'Univers n'est rien et c'est Dieu qui lui donne tout. Simplement je refuse de donner à cette phrase "l'Univers n'est rien" la rigueur métaphysique que vous ou Feuerbach essayeriez de lui donner, en tordant un peu les concepts. Je réfute la torsion qui n'a pour fondement qu'une confusion entre l'image et l'idée; mais je continue à affirmer la fragilité de l'Univers. Fragile, l'Univers n'est pas pour autant une valeur purement négative; toute la valeur que l'Univers a lui est conférée par Dieu, et en tant que conférée par Dieu, elle ne peut être que positive. Il est vain d'essayer de l'associer à une idée abstraite telle que le néant, que ce soit votre définition ou ma définition.

Dieu n'est pas entre le non-être et l'Univers et il n'est pas médiateur. Il est cause transcendante actuelle. Sans Dieu l'Univers ne serait plus; il serait identique au non-être; mais dans ce cas on ne peut dire que "l'être reviendrait au non-être" puisqu'il n'y aurait plus d'être pour y revenir! L'Univers non-être serait identique au non-être.

C'est vous qui amusez à subtiliser le médiateur lorsque vous envisagez ce cas de figure. Je conteste et la subtilisation et le médiateur.

Cela dit je suis tout à fait d'accord, encore une fois, avec la relativisation de l'Univers et sa fragilité par rapport à Dieu, et votre raisonnement à ce sujet est impeccable. Mais vous allez trop loin en essayant d'associer l'Univers au néant. Même si néant est pris comme "valeur nulle", en donnant l'existence à l'Univers, Dieu, en donnant "positivité" à l'Univers le place à une distance infinie de cette "valeur nulle"; les deux ne sauraient avoir quoi que ce soit de commun, encore moins s'équivaloir tant que Dieu soutient l'Univers dans l'existence. Ainsi, l'Univers existant par Dieu n'est pas équivalent au néant. Si Dieu le lâche, très bien, il retourne au néant, il n'est plus rien; mais tant que Dieu le soutient, comment ne serait-il "rien"? Qu'a-t-il alors de commun avec une "négativité totale"?

Toutes vos explications à ce sujet tournent autour de l'idée que Dieu cesserait soudainement de conserver l'Univers. Or cette cessation, manifstement, n'arrive pas. Elle n'est pas actuelle. Elle est une possibilité, je vous l'accorde pour l'instant. Mais parce que la cessation n'est pas actuelle, on ne saurait actuellement associer l'Univers au néant, "négativité totale" ou "non-être" peu importe. La critique n'a de valeur qu'au regard de la volonté de Dieu: s'il est un être capricieux, la critique porte; s'il est un être bon, non. Si Dieu est bon, la possibilité n'est pas réelle; la critique ne porte pas. Votre raisonnement aboutit toujours à ce "caprice divin"; enlevez-le de l'équation et vous voyez bien que la critique est sans substance. Elle repose sur une possibilité, qui n'est réelle qu'à la condition que Dieu soit un être fort vilain.
Prouvez moi donc votre garantie divine concernant la perpétuation de l'univers!

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Message par LumendeLumine »

Florent51 a écrit :Au regard de cette dimension métaphysique la notion de zéro est exactement du même registre que le négatif "non-être" : elle ne parle que du réel en en constituant une soustraction. Et je vous ai dit que selon moi cette manière de faire n'a pas de rapport avec le fait de réaliser l'impossibilité rationnelle fondamentale qui est la nôtre à saisir ce que peut signifier un "x antérieur au réel".
Un x antérieur au réel, n'est pas réel. S'il est réel, il n'est pas antérieur au réel. On ne peut pas parler d'un x antérieur au réel comme quelque chose de concret, d'existant, de réel, en effet. Ce qu'on peut en dire, c'est qu'il n'est rien; qu'avant le réel, il ne saurait rien y avoir.

Je ne vois pas comment vous éviteriez cette conclusion, parfaitement logique, sans associer nos limites expérimentales avec nos limites raisonnables, comme si cette dernière dépendait de l'autre. Or à ce compte, c'est nier l'intelligence.

Vous objectez: l'intelligence ne peut penser que sur fond d'être; elle ne saurait en sortir. Or ce n'est pas sortir du champ de l'être de dire qu'en-dehors de l'être il n'y a rien; c'est simplement le délimiter par déduction. L'idée de non-être est conséquente à celle d'être et rien n'est opposé ou différent de l'être sinon le non-être.

Votre objection ne porte que si l'idée d'être inclut toute la représentation mentale associée à l'être: espace, temps, objet particulier et matériel, etc. Or c'est encore une fois nier l'intelligence en niant la capacité d'abstraction qui est son activité propre, pour l'associer avec les sens qui ne peuvent se défaire des conditions d'expérience. Le propre de l'intelligence est de se défaire des conditions d'expérience pour affirmer ce qui est vrai de toute chose.

L'idée d'un commencement absolu est non seulement inconcevable mais absurde, parce qu'elle suppose que le commencement s'inscrit dans ce dont il est le commencement.

Vous objectez: l'idée nous semble absurde, mais la possibilité demeure néanmoins.

Je réponds: on ne saurait admettre la possibilité si cette possibilité n'est pas susceptible de se réaliser. Or un commencement du réel ne saurait lui-même être réel. On ne peut donc admettre la possibilité.

Vous objectez: On ne peut logiquement admettre la possibilité, mais on peut en toute honnêteté intellectuelle laisser la question ouverte.

Je réponds: laisser la question ouverte n'a aucun sens si la possibilité qu'elle implique n'a aucun sens.

Finalement, votre agnosticisme se fonde sur une possibilité; mais que cette possibilité soit réelle, nous ne pouvons l'affirmer logiquement. Il n'y a donc pas de fondement logique à votre agnosticisme. Qu'est-ce qui vous autoriserait donc à affirmer l'agnosticisme comme la position la plus raisonnable, si elle se fonde sur une possibilité contraire à la raison? Où est la prudence, si l'on est contraint à l'absurde pour se justifier?

Pour ce qui est maintenant de la garantie divine concernant l'existence de l'Univers. Nous avons assez de mal à nous entendre sur un terme simple comme "néant", je ne crois pas que dans le cadre de cette discussion je puis vous justifier de façon entièrement satisfaisante pourquoi Dieu est ainsi et pas autrement. Je vais néanmoins vous faire un exposé le plus cohérent possible de la doctrine chrétienne à ce sujet.

Dieu est la bonté et la sagesse même, puisqu'il est la source de ces perfections et doit les posséder en propre. Au contraire lorsque nous disons que quelqu'un agit par caprice ou par fantaisie, nous voulons dire qu'il n'agit pas conformément à la raison et ainsi que sa sagesse et sa bonté sont imparfaites. En Dieu qui est sa propre existence il ne saurait y avoir aucune imperfection, mais toutes les perfections en propre, à l'état pur, à un degré infini.

