Bonjour Nova,
Nova a écrit :Alors je vous vouvoierai en retour, par respect. Vous êtes donc un jeune super catho ... Une "espèce" en voie de disparition... Même si nous ne partageons pas forcément les mêmes convictions religieuses, je vous félicite pour votre position qui ne doit pas être facile à tenir dans la société actuelle, surtout pour un jeune. Bravo !
Pour préciser j'ai 24 ans, et je suis catéchumène, c'est-à-dire que je me prépare à recevoir le sacrement du baptême. A défaut d'être un "super catho", j'ai du moins l'intention de professer une foi
intégrale (et non pas
intégriste), pure de toute contamination du relativisme de nos sociétés modernes.
Nova a écrit :Vous êtes donc d'accord pour dire que le Logos a pu se révéler également ailleurs qu'en Jésus ? Peut-être pas dans toute sa plénitude (je reviendrai sur ce terme), mais il a pu s'être révélé ailleurs, par les prophètes par exemple.
C'est une évidence.
Nova a écrit :Le judaïsme est également une religion basée sur la révélation du Verbe de Dieu, êtes-vous d'accord ?
Le peuple Juif a été élu pour annoncer, par la voie des prophètes, la venue du Messie. Or il a rejetté ce Messie et l'a fait mettre à mort. "
Il vint chez lui, et les siens ne l'ont pas reçu" (
Jn I, 11)
C'est là que le terme de "plénitude" entre en jeu. Moïse et les autres prophètes n'ont fait qu'annoncer la plénitude de la Révélation qui devait venir en la personne du Messie ; et le peuple d'Israël a rejetté cette plénitude en méconnaissant Celui qui devait venir et qui est venu.
Nova a écrit :On peut faire l'hypothèse qu'il ne s'est pas limité à ce qui est devenu le judaïsme et le christianisme car Dieu nous aime. N'a-t-Il pas comme souhait de nous sauver ? Pourquoi cet Etre absolu et infini n'aurait-Il ouvert d'un ou deux chemins pour le rejoindre ? Je pense, mais cela n'engage que moi, que par amour pour nous, Il fait le maximum pour nous sauver, tout en préservant notre libre-arbitre. C'est pour cela que je ne suis pas choquée par les propos d'un Jacques Dupuis qui parle de possibilités de salut en dehors du christianisme, de semences de salut du Verbe en dehors de Jésus. J'ai du mal à comprendre pourquoi une seule religion aurait l'exclusivité du salut. Seul Dieu est absolu. De toute façon, comme nous l'avons vu avec le judaïsme, le christianisme n'a pas le monopole de la révélation du Verbe, force est de l'admettre.
Vous me dîtes : "Dieu, étant infini, ne peut se limiter à une seule Révélation. Il doit y en avoir plusieurs pour toucher et sauver tous les hommes" ; je vous réponds en chrétien catholique : "Dieu s'est fait homme en Jésus-Christ, qui par sa mort a réalisé une fois pour toute notre salut. Il n'y a pas d'autre révélation à attendre".
Vous me parlez d'hypothèse lorsque je vous parle de vérité de foi. Il est clair que nous n'avons pas le même langage, ni les mêmes postulats de départ.
Nova a écrit :Maintenant, on peut passer à la seconde étape et discuter du terme "plénitude" : que signifie-t-il en réalité ? Le Verbe peut-il se révéler autrement que dans toute sa plénitude ? Que signifie une révélation du Verbe qui ne serait pas "dans toute sa plénitude" ? Serait-ce une révélation d'une partie de Dieu uniquement ou d'une version édulcorée de Dieu ? Qu'est-ce qu'une partie de Dieu ? Le Logos, étant Dieu, est Un, indivisible. Aussi, soit il se révèle, soit il ne se révèle pas : comment un être Un peut-il se révéler partiellement ? Si Dieu ne peut pas se révéler partiellement et s'Il s'est révélé dans le judaïsme ainsi que dans le christianisme, alors Il s'est révélé entièrement dans les deux religions (ces deux religions ne sont que des exemples... certes bien choisis
). Si Dieu s'est révélé entièrement dans ces deux religions et que ces deux religions diffèrent, force est de conclure que la réception n'a pas été la même car Dieu est Un. La réception humaine d'une révélation divine peut être influencée par l'époque, la culture, ...
