Je tiens tout d'abord à faire le point sur Dieu et les religions. Mon discours va peut-être en choquer plus d'un, ou bien au contraire titiller la matière grise de certains d'un point de vue bénéfique, mais au moins j'espère qu'il permettra d'éviter un carcan qui s'est emparé de l'Humanité depuis des millénaires...
Lorsque l'on prend l'initiative de regarder à la loupe toutes les religions depuis la nuit des temps (ou en tout cas depuis que le volume encéphalique de l'Homo lui a permis d'imaginer une "force" supérieure), on constate que quasiment toutes ont tendance à donner à Dieu (ou à des dieux pour les polythéistes) des pouvoirs, mais aussi une personnalité, un caractère, car il aime, haït, pardonne, se venge, j'en passe, des pires et des meilleurs...
Au départ, les premières religions dont on n'a aucun écrit (car apparues a fortiori avant l'invention de l'écriture) ont sûrement eu un lien avec les forces de la Nature, la foudre, les tremblements de terre, les éclipses, les astres dans les cieux, … donc avec la Nature elle-même.
L'Homme, ne pouvant expliquer ces événements étranges, a inventé une entité, ou des entités capables de générer de tels phénomènes. Avec le temps et les guerres, des religions se sont éteintes (comme les langues), ou se sont mélangées aux croyances des conquérants.
L'arrivée de l'écriture a permis fort heureusement de laisser des traces de l'Histoire et des religions. Des dynasties, des empires se sont fondées, et des cultes se sont élevés de surcroît. La Science avait une place assez discrète puisque les moyens et connaissances d'antan n'étaient pas aussi développés qu'à l'époque contemporaine. Si le Soleil brillait, c'était un acte divin, ou c'était un dieu lui-même (Râ, dieu des Egyptiens).
Chaque religion possédait ses propres dogmes, en adéquation avec les légendes transmises de génération en génération...
Bref, aux quatre coins du Monde, chaque peuple ou presque avait une religion, différentes moeurs se rattachant à un dieu ou des dieux. Ce qui m'amènerait à conclure que c'est un sentiment humain presque logique, naturel. La capacité de l'Etre Humain à concevoir un être supérieur, quel que soit l'endroit sur la Terre...
Puis advint la religion monothéiste (officiellement, d’après les textes ; il n'est pas impossible que des religions monothéistes aient existé bien avant, mais le manque d'informations ne permet pas de l'affirmer).
Pourquoi prêter à plusieurs dieux moult pouvoirs, alors qu'un seul dieu tout puissant suffit à manifester tous les caprices de la Nature ?
Là encore, on prêta à ce dieu unique des pouvoirs auxquels l'Homme ne pouvait avoir accès... L'Homme était incapable de créer le Monde, cela devait forcément être un acte… divin.
Comment tous ces animaux, et surtout l'Homme, l'être pensant par excellence, ont-ils pu apparaître sur Terre ? Mais c'est grâce à Dieu bien entendu ! La théorie de l'évolution n'existait pas, et il fallait bien expliquer l'existence de ce que les Hommes voyaient, entendaient ; les étoiles dans le ciel, les planètes qui tournaient au-dessus de leur tête (d'ailleurs les Grecs et les Romains pensaient que les planètes du Système Solaire étaient des dieux, ils les ont même "baptisées" sous différentes appellations).
Dieu, cet "être" capable de provoquer des tremblements de terre, des raz-de-marée, des déluges, devait sans aucun doute être à l'origine du Monde, puisqu'il avait toute puissance... Et de père en fils, au fil du temps, le message s'est transmis oralement et surtout de manière scripturale jusqu’à nos jours...
De manière générale, les trois religions monothéistes les plus répandues (chronologiquement Judaïsme, Chrétienté et Islam), prêtent à Dieu des actes bienfaisants, cherchant à améliorer le quotidien des croyants qui lui vouent un culte, des cérémonies ou prières (ceci vaut d’autant plus pour les autres religions).