La doctrine chrétienne se défend bien de toute accusation d'anthropomorphisme à ce sujet parce qu'elle attribue ces perfections à Dieu non pas de manière univoque mais analogique. Je n'en dirai pas plus pour l'instant, le livre que vous avez acheté expose tout ceci avec une grande clarté.

Dieu ne saurait être contraint à conserver l'Univers dans l'existence, puisque rien ne lui est antérieur, rien ne peut le causer ou le déterminer d'aucune façon, c'est évident. Il est libre. Et c'est librement qu'il conserve l'Univers dans l'existence. À la question: "Dieu peut-il annihiler quelque chose?", il faut donc répondre: oui. Néanmoins à la question "Dieu annihile-t-il quelque chose?" il faut répondre: non. Saint Thomas d'Aquin explique: parce que Dieu agit afin que sa gloire soit manifestée, et c'est en conservant l'Univers dans l'existence que sa gloire est manifestée au maximum. Pour ma part je l'expliquerais ainsi: tout agent agit pour une fin; si Dieu a créé l'Univers pour une fin, il se contredirait en l'annihilant.

Dieu, étant parfait, n'a pas créé l'Univers dans son intérêt, puisqu'il n'a rien à gagner; il l'a créé afin que nous le connaissions, ce qui est manifeste dans les Saintes Écritures par où il se révèle. Or il se contredirait en annihilant ce qu'il a créé, puisque nous ne pourrions pas le connaître.

C'est donc par sa libre volonté, et non par contrainte, que Dieu conserve l'Univers dans l'existence; mais comme Dieu est toute perfection il ne saurait se contredire ou changer d'avis. L'Univers a été pour un but, et tant qu'il servira ce but il faut dire qu'il continuera à exister.

C'est un fait que par les seules lumières de notre raison, le but recherché par Dieu en créant l'Univers est difficile à atteindre avec certitude. Mais la doctrine chrétienne n'a pas à tout démontrer par la seule raison, mais à harmoniser le donné révélé avec la raison et montrer qu'il ne s'y oppose pas. Pour montrer que l'existence de Dieu ne s'oppose pas à la raison, elle doit la démontrer rigoureusement; mais pour montrer que la conservation de toutes choses par Dieu ne s'oppose pas à la raison, il suffit d'en montrer la convenance.

Florent51

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Message par Florent51 »

LumendeLumine a écrit :Un x antérieur au réel, n'est pas réel. S'il est réel, il n'est pas antérieur au réel. On ne peut pas parler d'un x antérieur au réel comme quelque chose de concret, d'existant, de réel, en effet. Ce qu'on peut en dire, c'est qu'il n'est rien; qu'avant le réel, il ne saurait rien y avoir.

Je ne vois pas comment vous éviteriez cette conclusion, parfaitement logique, sans associer nos limites expérimentales avec nos limites raisonnables, comme si cette dernière dépendait de l'autre. Or à ce compte, c'est nier l'intelligence.

Vous objectez: l'intelligence ne peut penser que sur fond d'être; elle ne saurait en sortir. Or ce n'est pas sortir du champ de l'être de dire qu'en-dehors de l'être il n'y a rien; c'est simplement le délimiter par déduction. L'idée de non-être est conséquente à celle d'être et rien n'est opposé ou différent de l'être sinon le non-être.

Votre objection ne porte que si l'idée d'être inclut toute la représentation mentale associée à l'être: espace, temps, objet particulier et matériel, etc. Or c'est encore une fois nier l'intelligence en niant la capacité d'abstraction qui est son activité propre, pour l'associer avec les sens qui ne peuvent se défaire des conditions d'expérience. Le propre de l'intelligence est de se défaire des conditions d'expérience pour affirmer ce qui est vrai de toute chose.

L'idée d'un commencement absolu est non seulement inconcevable mais absurde, parce qu'elle suppose que le commencement s'inscrit dans ce dont il est le commencement.

Vous objectez: l'idée nous semble absurde, mais la possibilité demeure néanmoins.

Je réponds: on ne saurait admettre la possibilité si cette possibilité n'est pas susceptible de se réaliser. Or un commencement du réel ne saurait lui-même être réel. On ne peut donc admettre la possibilité.

Vous objectez: On ne peut logiquement admettre la possibilité, mais on peut en toute honnêteté intellectuelle laisser la question ouverte.

Je réponds: laisser la question ouverte n'a aucun sens si la possibilité qu'elle implique n'a aucun sens.

Finalement, votre agnosticisme se fonde sur une possibilité; mais que cette possibilité soit réelle, nous ne pouvons l'affirmer logiquement. Il n'y a donc pas de fondement logique à votre agnosticisme. Qu'est-ce qui vous autoriserait donc à affirmer l'agnosticisme comme la position la plus raisonnable, si elle se fonde sur une possibilité contraire à la raison? Où est la prudence, si l'on est contraint à l'absurde pour se justifier?
Salut Lumen,

Je vous reposte ma position qui comme la vôtre n'a pas changé d'un iota sur le sujet :
La notion de "non-être" ne constitue rien de concret, d'abord pour la simple raison que l'être n'est pas quelque chose qui tombe sous le scalpel. De "l'être" je n'en connais que concernant les choses concrètes qui sont : et ces choses concrètes qui sont je peux imaginer que tout d'un coup elles ne soient plus (par exemple ce billet "est" dans ma poche ou n'y "est plus"). Ou je peux imaginer le "non-être" la "non-existence" d'êtres imaginaires forgés à partir de parties concrètes de choses qui existent, qui sont bel et bien.
Tout cela me montre que cette notion de "non-être" a une genèse bien concrète et ne saurait signifier que, ponctuellement, la disparition de telle chose concrète du réel.
Si je veux généraliser cette notion de "non-être" pour l'identifier au terme "néant" et la faire servir pour penser des questions comme celles du "commencement du réel" je fais fausse route en croyant posséder le terme adéquat pour traiter ces questions.

L'abstraction, dont vous faîtes grand cas, n'est ici que du vent et les distinctions subtiles que vous établissez entre "imaginer" et "penser" sans pertinence.

Mon avis est que vous vous mentez à vous-mêmes lorsque vous posez, sans que cela vous cause plus de soucis que cela, le possible commencement du temps et celui de l'espace et que vous faîtes les gros yeux lorsque l'on évoque la question d'un commencement possible du réel lui-même alors que le problème qui se pose à notre esprit est exactement le même, l'un comme l'autre étant également impensable ou inimaginable comme vous le voulez.
Mais je me suis comme vous déjà suffisamment expliqué sur ce sujet et pour tout éclaircissement sur des points du discours de l'autre qui nous paraîtrait encore vague nous avons maintenant, me semble-t-il, suffisamment de références abondantes que nous pouvons consulter.
LumendeLumine a écrit : Pour ce qui est maintenant de la garantie divine concernant l'existence de l'Univers. Nous avons assez de mal à nous entendre sur un terme simple comme "néant", je ne crois pas que dans le cadre de cette discussion je puis vous justifier de façon entièrement satisfaisante pourquoi Dieu est ainsi et pas autrement. Je vais néanmoins vous faire un exposé le plus cohérent possible de la doctrine chrétienne à ce sujet.