Voilà encore un postulat de départ : Dieu est Un et ne peut donc se révéler partiellement. Un postulat qui comme tout bon postulat est posé comme principe sans être démontré.
Moi aussi je suis "un", et pourtant je suis me contenter de vous montrer mon bras ou ma jambe, non ?
Nova a écrit :Quelle que soit la tradition religieuse (chrétienne ou pas), c'est le Verbe qui révèle le Père et l'Esprit qui agit sur les communautés... d'après les fonctions, certes conventionnelles, des Personnes divines. Mais, malgré qu'elles ne soient que conventionnelles, ces fonctions ne peuvent changer d'une religion à l'autre. C'est le Verbe de Dieu qui s'est révélé dans le judaïsme, dans le christianisme, et peut-être même ailleurs, et non l'Esprit, car c'est le rôle du Verbe de révéler Dieu. De la même manière, c'est l'Esprit qui agit dans toutes (?) les traditions religions et certainement aussi parmi les athées, et non le Verbe. Car c'est le rôle de l'Esprit d'accompagner les hommes dans leur foi.
Vous oubliez que Dieu est Esprit, et son Verbe est Esprit. C'est l'Esprit qui procède du Père et du Fils qui agit dans les autres cultures et traditions religieuses.
A propos de cette question du
filioque et de ses incidences dans le domaine du pluralisme religieux, voici un extrait très intéressant d'une prédication du pasteur Alain Houziaux au temple de l'Étoile, à Paris, le 4 novembre 2001 :
J'en viens à une querelle qui a divisé et qui divise toujours les églises chrétiennes. C'est la querelle du "filioque" qui a été à l'origine de la séparation entre les Églises d'Orient (les Églises que l'on appelle orthodoxes) et les Églises d'Occident (le catholicisme puis, à partir du seizième siècle le protestantisme).
Expliquons-nous. Le Symbole de Nicée Constantinople (qui est un Credo un peu plus tardif que le Symbole des Apôtres) énonce que le Saint-Esprit "procède du Père". Et, au dixième siècle, les églises d'Occident ont ajouté qu'il procédait du Père "et du Fils" ("filioque" en latin), alors que les églises d'Orient ont continué à dire qu'il "procédait" uniquement du Père et qu'il ne "dépendait" pas du Fils.
La question, c'est de savoir si la Parole de Dieu (Dieu en tant que Parole et Fils, c'est-à-dire en tant que deuxième personne de la Trinité) et l'Esprit (Dieu en tant qu'Esprit, c'est-à-dire en tant que troisième personne de la Trinité) sont, à côté du Père comme deux mains différentes de Dieu ayant une égale importance, ou si, au contraire l'Esprit est secondaire par rapport au Fils et s'il dépend de lui.
(...)
Quel est l'enjeu de cette querelle ? Pour les églises d'Occident, le Saint-Esprit n'est rien d'autre que l'esprit de Jésus-Christ, et ne peut agir que dans ceux qui se réclament de l'esprit de Jésus-Christ. Au contraire, pour les Églises orthodoxes d'Orient, le Saint-Esprit a la même importance que Jésus-Christ et est indépendant de Jésus-Christ. Ainsi le Saint-Esprit peut agir indépendamment du Christ y compris dans des cultures non spécifiquement chrétiennes.
L'enjeu de cette querelle, c'est donc de savoir si l'on peut être animé par l'Esprit de Dieu sans pour autant confesser que Jésus-Christ est le Fils de Dieu. C'est de savoir si les juifs, les bouddhistes, les musulmans, les agnostiques et les athées peuvent être animés par l'Esprit de Dieu de la même manière que les chrétiens. Et c'est aussi de savoir si, pour s'approcher de Dieu, la reconnaissance de Jésus-Christ comme Fils de Dieu est la seule voie possible, ou si on peut également s'approcher de Dieu par ce que produit l'Esprit (le sens esthétique, le sens moral, les œuvres sociales, la spiritualité soufi, etc.).