Grâce à la progression de la Science, les phénomènes inexpliqués jadis trouvaient en les mathématiques et l’expérience une solution satisfaisante. La Théorie de l’Evolution a permis de comprendre les mutations naturelles des êtres vivants, et donc l’origine de l’Homme. Les théories liées au Génie Génétique ont permis de lever le voile sur le cœur des cellules biologiques, que ce soit pour une amibe, une fougère ou l’Homme. L’Astronomie a permis de découvrir que la Terre (ronde et non plate) tourne autour du Soleil, et pas l’inverse. Que ce même Soleil tourne dans la Voie Lactée, notre Galaxie, cette dernière voyageant à son tour à travers l’espace intersidérale jusqu’à un autre « attracteur », et ainsi de suite…
Où voudrais-je en venir avec toute cette accumulation de faits et d’affirmations me direz-vous ?
Le but de ce texte n’est pas de dresser un réquisitoire contre la religion, mais plutôt d’échafauder un plaidoyer pour une doctrine non religieuse, un acte citoyen basé sur la liberté d’expression et le respect d’autrui (j’avoue volontiers avoir été baptisé et élevé dans une famille catholique).
Chaque religion, quelle qu’elle soit, n’a jamais apporté de véritables réponses sur le Monde, l’Univers qui nous entoure. Les textes sacrés écrits il y a des siècles, voire des millénaires, n’ont pas changé d’un iota, malgré toutes les avancées sociales, culturelles, scientifiques, que l’Humanité a connues. Force est de constater que l’Eglise a bien dû se résigner un jour à admettre que la Terre est bien ronde, sans quoi les croyants n’auraient voulu accepter le bien-fondé d’une religion si conservatrice, en inadéquation avec la réalité.
Depuis toujours l’Humanité a connu des catastrophes naturelles, génocides, guerres, et ce n’est pas prêt de s’arrêter. Les guerres et les génocides sont principalement des actes de volonté humaine, Dieu ayant laissé aux Hommes le fameux libre-arbitre. On pourrait donc conclure que les horreurs perpétrées sur les continents Américain (massacre de millions d’Indiens au Nord et au Sud), Africain (‘traite’ des Noirs), Océanien (massacre des Aborigènes), Européen (la liste est longue, mais on peut citer un acte historiquement ‘récent’, les millions de personnes mortes dans les camps de concentration).
Dieu, bon, altruiste, généreux, ne saurait-il ‘tendre la main’, lorsque ses fidèles, ou ses enfants ont vraiment besoin de Lui ? Certes, les Indiens, Aborigènes, ou encore certains Africains concernés n’avaient jamais entendu parler de Jésus avant l’arrivée de leurs bourreaux sur leur territoire, la Parole de Dieu n’ayant pas encore traversé les trop vastes espaces afin de les mettre au courant et dans le droit chemin.
Cependant, ces Hommes paraissaient-ils être des « sous-Hommes » aux yeux du Seigneur ? N’aurait-il pas pu transmettre un message divin à ses représentants ‘officiels’ sur Terre, permettant d’épargner des innocents qui vivaient en paix, même s’Il laisse le ‘choix’ aux Hommes ?
Durant la Seconde Guerre Mondiale, 6 millions de personnes (Juifs – et autres - pour ne pas les nommer), ont été exterminées dans les camps de concentration à travers l’Europe… Des millions de croyants, priant jour et nuit, pour que les horreurs que d’autres Hommes leur faisaient subir cessent. Pourquoi ces millions de prières, peut-être des milliards, réparties sur des années, sont restées ainsi vaines ? Pas une seule n’a été écoutée, voire entendue par le ‘Tout-puissant’ ?