Dieu est la bonté et la sagesse même, puisqu'il est la source de ces perfections et doit les posséder en propre. Au contraire lorsque nous disons que quelqu'un agit par caprice ou par fantaisie, nous voulons dire qu'il n'agit pas conformément à la raison et ainsi que sa sagesse et sa bonté sont imparfaites. En Dieu qui est sa propre existence il ne saurait y avoir aucune imperfection, mais toutes les perfections en propre, à l'état pur, à un degré infini.

La doctrine chrétienne se défend bien de toute accusation d'anthropomorphisme à ce sujet parce qu'elle attribue ces perfections à Dieu non pas de manière univoque mais analogique. Je n'en dirai pas plus pour l'instant, le livre que vous avez acheté expose tout ceci avec une grande clarté.

Dieu ne saurait être contraint à conserver l'Univers dans l'existence, puisque rien ne lui est antérieur, rien ne peut le causer ou le déterminer d'aucune façon, c'est évident. Il est libre. Et c'est librement qu'il conserve l'Univers dans l'existence. À la question: "Dieu peut-il annihiler quelque chose?", il faut donc répondre: oui. Néanmoins à la question "Dieu annihile-t-il quelque chose?" il faut répondre: non. Saint Thomas d'Aquin explique: parce que Dieu agit afin que sa gloire soit manifestée, et c'est en conservant l'Univers dans l'existence que sa gloire est manifestée au maximum. Pour ma part je l'expliquerais ainsi: tout agent agit pour une fin; si Dieu a créé l'Univers pour une fin, il se contredirait en l'annihilant.

Dieu, étant parfait, n'a pas créé l'Univers dans son intérêt, puisqu'il n'a rien à gagner; il l'a créé afin que nous le connaissions, ce qui est manifeste dans les Saintes Écritures par où il se révèle. Or il se contredirait en annihilant ce qu'il a créé, puisque nous ne pourrions pas le connaître.

C'est donc par sa libre volonté, et non par contrainte, que Dieu conserve l'Univers dans l'existence; mais comme Dieu est toute perfection il ne saurait se contredire ou changer d'avis. L'Univers a été pour un but, et tant qu'il servira ce but il faut dire qu'il continuera à exister.

C'est un fait que par les seules lumières de notre raison, le but recherché par Dieu en créant l'Univers est difficile à atteindre avec certitude. Mais la doctrine chrétienne n'a pas à tout démontrer par la seule raison, mais à harmoniser le donné révélé avec la raison et montrer qu'il ne s'y oppose pas. Pour montrer que l'existence de Dieu ne s'oppose pas à la raison, elle doit la démontrer rigoureusement; mais pour montrer que la conservation de toutes choses par Dieu ne s'oppose pas à la raison, il suffit d'en montrer la convenance.
Ma demande était un peu ironique je dois le reconnaître : vous-mêmes comprenez très bien que l'acceptation de vos "preuves" concernant la perpétuation du réel suppose la foi et il n'est guère de chance que votre catéchisme convainque quelque agnostique ou athée que ce soit.

Je me permets cependant de faire remarquer la chose suivante : il me semble que la doctrine catholique va elle-même plutôt dans mon sens lorsqu'elle traite de la question de la "fin du monde". Comme vous le savez en effet la théologie chrétienne envisage clairement et explicitement la disparition de ce monde. Comme elle lie la question de la disparition de ce monde à la notion de Providence divine elle signifie clairement par là que ce problème est à la discrétion entière de Dieu : rien ne vous garantit donc, même du point de vue catholique, que Dieu n'envisagera pas dans la seconde suivante la Fin de ce monde. Il me semble même que la pensée chrétienne rejoint à ce point ma notion de caprice divin sur ce sujet qu'elle s'appuit tout entière sur cette phrase fameuse de jésus disant que seul le Père sait exactement le jour et l'heure de cette Fin.

On ne saurait mieux exprimer le caractère arbitraire et capricieux de ce décret fixant potentiellement à tout instant, dans la théologie chrétienne, la subtilisation de ce Monde tel que nous le connaissons du domaine de l'être. Décidément Feuerbach était un excellent théologien..

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Ecrit le 08 oct.06, 13:45

Message par LumendeLumine »

Bonjour Florent,

vous dites: "l'abstraction n'est ici que du vent" et la distinction "subtile" entre image et pensée "sans pertinence".

Hélas l'abstraction, c'est ce qui fait l'intelligence, elle ne se conçoit pas sans rapport à cette notion simple et purement abstraite qui est au coeur de chacun de ses actes: l'être. La distinction entre image et pensée n'est pas subtile mais formelle; d'un côté l'expérience, de l'autre l'intelligence; on ne saurait les confondre même pas, et je dirais, surtout pas en métaphysique, où s'établissent la valeur des concepts et la nature des facultés.

Si cela ne vous convainc pas, tant pis, je ne souhaite pas continuer plus longtemps cet échange stérile. Je n'espère pas, dans le cadre d'un débat, déraciner de votre esprit ces conceptions matérialistes qui forment de nos jours la pensée commune et généralisée. Sûrement trouverez-vous mieux que mes arguments chez Garrigou-Lagrange.
Florent51 a écrit :Comme vous le savez en effet la théologie chrétienne envisage clairement et explicitement la disparition de ce monde. Comme elle lie la question de la disparition de ce monde à la notion de Providence divine elle signifie clairement par là que ce problème est à la discrétion entière de Dieu : rien ne vous garantit donc, même du point de vue catholique, que Dieu n'envisagera pas dans la seconde suivante la Fin de ce monde.
La fin du monde est tout sauf une destruction de ce que Dieu a fait. Ici je pense que votre critique procède d'une ignorance de la doctrine chrétienne et je vous conseille simplement de lire cette page du catéchisme qui constitue la meilleure réponse à votre argument.

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Message par Ecossais »

Le contraire d'illogique :lol:

Florent51

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Ecrit le 11 oct.06, 23:32

Message par Florent51 »

LumendeLumine a écrit :Bonjour Florent,

vous dites: "l'abstraction n'est ici que du vent" et la distinction "subtile" entre image et pensée "sans pertinence".

Hélas l'abstraction, c'est ce qui fait l'intelligence, elle ne se conçoit pas sans rapport à cette notion simple et purement abstraite qui est au coeur de chacun de ses actes: l'être. La distinction entre image et pensée n'est pas subtile mais formelle; d'un côté l'expérience, de l'autre l'intelligence; on ne saurait les confondre même pas, et je dirais, surtout pas en métaphysique, où s'établissent la valeur des concepts et la nature des facultés.

