Personnellement, comme je l'ai souvent dit sur ce forum, je suis agnostique et pas athée, ce qui fait une légère différence, ayant tendance à considérer que l'athéisme est une forme de croyance. Néanmoins il est évident que je n'aurais pas l'outrecuidance d'accuser les athées de ne pas penser. Quand on lit l'oeuvre d'un des plus grands athées qui ait existé, Friedrich Nietzsche, on ne peut qu'être ébloui par sa puissance, par sa subtilité, par sa lucidité. Je ne sais pas trop ce que tu veux dire par ce vocabulaire vague et indéterminé "qui n'a jamais rien fait avancé" ("avancé" quoi vers quoi, vers où?) mais ce qui est certain c'est que la lecture de quelqu'un comme Nietzsche a profondément bouleversé le paysage intellectuel de l'occident.abuzin a écrit : Non, libre-penseur. Ca fait une grosse différence. Ce qui fait la différence entre vous et moi, c'est que moi je me suis intéressé à la religion. Cela ne fait pas de moi un croyant, mais un chercheur de la cohérence sur laquelle elle sont fondées. Alors que si il existe sans doute des athées intelligents, la plupart ne sont que des sectaires anti-religions par facilité. De cette secte qui n'a de goût que pour la critique mais qui n'a jamais rien fait avancé, contrairement aux déistes et aux libres-penseurs qui, eux, mouillent leur maillot, et n'ont pas pour vocation de diviser l'humanité mais de la rassembler.
Je ne vois absolument pas le lien entre le problème que l'observateur est en physique inclue dans ce qu'il observe (et donc qu'il ne peut y avoir d'objectivité pure de l'observation) et le fait d'analyser un hadith ou un passage du coran. Peut-être que pour un croyant la question se pose comme ça, puisque le croyant pense que le coran est l'ouvrage de Dieu et donc que lui-même est en quelque sorte décrit par le coran, inclue dans ce qu'il essaye d'analyser et qui le dépasse, mais une telle vision des choses n'est valable QUE pour un croyant, absolument pas pour quelqu'un qui pense que ce texte est ni plus ni moins que tous les autres une création humaine et donc que les seuls moyens légitimes de l'étudier sont ceux de l'enquête herméneutique et philologique valables pour tous les textes, que ce soit ceux d'Homère, de Dante ou de Mohammed.Abuzin a écrit : Lorsque l'on comprend que la perception trouve ses limites dans les contraintes imposées par le système dans lequel est inclus l'observateur, cela donne à réfléchir sur la véritable capacité de l'observateur à véritablement "voir". Voilà en quoi la décohérence quantique apporte sa pierre à la philosophie, et c'est un sacré cailloux. Même un athée devrait comprendre ça.
Tu devrais t'intéresser à la dualité onde-corpuscule ou la décohérence trouve tout son sens. Alors peut-être que que tu découvriras ce qui fait de l'ombre à ta pensée figée à peine corpusculaire.
Je note que tu te dis n'être pas musulman mais que tu utilises les manières de faire des musulmans, notamment l'affectation de complexité infinie qu'ils prêtent à tout ce qui touche de près ou de loin à leur texte saint et à leur prophète, exigeant toujours à son égard un niveau de lecture infiniment supérieur à ce que n'importe quel texte humain peut recéler. D'où sans doute ta comparaison ébouriffante avec la décohérence quantique, à moins que tu ne plaides aussi pour le même prisme quantique de lecture appliqué à tous les textes, depuis Homère jusqu'à Amélie Nothomb, mais dans la mesure où je n'ai jamais trouvé cela nulle part chez aucun linguiste distingué, aucun spécialiste de l'étude littéraire des textes, je ne vois rien qui vienne soutenir ta manière si originale de voir les textes, rien du tout qui la légitime...
Bref nous en revenons à l'idée que ce genre de comparaison hyperspécialisée n'a pas grand sens, si ce n'est, c'est le seul que je vois, de revêtir artificiellement d'un prestige usurpé (ici celui de la science) un domaine précis (ici le coran) afin d'impressioner les naïfs et les gogos quant à sa valeur réelle. C'est ce genre de procédé qui permet aux musulmans de percevoir contre toute raison des "miracles scientifiques" d'une technicité ahurissante dans des passages du coran qui sont simplement vagues et poétiques.
Bien, tu finis par le reconnaître, c'est l'essentiel.Abuzin a écrit :Alors, est-ce que je me défile ? Non, j'utilise mon intelligence, et je pense. Je ne connaissais pas cet hadith, c'est vrai.
Encore une fois ta manière d'interpréter ce hadith et le coran en général, en planant quantiquement bien au-dessus des contingences, se heurte à ce que dit simplement le texte. Tu dis que ce dégage de TA lecture (c'est vraiment toi qui fait dans le subjectif, je comprends que tu insistes sur ce thème) le sentiment que le djihad intérieur est supérieur au djihad extérieur mais cela se heurte frontalement à des passages comme ceux que je t'ai déjà signalé :Abuzin a écrit :Il faut dire que si le Coran est très bien distribué, les hadiths le sont beaucoup moins. Quand Florent amène son hadith dont la source est une de celles qui est la plus authentique, je m'interroge. Non pas sur la motivation de Florent, celle-là au moins elle est claire, mais sur celle de Mahomet.
