Patrick,
Je comprends ce que tu veux dire, et ma participation à cette discussion n'a pas pour but d'avoir le dernier mot. Les Témoins de Jéhovah ne cherchent pas à avoir raison à tout prix. Comme tu le dis, l'important n'est pas de savoir si Jésus est mort sur un poteau, une croix ou un instrument d'une forme différente. L'important est qu'il ait donné sa vie en rançon pour que des hommes soient sauvés (Jean 3:16,17). Dans
De consolatione ad Marciam, Sénèque rapporte l'existence de croix faites de "
différentes manières". Certaines victimes avaient la tête en bas , d'autres étaient empalées par leurs parties intimes, ou avaient leurs bras écartés. Cela rejoint le témoignage de Flavius Josèphe qui fût le témoin occulaire des terribles évènements que les Juifs de Jérusalem vécurent en l'an 70. Les victimes étaient "crucifiées" dans des positions différentes, ce qui suppose des formes variées pour les "stauros" employés par les Romains. Toutefois, la plus simple forme d'éxécution, celle effectuée sur un poteau vertical, était une pratique courante chez les Romains, comme en témoignent les renseignements que j'ai donnés ci-dessus.
Les Ecritures ne précisent pas quelle était la forme du
stauros sur lequel Jésus est mort. En accord avec le sens fondamental qu'évoque ce terme, dans le grec tant classique que biblique, plusieurs autoritées se sont exprimées sur la question, ce dont j'ai voulu rendre compte dans mes propos.
Je me demande ce que l'on recherche profondément quand onveut absolument avoir raison contre tout lemonde pour marquer sa différence, et en même temps se réclamer du "monde chrétien", le seul, le seul vrai qui a tout compris
Pas "tout le monde" Patrick. "Se réclamer du monde chrétien" d'une part, et rejeter la "croix" d'autre part, ne sont pas deux choses contradictoires. Comme l'a reconnu le célèbre helléniste et bibliste William Vine, "
la forme de la ‘croix’, deux poutres à angle droit, a son origine dans l’antique Chaldée; elle était employée comme symbole du dieu Tammouz (étant en forme de Tau mystique, initiale de son nom) dans ce pays et dans les pays limitrophes, y compris l’Égypte. Vers le milieu du IIIe siècle ap. J.-C., ou bien les Églises s’étaient écartées de certaines doctrines de la foi chrétienne, ou bien elles les avaient travesties. Pour accroître le prestige du système ecclésiastique apostat, les Églises admettaient en leur sein les païens, sans qu’ils eussent été régénérés par la foi, et leur permettaient de conserver, en grande partie, leurs signes et symboles païens. D’où le Tau ou T, dans sa forme la plus employée, avec la barre transversale abaissée, qui fut adopté pour représenter la croix du Christ.” —
An Expository Dictionary of New Testament Words (Londres, 1962) .
Ce même bibliste précise en outre qu'"
à la fois le nom [stauros] et le verbe stauroô, attacher à un poteau ou à un pieu, sont, à l'origine, à distinguer de la forme écclésiastique de la croix faite de deux poutres [à angle droit]"
D'autres en sont arrivés à la même conclusion, bien avant que les Témoins de Jéhovah ne le reconnaissent. Mais voilà, William Vine, John Denham Parsons, A. E Knock, E. W. Bullinger, et d'autres, n'ont pas été durement critiqués pour avoir affirmé que Jésus n'était pas mort sur une croix, mais sur un simple poteau. Par contre, les Témoins de Jéhovah le sont. Pourquoi?
En ce qui concerne
xylon, il est employé à plusieurs reprises dans la
Septante pour désigner une poutre de bois, ou un simple poteau auquel on suspendait un condamné (Genèse 40:19, Deutéronome 21:23, Josué 10:26, Esther 5:14). Dans l'esprit d'un juif du 1° siècle, ce terme évoquait un simple poteau, et non deux poutres associées à angle droit. C'est pourquoi lorsque ce vocable est employé en Actes 5:30, 10:39, 13:29 , en Galates 3:13, et en 1 Pierre 2:24, il n'emporte pas d'autre idée que celle d'un simple poteau. Lucien de Samosate, auteur grec du II° siècle de notre ère, employa, quant à lui, le mot
skolops pour parler de l'instrument de torture sur lequel Jésus fût exécuté (
Sur la mort de Peregrinus - § 11). Or, ce terme ne désigne jamais deux poutres à angle droit, mais simplement un poteau ou un pieu sur lequel étaient suspendus des condamnés à mort.
Une très ancienne représentation de la crucifixion (publiée dans
The History of Our Lord as exemplified in works of art, London, 1864, pages 167-8) montre les malfaiteurs exécutés avec Jésus, attachés à des poteaux.
D' autres représentations montrent ces mêmes malfaiteurs attachés à des poteaux , alors que Jésus est cloué à une croix . On peut se demander pourquoi !...
Représentation artistique d'Antonello da Messina , en 1475
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Représentation artistique de Maerten van Heemskerck, 1545
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Bien cordialement,
Didier