Si cela ne vous convainc pas, tant pis, je ne souhaite pas continuer plus longtemps cet échange stérile. Je n'espère pas, dans le cadre d'un débat, déraciner de votre esprit ces conceptions matérialistes qui forment de nos jours la pensée commune et généralisée. Sûrement trouverez-vous mieux que mes arguments chez Garrigou-Lagrange.
Bonjour Lumen,

veuillez m'excuser de ce retard que j'ai pris à vous répondre mais cela m'a permis de réfléchir. Maintenant que les positions de l'un et de l'autre sont clairement affirmées il est possible de réfléchir sur ces positions. En ce qui me concerne je dois bien avouer que la force logique qui émane de vos raisonnements est incontestable et, si je me réfugie derrière l'idée de l'impensabilité du néant, il reste clair que je vois mal ce qui pourraît être l'opposé de l'être à part justement ce non-être dont vous parlez.
Cependant également plus j'y réfléchis et plus j'avoue que ma position me paraît la plus profonde, notamment en ce qui concerne la prudence nécessaire à tout raisonnement et qui nous évite d'affirmer comme vrai des choses dont nous n'avons pas la certitude totale qu'elles soient vraies.

Ce qui me paraît particulièrement douteux à bien y réfléchir réside dans la distinction que vous effectuez entre ce qui serait proprement le travail de l'intelligence, l'abstraction (qui nous permettrait de connaître la nature intelligible du réel) et ce qui serait simplement l'imagination.
J'en prendrai un exemple dans la distinction que vous effectuiez concernant le problème de penser le commencement du temps : vous disiez que le problème du commencement du temps concerne simplement notre imagination mais qu'il ne pose pas de problème logique, à la différence de l'impossibilité à penser le commencement du réel.
Vous preniez le raisonnement suivant : la notion de "commencement du réel" est non seulement inimaginable (comme pour le temps) mais également contradictoire car : soit le commencement du réel est réel et dans ce cas-là le réel a toujours déjà existé soit le commencement du réel n'est pas réel et dans ce cas-là il n'y a pas eu de commencement du réel.

Mais il me semble que ce raisonnement est tout aussi valable s'agissant du temps : soit le commencement du temps est dans le temps et dans ce cas le temps a toujours déjà existé, soit le commencement du temps n'est pas dans le temps et dans ce cas il n'y a jamais de commencement du temps.
Même chose pour l'espace : soit le commencement de l'espace est dans l'espace et dans ce cas l'espace a toujours déjà existé soit le commencement de l'espace n'est pas dans l'espace et dans ce cas il n'y a jamais de commencement de l'espace.

Dans les deux cas c'est aussi contradictoire donc votre distinction entre l'imagination qui serait seule en défaut dans un cas (le temps et l'espace) et la contradiction logique qui ne vaudrait que concernant l'être, le réel est fausse.

Plus j'y réfléchis plus il me semble que même s'il nous semble tenir quelque chose de solide avec la notion de "non-être" même prise comme vous le faîtes de manière prudente en tant qu'indication en négatif (négation ayant une valeur intelligible) en réalité nous nous trompons. Vous-mêmes d'ailleurs vous le voyez mieux lorsque vous reconnaissez que notre pensée ne parle jamais du réel et, même lorsqu'elle parle du néant, ne parle en fait que du réel en creux.
Que signifie alors cette notion de "non-être" et de "néant"? Comme je vous l'ai dit concrètement elle n'a de sens que ponctuellement au cas par cas : ici il n'y a pas tel objet.. Le non-être est quelque chose que nous abstrayons de la réalité en soustrayons à un objet existant son être. Mais notre langage montre bien toute la limite et le caractère faux de cette soustraction lorsque nous la prenons comme un substantif : le non-être. Dans ce cas nous pouvons aller jusqu'à former des phrases comme : "le non-être est.. ceçi" ou "le non-être n'est pas.. cela".. qui sont par elles-mêmes contradictoires et montrent que le réel est toujours déjà là et que la logique s'est joué de nous en nous faisant croire que ce pouvoir d'abstraction dont vous êtes si fier nous permet de comprendre la réalité.

Qu'est ce alors que ce pouvoir d'abstraction? Comment le comprendre?

Eh bien, puisque chaque chose a sa logique, il y a un terme qui correspond précisément à ce pouvoir d'abstraction dans le langage sartrien et qui va vous évoquer quelque chose : Sartre parle du pouvoir de "néantisation" de notre conscience.. Expliquons.

Sartre adhère à la juste démonstration de Bergson qui le premier avait réalisé le "vide" le "néant de pensée" que constitue la notion de "néant", simple soustraction dans l'imaginaire du réel à lui-même. Il la prolonge en montrant que cette notion de "néant" n'a pas absolument aucun sens : elle est au contraire tout à fait essentielle car elle indique le pouvoir essentiel de notre conscience qui consiste à pouvoir "néantiser" les choses. Cela veut dire que lorsque je perçois "un" objet, pour que je puisse le percevoir il faut que j'ai la capacité de "néantiser" tout le reste des choses sur lequel il fait fond. Sans vouloir vous infliger de trop longues citations permettez-moi de citer ici l'Etre et le Néant : "Lorsque j'entre dans ce café pour y chercher Pierre, écrit Sartre, il se fait une organisation synthétique de tous les objets du café en fond sur quoi Pierre est donné comme devant paraître. Et cette organisation du café en fond est une première néantisation." (Gallimard, 1943, p.44).

Ainsi selon Sartre la "néantisation" ou ce qu'il appelle aussi "négation" n'est pas une rupture dans l'être mais sa condition nécessaire. Pour pouvoir percevoir et individualiser ce réel il faut ce pouvoir le néantiser, toute néantisation se faisant évidemment sur un fond de réel toujours déjà là. D'où cette formul fameuse de Sartre disant que "le néant hante l'être" : "En un mot, s'il y a de l'être partout, ce n'est pas seulement le néant qui, comme le veut Bergson est inconcevable : de l'être on ne dérivera jamais la négation. La condition nécessaire pour qu'il soit possible de dire non, c'est que le non-être soit une présence perpétuelle. C'est ce que nous exprimons en disant que le néant hante l'être. Cela signifie que l'être n'a nul besoin de néant pour se concevoir et qu'on peut inspecter sa notion exhaustivement sans y trouver la moindre trace de néant. Mais au contraire, le néant qui n'est pas, ne saurait avoir qu'une existence empruntée. C'est de l'être qu'il prend son être ; son néant d'être ne se rencontre que dans les limites de l'être, et la disparition totale de l'être ne serait pas l'avènement du règne du non-être, mais au contraire l'évanouissement concomitant de l'être." (p.52)

Bref, parler du néant, du non-être (et j'en suis de plus en plus persuadé) ce n'est pas parler de la réalité mais d'un pouvoir de notre conscience. C'est de notre capacité de connaître qu'il est ici question, d'où les apories, les difficultés logiques auxquelles nous arrivons si nous voulons prendre le résultat de ces abstractions dans un sens positif, disant quelque chose de la réalité.

Je reviens sur la deuxième partie de votre message incessamment.

