a écrit :La foi en Dieu et la foi en des idoles, ce sont deux choses complètement différentes. La première fait référence à ce qu'on ne voit pas, la seconde à ce qu'on voit. Si la foi est conditionnée par ce que l'on voit alors on marche par la vue vous savez. Et la Bible, que dit-elle à ce sujet ? Je suis sûr que vous le savez.
Votre réflexion trahit une IGNORANCE abyssale de l'évolution du culte des juifs.
Y avait-il une statue de Yhwh dans le premier temple de Jérusalem ?
Thomas Römer
Les indices bibliques pour l’existence de statues de Yhwh. Premier indice : l’interdiction d’images dans le Décalogue
Revenons à l’interdiction des images : le fait d’interdire les images sculptées et autres représentations indique tout d’abord que celles-ci existaient parmi les Judéens, autrement il n’y aurait pas eu nécessité de les proscrire. La formulation de l’interdiction des images s’est apparemment constituée en deux ou trois étapes28. Dans l’énoncé du Décalogue, dans sa forme retenue par les massorètes, on peut penser que l’interdiction des images exprime une polémique générale contre les «idoles » , à la manière d’un Deutéro-Esaïe ; cette interprétation est d’ailleurs souvent suggérée par les traductions modernes. A y regarder de près, on discerne cependant une volonté d’interdire une statue de Yhwh. La formulation «
tu n’auras pas d’autres dieux en face de moi » se comprend comme une
interdiction de placer des statues d’autres divinités dans le sanctuaire de Yhwh, en face de la statue de celui-ci. Cette volonté de sortir les autres dieux du temple de Yhwh correspond sans doute aux origines du parti deutéronomiste sous le roi Josias vers la fin du viie siècle. Dans la version originelle de cette interdiction, Ex 20,3 (Dt 5,7) a probablement eu comme suite directe l’exhortation de ne pas se prosterner devant ces divinités en Ex 20,5 (Dt 5,9). Le prohibitif «tu ne te feras pas de psl » (Ex 20,4aa ; Dt 5,8aa) est peut-être un premier ajout visant l’interdiction de fabriquer une (nouvelle) statue de Yhwh ; l’élargissement de ce commandement par l’interdiction générale de confectionner toute image de ce qui se trouve dans le ciel, sur la terre et dans la mer voulait peut-être dire, d’abord, que Yhwh ne peut être représenté d’aucune manière. Mais puisque cet ajout est suivi de Dt 5,9 (Ex 20,5), il a rapidement été compris comme une polémique contre les images des autres divinités. On peut donc retracer, dans l’interdiction des images, une évolution dont le point de départ se situe dans la volonté de nettoyer le temple de Yhwh des statues d’autres divinités. Au moment de la rédaction des deux décalogues, on a radicalisé cette interdiction, en y insérant l’interdiction de représenter Yhwh par des images ; cette interdiction a été finalement lue comme une polémique contre toutes les idoles.
Quatrième indice : la vision du prophète Esaïe (Esaïe 6)
L’auteur du chapitre 6 du livre du prophète Esaïe légitime la vocation de celui-ci par un récit à la première personne relatant une vision de Yhwh dans le sanctuaire : «L’année de la mort d’Osias, je vis Yhwh44 assis sur un trône haut et élevé, sa traîne remplissait le temple. Des séraphins se tenaient au-dessus de lui ; chacun avait six ailes, deux pour se couvrir le visage, deux pour se couvrir les pieds et deux pour voler. L’un cria à l’autre : «saint, saint, saint est Yhwh Zebaot, toute la terre est remplie de sa gloire » . Les pivots des portes se mirent à trembler à la voix de celui qui criait, et la maison se remplissait de fumée. Je dis : «Malheur à moi, je suis perdu, car je suis un homme aux lèvres impures, j’habite au milieu d’un peuple aux lèvres impures et mes yeux voient (ont vu) le roi Yhwh Zebaot. » (6,1-5).
On a parfois interprété cette scène comme reflétant une vision dans laquelle le prophète aurait été enlevé au ciel, pour contrer l’idée que le prophète aurait vu Yhwh dans le temple de Jérusalem. Cette lecture d’Es 6, qui se trouve déjà dans le Targum, veut sans doute éviter toute allusion à une vision de Yhwh dans le temple, qui du coup ne peut se faire que via une représentation de Yhwh. C’est peut-être aussi pour cette raison que le texte massorétique a remplacé, au v. 1, le tétragramme par adonay, le Seigneur. Le texte d’Es 6 situe clairement le prophète dans le temple de Jérusalem45. Ceci est indiqué d’abord par l’emploi des termes
hykl et hbyt, fréquemment utilisés pour désigner le sanctuaire. Le récit présuppose en outre la tripartition du temple de Jérusalem en «saint des saints » (le trône), «salle centrale » et «entrée » (les pivots des portes, v. 4). De plus, la fumée mentionnée au v. 4 ne fait sens que dans le temple terrestre et non pas dans le ciel, comme c’est d’ailleurs le cas pour l’autel au v. 6. Il ne faut cependant pas construire une opposition entre la demeure de la divinité dans le ciel et son habitat sur terre, puisque le sanctuaire terrestre sert à relier le ciel et la terre. Via le temple, on accède au domaine du ciel ; cette conception est largement répandue dans le Proche-Orient ancien46 et dans les textes bibliques (Ps 11,4 : «Yhwh est dans son temple saint ; Yhwh a son trône dans les cieux » ).
https://www.persee.fr/doc/asdi_1662-465 ... um_2_1_869