Autre exemple : le tsunami survenu en Asie fin 2004. Presque 200 000 personnes tuées après le passage du raz-de-marée. Là, ce n’était pas un acte de volonté humaine, mais une catastrophe naturelle ! Ces personnes étaient on ne peut plus croyantes, et Dieu n’a pas osé épargner, sauver les bébés, les enfants, les femmes, les hommes innocents …?! Que les êtres vicieux, méchants, abjects, méprisables soient punis par Dieu, on pourrait le comprendre ; mais dans le cas présent, cela peut laisser perplexe…
Certains croyants avec qui j’ai discuté mettent les catastrophes et les guerres sur le compte de Satan. Mais si justement Dieu avait toute puissance, tous pouvoirs, Satan ne serait qu’un insecte à ses côtés !
Alors, il n’est pas impossible que certains ayant lu ce texte soient surpris par la simplicité avec laquelle je percevrais l’acte divin, le ‘rôle’ de Dieu à travers nos vies et à travers les Ages. Cependant, j’en arrive à la conclusion que les très nombreux miracles survenus en des temps presque immémoriaux sont devenus bien trop rares, voire inexistants de nos jours. En des temps pendant lesquels les Hommes n’avaient pas la culture, les connaissances d’aujourd’hui, en des temps pendant lesquels les médias n’étaient pas présents afin de transmettre sur tous les continents les événements relatés dans les livres sacrés.
Selon moi une chose est sûre, si Dieu existe, Il est en dehors de nos conceptions humaines, car nos conceptions furent établies sur l’expérience de nos sens. On prête à Dieu une volonté, une âme, car il pense, aime, juge, se venge… Ne sont-ce pas des sentiments proprement humains ? Ce dieu qui aurait créé l’Univers, tous les êtres vivants de cette planète, chaque particule composant le Cosmos et au-delà (et pourquoi pas d’autres êtres sur d’autres planètes), se permettraient-ils d’éprouver des sentiments proprement humains, simplement humains ? Non. L’Univers est soumis à des lois physiques, l’évolution des êtres vivants est soumise à des lois, la volonté humaine n’est autre que celle que les Hommes veulent bien en faire, Dieu n'a rien à voir là-dedans…
Si Dieu existe, Il est bien au-dessus de tout cela… Comme l’écrivait Bernard Werber :
Si un électron était doué de conscience, se douterait-il qu’il est inclus dans cet ensemble beaucoup plus vaste qu’est l’atome ? Un atome pourrait-il comprendre qu’il est inclus dans cet ensemble plus vaste, la molécule ? Et une molécule pourrait-elle comprendre qu’elle est enfermée dans un ensemble plus vaste, par exemple une dent ? Et une dent pourrait-elle concevoir qu’elle fait partie d’une bouche humaine ? A fortiori, un électron peut-il être conscient qu’il n’est qu’une infime partie d’un corps humain ?
Lorsque quelqu’un me dit croire en Dieu, c’est comme s’il affirmait : « J’ai la prétention, moi petit électron, d’entrevoir ce qu’est une molécule. » Et lorsque quelqu’un me dit être athée, c’est comme s’il assurait : « J’ai la prétention, moi, petit électron, d’être sûr qu’il n’y a aucune dimension supérieure à celle que je connais. »
Mais que diraient-ils, croyants et athées, s’ils savaient combien tout est beaucoup plus vaste, beaucoup plus complexe que leur imagination ne saurait l’appréhender ? Quelle déstabilisation subirait l’électron s’il savait qu’il est non seulement enfermé dans la dimension des atomes, molécules, dents, humains, mais que l’humain est lui-même inclus dans la dimension planète, système solaire, espace et puis quelque chose d’encore plus grand pour quoi nous ne possédons pour l’heure pas de mot. Nous sommes dans un jeu de poupées russes qui nous transcende.
Dès lors, je m’autorise à dire que l’invention par les hommes du concept de dieu n’est peut-être qu’une façade rassurante face au vertige qui les saisit devant l’infinie complexité de ce qui pourrait se trouver effectivement au-dessus d’eux.
BERNARD WERBER – Nous les dieux
A bon entendeur…