Florent51

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Ecrit le 12 oct.06, 03:08

Message par Florent51 »

LumendeLumine a écrit :Bonjour Florent,

La fin du monde est tout sauf une destruction de ce que Dieu a fait. Ici je pense que votre critique procède d'une ignorance de la doctrine chrétienne et je vous conseille simplement de lire cette page du catéchisme qui constitue la meilleure réponse à votre argument.

http://www.vatican.va/archive/FRA0013/__P2L.HTM
Re-bonjour Lumen,

suite de la conversation.

Cette contre-critique que vous produisez me paraît ici bien légère. Comment pouvez-vous supposer un seul instant que je ne connaisse pas au moins aussi bien que vous la doctrine chrétienne? Enfin!! :wink:

Dans la doctrine chrétienne la Fin du monde est difficile à concevoir : l'expression "terre nouvelle et cieux nouveaux" n'est-elle pas métaphorique?

Et quand bien même elle ne serait pas métaphorique cela ne change pas deux choses :
1) Même s'il n'y a pas destruction radicale il y a changement substantielle. La terre nouvelle n'est pas la terre que nous connaissons même si de quelque manière elle s'y rapporte : la phrase disant que "le monde et la réalité tels que nous les connaissons peuvent cesser à tout instant d'exister" reste donc vraie.
2) Le caractère arbitraire de ce terme, connu de Dieu seul (et même d'une seule personne voire de 2 dans la Trinité ce qui pose au passage un sérieux problème de logique : Jésus qui reconnaît ne pas savoir l'heure de la fin - donc n'être pas omniscient - peut-il encore participer pleinement à l'essence divine?), le caractère capricieux de cette décision n'est certainement pas réfuté par votre remarque. Donc la fragilité radicale (et nullement admirable) du réel que dénonce Feuerbach reste entière.

Pour aller un peu plus loin dans l'analyse je vous dirai que votre réponse sur la conservation de la terre me fait fortement penser à une analyse tout à fait comparable de Nietzsche sur un sujet fort proche.
Nietzsche prend le cas de la résurection des corps dans la doctrine chrétienne pour montrer que les chrétiens se "payent de mots" comme il dit, et qu'ils passent leur temps à construire des idées contradictoires et sans valeur.
Dans la doctrine chrétienne les corps on le sait ressuscitent eux aussi et pas seulement les âmes : ils deviennent ce que l'on appelle des "corps glorieux".
Que sont alors vraiment ces corps demandent Nietzsche? Si l'on regarde ce qu'en dit la théologie on constate d'abord que ce sont des corps assexués (il n'y a plus ni maris ni femmes au royaume des cieux), des corps qui ne souffrent plus, qui ne sont plus atteints de maladies ou de défauts physiques, des corps imputrescibles..

Bref le contraire de ce que nous appelons des corps, de ce que nous savons être des corps.

La religion se paye donc clairement de mots en continuant d'appeler par le même terme des "réalités" qui ne sont pas loin de constituer de purs contradictoires..

Vous voyez à quel point cette analyse rejoint ce que vous affirmez sur les "nouveaux cieux et la nouvelle terre" d'après la parousie : à supposer qu'il s'agisse bien d'une recréation de la terre il s'agit alors d'une terre sans tremblements de terre, sans éruptions volcaniques, sans raz-de-marée, sans sécheresse et sans ouragans... Bref le contraire de notre terre...

L'affirmation chrétienne selon laquelle l'univers ne ferait ainsi que revenir à sa nature profonde masque difficilement la différence radicale, le hiatus complet, existant entre les deux états de ce qu'on appelle par le même terme ("corps" ou "terre" ou "ciel").

Donc l'affirmation de Feuerbach reste on ne peut plus valable : dans la théologie chrétienne la fragilité du réel tel que nous le connaissons est radicale et il peut plaire à tout instant à Dieu de le faire disparaître et de le remplacer par ce qui est presque symétriquement son contraire ou en tous cas par quelque chose qui, essentiellement, radicalement, n'est plus lui..

Cette contingence absolue égale véritablement l'être, le réel, au "néant" conçu comme valeur négative absolue, comme ce qui n'a aucune consistance, aucune légitimité par soi.

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Ecrit le 12 oct.06, 08:43

Message par LumendeLumine »

Florent51 a écrit :Comment pouvez-vous supposer un seul instant que je ne connaisse pas au moins aussi bien que vous la doctrine chrétienne? Enfin!!
Eh bien, parce que je connais peu d'agnostiques qui ont pour hobby la théologie. :lol:
Florent51 a écrit :Dans la doctrine chrétienne la Fin du monde est difficile à concevoir : l'expression "terre nouvelle et cieux nouveaux" n'est-elle pas métaphorique?
Pas du tout.
Florent51 a écrit :Et quand bien même elle ne serait pas métaphorique cela ne change pas deux choses :
1) Même s'il n'y a pas destruction radicale il y a changement substantielle. La terre nouvelle n'est pas la terre que nous connaissons même si de quelque manière elle s'y rapporte : la phrase disant que "le monde et la réalité tels que nous les connaissons peuvent cesser à tout instant d'exister" reste donc vraie.
2) Le caractère arbitraire de ce terme, connu de Dieu seul (et même d'une seule personne voire de 2 dans la Trinité ce qui pose au passage un sérieux problème de logique : Jésus qui reconnaît ne pas savoir l'heure de la fin - donc n'être pas omniscient - peut-il encore participer pleinement à l'essence divine?), le caractère capricieux de cette décision n'est certainement pas réfuté par votre remarque. Donc la fragilité radicale (et nullement admirable) du réel que dénonce Feuerbach reste entière.
La difficulté posée à la divinité du Christ par son ignorance du jour et de l'heure n'a pas été ignorée par les Pères de l'Église et différentes réponses ont été avancées. Saint Thomas d'Aquin estime que cette ignorance est essentiellement relative à sa mission en tant que Sauveur du monde et qu'en fait le Christ, en tant qu'il est Dieu, connaît le jour et l'heure.

Je ne comprends pas pourquoi le caractère "capricieux" de la décision de la Fin du monde n'est pas réfuté par ma remarque. Vous l'affirmez, mais sans le démontrer. Le capricieux change constamment d'idée; or Dieu agit conformément à la fin qu'il poursuit tant par la conservation actuelle des choses que par le renouvellement qu'il opérera à la fin des temps. Agir par caprice est signe d'imperfection et ne convient aucunement à Dieu, source de toute perfection.

L'affirmation "le monde et la réalité tels que nous les connaissons peuvent cesser à tout instant d'exister" reste vraie, mais sa portée est nettement amoindrie; en effet si ce monde doit tomber au néant, c'est que Dieu a mieux pour nous en réserve. Il y a une différence entre raser une maison et ne rien laisser, et remplacer la maison par un palais.