Et le problème, c'est aussi de savoir si le Saint-Esprit, c'est seulement ce que nous communique Jésus-Christ (et alors être chrétien, c'est être animé par l'esprit du Christ) ou si l'Esprit est aussi ce qui nous tourne vers Jésus-Christ et nous incite à le reconnaître comme le Fils de Dieu. Ou pour dire les choses autrement : est-ce que Jésus-Christ est le Fils de Dieu en lui-même, ou bien est-ce qu'il devient le Fils de Dieu parce que, animés par l'Esprit, nous le reconnaissons comme tel ? Et, de la même manière, on peut poser la question : est-ce que la Bible est la Parole de Dieu en elle-même et par elle-même ou est-ce qu'elle le devient lorsque nous la lisons en étant illuminés par l'Esprit ?
Et dans cette querelle je vous dirais que je me situe plutôt du côté des Églises orthodoxes.
http://www.eretoile.org/elements/Predic ... ritAH.html
Il va de soi que je me situe plutôt du côté catholique. Ce texte (que les théologiens orthodoxes n'approuveraient d'ailleurs sûrement pas) ne fait que renforcer ma conviction dans la nécessité et la justesse théologique du
filioque.
Nova a écrit :Oui mais vous n'expliquez pas pourquoi. C'est mon problème. A mes yeux, donner un résultat sans décrire la réflexion qui lui a donné naissance le discrédite.
Une évidence ne se démontre pas ; elle s'impose d'elle-même. Ai-je besoin de vous démontrer que 2+2= 4 ? Non, je ne crois pas. Pour n'importe quel chrétien, que Jésus soit le Verbe est une évidence aussi grande que ce calcul arithmétique enfantin.
Nova a écrit : Je vais vous expliquer pourquoi je fais une séparation entre le Jésus historique et le Christ (Verbe, Logos, etc). Vous pourrez me qualifier d'hérétique : je ne serai pas vexée. Le Verbe, deuxième Personne divine, est la Parole de Dieu. En tant que divine, cette Parole est infinie. Jésus est la Parole de Dieu incarnée. Aussi ce qu'il disait et faisait était Parole de Dieu. En tant que Verbe incarné, il révélait le Père. Mais Jésus a eu une nature humaine et donc une vie terrestre à durée limitée dans le temps. Donc la Parole de Dieu est infinie mais la Parole de Dieu issue de la bouche de Jésus n'a pu être que finie, limitée. C'est pourquoi je distingue le Verbe du Verbe incarné : c'est le problème de l'universel et du particulier qui ne peut être universel.
Je me pose une question vu ce que j'ai dit plus haut, mais je n'ai pas encore de réponse : si le particulier (Jésus historique), à cause de son caractère fini et temporel, ne peut révéler l'universel dans sa totalité et si l'universel est indivisible, que révèle le particulier ?
Mais la théorie scientifique du big bang ne dit-elle pas que tout l'univers était contenu dans l'équivalent d'un dé à coudre ?
L'Incarnation, c'est l'équivalent de ce dé à coudre. C'est l'infinité de Dieu qui se renferme volontairement dans la finitude de sa créature : "
Bien qi'il fût dans la condition de Dieu, il n'a pas retenu avidement son égalité avec Dieu ; mais il s'est anéanti lui-même, en prenant la condition d'esclave, en se rendant semblable aux hommes, et reconnu pour homme par tout ce qui a paru de lui ; il s'est abaissé lui-même, se faisant obéissant jusqu'à la mort, et à la mort sur la croix" (
Philippiens II, 6-8) - En Jésus-Christ "
habite corporellement toute la plénitude de la divinité" (
Col. II, 9)
Jésus est l'Alpha et l'Omega, le commencement et la fin de l'histoire du salut. Par sa mort, il a surabondamment payé la rançon du péché de tous les hommes, quelque soit le lieu ou le temps de leur vie.
Fraternellement en Christ,
- VR -