La lecture du Coran apporte la révélation d'un discours à plusieurs niveaux dépendant de celui qui le lit. Si je n'ai pas pêché la notion de grand et de petit djihad dans le hadith cité par Florent, c'est donc que je l'ai pêché ailleurs et probablement dans le Coran lui-même.
Contrairement aux étudiants islamiques, je ne pratique pas le Coran dans le "par cœur", mais dans l'interprétation du texte et des concepts abordés afin d'en bâtir une cohérence globale qui me satisfasse intellectuellement.
Si le djihad est la "lutte", ma réflexion sur ce concept commence par l'évidence qu'il ne doit pas être traité dans l'anecdotique. Chaque époque possède sa contextualité, et les guerres d'alors avait leurs propres motivations qui n'ont pas plus d'importance que ça.
Ayant bâti ma propre cohérence sur le principe de réciprocité, lié lui-même au principe de causalité, le concept de lutte évoque d'abord pour moi celui de l'effort s'inscrivant dans une finalité. Il y a une finalité interne à l'individu, et une finalité externe à l'individu. La question qui se pose alors, c'est de savoir, dans le processus de la lutte, laquelle de ces finalités est la plus importante.
Dans la lutte, il y a deux options : soit on est attaqué, soit on attaque. D'une manière comme de l'autre, la victoire dépend de sa propre préparation à la lutte. C'est la raison même de l'existence des armées en temps de paix, qui repose sur le principe "si tu veux la paix, prépare la guerre".
En conclusion, il est évident que la finalité interne de l'effort est un préalable plus important que sa finalité externe, qui peut-être soit défensive, soit offensive. C'est le principe même de l'éducation, qui est de préparer l'individu aux contraintes qui lui seront opposés afin d'y répondre de manière optimale, c'est-à-dire sans gâcher son énergie.
Les contingences passent. Se ressemblent ou ne se ressemblent pas, mais l'individu demeure et se construit sur la base d'une éducation saine que l'expérience, ensuite, viendra renforcer.
Ai-je trouvé cela dans ma lecture du Coran ? Certainement. Le Coran devait avoir une valeur éducative pour que je puisse le valider. Où ? C'est une bonne question qui ne m'intéresse plus particulièrement. Pour moi, le Coran est une lecture du passé à laquelle j'ai consacré plus d'un an. J'en garde une très bonne impression, alors qu'au départ, j'étais plutôt circonspect. N'étant pas musulman, mais comprenant, maintenant, beaucoup mieux les valeurs dont ces gens se revendiquent, il m'est bien plus facile de sympathiser avec eux, car en définitive, ce sont bien les piliers de l'Islam qui sont important, le reste n'étant que commentaires justifiant ceux-ci. Je n'y vois rien de rédhibitoire.
Pour votre information, je ne suis pas le seul à penser que le djihad est à relativiser (il y a beaucoup d'autres liens). Et vous n'êtes pas les seuls à penser que la finalité de la préparation à la guerre, c'est la guerre elle-même. Le Coran, c'est aussi l'auberge espagnole, et on y mange ce que l'on y apporte. Le reste regarde la conscience de ceux qui en ont une.
"Ne sont pas égaux ceux des croyants qui restent chez eux - sauf ceux qui ont quelques infirmités - et ceux qui luttent corps et biens dans le sentier d'Allah. Allah donne à ceux qui luttent corps et biens un grade d'excellence sur ceux qui restent chez eux. Et à chacun Allah a promis la meilleure récompense; et Allah a mis les combattants au-dessus des non combattants en leur accordant une rétribution immense; des grades de supériorité de Sa part ainsi qu'un pardon et une miséricorde. Allah est Pardonneur et Miséricordieux"[Sourate En-Nisa' 4:95-96]
De même ce hadith parlant du grand et petit djihad (hadith que tu reconnais ne pas avoir connu avant que je le cite et dont l'origine contrairement à ce que tu dis est contesté) contredit des hadiths jugés autentiques comme par exemple : "Un matin ou un soir passé [dans le combat] fi sabilillah est meilleurs que le monde et tout ce qu'il contient. " [Boukhari wa Mouslim]
Là encore ce que tu dis est extrêmement vague. Il me semble que l'on peut appliquer à égalité ce principe "si celui qui le lit et qui en devient le porteur y trouve de quoi s'y réformer en cohérence avec sa propre époque" absolument à TOUS les textes, ou si tu veux tous les grands textes de l'histoire humaine. Un texte athée et prodigieux d'intelligence comme le De natura rerum de Lucrèce par exemple s'y prête au moins aussi bien.Abuzin a écrit : Mahomet était un être exceptionnel. Je n'ai pas peur de le répéter, mais ce n'était qu'un homme, comme les autres, empêtré dans des contingences complexes. Il a su, malgré tout, apporter des réponses cohérentes aux contraintes de son époque. L'Islam est-il dépassé ? Oui, dans une vision figée qui sacralise le texte. Non, si celui qui le lit et qui en devient le porteur y trouve de quoi s'y réformer en cohérence avec sa propre époque.
Disons que la liberté de parole des forums musulmans est étroitement encadrée... un peu comme la liberté de parole dans les pays musulmans.Abuzin a écrit :Rassurez-vous, j'ai participé aussi à des forums musulmans, et la libre-pensée n'y existe pas plus qu'ici. Il va de soi que je m'en suis fait viré.