C'est un abus de langage de parler d'une "disparition du réel"; le monde à venir sera lui-même réel; nous demeurerons éternellement réels et identiques à nous-mêmes.
Florent51 a écrit :Nietzsche prend le cas de la résurection des corps dans la doctrine chrétienne pour montrer que les chrétiens se "payent de mots" comme il dit, et qu'ils passent leur temps à construire des idées contradictoires et sans valeur.
Dans la doctrine chrétienne les corps on le sait ressuscitent eux aussi et pas seulement les âmes : ils deviennent ce que l'on appelle des "corps glorieux".
Que sont alors vraiment ces corps demandent Nietzsche? Si l'on regarde ce qu'en dit la théologie on constate d'abord que ce sont des corps assexués (il n'y a plus ni maris ni femmes au royaume des cieux), des corps qui ne souffrent plus, qui ne sont plus atteints de maladies ou de défauts physiques, des corps imputrescibles..
Où avez-vous lu que ces corps seraient asexués? Dans le supplément à la Somme Théologique, on lit:

Les sexes féminin et masculin font partie du corps humain auquel ils donnent une qualité essentielle à sa nature profonde. Il ne s’agit pas d’un accident provisoire comme le fait que ce même corps est corruptible. L’humanité est crée homme et femme de manière complémentaire, de telle façon qu’elle révèle en deux sujets les deux pôles de l’amour: sa force et sa douceur. C’est dans l’union de ces deux orientations de l’amour que peut naître la vie, l’éducation des enfants et l’équilibre humain tout entier. Si donc le corps ressuscité doit être essentiellement le même dans l’au-delà, il est nécessaire qu’il soit sexué de la même façon qu’il l’a été sur la terre.

Ces corps ne souffrent plus; mais qui souhaite souffrir, et qui ne voit dans la souffrance non pas une perfection mais une imperfection des choses et qui ne devrait pas y être présente? La souffrance, est-ce ce qui fait la nature humaine? Pas du tout: c'est d'abord sa capacité à connaître, à aimer. La souffrance est liée aux conditions mauvaises dans lesquelles nous sommes placés; enlevez le mal, la souffrance disparaît. Personne ne s'en plaindrait vraiment d'ailleurs, même pas Nietzsche.

Ce qui fait l'homme ne peut être ce qui le détruit. Or la corruptibilité détruit l'homme; ce n'est pas donc pas ce qui le fait, positivement. Donnez aux corps humains l'incorruptibilité, ils en sont plus, et non pas moins humains. Je mettrais la souffrance dans le même ordre d'idées.

Vous allez très, très loin, en osant appeler le monde à venir un "pur contradictoire" avec le monde actuel. C'est plutôt le monde actuel qui est contradictoire en lui-même; la mort succède au développement des êtres vivants, le bonheur s'accompagne de souffrance; la terre qui permet la vie la détruit sauvagement (cataclysmes naturels). Le monde à venir est semblable au monde actuel, mais sans ses contradictions internes, son imperfection. Il est donc plus fidèle à notre monde que notre monde l'est à lui-même! Notre corps glorieux, notre état de ressuscités, est plus vraiment nous-même que cet état actuel où nous nous dissolvons dans les labeurs, les blessures, et finalement la mort.

Notre monde actuel, pour prendre cette comparaison, c'est comme un vieux phono tout rayé; on entend la musique, mais on entend aussi tout le boucan d'interférences, et puis le son manque de puissance. D'après vous, un re-master sur disque compact ce serait un "pur contradictoire" à l'original, parce qu'il y manquerait l'interférence, parce qu'on n'entendrait que la belle musique?
Florent51 a écrit :Mais il me semble que ce raisonnement est tout aussi valable s'agissant du temps : soit le commencement du temps est dans le temps et dans ce cas le temps a toujours déjà existé, soit le commencement du temps n'est pas dans le temps et dans ce cas il n'y a jamais de commencement du temps.
Non, je ne vois pas la logique de l'argument. Le commencement du temps n'a pas besoin d'être dans le temps pour être réel. Vous avez déjà entendu parler de ce que c'est qu'une singularité? Le commencement du temps, c'est peut-être bien une singularité. De même avec l'espace. Vous ne pouvez pas vous représenter l'espace ailleurs que dans un espace plus grand, de même avec un commencement de l'espace; mais l'espace a peut-être bien commencé tel une singularité.

La théorie du Big Bang parle bien, effectivement, d'un commencement du temps et de l'espace, contenu dans une singularité, mais pas d'un commencement du réel. C'est bien parce que l'un a un sens, l'autre pas.
Florent51 a écrit :Que signifie alors cette notion de "non-être" et de "néant"? Comme je vous l'ai dit concrètement elle n'a de sens que ponctuellement au cas par cas : ici il n'y a pas tel objet.. Le non-être est quelque chose que nous abstrayons de la réalité en soustrayons à un objet existant son être.
Faire du cas par cas, c'est le rôle de l'imagination; mais le rôle de l'intelligence c'est de faire de l'universel.

Nous ne pouvons pas abstraire le non-être de la réalité parce que le non-être ne fait pas, par définition, partie de la réalité. Vous avez une drôle de notion d'abstraction. Abstraire c'est constater ce qui est réel non pas dans un objet particulier mais dans plusieurs objets différents en même temps. Rouge, c'est rouge, que ce soit dans cet objet ou celui-là, que ce soit hier ou demain. Même chose avec les nombres, comme on l'avait dit.

Ce que l'intelligence abstrait de la réalité, ce n'est pas le non-être, c'est l'être; l'être est vraiment dans les choses, et dans toutes les choses.
Et parce que l'être est une notion simple, intelligible, on ne peut pas se tromper en pensant sa négation, qui elle aussi doit être simple et intelligible.

Dire "le non-être est ceci ou cela" est contradictoire si "ceci ou cela" est une quelconque chose réelle. Mais vous pouvez très bien affirmer sans vous contredire "le non-être est rien", "le non-être est sans substance", "le non-être ne contient rien".

J'apprécie votre exposé sur Sartre, mais je n'y adhère pas pour deux raisons. Premièrement, cette "néantisation" d'où il tire sa formule "le néant hante l'être" est une opération de division et de catégorisation; l'intelligence n'attribue d'aucune façon à toute chose le "néant" parce qu'elle en considère une en particulier. Quelle logique y a-t-il là-dedans? C'est s'amuser à donner des noms tirés par les cheveux (qu'est-ce que c'est que cette néantisation) pour en dégager des conclusions métaphysiques rigoureuses; mais si on manque de rigueur dans les prémisses on ne peut pas attendre grand-chose de la suite.

Notez qu'en fait je suis d'accord avec lui quand il dit: "l'être n'a nul besoin de néant pour se concevoir et qu'on peut inspecter sa notion exhaustivement sans y trouver la moindre trace de néant. Mais au contraire, le néant qui n'est pas, ne saurait avoir qu'une existence empruntée. C'est de l'être qu'il prend son être ; son néant d'être ne se rencontre que dans les limites de l'être, et la disparition totale de l'être ne serait pas l'avènement du règne du non-être, mais au contraire l'évanouissement concomitant de l'être."

J'irais plus loin que lui: le néant ne prend son être de rien, même pas de l'être; il n'est pas, point. Son idée est, en tant que négation de l'être, mais il n'a aucun contenu dans le réel. Il ne hante pas l'être, parce que ce qui hante existe au moins du fait qu'il agit en quelque sorte.

Nous ne disons rien, comme vous le dites, des choses qui sont, des choses réelles, quand nous parlons de non-être; nous parlons d'une négation pure.

Deuxièmement, parce que sa notion de néant est encore toute expérimentale: si elle réellement pour lui "soustraction dans l'imaginaire du réel à lui-même", elle n'atteint pas l'intelligence dans sa fonction.

Finalement, vous ne montrez pas qu'on puisse considérer un commencement du réel comme possible.

Florent51

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Ecrit le 12 oct.06, 12:18

Message par Florent51 »

Bonsoir Lumen,

je vous réponds de manière beaucoup plus brève que prévue et presque laconiquement car une panne sur le serveur de ce forum a effacé la longue rédaction que je vous avait écrite. Cet abrégé sans saveur aura au moins le mérite de vous faire gagner du temps.
LumendeLumine a écrit :
La difficulté posée à la divinité du Christ par son ignorance du jour et de l'heure n'a pas été ignorée par les Pères de l'Église et différentes réponses ont été avancées. Saint Thomas d'Aquin estime que cette ignorance est essentiellement relative à sa mission en tant que Sauveur du monde et qu'en fait le Christ, en tant qu'il est Dieu, connaît le jour et l'heure.
Pure hypothèse.
LumendeLumine a écrit : Je ne comprends pas pourquoi le caractère "capricieux" de la décision de la Fin du monde n'est pas réfuté par ma remarque. Vous l'affirmez, mais sans le démontrer. Le capricieux change constamment d'idée; or Dieu agit conformément à la fin qu'il poursuit tant par la conservation actuelle des choses que par le renouvellement qu'il opérera à la fin des temps. Agir par caprice est signe d'imperfection et ne convient aucunement à Dieu, source de toute perfection.
Vous affirmez qu'il ne s'agit pas d'une destruction de la réalité mais d'une transformation, cela ne change rien quant au caractère capricieux concernant la date de cette transformation.
LumendeLumine a écrit : L'affirmation "le monde et la réalité tels que nous les connaissons peuvent cesser à tout instant d'exister" reste vraie, mais sa portée est nettement amoindrie; en effet si ce monde doit tomber au néant, c'est que Dieu a mieux pour nous en réserve. Il y a une différence entre raser une maison et ne rien laisser, et remplacer la maison par un palais.
Allons, allons!!
Si ma bicoque qui fuit de partout (image réaliste du monde) est remplacée par un palais alors la phrase qui dit "ma maison telle que je la connaissais a cessé d'exister" est juste. La promotion dans l'être ne change rien au caractère radical de la transformation.
LumendeLumine a écrit :C'est un abus de langage de parler d'une "disparition du réel"; le monde à venir sera lui-même réel; nous demeurerons éternellement réels et identiques à nous-mêmes.
C'est en lisant ce genre de passage mon cher Lumen que je me demande si vous ne faîtes pas preuve d'une certaine mauvaise foi. Je n'ai pas dit en effet "disparition du réel" mais "disparition du réel tel que je le connais", ça change tout et je demande bien comment vous avez pu ne pas prendre en compte cette précision
LumendeLumine a écrit :Où avez-vous lu que ces corps seraient asexués? Dans le supplément à la Somme Théologique, on lit:
Les sexes féminin et masculin font partie du corps humain auquel ils donnent une qualité essentielle à sa nature profonde. Il ne s’agit pas d’un accident provisoire comme le fait que ce même corps est corruptible. L’humanité est crée homme et femme de manière complémentaire, de telle façon qu’elle révèle en deux sujets les deux pôles de l’amour: sa force et sa douceur. C’est dans l’union de ces deux orientations de l’amour que peut naître la vie, l’éducation des enfants et l’équilibre humain tout entier. Si donc le corps ressuscité doit être essentiellement le même dans l’au-delà, il est nécessaire qu’il soit sexué de la même façon qu’il l’a été sur la terre.
La phrase "il n'y a plus ni maris ni femmes" signifiait (puisque je dois choquer votre pudeur allons-y), non pas que monsieur et madame ont disparu mais qu'ils n'entretiennent plus ce genre de relations qui caractérisent un couple réel : relations charnels et possibilités d'enfantement. Vous prenez le terme "sexué" dans un sens qui ne choquerait guère la moral élisabéthenne : si le corps humain n'a de caractère sexué que ce qu'un petit garçon et une petite fille de 8 ans peuvent nous en révéler, vous avez dû oublier quelque chose en chemin, cette sexuation indique autre chose que la simple différence des genres concernant les adultes réels. Ne vous payez donc pas de mots, comme dirait Nietzsche!
LumendeLumine a écrit : Ces corps ne souffrent plus; mais qui souhaite souffrir, et qui ne voit dans la souffrance non pas une perfection mais une imperfection des choses et qui ne devrait pas y être présente? La souffrance, est-ce ce qui fait la nature humaine? Pas du tout: c'est d'abord sa capacité à connaître, à aimer. La souffrance est liée aux conditions mauvaises dans lesquelles nous sommes placés; enlevez le mal, la souffrance disparaît. Personne ne s'en plaindrait vraiment d'ailleurs, même pas Nietzsche.
Le problème pour définir l'être humain n'est pas de savoir ce que l'être humain souhaite mais ce qu'il est. Point.
LumendeLumine a écrit :Ce qui fait l'homme ne peut être ce qui le détruit. Or la corruptibilité détruit l'homme; ce n'est pas donc pas ce qui le fait, positivement. Donnez aux corps humains l'incorruptibilité, ils en sont plus, et non pas moins humains. Je mettrais la souffrance dans le même ordre d'idées.
Un corps imputrescible n'est pas ce que nous appelons un corps, ce que nous savons être un corps. Point.
LumendeLumine a écrit :Vous allez très, très loin, en osant appeler le monde à venir un "pur contradictoire" avec le monde actuel. C'est plutôt le monde actuel qui est contradictoire en lui-même; la mort succède au développement des êtres vivants, le bonheur s'accompagne de souffrance; la terre qui permet la vie la détruit sauvagement (cataclysmes naturels). Le monde à venir est semblable au monde actuel, mais sans ses contradictions internes, son imperfection. Il est donc plus fidèle à notre monde que notre monde l'est à lui-même! Notre corps glorieux, notre état de ressuscités, est plus vraiment nous-même que cet état actuel où nous nous dissolvons dans les labeurs, les blessures, et finalement la mort.
Vous prenez les choses à l'envers : il n'y a pas de contradictions dans le monde réel car il obéit à des lois physico-chimiques qui le constituent. Ce qui serait contradictoire ce serait une terre que l'on continuerait d'appeler "terre" et qui ne connaiterait plus aucune des lois physiques qui la constituent et qui produisent effectivement, par moments, ce qu'au regard de l'homme on appelle des cataclysmes mais qui sont de simples aléas résultant de sa nature.
LumendeLumine a écrit :Notre monde actuel, pour prendre cette comparaison, c'est comme un vieux phono tout rayé; on entend la musique, mais on entend aussi tout le boucan d'interférences, et puis le son manque de puissance. D'après vous, un re-master sur disque compact ce serait un "pur contradictoire" à l'original, parce qu'il y manquerait l'interférence, parce qu'on n'entendrait que la belle musique?
Trouvez-vous réellement que cette métaphore est honnête, qu'elle rend justice à la perception du réel?
LumendeLumine a écrit :Non, je ne vois pas la logique de l'argument. Le commencement du temps n'a pas besoin d'être dans le temps pour être réel. Vous avez déjà entendu parler de ce que c'est qu'une singularité? Le commencement du temps, c'est peut-être bien une singularité. De même avec l'espace. Vous ne pouvez pas vous représenter l'espace ailleurs que dans un espace plus grand, de même avec un commencement de l'espace; mais l'espace a peut-être bien commencé tel une singularité.
La physique parle s'agissant du commencement de l'univers de la "singularité initiale" ce qui peut être compris comme la somme de toutes les singularités.
De plus : vous me reprochiez de faire reposer mon raisonnement sur des hypothèses, sur un grand "peut-être" et n'est-ce pas précisément ce que vous faîtes ici en essayant de rejeter à tout prix la comparaison que je fais entre l'impossibilité de penser le commencement du réel et le commencement du temps ou de l'espace?
LumendeLumine a écrit :La théorie du Big Bang parle bien, effectivement, d'un commencement du temps et de l'espace, contenu dans une singularité, mais pas d'un commencement du réel. C'est bien parce que l'un a un sens, l'autre pas.
Je vais finir par trouver agaçant ses réitérations perpétuelles des mêmes remarques sans avoir jamais essayé de prendre en compte les contre-remarques que je vous ai faîtes.
Je vous ai dit que certes la science ne parle pas d'un "commencement du réel" mais qu'elle parle encore moins d'un "univers qui aurait été tiré du néant".
LumendeLumine a écrit :Faire du cas par cas, c'est le rôle de l'imagination; mais le rôle de l'intelligence c'est de faire de l'universel.
Ce que je conteste c'est précisément la validité de cet "universel" une fois que vous l'avez abstrait du terreau où il prend son sens c'est-à-dire la réalité concrète. La notion de "non-être" n'a de sens que prise au cas par cas comme négation de l'être (c'est-à-dire de la présence) de tel objet, mais abstraite elle donne ce substantif vide "non-être" dont la pertinence épistémologique est nulle.
LumendeLumine a écrit :Nous ne pouvons pas abstraire le non-être de la réalité parce que le non-être ne fait pas, par définition, partie de la réalité. Vous avez une drôle de notion d'abstraction. Abstraire c'est constater ce qui est réel non pas dans un objet particulier mais dans plusieurs objets différents en même temps. Rouge, c'est rouge, que ce soit dans cet objet ou celui-là, que ce soit hier ou demain. Même chose avec les nombres, comme on l'avait dit.

Ce que l'intelligence abstrait de la réalité, ce n'est pas le non-être, c'est l'être; l'être est vraiment dans les choses, et dans toutes les choses.
Et parce que l'être est une notion simple, intelligible, on ne peut pas se tromper en pensant sa négation, qui elle aussi doit être simple et intelligible.

Dire "le non-être est ceci ou cela" est contradictoire si "ceci ou cela" est une quelconque chose réelle. Mais vous pouvez très bien affirmer sans vous contredire "le non-être est rien", "le non-être est sans substance", "le non-être ne contient rien".
Non, pris en tant qu'abstraction la notion de "non-être" n'a pas de sens, elle devient un substantif possible pour des phrases positives "le non-être est.." ou "le non-être contiend" qui ne parlent jamais que de l'être.
LumendeLumine a écrit : J'apprécie votre exposé sur Sartre, mais je n'y adhère pas pour deux raisons. Premièrement, cette "néantisation" d'où il tire sa formule "le néant hante l'être" est une opération de division et de catégorisation; l'intelligence n'attribue d'aucune façon à toute chose le "néant" parce qu'elle en considère une en particulier. Quelle logique y a-t-il là-dedans? C'est s'amuser à donner des noms tirés par les cheveux (qu'est-ce que c'est que cette néantisation) pour en dégager des conclusions métaphysiques rigoureuses; mais si on manque de rigueur dans les prémisses on ne peut pas attendre grand-chose de la suite.

Notez qu'en fait je suis d'accord avec lui quand il dit: "l'être n'a nul besoin de néant pour se concevoir et qu'on peut inspecter sa notion exhaustivement sans y trouver la moindre trace de néant. Mais au contraire, le néant qui n'est pas, ne saurait avoir qu'une existence empruntée. C'est de l'être qu'il prend son être ; son néant d'être ne se rencontre que dans les limites de l'être, et la disparition totale de l'être ne serait pas l'avènement du règne du non-être, mais au contraire l'évanouissement concomitant de l'être."

J'irais plus loin que lui: le néant ne prend son être de rien, même pas de l'être; il n'est pas, point. Son idée est, en tant que négation de l'être, mais il n'a aucun contenu dans le réel. Il ne hante pas l'être, parce que ce qui hante existe au moins du fait qu'il agit en quelque sorte.
Lorsque vous dîtes "le néant n'est pas" vous substantivez une abstraction dans une phrase qui par nature ne peut parler que de l'être.
LumendeLumine a écrit :Nous ne disons rien, comme vous le dites, des choses qui sont, des choses réelles, quand nous parlons de non-être; nous parlons d'une négation pure.

Deuxièmement, parce que sa notion de néant est encore toute expérimentale: si elle réellement pour lui "soustraction dans l'imaginaire du réel à lui-même", elle n'atteint pas l'intelligence dans sa fonction.

Finalement, vous ne montrez pas qu'on puisse considérer un commencement du réel comme possible.
Je vous ai dit ma position.

Je dis qu'on ne peut pas penser un commencement du réel.

Mais précisément cette prise de conscience de l'impossibilité de penser ce commencement doit nous inciter à la plus grande prudence concernant ce sujet.

Comment l'impossibilité constatée de penser un phénomène (parce qu'il atteint clairement aux limites de notre raison) peut-elle nous inciter à penser que nous connaissons le fin mot concernant la réalité ou non de ce phénomène? Ici le phénomène en question (le commencement du réel lui-même) défie radicalement notre raison qui, par sa nature même, ne peut pas le penser et donc se prononcer avec certitude concernant un sujet dont elle voit avec clarté les limites qu'il lui impose.

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